Il y a environ un an, M. Truman remportait les suffrages aux élections présidentielles des États-Unis, contrairement aux prévisions des instituts les plus qualifiés. De là de véhéments reproches à ces prophètes modernes et principalement à leur porte-bannière, M. Gallup, d’avoir, au nom des méthodes scientifiques, induit en erreur presque toute la population américaine.
Cet échec eut des répercussions dans divers pays : méfiance vis-à-vis des recherches d’opinion, scepticisme à l’égard des conclusions et des bases scientifiques des sondages. La Belgique, où la pratique des sondages est d’introduction récente, n’y échappa point.
Nous n’avons pas l’intention de reprendre ici l’exposé détaillé de l’erreur commise par M. Gallup. De longs articles y ont été consacrés. On a montré que l’erreur n’affectait pas les bases scientifiques de l’étude des opinions. Le savant Gallup s’est laissé dominer par le prophète Gallup. La science n’admet aucun marchandage.
Tandis que dans le grand public, la confiance à l’égard des instituts de l’opinion publique avait été ébranlée, les spécialistes ont gardé leur foi intacte. Pour marquer sa confiance, l’administration du Plan Marshall chargea les instituts Gallup d’un sondage international dans les divers pays bénéficiaires du plan. Par ailleurs, l’affaire Gallup a eu comme résultat de porter les milieux intéressés à étudier avec un soin nouveau les fondements de l’étude des opinions et à délimiter davantage ses possibilités et ses frontières.
Dans la société moderne, une désaffection à l’égard des études de l’opinion publique paraît difficile à concevoir. Nous sommes à l’ère des démocraties et l’opinion est appelée à jouer un rôle prépondérant. L’évolution des idées tend à ce qu’un groupe toujours plus large prenne part à la direction de la vie commune. Mais ceci nécessite des techniques nouvelles.