L'idée qui sous-tend l'ouvrage de Margaret C. Jacob est que le mouvement des Lumières comporte dès ses origines deux variantes intellectuelles, deux tendances politiques. L'une, qu'illustre la grande figure de Voltaire, est « royaliste », déiste sans être pour autant antichrétienne et fondamentalement « newtonienne » : elle reconnaît au Dieu omniscient et providentiel, à la fois très lointain et très proche, le double rôle de coordonnateur et de conservateur de l'ordre cosmique. Elle se fait prédicatrice de la science nouvelle en Europe, sans jamais remettre en cause l'institution monarchique, même si elle ne lui ménage pas ses critiques.
L'autre est « radicale » : panthéiste, matérialiste et républicaine, sinon de fait du moins par idéal. Elle est à la fois égalitaire dans ses principes et internationale par ses ramifications ; comme l'est à cette époque la franc-maçonnerie naissante avec laquelle, nous dit l'auteur, elle ne serait pas sans rapports.
L'essentiel du livre porte sur cette seconde version encore peu connue des Lumières, dont il analyse les origines intellectuelles et politiques avant d'en retracer l'évolution.