Les préoccupations relatives à la reconstitution de l’économie nationale dévastée par la guerre, au désarroi des finances publiques et aux soubresauts du change ont, pendant de nombreuses années, détourné notre attention de l’étude de la vie économique envisagée dans son fonctionnement normal. Maintenant que la stabilisation monétaire est chose faite depuis trois ans, c’est la connaissance de cet ordre normal des choses qui devient nécessaire pour la conduite raisonnée des affaires. Or, depuis la guerre, dans des pays tels que les États-Unis et la Grande-Bretagne et plus récemment en Allemagne, les économistes ont scruté le mécanisme économique au moyen de méthodes nouvelles; le retour à la monnaie saine nous permet aujourd’hui d’appliquer celles-ci avec fruit à l’étude de la vie économique de la Belgique.
Les efforts ont été dirigés spécialement vers l’observation des mouvements de l’organisme économique. On savait sans doute depuis longtemps que l’évolution des phénomènes économiques était ordinairement la résultante de plusieurs forces dont la plus intéressante et la plus mystérieuse était celle qui produisait des oscillations rythmiques, des états de prospérité, de tension, de crise et de dépression; mais leur action respective était peu connue et l’étude statistique des cycles économiques restait un champ d’observation encore peu exploré. L’attention générale avait surtout été attirée par la phase la plus dramatique du cycle, la crise, et cette tendance était encouragée par le sens plutôt théorique des recherches des économistes: sauf quelques exceptions ceux-ci s’appliquaient plus à rechercher les causes des crises qu’à en découvrir le mécanisme: le problème, souvent débattu, de la périodicité des crises avait en lui un attrait tout spécial.