Le mouvement progressif par lequel se constituent, de notre temps, les sciences de l'homme, restera sans doute une des acquisitions les plus durables d'une époque secouée de convulsions planétaires, où la civilisation occidentale, à tant de signes, semble décliner et met elle-même en question les valeurs les plus élevées qu'elle avait conçues. L'avance de ce mouvement peut se mesurer à la solidarité croissante de disciplines, toutes jeunes encore, affirmant que seule leur conjonction peut permettre de comprendre l'homme, les hommes, leurs groupes sociaux, leur mentalité, leurs sentiments, leurs activités, leurs conflits. Des efforts coordonnés, où se rejoignent des ethnographes, des linguistes, des économistes, des statisticiens, des psychologues, des sociologues, efforts inconnus il y a un demi-siècle, se manifestent. Il apparaît de plus en plus clair à beaucoup de savants (comme l'avaient depuis longtemps prêché — et prêché d'exemple — les fondateurs des Annales) que les faits humains ne peuvent être approchés, avec quelque chance de succès, que par ce faisceau de disciplines conjuguées.