L'un des traits marquants de l'Égypte post-nassérienne consiste en une volonté très nette, commune à différentes classes et couches sociales, de trouver des modèles d'analyse et des modes d'expression qui permettent de saisir la réalité quotidienne de la société et, dans un même mouvement, de la transformer et de la maîtriser. Toute une gamme de discours viennent décrire et guider la reconstruction, la réforme ou, pour les plus radicaux, la reconstitution, de la base au sommet, des structures et de la signification de la société égyptienne. On peut ainsi distinguer le discours laïque, a-religieux ou même antireligieux (c'est le discours des groupes de gauche, ainsi que celui de cet ensemble de forces hétérogènes regroupées sous l'étiquette du Wafd, ancien parti constitutionnel bourgeois libéral dominé principalement par les propriétaires terriens et quelques fractions de la bourgeoisie commerçante et industrielle) ; le discours religieux (discours des Frères Musulmans, bien sûr, et d'une série de groupes qui se réclament de l'islam) ; enfin, le discours idéologique de l'État-nation égyptien et des classes qui sont proches de lui.