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Le droit international humanitaire et l'avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur la licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires

Published online by Cambridge University Press:  19 April 2010

Louise Doswald-Beck
Affiliation:
Louise Doswald-Beck, LL.M. (Londres), est chef adjoint de la Division juridique du CICR.

Extract

Avec cet avis consultatif, les juges de la Cour internationale de justice (CIJ) étaient appelés pour la première fois à analyser de façon détaillée des règles du droit international humanitaire. Les affaires précédentes — comme par exemple l'affaire Nicaragua contre États-Unis d'Amérique — n'avaient pas donné lieu à des analyses aussi approfondies. L'avis consultatif revêt donc un intérêt tout particulier, car il contient plusieurs conclusions importantes sur la nature coutumière d'un certain nombre de règles de droit humanitaire, ainsi que des déclarations intéressantes sur l'interprétation de ces règles et sur leurs relations avec d'autres principes.

Type
Review Article
Copyright
Copyright © International Committee of the Red Cross 1997

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References

1 L'analyse la plus complète de ces questions se trouve dans: Cour internationale de Justice, Licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires. Avis consultatif du 8 juillet 1996, opinion dissidente du juge Weeramantry.

2 Avis consultatif, ci-après dénommé «avis'était penché sur des attaques par armes nucléaires au regard du droit international était l'affaire Shimoda contre L'État japonais (tribunal de district de Tokyo, 1964, publié en traduction anglaise dans International Law Reports, vol. 32, 1966, p. 626). Le jugement est résumé et analysé par Falk, R., «The Shimoda Case: a legal appraisal of the atomic attacks upon Hiroshima and Nagasaki», AIJL, vol. 59, 1965 p. 759.Google Scholar Le tribunal de district n'a toutefois pas analysé la notion d'arme frappant sans discrimination en tant que telle, mais s'est penché sur la licéité du bombardement à l'aveugle en tant que méthode de guerre. Cela dit, il se référait au droit applicable à L'époque, qui faisait une distinction, tombée en désuétude depuis, entre le bombardement de villes défendues et celui de villes non défendues, notion qui n'a de pertinence que dans le contexte des villes ouvertes.

9 Déclaration de M. Bedjaoui, président, par. 21.

10 Opinion individuelle du juge Guillaume, par. 5.

11 Avis, par. 78.

13 Opinion dissidente du juge Higgins, par. 24.

13 Ibid.

14 Opinion individuelle du juge Guillaume, par. 5.

15 Opinion dissidente du vice-président Schwebel, par. 21.

16 Ce cas est très différent de celui d'une balle ou d'un missile qui rate la cible visée, ou de celui des bombes classiques. La définition d'une «arme frappant sans discrimination» couvrirait, de toute évidence, les armes bactériologiques ainsi que les gaz toxiques en général.

17 Avis, par. 35.

18 Ibid., par. 95. Les «exigences» dont il est question dans cette phrase sont l'interdiction des «méthodes et moyens de guerre qui ne permettraient pas de distinguer entre cibles civiles et cibles militaires, ou qui auraient pour effet de causer des souffrances inutiles aux combattants».

19 Opinion individuelle, par. 2.

20 Déclaration de M. Bedjaoui, président, par. 20.

21 Déclaration de M. Herczegh.

22 Deux critères permettent de considérer que les mines antipersonnel sont des armes frappant sans discrimination: premièrement, elles ne peuvent viser réellement des objectifs militaires, puisqu'elles sont placées à l'avance dans l'hypothèse que des combattants pourraient passer par là; deuxièmement, elles ont souvent des effets imprévus, tout spécialement lorsqu'elles quittent leur emplacement original en raison des conditions météorologiques.

23 Opinion dissidente du juge Higgins, par. 21.

24 Opinion dissidente de M. Schwebel, vice-président, par. 23 et 24.

25 Ibid., p. 87.

26 Voir, par exemple, l'opinion dissidente du juge Weeramantry, p. 84, par. (xi).

27 Voir, par exemple, Doswald-Beck, Louise, «Le nouveau Protocole sur les armes à laser aveuglantes», RICR, no 819, mai-juin 1996, p. 289.Google Scholar

28 Opinion principale, par. 78.

29 Tout le problème réside dans le fait que la règle des maux superflus signifie que l'arme est interdite sans qu'un traité soit nécessaire. Cela décourage les Etats — en particulier ceux qui ont mis au point l'arme en question — de déclarer cette illicéité, alors qu'ils pourraient être disposés à interdire une arme en arguant du fait qu'une telle interdiction est purement fondée sur un traité. Toutefois, il est indubitable que la motivation à accepter une interdiction découle d'une évaluation montrant que l'utilité militaire normale n'est pas suffisante pour justifier les effets néfastes de l'arme.

30 Opinion dissidente du juge Higgins, par. 12.

31 Avis, par. 95. Voir note 17 ci-dessus.

32 Opinion individuelle du juge Fleischhauer, par. 2.

33 Déclaration de M. Bedjaoui, président, par. 20.

34 Voir note 21 plus haut.

35 Opinion dissidente du juge Shahabuddeen, par. 19–21.

36 Opinion dissidente du juge Koroma. Le tribunal de district de Tokyo, dans l'affaire Shimoda contre L'Etat japonais, a suivi le même raisonnement et a conclu que les bombes atomiques violaient cette règle; voir Falk, , op. cit., p. 775Google Scholar, note 8 plus haut.

37 Opinion dissidente du juge Weeramantry.

38 Opinion dissidente du juge Weeramantry, pp. 56–58.

39 Opinion dissidente du juge Koroma, p. 11.

40 On trouvera, à titre d'exemple, un débat sur l'influence de la clause de Martens parmi un groupe d'experts qui s'efforçaient de déterminer si les armes à laser aveuglantes devaient être considérées illégales ou, en tout état de cause, devaient être interdites: Les armes qui aveuglent: Rapports des réunions d'experts organisées par le Comité international de la Croix-Rouge sur les lasers de combat, 1989–1991, CICR, 1993, pp. 340 et 341 et pp. 344 à 346.

41 Avis, par. 87.

42 Ibid., par. 78.

43 Ibid., par. 86.

44 Opinion dissidente du juge Shahabuddeen, pp. 22–23.

45 Opinion dissidente du juge Weeramantry, pp. 41–43.

46 Bien qu'elle ne soit pas mentionnée dans l'avis consultatif, plusieurs juges ont débattu de la pertinence de l'affaire du Lotus (CPJI, 1927. Il s'agit d'une affaire portant sur la compétence pénale à la suite d'une collision en mer.) Le juge Guillaume cite cette affaire à l'appui de son argument, selon lequel, en droit humanitaire, les États choisissent d'interdire les armes par traité, et qu'une arme non prohibée est licite (par. 10 de son opinion individuelle). Toutefois, le président Bedjaoui souligne, dans sa déclaration, qu'il a voté pour l'avis consultatif uniquement à la condition qu'il soit entendu que ce qui n'est pas interdit n'est pas nécessairement autorisé; la société internationale a considérablement changé depuis 1927, elle est aujourd'hui beaucoup plus intégrée (par. 10 à 15). Le juge Shahabuddeen s'est rallié à cet avis (pp. 13–14), et le juge Weeramantry a ajouté que la CPIJ n'aurait jamais imaginé que sa décision püt être invoquée de cette manière, en particulier à la lumière de la clause de Martens (pp. 45–46).

47 Avis, par. 78.

48 Protocole additionnel I de 1977, article 51, par. 2.

49 Ibid., article 40.

50 Avis, par. 25.

51 Dans une affaire plaidée devant la Commission interaméricaine des droits de l'homme, concernant le bombardement d'un hôpital dans un conflit armé, les plaignants ont prié la Commission d'interpréter le «droit à la vie» à la lumière des règles du droit humanitaire. Voir Weissbrodt, D. et Andrus, B., «The right to life during armed conflict: Disabled People's International v. United States», 29Google Scholar, Harvard International Law Journal, 1988, p. 59. Une demande similaire a été formulée à l'adresse de la même Commission dans l'affaire numéro 10 573.

52 Voir, par exemple, l'affaire Chypre contre Turquie (Conseil de l'Europe, Commission européenne des droits de l'homme, Décisions et Rapports vol. 72, p. 5), dans laquelle la Commission, confrontée au cas de personnes disparues pendant et après un conflit armé, a conclu à une violation de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme (droit à la liberté et à la sécurité de la personne) et n'a pas interprété cet article à la lumière des dispositions pertinentes des Conventions de Genève. De même, l'affaire Loizidou contre Turquie (jugement de la Cour du 18 décembre 1996) concernant le nord de Chypre, dans laquelle la Cour s'est fondée sur les règles concernant le droit à la propriété et le droit au respect du domicile plutôt que sur les dispositions équivalentes de la IVe Convention de Genève, bien qu'elle ait fondé la responsabilité de la Turquie, en vertu de la Convention européenne, sur son occupation militaire du nord de Chypre (par. 52 et 54 du jugement).

53 Avis, par. 29.

54 Ibid., par. 30. Dans ce contexte, la Cour cite, pour l'approuver, le principe 24 de la déclaration de Rio, qui stipule que «la guerre exerce une action intrinsèquement destructrice sur le développement durable. Les États doivent donc respecter le droit international relatif à la protection de l'environnement en temps de conflit armé et par ticiper à son développement, selon que de besoin».

55 Voir, par exemple, ICRC Guidelines for military manuals and instructions on the protection of the environment in times of armed conflicts, 1994, préparé en application de la résolution A/RES/48/30 de l'Assemblée générale du 9 décembre 1993, voir RICR, no 818, mars-avril 1996, pp. 242–250; voir aussi le paragraphe 13 c) du «Manuel de San Remo sur le droit international applicable aux conflits armés en mer», RICR, no 816, novembre-décembre 1995, p. 656. Voir aussi d'autres dispositions concernant l'environnement: paragraphes 11, 34 et 44, et des commentaires sur ce sujet pp. 655, 661 et 664, respectivement de l'explication.

56 Avis, par. 32.

57 Ibid., par. 31.

58 Manuel de San Remo, 1994, section II, par. 3 à 6. Une partie de cette discussion est décrite dans les «Travaux préparatoires», in Bochumer Schriften no 24, pp. 133 à 206.

59 Op. cit., note 52, pp. 75 à 78.

60 Avis, par. 41 et 42; souligné par l'auteur.

61 Avis, par. 105, alinéa 2. E.

62 Sur les sept juges qui ont voté pour cette conclusion, quatre indiquent dans leur opinion individuelle que l'emploi d'armes nucléaires est indubitablement illégal au regard des règles du droit humanitaire (juges Bedjaoui, Ranjeva, Herczegh et Heischhauer), et un cinquième juge considère ces armes illégales en droit coutumier (juge Ferrari Bravo). Sur les sept juges qui ont voté contre, trois considèrent que leur emploi pourrait être licite au regard du droit humanitaire dans certaines circonstances extrêmes (juges Schwebel, Guillaume et Higgins), trois estiment que leur emploi est forcément illicite du point de vue du droit humanitaire (juges Shahabuddeen, Weeramantry et Koroma), et le septième (juge Oda) pense que la Cour aurait dü s'abstenir de rendre un avis consultatif.

63 Ce fait a été signalé par le juge Weeramantry dans son opinion dissidente, pp. 81–82. Relevons par ailleurs que le juge Weeramantry a été le seul magistrat à poser la question de savoir si l'emploi d'armes nucléaires dans des circonstances aussi extrêmes représenterait une protection réaliste pour l'État agissant en situation de légitime défense, et il a conclu, sur la base d'avis autorisés, que ce ne serait probablement pas le cas (pp. 59–61).