D'ordinaire la démographie analyse la migration en tant que telle, cherchant à décrire la direction, l'intensité et la composition de ses flux, ainsi qu'à retracer ses causes et ses effets. C'est dans une perspective différente que nous nous proposons de porter l'attention sur elle, en l'étudiant non pas en tant qu'objet en soi, mais comme un outil permettant d'observer d'autres phénomènes, qui ne sont pas nécessairement de nature démographique.
La dimension de la migration qui est ici considérée est d'ordre biographique. La démographie se préoccupe en priorité de l'aspect physique des mouvements migratoires. Sa pratique la plus courante, l'analyse statistique, renforce naturellement cette tendance. Elle réduit les migrants à un ensemble prédéterminé de variables, et dissocie ces variables individuelles les unes des autres, négligeant le plus souvent les articulations qui les unissent et qui, seules, leur donnent sens. Au contraire, nous entendons examiner la migration en tant que créatrice pour l'individu d'un différentiel spatial, et observer comment la perception de ce différentiel se répercute sur le migrant et influe sur ses comportements.