Dès 1946, Jean Meuvret, travaillant sur les famines louis-quatorziennes, diagnostiquait, comme phénomène concomitant, outre une prévisible mortalité, la très forte raréfaction des naissances. Il en offrait le premier un diagnostic fin, qui acheminait vers une explication causale, sans pour autant proposer celle-ci avec certitude. Compulsant les registres paroissiaux, et spécialement les chiffres de baptêmes, Jean Meuvret décida de ne plus raisonner en termes de naissances, mais de conceptions. Pour aboutir à cette donnée primaire, il décala, comme on sait, de neuf mois vers l'amont chronologique toutes les dates des baptêmes ; et il parvint ainsi à suivre, mois par mois, le mouvement des conceptions elles-mêmes. Du coup se fit jour, avec force, une vérité qu'on avait seulement soupçonnée : au moment précis où culminaient les prix du grain, et où se multipliaient les morts de faim et d'épidémies, on voyait s'effondrer le nombre des conceptions.