Cette carte a été mise au point et dessinée à Athènes, en 1962-63, dans le cadre des travaux préparatoires de l'Atlas économique et social de la Grèce où elle est publiée à l'échelle du 1/2 000 000, et grâce à l'aide et aux contributions spéciales du Centre de Sociologie Européenne et du Laboratoire de Cartographie de l'École Pratique des Hautes Études. Elle a été préparée par Mme Marthe Rajchmann-Czarnovski, cartographe, et dessinée par M. Roger Vaternelle, artiste-cartographe (Institut Géographique National), sous la direction de M. Bernard Kayser, Professeur à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Toulouse, directeur des recherches géographiques au Centre des Sciences Sociales d'Athènes.

Elle est basée sur les résultats officiels du recensement de la population du 19 mars 1961 — population de fait.

La situation géographique de Périgueux, dans un pays disputé au XIVe siècle entre Français et Anglais, met en lumière dès l'abord son importance politique et explique bien des aspects de son histoire et de sa vie quotidienne. Le roi de France lui a toujours porté un très grand intérêt : située à l'un des points les plus avancés de son domaine, bâtie sur une butte qui domine un méandre de l'Isle, entourée d'un épais rempart, elle a représenté pour lui un point stratégique important. La prise de conscience par la royauté capétienne de l'intérêt de cette région remonte en réalité assez loin dans le passé et l'on pourrait même dire que d'elle dépend la vitalité du Puy Saint-Front au XIVe siècle.

Le thème général des études présentées au Colloque d'Histoire religieuse de Lyon, en octobre 1963, concernait « La vie religieuse dans les pays français et germaniques à la fin du XVe et à la fin du XVIe siècle »

La fin du XVe siècle a été étudié par le chanoine E. Delaruelle, pour les pays français, et, pour les pays de langue germanique, par Bernard Moeller.

Le premier de ces articles voit, dans les manifestations religieuses de l'époque, une annonce de la Réforme. De ces manifestations, les témoignages sont recueillis à des sources diverses : les mystères, la prédication, la catéchèse, la vitalité des confréries, la naissance et l'expansion de l'imprimerie et de l'édition, les pratiques dévotionnelles à Jésus et Marie ; enfin à la prise de conscience du tragique chrétien (Grünewald ou Dürer), à la manifestation du prophétisme (Savonarole et Christophe Colomb), à l'expansion des danses macabres et aux « banquets de la folie ». La conclusion de ce rapport reproduit celui de P. Janelle au sujet d'une enquête analogue en Angleterre : « nous observons de tous côtés les manifestations d'un renouveau de la foi et surtout de la piété, dans le cadre de la religion traditionnelle » (p. 30).

Une vingtaine de manuscrits connus, ‘les uns partiels, les autres complets, mais — avec l'Extrait de Voltaire, singulièrement édulcoré (1762) — une seule édition, centenaire et confidentielle (Rudolf Charles, Amsterdam, 1864, 3 vol.) : voilà pour le texte du Testament. Quant à la personnalité et à la pensée de Jean Meslier, malgré les travaux de Lanson, Morehouse, Wade, P. Naville, P. Vernière et B. F. Porchnev, elles commencent à peine à émerger d'une ombre énigmatique et déformante. On lira donc avec intérêt la solide étude biographique que Maurice Dommanget vient de consacrer au curé d'Étrépigny (Julliard, 1965), en attendant les Actes du Colloque international qui s'est tenu à Aix-en-Provence le 21 novembre 1964, sous l'égide du centre aixois d'études et de recherches sur le XVIIIe siècle et sous la présidence du professeur J. Fabre. La réussite de cette journée, venant après les succès du colloque Prévost de 1963 et diverses autres manifestations, témoigne de la vitalité du jeune Centre, ainsi que d'un rayonnement qui n'est pas seulement régional.

Le point de départ du livre de Richard Hofstadter, Anti-Intellectualism in American Life (Londres, 1964) est une série de réflexions sur le McCarthysme et les violentes attaques dirigées contre les intellectuels à cette époque, en particulier lors de la campagne pour l'élection présidentielle de 1952 (Eisenhower contre Stevenson). Pour R. Hofstadter le McCarthysme n'a été que la cristallisation de tendances présentes de tout temps dans la société américaine et qui sont liées aux origines de la démocratie américaine et à la tradition de l'égalitarisme.

On ne pouvait pas espérer pénétrer la mentalité du Moyen Age tant que l'on écartait, sous l'étiquette « thème banal de sermon », les textes les plus volumineux qu'il nous a laissés, en latin et même en langues vulgaires. Cette masse même, qui paraissait cacher la réalité profonde des faits sociaux, ne pouvait être, en vérité, sans signification. Il fallait aborder franchement cette abondante littérature abstraite, et, renonçant aux subtils plaisirs que donne la recherche des symboles moraux dans la littérature narrative, il fallait se décider à chercher ce que les auteurs du Moyen Age disaient quand, directement et simplement, ils prétendaient parler morale. Il fallait surtout donner un sens à cette analyse en ne ramenant pas, comme l'ont fait trop de pieux érudits du XIXe siècle, les idées des auteurs médiévaux à des thèmes vagues qui nous paraissent sans originalité, mais au contraire en opposant les conceptions de nos ancêtres à celles de notre époque, en montrant ces différences avec nous dont la prise de conscience nous permet seule de comprendre une âme étrangère.

Les recherches sur les conditions économiques de la vie paysanne dans la société d'Ancien Régime ont précédé, chez les historiens européens, aussi bien à l'Est qu'à l'Ouest, toute prospection des phénomènes qu'on pourrait ranger sous l'intitulé large de sociologie rurale ; elles ont précédé des études sur l'activité sociale des paysans, sur les expressions de leur prise de conscience, sur les aspects mêmes de leur mobilité. La recherche marxiste de sociologie et d'histoire, appuyée sur de nombreux travaux traitant des luttes paysannes, est parvenue à des résultats intéressants, détaillés souvent, parfois de portée générale : mais ils concernent des mouvements à vaste rayon d'action et de caractère révolutionnaire ou insurrectionnel.

Par contre, notre connaissance des tensions fondamentales, des conflits quotidiens dans toute société rurale, reste mince, surtout là où, comme en Pologne, l'activité sociale des paysans, leurs luttes contre le système seigneurial, ne se manifestèrent pas sous des formes aussi voyantes que les grands soulèvements. Il faudra bien des recherches encore pour dégager et mettre en valeur ces phénomènes, au cœur de la vie, apparemment monotone et sans heurts, de nos sociétés rurales.

L'Hôpital de Santa Maria degli Innocenti fut créé pour recueillir et éduquer les enfants trouvés de Florence, par la corporation de Por Santa Maria, dite de la Soie parce que les fabricants et les négociants de tissus en soie constituaient le groupe le plus important de ses adhérents. Comme on a pu l'écrire, « dans la deuxième moitiée du XVe siècle, l'Art de la Soie finit par s'identifier à l'Art de Por Santa Maria lui-même… »

Manifestation de l'esprit de bienfaisance et de charité d'un des principaux Arts florentins, l'Hôpital témoigne de la prospérité et de la puissance des setaioli, qui ont supporté tout le poids financier de l'institution, et n'ont pas hésité à créer des taxes spéciales pour lui assurer une activité favorisée par rapport aux oeuvres semblables, dites de la Scala et de San Gallo.

La Pologne et les autres contrées qui touchaient jadis le Proche Orient ont beaucoup emprunté à la civilisation orientale. Mais jusqu'au XVIIIe siècle, ces emprunts consistaient surtout en objets matériels, tels que costumes, armes, harnais, et n'avaient qu'une influence mineure sur la civilisation de l'Europe Orientale. Ils étaient l'expression d'un état d'esprit appelé couramment « sarmatisme ». Par contre, à l'époque des « lumières », d'autres éléments de la civilisation orientale pénètrent dans l'Europe de l'Est, non pas, il est vrai, venus directement d'Orient, mais — paradoxalement — par le truchement de l'Occident, où l'orientalisme s'était intégré au style rococo, alors très à la mode. Cet orientalisme rencontre, en Pologne, des éléments préexistants; il les assimile, et donne naissance à un grand courant inspirateur, particulièrement fécond et bénéfique, que nous voudrions évoquer ici dans toute son ampleur.

Notre époque aime les colloques et les anniversaires : communiquer et se souvenir. Le colloque sur l'histoire de la première Internationale répondait de façon significative à ce double besoin : celui de confronter les recherches, que les difficultés linguistiques et les frontières intellectuelles, et autres, rendent plus souvent parallèles que convergentes, sur un thème central et propice aux comparaisons de l'histoire du socialisme qui s'est bien développée depuis quelque temps ; celui, cent ans après, de s'interroger sur les conditions de la naissance et de la mort de la première association internationale des travailleurs et de tenter d'en percevoir le visage masqué par les phantasmes de la peur et les mirages de la foi : l'Internationale était-elle mythe ou réalité ?

C'est le titre du colloque du C.N.R.S. tenu à Toulouse du 24 au 27 février 1964, sous la présidence de Pierre Monbeig, Professeur à la Sorbonne. Son but a été double : apprécier le phénomène spécifique de la capitale latino-américaine, les problèmes qu'il pose, les solutions que l'on propose ; expérimenter sur un sujet déterminé la méthode du travail interdisciplinaire, en honneur dans les groupes d'area studies ou d'aires culturelles. Étaient conviés des représentants éminents des différentes sciences sociales : histoire, géographie, économie, sociologie, ethnologie, démographie, droit, politicologie, urbanisme. Fallait-il prévoir un exposé général par discipline ou encourager les monographies particulières, soit dans la perspective d'une discipline soit dans la synthèse de plusieurs d'entre elles ?

Les organisateurs du Colloque s'en sont tenus à un compromis entre ces deux positions. Ils ont encouragé les études d'ensemble par discipline mais ils n'ont pas refusé les monographies particulières.

Publié en 1968, cet ouvrage polonais, qui a été attaqué par le Comité central du P.O.U.P., va prochainement paraître aux Étas-Unis (University of Califomia Press). Son auteur, économiste polonais, a cherché à explorer la dialectique des mutations économiques au cours des siècles. Il prend le fer et l'acier comme indicateurs de la production totale et de la puissance économique à cause de leur omniprésence, de leur applicabilité universelle, de leur rôle fondamental dans la formation de capital et de leur lien avec le progrès technique. Il justifie leur emploi comme instrument de mesure du P.N.B. et de la production industrielle par des calculs de corrélation dans l'espace et dans le temps. Bien qu'ils ne soient pas parfaits, les résultats sont statistiquement significatifs et posent des problèmes réellement intéressants à l'historien de l'économie ; étant donné le caractère incomplet et la notoire fragilité des séries historiques, les informations très convenables dont nous disposons sur le fer et l'acier nous fournissent une possibilité d'appliquer la méthode quantitative à l'analyse séculaire. Mieux vaut mesurer quelque peu que pas du tout.

Les historiens des sciences et un certain nombre de chercheurs, de philosophes et d'historiens des civilisations attendaient depuis de longues années la parution du manuel de George Sarton. L'ouvrage était conçu et promis déjà en 1913, mais son élaboration intellectuelle fut si longue que le premier volume ne vit le jour qu'en 1952.

En 1913, à l'occasion du lancement de la nouvelle revue Isis, « revue consacrée à l'Histoire de la Science, publiée par George Sarton, D.Sc. », ce mathématicien belge définit comme l'un des buts de son périodique de « rendre possible l'élaboration d'un manuel d'histoire de la science vraiment complet et synthétique ». La guerre survint et Sarton commença à vivre une existence de Juif errant. De Wondelgem-lez-Gand en Belgique, son premier lieu d'inspiration, jusqu'à Cambridge aux États-Unis, où il fut longtemps professeur d'Histoire de la Science à la Harvard University, il poursuivit ce qu'il appelait lui-même « une œuvre de foi : foi dans le progrès humain, foi dans l'idéal le plus élevé que l'humanité se soit jamais proposé, la conquête progressive de la vérité et de la justice ». Dans l'union harmonieuse des Science et des Lettres, dans la réconciliation de l'idéalisme avec le sens commun et l'expérience scientifique, Sarton cherchait les bases d'un nouvel humanisme.

La Publication d'une traduction française de l'ouvrage d'Américo Castro La réalité historique de l'Espagne, nous fournit l'occasion de rendre compte de deux ouvrages animés tous deux par une noble ambition, celle de rendre intelligible l'histoire de l'Espagne. Ils sont l'œuvre de deux grands érudits, chez qui l'éloignement de la terre natale n'a fait qu'exalter la ferveur pour l'étude de son passé. C'est en 1948 qu'Américo Castro publiait España en su historia. Cristianos, moros y judíos, dont il procurait en 1954 une réédition sous un titre nouveau : La realidad histórica de España. C'est en 1956 qu'un autre exilé de marque, Claudio Sánchez Albornoz, lui répondait par España. Un enigma histórico. Quelques comptes rendus de ces ouvrages ont paru en leur temps dans les revues françaises, mais comme aucun de nos compatriotes n'a exposé la polémique dans son ensemble, nous croyons que notre tardif commentaire peut encore se justifier.

L'ouvrage de Claude Lévi-Strauss pose un problème fondamental : celui des rapports entre la raison et la réalité. Or il faut distinguer deux manières au moins qu'a la raison de se définir face au réel qu'elle appréhende.

La première manière est celle que nous avons héritée de Descartes, du rationalisme classique, de la science moderne. Elle définit ce que Lévi-Strauss tout comme Sartre appellent la raison analytique. Sur un phénomène donné, la raison prend un recul réflexif, et ancre ses positions sur un ensemble de critères qui permettent l'analyse du réel par réduction aux principes. L'ensemble de ces critères ou principes est en droit l'objet possible d'une axiomatisation qui rapporte explicitement ou implicitement ces principes à un moi pensant, à un « Je pense », à une activité rationnelle impersonnelle, bref à ce que Lalande nomme la raison constituante (Lévi-Strauss reprend ce terme).

C'est un colloque original que celui qui s'est tenu les 26 et 27 mars 1965 à la Fondation Nationale des Sciences Politiques. Original ? moins à vrai dire par son thème qu'en raison de la manière dont il fut mis en œuvre.

En traitant de la façon dont Léon Blum conçut et assuma son rôle de dirigeant du premier (faut-il dire du seul ?) gouvernement de Front Populaire, la Fondation s'intégrait au vaste mouvement par lequel le souvenir de 1936 bat en ce moment la plage historisante. Trente ans après, le Front Populaire figure au programme de l'agrégation, les éditions Payot s'en emparent et l'essor qu'il donna au mouvement syndical fait l'objet d'une thèse de troisième cycle remarquée.

Sur la couverture du volume d'Etudes archéologiques dirigé par Paul COURBIN, on distingue le quadrillage d'une fouille moderne, celle qu'a organisée P. Courbin à Argos lorsqu'il était secrétaire général de l'École d'Athènes. L'ouvrage se présente donc comme un manifeste au service d'une nouvelle conception de l'archéologie, l'ancienne étant celle qui « suivait les murs » afin de dégager au plus vite le plan des édifices, recueillait un peu en vrac le matériel et, malgré tous les progrès accomplis depuis la Renaissance, persistait à « chasser » l'objet. L'évolution dans ces domaines a été plus rapide à l'étranger, dans les pays anglo-saxons notamment, qu'en France, et c'est principalement à Sir Mortimer Weelher, dont l'ouvrage Archeology from the Earth, suffisamment célèbre outre Manche pour avoir été republié en livre de poche, demeure la bible de l'archéologue-stratigraphe, que l'on doit la mise au point de la méthode dite du quadrillage, ou des carrés, méthode du reste infiniment plus souple qu'on ne pouvait le supposer a priori. Mais bien que les Études archéologiques soient avant tout un recueil méthodologique, il s'agit dans ce livre d'infiniment plus que d'une initiation aux techniques modernes. Comme le montre bien P. Courbin dans sa préface, l'ouvrage s'adresse aussi aux historiens mis au défi, sur un ton parfois un peu provocant, sommés de s'adapter ou de périr. On songe au choc qu'ont dû ressentir les lecteurs des premiers travaux d'Ernest Labrousse sur l'histoire des prix au XVIIIe siècle.

Crise de la géographie, au moment où nous parviennent tant de beaux travaux de géographes ? Oui, car ce n'est pas leur qualité qui est en cause, mais leur orientation. Il y a cinquante ans, la monographie régionale était l'ambition suprême. Aujourd'hui, c'est l'enquête spécialisée. Cette division du travail est un indice de progrès. C'est aussi un signe de crise, puisqu'on cesse d'être géographe en devenant spécialiste. C'est ce que l'on ne peut s'empêcher de penser en examinant quelques ouvrages récents, dont le trait commun est de se situer à la frontière de l'économie et de la géographie. Ouvrages économiques, ou ouvrages géographiques ?

La Commission d'Histoire Économique et Sociale de la Révolution a confié à M. Albert Soboul la publication d'un manuscrit de Georges Lefebvre dans lequel il est permis de voir un legs particulièrement précieux de sa pensée historique puisqu'il fut l'oeuvre d'une vie. Les Etudes Orléanaises reposent en effet sur une documentation rassemblée après la fin de la première guerre mondiale et complétée ultérieurement ; l'Avant-Propos est de 1944, et la publication posthume. La forme en reste celle d'une thèse, et laisse apparaître la démarche du chercheur ; l'analyse soigneuse des documents s'éclaire à chaque pas d'une interprétation à la fois prudente et ferme : on en mesure tout le prix en constatant qu'elle se réfère à l'acquis d'autres travaux, et s'intègre ainsi à l'ensemble d'une pensée si pénétrante et si vigoureuse qu'elle continue de nourrir nécessairement toute recherche sur l'histoire sociale et mentale de la France autour de 1789.

« Les sociétés savantes, si nombreuses chez nous, sont des foyers où s'alimentent le zèle et l'ardeur pour les études littéraires, pour les arts et pour les recherches scientifiques. Le rôle que jouent ces compagnies est tel, qu'ignorer leur existence, leur nombre, l'action qu'elles exercent, c'est ne pas avoir une notion suffisante du mouvement intellectuel dans notre pays. » Sans doute cette circulaire de Jules Ferry a-t-elle quelque peu vieilli. Mais l'on a tort de sous-estimer le rôle de ces « compagnies », de les déclarer, sans autre forme de procès, archaïques, inutiles, bonnes à disparaître ; certes elles rencontrent certaines difficultés, mais point insurmontables.