Le Français commun dit régulièrement, comme chacun sait, C’est le plus beau blé qu’il yAITsur le marché, construisant au subjonctif le verbe de la proposition subordonnée. Un trait du parler populaire de la région de Québec — observé aussi ailleurs au Canada français — consiste à substituer ici au subjonctif, lorsque le verbe est un verbe d’existence, un indicatif accompagné de la négation (réduite à pas) et à dire: C’est le plus beau blé qu’il y A PAS sur le marché.
Cet emploi en apparence aberrant de la négation est-il une innovation du français canadien ou représente-t-il, au contraire, l’usage ancien d’un des divers parlers régionaux français apportés en Nouvelle-France aux XVIIe et XVIIIe siècles? Ce n’est pas notre intention d’éclairer ce point d’histoire. Notre propos est tout différent. Prenant acte des deux usages observés et de leur divergeance, nous démontrerons—en nous appuyant, pour ce faire, sur l’analyse psychomécanique du langage du linguiste français Gustave Guillaume — que, en face de la nuance de pensée à exprimer, les deux manières de dire s’équipollent, la négation d’une forme verbale indicative produisant en l’occurrence le même effet de sens que l’emploi affirmatif d’une forme de subjonctif.