L’étude de la genèse des langues créoles fait partie de la problématique plus générale d’une théorie de la variation et du changement linguistique dans les langues naturelles. Même si la genèse des langues créoles se démarque de la genèse des autres langues, tant par les circonstances historiques dans lesquelles elles se développent, que par les dérivations linguistiques qui les caractérisent, l’origine des langues créoles doit être expliquée à l’intérieur du même cadre que les autres langues. Cependent, étant donné les propriétés uniques de leur origine, l’étude des langues créoles offre une contrainte de plus sur la forme de la théorie linguistique en générale. Ce qui est unique et extraordinaire à propos des langues créoles c’est surtout le partage systématique de leurs propriétés par rapport aux propriétés de leurs langues sources. Il existe une théorie de la genèse des langues qui permet d’expliquer la systématicité de ce partage: la relexification Nous montrerons que cette théorie fournit les bases d’une explication du processus de formation des langues créoles. Cet article a pour objectif de construire une théorie de la genèse du créole haïtien qui soit explicative des faits linguistiques et qui soit compatible avec les faits historiques qui prévalaient lors de sa formation. Nous constatons qu’une telle théorie doit être révélatrice de la nature de la grammaire universelle qui définit la forme des langues naturelles.

This paper summarizes the findings of an extensive study of Haitian Creole morphology as compared with that of contributing languages: French, the lexifier language, and Fon, the West African language selected as the substratum language. The proposal we want to argue for in this paper is that, although the phonetic matrices of Haitian Creole lexical items are recognizable as being from French, at a more abstract level the productive affixes of Haitian Creole pattern in a significant way with the model of contributing West African languages, in this case Fon. This being the case, the widespread assumption in the creole literature that creole languages have undergone morphological simplification is not borne out by the Haitian data (cf. several discussions on this topic in Hymes 1971).

Les composés du créole haïtien fournissent à première vue une confirmation directe de l’hypothèse de relexification telle que définie par Lefebvre et Lumsden (1989). D’une part, ils partagent des propriétés phonétiques de la langue du superstrat, le français. On trouve done des composés dans ces deux langues constitués de séquences phonétiques pratiquement identiques:

En créole haïtien (CH), l’agglutination du déterminant dans certains items lexicaux empruntés au français réalise des paires minimales révélant dans la plupart des cas une distinction sémantique évidente entre la forme à déterminant préfixé et sa correspondante non agglutinée. Ceci est illustré dans l’opposition établie entre listoua ‘histoire’ et istoua ‘une histoire’. Quelle est la source d’un tel type de distinction?

Pour Baker (1984, 1986), la fréquence d’apparition d’un article particulier devant certains noms du français plutôt que d’autres constitue une condition préliminaire ayant favorisé l’agglutination du déterminant. L’influence de la structure morphologique des langues sources permet, quant à elle, d’expliquer l’inégale répartition de ce phénomène dans les différents créoles à base lexicale française.

Since the paper by Jansen et al (1978), it is a well-known fact that serializing languages divide into two major groups: those which have Take-serial constructions and those which don’t. Haitian creole has Take-serial constructions, as exemplified in (l):

1. (1) Jan pran kabrit ale nan mache

2. John take goat go in market

3. ‘John brought the goat in the market.’

Among the languages which have Take-serial constructions, languages further divide into two groups: those which have instrumental Take constructions and those which do not. An example of an instrumental Take-serial construction is provided in (2). In these constructions, the subject of the second verb is interpreted as the instrument of the complex predicate formed by the series of verbs.

Métif is a language spoken in the Canadian prairie provinces and the American prairie states bordering Canada. There are probably between 3000 and 5000 people who speak Métif as their first language, most of them of advanced age. They are living mostly in scattered Métis settlements. The Métis are a nation of mixed Amerindian and European descent. From the 17th century on French Canadian fur traders and voyageurs travelled west-wards from French Canada. Many of them married Amerindian women, who were often Cree speaking. Around 1860 the Métis were the largest population group of the Canadian West, many of them multilinguals. From the first decades of the 19th century the Métis started to consider themselves as a separate ethnic group, neither European nor Amerindian (see e.g., Peterson and Brown 1985). The Métis are still a distinct people. The Métis nowadays often speak Cree, Ojibwa, Métif, French and English or a combination of these. They often speak particular varieties of these languages. Not only is the French spoken by the Métis markedly different from other North American French dialects the language called Métif is uniquely spoken among the Métis people. For more information on Métif and Métis languages, see the publications listed in Bakker (1989).

Substratal influences as an explanation for creolization (and language change generally) often fail to convince for one major reason, namely that, in most cases, the possible substratum for a given creole language is now separated from the site where creolization took place by a wide historical and geographical gap. This, for example, is the case of the West African languages vis-à-vis the Caribbean Creoles.