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Où est la vérité?

Published online by Cambridge University Press:  05 May 2010

Robert Franck
Affiliation:
Université de Louvain

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En Europe au seizième siècle, la vérité siège dans l'Autorité. Mais à l'aube du dix-septième siècle elle vient s'établir du côté de la Raison de l'Homme, et choisit la Nature pour seconde résidence. Prenant goût à la Nature, la vérité finit par s'y loger pour de bon. Mais aujourd'hui on ne sait plus où la trouver. Et certains pensent qu'il est devenu désuet de la chercher.

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Articles
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Copyright © Canadian Philosophical Association 1978

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References

Notes

1 Nous aurons l'occasion de revenir sur cette conception et de l'évaluer, au paragraphe 16.

2 Quels genres de traces? L'emprunt de certains concepts, mais surtout la reproduction d'une même configuration de discours. Cf. le paragraphe 11.

3 On aura l'occasion, plus loin, de justifier cette inclination à accorder une plus grande valeur de vérité àa la pensée qui se développe aux dix-septième et dix-huitième siècles.

4 Cf. le paragraphe 12.

5 Chaussinand-Nogaret, Guy, La Noblesse au XVIIIième siècle, éd. Hachette, , Paris, 1976Google Scholar.

6 On le montrera au paragraphe 16.

7 Foucault, Michel, Les mots et les choses, une archéologie des sciences humaines, éd. Gallimard, , Paris, 1966Google Scholar.

8 Id., p. 9.

9 Id., p. 13.

10 Foucault, Michel, L'archéologie du savoir, éd. Gallimard, , Paris, 1969, p. 98Google Scholar.

11 Lecourt, Dominique, Pour une critique de l'épistémologie, éd., Maspero, Paris, 1972, pp. 98133Google Scholar.

12 Michel Foucault, L'archéologie…, op. cit. p. 250

13 Id., p. 250

14 La disqualification d'une épistémè n'entraîne pas nécessairement la disqualification d'une conception de la connaissance qui lui correspond. Par exemple si l'épistémè que Foucault attribue aux dix-septième et dix-huitième siècles a pu prévaloir assez brusquement, s'imposant en quelques années à de nombreux intellectuels, elle n'a pas empêché que la conception sommaire «autoritaire» de la connaissance, qui correspond à une autre épistémè, se maintienne fermement dans les esprits, et continue de dominer dans les institutions politiques, juridiques, et autres.

15 Michel Foucault, Les mots et les choses, …, op. cit. p. 54.

16 Id., p. 55.

17 Johaness Kepler, Mysterium Cosmographicum, chap. II, 1596. Trad, française de Karvelis, Ugne et Leroy, A.E., dans Heisenberg, Werner, La nature dans la physique contemporaine, éd. Gallimard, 1962, p. 91Google Scholar.

18 Johaness Kepler, lettre à Herwart von Hohenburg, 14 sept. 1599, dans Caspar, M. et Dyck, W. v., Johaness Kepler in seinen Briefen, 2 vol., Munich, 1930Google Scholar, trad, franç. Ugne Karvelis et A.E. Leroy, cité par W. Heisenberg, op. cit. p. 89.

19 Johaness Kepler, Mysterium Cosmographicum, Préface, 1596. Trad, franç, dans W. Heisenberg, op. cit. p. 82.

20 Id., chap. II. Trad, franç, id. p. 92.

21 Galilei, Galileo, Dialogo dei massimi sistemi, Giornata Seconda, dans Le opere de G. Galilei, ed. Nazionale, Florence, 18901909Google Scholar. Trad, franç. dans W. Heisenberg, op. cit. pp. 111–112.

22 Il serait difficile de nier que la confrontation des mots et des choses subsiste toujours au seizième siècle au niveau de la vie quotidienne, aussi longtemps cependant que les mots ne sont pas trop chargés d'autorité. Mais elle devient impossible lorsque les rapports hiérarchiques sont trop accusés (et cela reste vrai aujourd'hui, à l'armée, dans les ècoles, etc.), ainsi que dans l'exercice savant du savoir, comme l'a bien montré Foucault.

23 Un exposé plus systématique et plus complet de l'approche linguistique du modèle qui est proposé ici, a été fait dans Franck, Robert, «Langue, discours et significations», Revue philosophique de Louvain, tome 67, mai 1969, pp. 306321CrossRefGoogle Scholar.

24 Benveniste, Emile, «Les niveaux de l'analyse linguistique», Problèmes de linguistique générate, éd. Gallimard, Paris, 1966, pp. 119131Google Scholar.

25 Id., p. 126.

26 Id., pp. 126–127.

27 Id., p. 129.

28 Robert Franck, art. cit.

29 À partir de la définition proposée par Benveniste du signifiant, et de son application ici au locuteur, à l'interlocuteur, à l'objet du discours comme à ce qui est dit, le concept de signifiant se trouve profondément modifié en regard de son acception habituelle. Il en va de même pour le concept de signifié. Pour plus de commentaires on se reportera à Robert Franck, art. cit.

30 On peut hésiter sur l'opportunité de désigner du nom de « discours » cette unité supérieure à la phrase, qui est aussi unité supérieure au locuteur, à l'interlocuteur, et à ce dont on parle. Car cette dénomination risque d'amener le lecteur à confondre l'unité supérieure qui est ici définie, avec un seul de ses constituants : ce qui est dit. Si je maintiens cependant cette dénomination, c'est précisément en vue de substituer une conception du discours à une autre.

31 Autre chose est d'affirmer, comme je l'ai fait plus haut, que la promotion de la vérité est généralement le fait de couches sociales en lutte contre la domination.

32 Foucault, Michel, Surveiller et punir, Naissance de la prison, éd. Gallimard, Paris, 1975Google Scholar.

33 L'approche de l'idéologie qui est évoquée ici, serait trop longue à développer; je le ferai en une autre occasion. Elle est analogue à l'approche que Foucault appelle « archéologique », et qui consiste à découvrir des « régularités discursives » communes à des sciences différentes.

34 La « raison » ne doit-elle pas être rangée plutôt dans la case du locuteur ? On pourrait le croire à première vue, puisqu'il s'agit bien de la raison de l'homme, du « sujet» qui parle… On examinera cette question plus loin, au paragraphe 13.

35 Goldmann, Lucien, Le Dieu caché, Etude sur la vision tragique dans les ‘Pensées’ de Pascal et dans le théâtre de Racine, éd. Gallimard, Paris, 1955, pp. 4647 et 45Google Scholar.

36 Id., p. 47.

37 La pensée scientifique requiert-elle ce dénuement du locuteur « sujet», réduit à l'état de raison pure et universelle ? Non, sans doute, et on y reviendra au paragraphe 17.

38 Cf. Delumeau, Jean, Naissance et affirmation de la Réforme, éd. Puf, Paris, 1965Google Scholar.

39 Galilei, Galileo, Le opere de G. Galilei, op. cit., vol. VII, p. 156Google Scholar. Trad, franç, dans W. Heisenberg, op. cit. p. 98.

40 Huygens, Christian, Traité de la Lumière, éd. P. Vander Aa, Leyde, 1690, PréfaceGoogle Scholar.

41 Descartes, René, Les Principes de la Philosophie, éd. Elzevier, Amsterdam, 1644Google Scholar.

42 Isaac Newton, Philosophiae naturalis principia mathematica, éd. J. Streater, 1687, livre III, Section IV : Des Comètes. Trad, franç, dans W. Heisenberg, op. cit. pp. 135–136.

43 Id., livre III: Règles pour l'étude de la nature, Règles III et IV.

44 La position de Galilée rapportée plus haut écarte la nécessité de cette liaison; néanmoins son œuvre témoigne de la préoccupation constante de confronter la Raison è la Nature.

45 Francis Bacon, Novum Organum, 1620, liv. I, 95. Trad, franç, dans Bacon, Francis, Œuvres philosophiques, trad. de Lassalle et J.C. Buchon, Paris, 1836, p. 301Google Scholar.

46 Ravaisson, Félix, La philosophie en France, éd. Hachette, 2o éd., 1885, p. 275Google Scholar.

47 Il existe pourtant au dix-neuvième siècle des exemples d'une telle critique, comme celui, célèbre, de la théorie de l'évolution. On peut dire aussi que la philosophie positiviste cherche à donner au savoir scientifique le rôle critique le plus large, et cherche à surmonter précisément le clivage qui se dessine, et que véhicule la conception sommaire de la connaissance qui est évoquée ici. Cette conception, qui paraît traverser tout le dixneuvième siècle, et à l'égard de laquelle les philosophies tant positivistes que spiritualistes prennent position, a joué et joue toujours un rôle idéologique important.

J'ai présenté plus en détail cette conception de la connaissance dans « Le savoir et les opinions », Rose, H., Rose, S. et al. , L'idéologie de/dans la Science, éd. Seuil, Coll. science ouverte, Paris, 1977, pp. 243264Google Scholar.

48 On peut trouver dans (Auto) critique de la science, textes réunis par Jaubert, A. et Levy-Leblond, JM., éd. Seuil, Coll. science ouverte, Paris, 1973Google Scholar, le relevé d'un grand nombre de ces groupes et publications. Quant aux sciences humaines, des préoccupations comparables s'y manifestent qui méritent une égale attention.

49 Cf. « L'institut de recherches scientifiques s'appuie sur les ouvriers », Rapport d'enquête sur l'Institut de Recherches Scientifiques en chimie-physique de Dalian, Renmin Ribao, 28 juillet 1976. Pour plus d'information on peut consulter: China: Science walks on two legs, A Report from Science for the People, Avon Books, New York, 1974. Également Coriat, Benjamin, Science, Technique et Capital, éd. Seuil, Coll. science ouverte, Paris, 1976, pp. 191243Google Scholar.