Published online by Cambridge University Press: 22 January 2009
On admet en général que l'expansion de l'islam était une des principales préoccupations des géographes arabes quand ils décrivaient la situation dans les régions excentriques par rapport au monde musulman. En partant de ce présupposé on aurait pu s'attendre à trouver pour l'ètude de l'histoire d'une région précise, telle que le Kānem, des renseignements amples et explicites nous permettant de dessiner un tableau satisfaisant de la progression de l'islam, au moins dans ses grands traits. En fait, chemin faisant, on découvre que les renseignements qui nous ont été transmis dans ce type de sources, même sur un sujet aussi important, sont si lacunaires et contradictoires que presque rien ne peut être dit avec certitude du processus global dans lequel s’inscrit l'islamisation de la région. Or, dans le cas du Kānem une source interne, longtemps négligée, peut contrebalancer et corriger la vision non seulement lacunaire mais aussi déformant que les géographes arabes donnent du Kānem ancien, le Diwān salātin Bornū. Composée dans l'entourage du roi, cette source elle-même ne présente pas une vue neutre, et, surtout en ce qui concerne des questions touchant à l'islam, elle doit être maniée avec circonspection; mais contrairement aux aperçus aléatoires et sans rapport les uns avec les autres fournis par les géographes arabes, les chroniqueurs autochtones nous présentent une vision d'ensemble rigoureusement chronologique de l'histoire du Kānem dont la critique, à certains égards, est plus aisée.
1 Cf. Lange, D., Le Dīwān des sultans du Känem-Bornū Chronologie et histoire d'un royaume africain (de la fin du Xe siecle jusqu'à 1808) (Wiesbaden, 1977)Google Scholar. Je tiens à signaler que le présent article s'appuie en grande partie sur les résultats de mes premières recherches sur l'histoire du Kānem/Bornū exposé dans ce livre et dont certains ont dû être modifiés. En outre je voudrais remercier J. O. Hunwick pour ses nombreux commentaires portant sur une première version de cet article.
2 Cf. Palmer, H. R., Sudanese Memoirs (Lagos, 1928), iii, 3–27Google Scholar; idem, The Bornu Sahara and Sudan (Londres, 1936), 14–52.Google Scholar
3 Parmi les auteurs récents ayant abordé dans leur travaux l'histoire du Kānem il faut surtout citer Trimingham, S., A history of Islam in West Africa (Londres, 1962), 110–26Google Scholar; Smith, A., ‘The early States of the Central Suda’, in: Ajayi, J. and Crowder, M., éds., History of West Africa, i (Londres, 1971), 158–83Google Scholar; J. E. Lavers, ‘Islam in the Bornu Caliphate: a surve’, Odu, nouv. sér. 5, 1971, 27–53; Fisher, H. J., ‘The eastern Maghrib and the central Sudan’, in: Oliver, R., éd., The Cambridge History of Africa, iii, (Cambridge, 1977), 232–330CrossRefGoogle Scholar. Dans leurs considérations se rapportant à l'adoption de l'islam par les rois du Kanem chacun de ces auteurs fait une large place à Muhammad b. Mānī.
4 Le mahram ne porte pas de date mais il pourrait eéventuellement être daté d'après le nom de son propriètaire, Ahmad b. Muhammad b. Walī b. Furţū, qui semble être identique celui de l'imam Ahmad b. Furţū auteur de deux livres datant respectivement de 1576 et de 1578 (cf. Lange, , Chronologie, 4)Google Scholar. Par ailleurs, aucun indice ne permet de confirmer que Muhammad b. Mānī ait effectivement vécu au XIe siècle. Au contraire, l'énumération des noms de dix anciens rois du Kānem/Bornū—le dernier étant ‘Uthmān b. Idrīs (c. 1389–1421)—permet de rapprocher ce document des ‘listes dynastique’ dont il a pu être établi qu'elles dérivent toutes du Dīwān (op. cit. 8–10). Or, ce dernier repose sur une tradition écrite dont tout indique qu'elle n'a commencé que sous le règne de Dūnama Dībalāmi (c. 1210–48) (op. cit., 156–60). On remarquera que d'autres mahram, portant des dates du XIIe siècle (Palmer, , Sudanese Memoirs, iii, 5–6Google Scholar), relèvent en toute vraisemblance du XXe siècle—du moins en ce qui concerne leurs dates (op. cit. 4–5).
5 Parmi les auteurs précités (cf. note 3) il n'y a que H. Fisher qui a distingué assez clairement entre la période zaghāwa de l'histoire du Kānem et la période Séfuwa (‘Eastern Maghri’, 288–90; la distinction a déja` été préssentie—mais non élucidé—par Trimingham, S., A History, 115Google Scholar). Notant en passant que Hummay était un ‘usurpateur musulma’ Fisher a également envisagél'hypothèse que les Zaghāwa (après le changement dynastique) constituaient une ‘pagan rearguard actio’ (op. cit., 289). En l'absence d'un fondement chronologique suffisamment solide il était cependant contraint d'envisager cette période cruciate pour l'introduction de l'islam au Kānem dans le seul cadre de l'histoire locale.
6 Cf. Lange, , Chronologie, 112–29Google Scholar. La mêime idée a déjà été développée dans ma thfése Contribution à l'histoire dynastique du Kānem-Bornū (Sorbonne, 1974), 172–209.
7 K. al-ta'rīkh, éd. M. T. Houtsma, 219; tr. Cuoq, J., Recueil des sources arabes concernant I'Afriqiie Occidentals du VIIIe au XVIe siècle (Paris, 1975), 52.Google Scholar
8 Cf. Qutayba, Ibn, K. al-ma'-arif, éd. F. Wüstenfeld, 12–13Google Scholar; tr. Cuoq, Recueil, 41.
9 In: al-Yāqūt, Mu'djam al-buldān, éd. Wüstenfeld, F., ii, 142; tr. Cuoq, Recueil, 79Google Scholar, mais celui-ci commct ici une faute (cf. Lange, , Chronologie, 118Google Scholar, n. 43).
10 K. nuzhat al-mushtāg, éd., de Goeje, 12; trad. 15 (Cuoq, , Recueil, 141Google Scholar). Il serait erroné de prendre le texte d'al-ldrīsī à la lettre car cet auteur juxtapose des renseignements d'origines extrêmement disparates.
11 K. al-djughrāfiyā, éd al-'Arabī, 95; tr. Cuoq, , Recueil, 209Google Scholar. Ibn Sa'īd s'appuie pour ce qui est du Kānem sur le récit du voyageur Ibn Fāţima, aujourd'hui perdu.
12 Ibid. 95–6; tr. Cuoq, , Recueil, 211Google Scholar. Pour la situation actuelle des Zaghāwa cf. Tubiana, M. J., Survivances preéislamiques en pays zaghawa (Paris, 1964), 17–18.Google Scholar
13 Al-Ya'qūbī, K. al-buldān, éd. de Goeje, 345; tr. Cuoq, , Recueil, 49.Google Scholar
14 In: K. al-siyar, cité d'après Lewicki, T., External Arabic Sources (Varsovie, 1969), 97.Google Scholar
15 In: al-Yāqūt Mu'djam, ii, 142; tr. Cuoq, , Recueil, 78.Google Scholar
16 K. al-masālik, éd. de Slane, ii; tr. 29 (Cuoq, , Recueil, 82Google Scholar).
17 Nuzha, 12, tr. 15 et 20, tr. 25 (Cuoq, , Recueil, 141Google Scholar, 151).
18 Ce nom désigne le plus grand roi du Kānem connu dans les sources internes sous le nom de Dūnama Dībalāmi (cf. Chronologie, 71, § 17, n. 2 et 94, n. 52).
19 K. al-djughr āfiyā, 95, et Kamal, Y., Monuments cartographica Africae et Aegypti (Le Caire et Leyde, 1926–1951), ivGoogle Scholar (i), 1082r (v.a. Cuoq, , Recueil, 209Google Scholar).
20 Al-Khabar 'an adjnās al-Sūdān, in Hamaker, A. H., Specimen Catalogi, 206Google Scholar. Il s'agit d'un mémoire inclu dans certains exemplaires du K. al-mawā′iz wa-l-i′tibār fī dhikr al-khiṭat wa-l-āthār d'al-Maqrīzī. Une partie des informations semble dériver d'un ouvrage inconnu d'Ibn Sa′īd.
21 Masālik al-absār wa'l-mamālik al-amsār, MS. BN Paris n° 5868, fo. 24r; tr. Gaudefroy–Demombynes, L'Afrique moins l'Egypte, 45 (Cuoq, , Recueil, 260)Google Scholar. Al-′Umarī obtint ses informations sur le Kānem par Abū 'Abd Allāh al-Salāhī, qui lui-même se renseigna auprès du shaykh 'Uthmān al-Kānemī, ‘un des proches de leur ro’.
22 Cf. Chronologie, chap. V, dans lequel j'ai montré que Ḥummay était le fondateur de la dynastie des Sēfuwa.
23 Op. cit. surtout pp. 156–60.
24 Dīwān, § ii (On trouvera le texte arabe du Dīwān, sa traduction française et des commentaires in: Chronologic et Histoire, 15–82).
25 Op. cit. § 10.
26 Masālik, II; tr. 29 (Cuoq, , Recueil, 82Google Scholar). Il est très improbable que ce passage ait été emprunté a al-Warrāq (mort en 973/4)—dont l'ouvrage géographique a souvent été mis à contribution par al-Bakrī—car à son époque le royaume des Zaghāwa était encore à l'apogée de sa puissance (cf. al-Muhallabī in al-Yāqūt Mu′djam, ii, 142; tr. Cuoq, , Recueil, 78Google Scholar).
27 En raison du discrédit jeté par les historiens ultérieurs sur les Omeyyades il a pu être tentant pour les traditionnistes du Kānem de rattacher al-Hādī al-′Uthmānī à des califes rāshidūn (on notera la ressemblance des noms).
28 Dīwān, § 9. On notera que dans le Dīwān le hā terminal a dans le cas des noms propres souvent la même fonction qu'un alif otiusum sans valeur phonétique. Ainsi on trouvera , §§ 4, 31, à la place de de mêane que , § 4, à la place de (pour .) et § 35, à la place de (Kano).
29 Il n'est pas interdit de penser que le terme actuellement en usage chez les Kanuri (surtout ceux du nord) pour désigner le Fezzan dérive en fait du nom de la ville de Zawila. Cette étymologie n'implique pas forcément que les chroniqueurs ont voulu désigner la ville elle-même car ils écrivent , alors que les géographes arabes transcrivent ce nom toujours sous la forme de .
30 De nombreux restes archéologiques, surtout dans la région de Traghen, témoignent d'une ancienne implantation kanuri (Kānem/Bornū) au Fezzan (cf. Lange, D. et Berthoud, S., ‘Al-Qaşaba et d'autres villes de la voie centrale du Sahar’, Paideuma, 1977).Google Scholar
31 Cf. Chronologie, p. 29Google Scholar, n. 9 et p. 67, § 10, n. 1.
32 Al-Idrīsī, Nuzha, 12, tr. 15 (Cuoq, , Recueil, 141Google Scholar) (les Zaghāwa sont des nomades); 34, tr. 41 (Cuoq, Recueil, 151Google Scholar) (les Zaghāwa ‘sont les plus galeux parmi les Sūdān’).
33 Mu′djam, ii, 142 (Cuoq, , Recueil, 78).Google Scholar
34 K. al-buldān, 345; tr. Cuoq, , Recueil, 49.Google Scholar
35 Bien entendu même après la consolidation des grands Etats musulmans du bilād al-Sūdān les transgressions de cette loi étaient nombreuses mais elles étaient le plus souvent la conséquence d'aggressions externes. A l'intérieur de ces différents Etats le principe de l'intangibilité des musulmans libres semble en général avoir été respecté; la question à cette époque était plutôt comment assurer la protection des musulmans libres à l'extérieur de leur communauté d'origine (voir p. ex. Ahmad Bābā, Mi′rādj al-su′¯d dont on trouvera une traduction avec commentaire in Zouber, M., AḤmad Bābā de Tombouctou (Paris, 1977), 129–46).Google Scholar
36 Cf. Brett, M., ‘Ifrīqiya as a market for Saharan trade from the tenth to the twelfth century A.D’ J. Afr. Hist., x, 3 (1969), 354–5.Google Scholar
37 Al-Idrīsī, Nusha, 121, tr. 141–2.
38 Al-Maqrīzī, Khiţaţ, éd. Bulāq, i, 335–9.
39 Le seul renseignement direct sur le commerce du Kānem ancien est donné par al-Ya′qūbī qui, mentionnant la ‘vill’ du Kawār—la principale étape entre le Kānem et Zawīla—précise que la plupart de ses habitants étaient des Berbères engageés dans le commerce des esclaves (Buldān, 345; tr. Cuoq, , Recueil, 49Google Scholar).
40 Léon l'Africain, au XVIe siècle, insiste beaucoup sur la difficulté du roi du Bornū de capturer un nombre suffisant d'esclaves pour satisfaire la demande des comercants étrangers (Descrittione, tr. A. Epaulard, ii, 480).Google Scholar
41 Cf. Gotein, S., A Mediterranean Society, i, 188.Google Scholar
42 Cf. Chronologie, chap. V.
43 Dīwān, § 16.Google Scholar
44 Al-Mas′ūdī, Murūdj al-dhahab, iii, 163 ff.Google Scholar
45 Cf. Paret, R., Sīrat Saif ibn Dhī jazan. Ein arabischer Volksroman, 88.Google Scholar
46 Dans un article peu connu, C. H. Becker avail déjà émis l'hypothèse que la nisba sayfide était l'expression d'un véritable ‘programme politique’ (‘Geschichte des östlichen Suda’, Der Islam, i, 2 (1910), 173.Google Scholar
47 Dans un prochain travail je me propose d'Étudier cette question plus en détail.
48 Al-Idrīsī signale que les comerçants du Kawār se rendaient au XIIe siècle jusqu'en Egypte (Nuzha, 39Google Scholar; tr. Cuoq, , Recueil, 157).Google Scholar
49 Cf. Brenner, L., The Shehus of Kukawa (Oxford, 1973), 26–66.Google Scholar
50 Nuzha, 8 tr. 10; Cuoq, , Recueil, 133Google Scholar (Ghāna); ii, tr. 13; Cuoq, Recueil, 139 (Kawkaw)Google Scholar; 39, tr. 46; Cuoq, , Recueil, 157Google Scholar (Ankalās).
51 Cf. supra, p. 7.
52 D'après le récit des chroniqueurs il sera emprisonné par sa mère pour avoir enfreiné la loi coranique en tuant un voleur—alors qu'il aurait dû lui couper la main (Dīwān, § 14).
53 Dīwān, § 13. V.a. D. Lange, ‘Royaumes et peuples du Tcha’, in: Histoire générale de l'Afrique, éd. UNESCO, vol. iv, chap. 10 (à paraître).
54 Cf. Furtū, Ibn, Ghazawātfi Kānem, fos. 77 et 123–4Google Scholar (tr. Palmer, , Sudanese Memoirs, I, 50, 70Google Scholar). Ibn Sa′īd semble confirmer que les Tubu étaient au XIIIe siècle encore des Païens (Djughr āfiyā, 96Google Scholar; v.a. Chronologe, 128, n. 115Google Scholar).
55 D'après les chroniqueurs la mère de Salmama b. ‘Abd Allāh (c. 1182–1210) portait le nom musulman de Ḥawwā’ et le père de celle-ci s'appelait ‘Abd al-Rahmān (Dīwān, § 16). IIs appartenaient aux Dabīr qui, d'après G. Nachtigal, étaient une ancienne tribu sédentaire du Kānem (Sahara und Sudan, ii, 319–20Google Scholar). On notera avec intérêt que le même Salmama, descendant de la quatrième génération de Ḥummay, est décrit par les chroniqueurs comme le premier roi de couleur noire parmi les Sēfuwa.
56 Toubous et Kanembous se distinguent aujourd'hui par leur genre de vie, les premiers étant nomades et les seconds sédentaires. II est probable que cette distinction est très ancienne.
57 Cf. Sa′īd, Ibn, Djughr āfiyā, 94–6Google Scholar; tr. Cuoq, , Recueil, 208–9.Google Scholar
58 Il faut cependant noter que la femme principale de Bīr b. Dūnama (c. 1140–66) et celle de ′Abd Allāh b. Bīr (c. 1166–82) étaient des musulmanes si l'on peut en juger d'après les noms que leur donnent les chroniqueurs (Dīwān, § 15, § 16).
59 Ghazawāt fī Kānem, fos. 123–4 (tr. Palmer, , Sudanese Memoirs, 70Google Scholar). Ibn Furṭu étant le principal personnage religieux de I'Etat sēfuwa à son époque (al-imām al-kabīr) cette présentation des événements pourrait surprendre si l'on ne tient pas compte du fait que celui-ci, lorsqu'il est amené à évoquer des faits historiques, se fonde exclusivement sur des traditions orales.
60 Cf. Chronologie, 4, 87.
61 Djughr āfiyā, 95–6; tr. Cuoq, , Recueil, 209.Google Scholar
62 Cf. al-Maqrīzī, Khiṭaṭ, éd. Wiet, iii (2), 266 et al-′Umarī, Masālik al-absār, trad. Gaudefroy-Demombynes, 46.
63 Peu soucieux du destin de l'islam à l'époque de sa pénétration profonde dans la région du lac Tchad, les chroniqueurs—comme on l'a vu—ne lui accordaient pas non plus une grande attention quant à ses débuts au Kānem.
64 41,000 chevaux d'après le Dīwān (§ 17) et 30,000 d'après Ibn Furţū (Ghazawāt fī Kānem, fos. 77–8; tr. Palmer, , Sudanese Memoirs, 50Google Scholar).
65 Djughrāfiyā, 94–5, 127; tr. Cuoq, , Recueil, 208–9, 219x.Google Scholar
66 Le nombre très élevé de 100,000 chevaux attribué par les chroniqueurs à Dūnama b. Ḥummay (c. 1086–1140) pourrait être dû à une faute de copiste (cf. Chronologie, 32, n° 3). Mais on peut aussi soupconner que tous les renseignements donnés à propos de ce roi—et surtout ceux concernant ses différents pèlerinages—relèvent de la fiction (Dīwān, § 13). Si tel était le cas on comprendrait mieux pourquoi aux yeux d'al-Idrīsī la capitale du Kānem était ‘une toute petite ville’ (Nuzha, 12; tr. Cuoq, , Recueil, 140).Google Scholar
67 Djugrāfiyā, 94; tr. Cuoq, , Recueil. 67.Google Scholar
68 Barth, H., Travels and Discoveries. éd. Harper, (centenary edition), ii, 582.Google Scholar
69 L'historien notera avec intérêt que le phénomène dūguwa se rencontre seulement au Kanem, et non pas au Bornu où les Sēfuwa se sont retirés sous le règne de ′Umar b. Idrīs (c. 1382–7). Cette différence peut sans doute s'expliquer par le fait qu'à la fin du XIVe siècle il n'existait plus de kanuriphones païens, et que le clivage fondamental entre musulmans et ‘païens’ avait pris la form—d'après ce qui précède vraisemblablement depuis le XIIIe siècle—d'une opposition entre Kanuri (ou plus exactement ‘protokanuriphone’) et kirdi, seuls ces derniers pouvant être réduits en esclavage.
70 On préfèrera cette définition à celle qui fait des Zaghāwa une ‘aristocratie dominante’ ou une ‘caste supérieure’ (cf. Chronologie, 113–29).Google Scholar