Published online by Cambridge University Press: 04 August 2021
L’une des caractéristiques des Annales depuis leurs débuts est de publier des travaux qui proviennent ou qui portent sur d’autres régions du monde. Or il existe bien des manières d’envisager et de conduire un tel positionnement éditorial. Fondé sur l’analyse de la répartition géographique des terrains étudiés dans les articles de la revue sur les trente dernières années, cet essai propose une réflexion sur les manières dont celles et ceux qui ont fait les Annales ont pensé la place des différentes histoires et historiographies du monde dans un projet intellectuel en recomposition permanente. En s’appuyant sur certains textes théoriques ou programmatiques publiés par la revue à partir des années 1990, en les replaçant dans leurs moments institutionnels et historiographiques, mais aussi en éclairant certains des courants que les Annales n’ont pas accompagnés, l’article suggère que les attendus intellectuels mis en œuvre par le comité éditorial insistent en réalité sur une inscription documentaire forte des articles et le croisement des traditions historiographiques, et mettent au cœur de la réflexion la question des échelles d’analyse. C’est sans doute par ces expérimentations sur les échelles que les Annales cherchent le plus fortement à inclure la pluralité des histoires du monde dans un cadre intellectuel qui mette en œuvre une pratique généraliste (en termes de périodes historiques comme de diversité d’aires géographiques ou d’ouverture disciplinaire) défendant, à distance de l’exotisme de l’ailleurs, l’histoire comme science sociale à part entière.
One of the core characteristics of the Annales since their foundation has been to publish articles on, or from, all regions of the world. Yet there are many ways to understand such an editorial commitment. Based on an analysis of the geographical areas studied in articles over the past thirty years, this essay reflects on how the editorial board has conceived the place of diverse histories and historiographies within its larger intellectual project (itself in constant redefinition). Returning to certain theoretical texts published in the journal since the 1990s, placing them in their institutional and historiographical contexts, but also highlighting some of the trends the Annales have not accompanied, this article sketches some of the intellectual traits that emerge from this overview : an insistence on strong documentary evidence, the mobilization of plural historiographies, and a substantive reflection on the scales of analysis. Experimentation with scales appears in the editorial practice of the Annales as a privileged way to incorporate the plurality of the world’s histories into a common intellectual framework. Indeed, it is through this generalist perspective—in terms of periods, geographical regions, and scholarly disciplines—that the Annales seek to avoid the exoticization of far-away lands and instead defend history as a full-fledged social science.
1 Voir, dans le présent numéro, « Approche quantitative d’un projet intellectuel », p. 583-608.
2 Sur la critique des échelles qui se développe aujourd’hui, voir Christian G. De Vito, « Verso una microstoria translocale (micro-spatial history) », Quaderni storici, 50-3, 2015, p. 815-833.
3 Représentation « aplatie » à deux dimensions. On laisse ici de côté la problématique de l’échelle en architecture qui, à travers la pratique du modèle réduit, reproduit la tri-dimensionalité de l’espace.
4 Si beaucoup de travaux ont porté sur le « vol de l’histoire », pour reprendre le titre polémique de l’ouvrage de Jack Goody (Le vol de l’histoire. Comment l’Europe a imposé le récit de son passé au reste du monde, trad. par F. Durand-Bogaert, Paris, Gallimard, [2006] 2015), peu se sont préoccupés, en dehors du petit monde des historiens de la géographie, de ce « vol de l’espace » – tout du moins ne l’ont-ils pas formulé en ces termes. La monumentale History of Cartography, démarrée sous la direction de John Brian Harley et David Woodward à l’université du Wisconsin et qui compte six volumes en plusieurs tomes, est une entreprise unique par son ambition chronologique et spatiale. Pour ce qui concerne notre propos, voir en particulier David Woodward (dir.), The History of Cartography, vol. 3, Cartography in the European Renaissance, Chicago, The University of Chicago Press, 2 t., 2007, qui propose des analyses détaillées de la « révolution cartographique » européenne. Dans le domaine français, voir Isabelle Laboulais-Lesage (dir.), Combler les blancs de la carte. Modalités et enjeux de la construction des savoirs géographiques (xvi e -xx e siècle), Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2004 ; Hélène Blais et Isabelle Laboulais (dir.), Géographies plurielles. Les sciences géographiques au moment de l’émergence des sciences humaines (1750-1850), Paris, L’Harmattan, 2006 ; Jean-Marc Besse, Hélène Blais et Isabelle Surun (dir.), Naissances de la géographie moderne (1760-1860). Lieux, pratiques et formation des savoirs de l’espace, Paris, ENS Éditions, 2010. Tous ces travaux se développent sans lien direct avec les recherches de Bernard Lepetit, dont la réflexion cartographique trouve à s’exprimer dans les nombreux comptes rendus qu’il publie dans la revue entre 1980 et sa mort accidentelle en 1996.
5 Élaborée, entre autres, par Jacques Lévy et Michel Lussault et consignée notamment dans leur Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Paris, Belin, 2003, l’approche multi-scalaire est aujourd’hui largement diffusée chez les géographes, jusqu’à faire son entrée dans les programmes d’enseignement scolaire. En géo-archéologie, elle est aussi appliquée à des échelles temporelles.
6 Nicolas Verdier, « L’échelle dans quelques sciences sociales. Petite histoire d’une absence d’interdisciplinarité », in O. Orain et al., Échelles et temporalités en géographie, t. 2, Vanves, CNED, 2004, p. 25-56.
7 Rappelons que, si cet « héritage » a fait l’objet d’interprétations divergentes, à partir des Lumières européennes, dans les travaux de Theodor Mommsen, Fustel de Coulanges et d’autres, il s’est largement fondé sur l’exclusion de l’Orient antique, comme l’a montré Arnaldo Momigliano, Sagesses barbares. Les limites de l’hellénisation, trad. par M.-C. Roussel, Paris, F. Maspero, [1975] 1979 et, d’une autre manière, François Hartog, Anciens, modernes, sauvages, Paris, Galaade éditions, 2005.
8 Ces chiffres concernent les 1 100 articles publiés par les Annales entre 1990 et 2018 inclus, à l’exception des éditoriaux et des comptes rendus d’ouvrages. Certains articles portant sur plusieurs aires géographiques à la fois, la somme des pourcentages est supérieure à 100 %. Sur l’approche statistique de ce que publient les Annales, voir, dans le présent numéro, « Approche quantitative… », art. cit.
9 La notion de « lointain » vaut ici au sens spatial : elle désigne une distance par rapport au lieu de la production de la réflexion. La catégorie, souvent utilisée pour sa capacité d’évocation, reste problématique : non seulement elle suppose que le lointain est ailleurs dans l’espace, annihilant par là même toute saisie des formes d’éloignement social ou culturel, mais elle investit aussi ce lointain d’un parfum d’exotisme, contre lequel les sciences sociales ont cherché à se construire. Pour une réflexion sur ces questions, voir Alain Mahé et Kmar Bendana (dir.), Savoirs du lointain et sciences sociales, Saint-Denis, Éd. Bouchène, 2004 ou Gérard Lenclud, L’universalisme ou le pari de la raison. Anthropologie, histoire, psychologie, Paris, Éd. de l’EHESS/Gallimard, 2013, qui renvoient autant au débat français sur les « aires culturelles » qu’à la question, au sein des Annales, des liens entre histoire et sciences sociales (ici l’anthropologie). Dans les Annales, cette catégorie est travaillée dans le dossier intitulé « L’exercice de la comparaison », Annales HSS, 57-1, 2002, p. 27-144, une réflexion reprise, dix ans plus tard, dans l’entreprise collective Faire des sciences sociales, Paris, Éd. de l’EHESS, 2012, publiée en trois volumes : Pascale Haag et Cyril Lemieux (dir.), vol. 1, Critiquer ; Olivier Remaud, Jean-Frédéric Schaub et Isabelle Thireau (dir.), vol. 2, Comparer ; Emmanuel Désveaux et Michel de Fornel (dir.), vol. 3, Généraliser.
10 Sanjay Subrahmanyam, « Ceci n’est pas un débat… », Annales HSS, 57-1, 2002, p. 195-201, ici p. 195. Sanjay Subrahmanyam défend ici avec force l’approche d’histoire connectée dont son critique, le spécialiste de l’empire portugais Francisco Bethencourt, soulignait les limites et défendait la combinaison « d’autres échelles d’analyse, notamment l’histoire globale ou la micro-histoire, approches complémentaires pour l’analyse historique » dans Francisco Bethencourt, « Le millénarisme : idéologie de l’impérialisme eurasiatique ? » Annales HSS, 57-1, 2002, p. 189-194, ici p. 194.
11 Voir, dans le présent numéro, « Un collectif au travail », p. 537-554.
12 Karine Karila-Cohen et al. (dir.), no spécial « Histoire quantitative », Annales HSS, 73-4, 2018.
13 On ne se trouve donc pas ici dans le cadre des approches multi-sites telles qu’elles ont été proposées par les ethnologues. Voir, à ce propos, l’analyse et la réflexion méthodologique de Guillaume Calafat, « Jurisdictional Pluralism in a Litigious Sea (1590-1630): Hard Cases, Multi-Sited Trials and Legal Enforcement between North Africa and Italy », J.-P. Ghobrial (dir.), « Global History and Microhistory », Past & Present, 242, supplément 14, 2019, p. 142-178, ici p. 145. L’approche est reprise et abondamment commentée dans le même numéro par Christian G. De Vito, « History Without Scale: The Micro-Spatial Perspective », J. P. Ghobrial (dir.), Past & Present, 242, supplément 14, 2019, p. 348-372. On aura l’occasion d’y revenir à propos des échelles.
14 Dossier « Souveraineté et territoire (xix e-xx e siècle) », Annales HSS, 69-2, 2014, p. 307-467 ; dossier « Micro-analyse et histoire globale », Annales HSS, 73-1, 2018, p. 3-159 ; Étienne Anheim (dir.), no spécial « Archives », Annales HSS, 74-3/4, 2019. Bien plus tôt, c’était déjà le cas de certains numéros spéciaux : Yves Cohen et Dominique Pestre (dir.), no spécial « Histoire des techniques », Annales HSS, 53-4/5, 1998 ; Alice Ingold (dir.), no spécial « Environnement », Annales HSS, 66-1, 2011.
15 C’est ici toute la difficulté de l’exercice auquel se livre ce texte : il n’est pas possible de rendre compte des évolutions des trente dernières années à la seule lumière de la « politique éditoriale » de la revue. Il n’est cependant pas non plus possible de s’engager dans une étude globale du monde des revues, marqué par l’accélération de leur internationalisation et la victoire temporaire de la langue anglaise dans la production des sciences sociales.
16 Voir, dans le présent numéro, « Une revue en langues. Les défis d’une édition bilingue », p. 573-582.
17 Voir en particulier les dossiers suivants : « Histoire croisée », Annales HSS, 58-1, 2003, p. 7-36 ; « Une histoire à l’échelle globale », Annales HSS, 56-1, 2001, p. 3-123.
18 Parmi les travaux « internes », voir Jacques Revel et Nathan Wachtel (dir.), Une école pour les sciences sociales. De la VI e section à l’École des hautes études en sciences sociales, Paris, Éd. de l’EHESS/Éd. du Cerf, 1995 ; André Burguière, L’école des Annales. Une histoire intellectuelle, Paris, Odile Jacob, 2006 ; Jacques Revel, Un moment, des histoires, Paris, Éd. de l’EHESS, 2018, p. 91-118. En « externe », voir Peter Burke, The French Historical Revolution: The Annales School, 1929-89, Cambridge, Polity Press, 1990. Voir aussi, dans le présent numéro, « Entre revue et ‘école’. Les Annales en situation », p. 519-535.
19 Ces centres sont : l’Institut des mondes africains (IMAF), le Centre d’études de l’Inde et de l’Asie du Sud (CEIAS), Mondes américains, le centre Georg Simmel, pour les centres organisés autour d’aires géographiques ; le Centre d’études sociologiques et politiques Raymond-Aron (CESPRA), le Centre Alexandre Koyré (CAK), l’UMR Anthropologie et histoire des mondes antiques (ANHIMA), pour les centres organisés autour d’objets ou de périodes (tous ces centres étant, par ailleurs, interdisciplinaires).
20 Angelo Torre, « Geografie regolari. Problemi di ricerca e ipotesi di lavoro sugli ordini religiosi nel Piemonte fra Concilio di Trento e soppressioni postunitarie » et Maria Antonietta Visceglia « ‘Le pretensioni hano più capi dell’Hidra’: un bilancio sulla nobiltà romana », in S. Sebastiani et A. Romano (dir.), La forza delle incertezze. Dialoghi storiografici con Jacques Revel, Bologne, Il Mulino, 2016, respectivement p. 213-227 et 229-267. Voir, en outre, dans le présent numéro, Angelo Torre et Vittorio Tigrino, « Des historiographies connectées ? Les Annales, Quaderni storici et l’épreuve de l’histoire sociale », p. 681-692.
21 On notera la rapidité de l’exportation, dans le monde états-unien, du tournant critique : Lynn Hunt et Jacques Revel (dir.), Histories: French Constructions of the Past, trad. par A. Goldhammer et al., New York, The New Press, 1995, p. 479-484.
22 Introduction, « Une histoire à l’échelle globale », Annales HSS, 56-1, 2001, p. 3-4, ici p. 4, reproduite dans le présent numéro : « 90 ans d’éditoriaux », p. 725-796.
23 Bernard Lepetit (dir.), Les formes de l’expérience. Une autre histoire sociale, Paris, Albin Michel, 1995 ; Jacques Revel (dir.), Jeux d’échelles. La micro-analyse à l’expérience, Paris, Gallimard/Éd. du Seuil, 1996. Si, dans les deux volumes, la question des échelles de l’analyse est présente, elle revient comme le nœud de plusieurs contributions du volume de 1996 : Bernard Lepetit, « De l’échelle en histoire », Alban Bensa, « De la micro-histoire vers une anthropologie critique », Maurizio Gribaudi, « Échelle, pertinence, configuration » et Paul-André Rosental, « Construire le ‘macro’ par le ‘micro’ : Fredrik Barth et la microstoria », in J. Revel (dir.), Jeux d’échelles, op. cit., respectivement p. 71-94, 37-70, 113-139 et 141-159. On renverra aussi à Bernard Lepetit, « Architecture, géographie, histoire : usages de l’échelle », Genèses, 13, 1993, p. 118-138, dont le texte constitue la version développée de l’article de 1996. Pour une réflexion sur le rôle personnel de Jacques Revel dans cette contribution, voir Lynn Hunt, « Jacques Revel and the Question of Scale », in S. Sebastiani et A. Romano (dir.), La forza delle incertezze, op. cit., p. 35-45. Pour les propositions expérimentales de B. Lepetit, voir les différentes notes critiques publiées dans la revue : Bernard Lepetit, « L’échelle de la France », Annales ESC, 45-2, 1990, p. 433-443 ; id., « Une logique du raisonnement historique (note critique) », Annales ESC, 48-5, 1993, p. 1209-1219 ; id., « Le travail de l’histoire (note critique) », Annales HSS, 51-3, 1996, p. 525-538.
24 Introduction, « Une histoire à l’échelle globale », art. cit., p. 4. Dans l’introduction du volume collectif de 1996, J. Revel écrit : « Saisie au ras du sol, l’histoire d’un ensemble social se disperse, en apparence, en une myriade d’événements minuscules, difficiles à organiser. La conception traditionnelle de la monographie cherche à le faire en se donnant pour tâche la vérification locale d’hypothèses et de résultats généraux. Le travail de contextualisation multiple pratiqué par les micro-historiens part de prémisses très différentes. Il pose, en premier lieu, que chaque acteur historique participe, de façon proche ou lointaine, à des processus – et donc s’inscrit dans des contextes – de dimensions et de niveaux variables, du plus local au plus global. […] Ce que l’expérience d’un individu, d’un groupe, d’un espace permet de saisir, c’est une modulation particulière de l’histoire globale. Particulière et originale car ce que le point de vue micro-historique offre à l’observation, ce n’est pas une version atténuée, ou partielle, ou mutilée de réalités macro-sociales : c’en est […] une version différente » (Jacques Revel, « Micro-analyse et construction du social », in J. Revel [dir.], Jeux d’échelles, op. cit, p. 15-36, ici p. 26).
25 Dans l’espace intellectuel français, les articles consacrés aux subaltern studies sont publiés ailleurs et tardivement : voir par exemple Jacques Pouchepadass, « Les Subaltern Studies ou la critique postcoloniale de la modernité » et, sur la globalisation, Jean-Loup Amselle, « La globalisation. ‘Grand partage’ ou mauvais cadrage ? », J. Assayag et V. Bénéï (dir.), no spécial « Intellectuels en diaspora et théories nomades », L’Homme, 156, 2000, respectivement p. 161-186 et 207-226. Jacques Pouchepadass contribue toutefois régulièrement aux Annales, principalement à travers des comptes rendus – 13 entre 1973 et 1991. Voir aussi Isabelle Merle, « Les Subaltern Studies. Retour sur les principes fondateurs d’un projet historiographique de l’Inde coloniale », Genèses, 56, 2004, p. 131-147. De la même manière, les travaux portant sur l’écriture de l’histoire, comme l’entreprise collective de la Oxford History of Historical Writing, dont les volumes 3 (1400-1800), 4 (1800-1945) et 5 (depuis 1945), parus entre 2012 et 2015, sans aucun auteur français, n’ont pas reçu d’écho particulier. Pour une approche quantitative de cette question dans les Annales, voir, dans ce numéro, « Approche quantitative… », art. cit.
26 Une abondante littérature se développe dans le cadre de revues à caractère théorique, dans le monde principalement anglophone ou hispanophone (moins visible), où ces questions sont travaillées. À titre d’exemples, voir les numéros spéciaux « Early Modernities », Dædalus, 127-3, 1998 et « Multiple Modernities », Dædalus, 129-1, 2000.
27 Johannes Fabian, Le temps et les autres. Comment l’anthropologie construit son objet, trad. par E. Henry-Bossonney et B. Müller, Toulouse, Anacharsis, [1983] 2006.
28 Voir, dans le présent numéro, « Après le tournant documentaire. Ce qui montre, ce qu’on montre », p. 425-446, ainsi que Nathalie Kouamé, Éric P. Meyer et Anne Viguier (dir.), Encyclopédie des historiographies : Afriques, Amériques, Asies, vol. 1, Sources et genres historiques, Paris, Presses de l’Inalco, 2020.
29 Citons, par exemple, le dossier sur le contrat salam, « Islam et développement économique », Annales HSS, 61-4, 2006, p. 863-940, ou le dossier « Écrire l’histoire de l’islam moderne et contemporain », Annales HSS, 73-2, 2018, p. 311-439, dans lequel la revendication d’une « islamologie historienne » invite à repenser les articulations du temps du religieux et de l’impérial : voir en particulier Augustin Jomier et Ismail Warscheid, « Pour une islamologie historienne » et Catherine Mayeur-Jaouen, « ‘À la poursuite de la réforme’. Renouveaux et débats historiographiques de l’histoire religieuse et intellectuelle de l’islam, xv e-xxi e siècle », Annales HSS, 73-2, 2018, respectivement p. 311-316 et 317-358. Voir aussi le dossier paru l’année précédente, « Temporalités du moment colonial », Annales HSS, 72-4, 2017, p. 937-1083.
30 La revue ayant pour tradition de rubriquer son sommaire, tous les articles appartiennent à des « dossiers », qui se réduisent donc parfois à un seul article. Il existe toutefois des dossiers particulièrement volumineux, souvent composés de quatre articles ou plus, qui avaient ou auraient pu avoir vocation à faire des numéros spéciaux. Pour l’analyse qui suit, ces différents types de dossiers sont embrassés ensemble.
31 Hiroyuki Ninomiya et Pierre-François Souyri (dir.), no spécial « L’histoire du Japon sous le regard japonais », Annales HSS, 50-2, 1995 : voir en particulier, dans ce numéro, Hiroyuki Ninomiya et Pierre-François Souyri, « Présentation », p. 227-233.
32 Dossier « La société allemande, xvii e-xix e siècles », Annales HSS, 50-4, 1995, p. 719-802, qui, par ailleurs, permettait de présenter les appropriations allemandes de la micro-histoire ; no spécial « Histoire sociale de la RDA », Annales HSS, 53-1, 1998.
33 Dossiers « Chiapas » et « Quel américanisme aujourd’hui ? », Annales HSS, 57-5, 2002, respectivement p. 1251-1289 et 1293-1355 ; dossier « Politique et contrôle de l’eau dans le Moyen-Orient ancien », Annales HSS, 57-3, 2002, p. 517-663 ; Pierre Chuvin et Jacques Poloni-Simard (dir.), no spécial « Asie centrale », Annales HSS, 59-5/6, 2004 ; Angela Ki Che Leung (dir.), no spécial « Chine », Annales HSS, 61-6, 2006 ; Jacques Poloni-Simard (dir.), no spécial « Amériques coloniales. La construction de la société », Annales HSS, 62-3, 2007 ; Éloi Ficquet et Aïssatou Mbodj-Pouye (dir.), no spécial « Cultures écrites en Afrique », Annales HSS, 64-4, 2009 ; dossier « Les statuts sociaux au Japon (xvii e-xix e siècle) », Annales HSS, 66-4, 2011, p. 955-1077.
34 Claude Markovits, Jacques Pouchepadass et Sanjay Subrahmanyam, « La geste indianiste. Du saint guerrier aux héros paysans », Annales HSS, 60-2, 2005, p. 233-237, ici p. 233.
35 Guillaume Carré, « Les marges statutaires dans le Japon prémoderne : enjeux et débats », Annales HSS, 66-4, 2011, p. 955-976, ici p. 966.
36 Dossier « Processus d’urbanisation », Annales HSS, 59-1, 2004, p. 39-139.
37 Voir par exemple le dossier intitulé « Échanges et communautés », qui accueille un article de Judith Scheele, « L’énigme de la faggāra : commerce, crédit et agriculture dans le Touat algérien », Annales HSS, 67-2, 2012, p. 471-493.
38 Fernand Braudel, Grammaire des civilisations, Paris, Arthaud, 1987. On a déjà pointé plus haut l’intérêt de la notion dans une tradition des Annales au long cours. Une réflexion plus approfondie permettrait aussi, notamment à propos de Fernand Braudel, de mettre en perspective toute la réflexion et la recherche sur les zones de contacts, les territoires de rencontres, à l’image de ce qu’était, pour lui, l’espace méditerranéen.
39 C’est par exemple à la même époque que le CNRS dissout sa section orientaliste dans la section d’histoire moderne et contemporaine (généraliste).
40 C’est le cas de nombre des dossiers évoqués plus haut, qui n’ont toutefois jamais exclu un certain degré de spécialité, qu’elle soit linguistique ou technique.
41 Voir, à titre d’exemple, Benoît Grévin, « Langues et sociétés de l’Islam médiéval », Annales HSS, 70-3, 2015, p. 563-576.
42 Parmi les différentes entreprises, plusieurs histoires de l’Europe ont mobilisé les grands éditeurs européens et divers volumes collectifs ont rouvert le dossier. Voir entre autres Maria Antonietta Visceglia (dir.), Le radici storiche dell’Europa. L’età moderna, Rome, Viella, 2007 ; Anthony Molho, Diogo Ramada Curto et Niki Koniordos (dir.), Finding Europe: Discourses on Margins, Communities, Images, ca. 13th-ca. 18th centuries, New York, Berghahn Books, 2007.
43 On pense ici aux travaux d’Ann Laura Stoler, Along the Archival Grain: Epistemic Anxieties and Colonial Common Sense, Princeton, Princeton University Press, 2009, dont la traduction récente aux Éditions de l’EHESS (ead., Au cœur de l’archive coloniale. Questions de méthode, trad. par C. Jaquet et J. Gross, Paris, Éd. de l’EHESS, 2019) témoigne de l’acclimatation en France des réflexions post-coloniales.
44 Voir notamment le dossier « Une histoire à l’échelle globale », Annales HSS, 56-1, 2001, p. 3-123.
45 Dipesh Chakrabarty, Provincializing Europe: Postcolonial Thought and Historical Difference, Princeton, Princeton University Press, 2000 (traduction française : id., Provincialiser l’Europe. La pensée postcoloniale et la différence historique, trad. par O. Ruchet et N. Vieillescazes, Paris, Éd. Amsterdam, [2000] 2009). Formé d’abord en physique (BSc degree à l’université de Calcutta), ayant obtenu un MBA en Management à Calcutta, puis un PhD en histoire à la Australian National University, spécialiste de l’histoire contemporaine de l’Asie du Sud, dans une perspective subalterniste, l’auteur est alors professeur au département d’histoire de l’université de Chicago.
46 Voir, dans le présent numéro, le compte rendu par Romain Bertrand de Provincialiser l’Europe de Dipesh Chakrabarty, p. 821-826.
47 Voir Jacques Poloni-Simard (dir.), no spécial « Amériques coloniales. La construction de la société », Annales HSS, 62-3, 2007 ; no spécial « Empires », Annales HSS, 63-3, 2008, qui inclut une remise en cause de la catégorie « études coloniales » par Jean-Frédéric Schaub, « La catégorie des ‘études coloniales’ est-elle indispensable ? », Annales HSS, 63-3, 2008, p. 625-646 ; dossiers « L’Atlantique français », Annales HSS, 64-5, 2009, p. 985-1050 et « Histoire atlantique », Annales HSS, 67-2, 2012, p. 327-413, ce dernier comprenant un article de Cécile Vidal, « Pour une histoire globale du monde atlantique ou des histoires connectées dans et au-delà du monde atlantique ? », Annales HSS, 67-2, 2012, p. 391-413, qui répond, entre autres, à celui de Jean-Frédéric Schaub.
48 Jocelyne Dakhlia, « La ‘culture nébuleuse’ ou l’Islam à l’épreuve de la comparaison », Annales HSS, 56-6, 2001, p. 1177-1199, ici p. 1183.
49 Ead., « La question des lieux communs. Des modèles de souveraineté dans l’islam médiéval », in B. Lepetit (dir.), Les formes de l’expérience, op. cit., p. 39-62.
50 Marc Bloch, « Pour une histoire comparée des sociétés européennes », Revue de synthèse historique, 46, 1928, p. 15-50, réédité dans id., Mélanges historiques, vol. 1, Paris, S.E.V.P.E.N., 1963, p. 16-40 et dans id., Histoire et historiens, Paris, Armand Colin, 1995, p. 94-123. Parmi les gloses, voir Maurice Aymard, « Histoire et comparaison », Aleksander Gieysztor, « Le comparatisme en histoire » et Lucette Valensi, « Retour d’Orient. De quelques usages du comparatisme en histoire », in H. Atsma et A. Burguière (dir.), Marc Bloch aujourd’hui. Histoire comparée et sciences sociales, Paris, Éd. de l’EHESS, 1990, respectivement p. 271-278, 255-258 et 307-316 ; Nancy L. Green, « L’histoire comparative et le champ des études migratoires », Annales ESC, 45-6, 1990, p. 1335-1350.
51 C’est ce dont témoigne, dans la revue et à travers son travail, la contribution de Michaël Werner, à partir du milieu des années 1980 et de son premier article, co-signé, publié dans les Annales : Michel Espagne et Michaël Werner, « La construction d’une référence culturelle allemande en France : genèse et histoire (1750-1914) », Annales ESC, 42-4, 1987, p. 969-992, article fondateur de la recherche sur les transferts culturels. La fécondité de la piste, sur le versant français, est rappelée, la décennie suivante, par Sandrine Kott et Thierry Nadau, « Pour une pratique de l’histoire sociale comparative. La France et l’Allemagne contemporaines », Genèses, 17, 1994, p. 103-111.
52 Voir les contributions au volume de Michael Werner et Bénédicte Zimmermann (dir.), De la comparaison à l’histoire croisée, Paris, Éd. du Seuil, 2004.
53 Michael Werner et Bénédicte Zimmermann, « Penser l’histoire croisée : entre empirie et réflexivité », Annales HSS, 58-1, 2003, p. 7-36, ici p. 21-23.
54 Parmi les articles des Annales s’étant confrontés aux outils de l’histoire croisée, on peut citer : Catarina Madeira Santos, « Entre deux droits. Les Lumières en Angola (1750-v. 1800) », Annales HSS, 60-4, 2005, p. 817-848 ; Ludovic Tournès, « La fondation Rockefeller et la construction d’une politique des sciences sociales en France (1918-1940) », Annales HSS, 63-6, 2008, p. 1371-1402 ; Markus Messling, « Philologie et racisme. À propos de l’historicité dans les sciences des langues et des textes », Annales HSS, 67-1, 2012, p. 153-182 ; C. Vidal, « Pour une histoire globale du monde atlantique… », art. cit. ; Nathalie Clayer, « Les espaces locaux de la construction étatique à l’aune du cas albanais (1920-1939) », Annales HSS, 69-2, 2014, p. 415-438. On notera la variété des échelles spatiales en question.
55 Voir Christopher L. Hill, « Conceptual Universalization in the Transnational Nineteenth Century », in S. Moyn et A. Sartori (dir.), Global Intellectual History, New York, Columbia University Press, 2013, p. 134-158, ici p. 146.
56 Voir notamment The Cambridge World History, comprenant à ce jour sept volumes, et dont le sixième a fait l’objet d’un compte rendu : Antonella Romano, « Jerry H. Bentley, Sanjay Subrahmanyam et Merry E. Wiesner-Hanks (dir.), The Cambridge World History, vol. 6, The Construction of a Global World, 1400-1800 CE, t. 1, Foundations, t. 2, Patterns of Change (compte rendu) », Annales HSS, 73-1, 2018, p. 229-233. Pour les revues, voir notamment le Journal of World History, dès 1990, et le Journal of Global History, depuis 2006.
57 Dossier « Une histoire à l’échelle globale », ensembles « Braudel et l’Asie » et « Temps croisés, mondes mêlés », Annales HSS, 56-1, 2001, respectivement p. 5-50 et 51-123.
58 Le texte liminaire précise que « [l]es articles publiés sont issus d’une journée d’études : ‘Penser le monde’, organisée le 10 mai 2000 à l’EHESS, par Serge Gruzinski et Sanjay Subrahmanyam » (Introduction, « Une histoire à l’échelle globale », art. cit., p. 3).
59 Celles qui sont héritées de l’histoire coloniale ou impériale articulent le plus souvent le binôme centre/périphérie (par définition hiérarchisant, ce qui a alimenté la critique du modèle diffusionniste, paradigme historique de l’histoire européo-centrée) ou métropole/colonie.
60 La note de Maurice Aymard, « De la Méditerranée à l’Asie : une comparaison nécessaire (commentaire) », Annales HSS, 56-1, 2001, p. 43-50, est l’analyse d’un ouvrage, Peregrine Horden et Nicholas Purcell, The Corrupting Sea: A Study of Mediterranean History, Oxford, Blackwell, 2000, qui ne cesse de dialoguer avec F. Braudel en proposant un modèle d’analyse régionale fondé sur l’idée de connectedness.
61 Introduction, « Une histoire à l’échelle globale », art. cit., p. 3.
62 Ibid., p. 3.
63 Ibid., p. 4.
64 Ibid. ; Denys Lombard, Le carrefour javanais. Essai d’histoire globale, Paris, Éd. de l’EHESS, 3 vol., 1990. Le sous-titre « Essai d’histoire globale » n’est pas reporté dans la note de Maurice Aymard citée infra.
65 Sur ce point, voir Sebastian Conrad, What is Global History?, Princeton, Princeton University Press, 2016, chap. 5 et 8, et les questions que suscite une synthèse de ce type. Le problème n’est pas davantage formulé dans les nombreux travaux de S. Subrahmanyam, dont on retiendra notamment Explorations in Connected History: From the Tagus to the Ganges, Delhi, Oxford University Press, 2005, ou dans Muẓaffar ʿĀlam, Indo-Persian Travels in the Age of Discoveries, 1400-1800, Cambridge, Cambridge University Press, 2007.
66 Voir sur ce point, la réflexion de S. Subrahmanyam, dans la préface à la version française de son recueil de textes, Comment être un étranger. Goa-Ispahan-Venise, xvi e -xviii e siècles, trad. par M. Dennehy, Paris, Alma éditeur, [2011] 2013, p. 9-15, ici p. 13 : « Pour situer cet ouvrage dans son contexte, quelques réflexions supplémentaires s’imposent. Dans les années 1990, à l’époque où l’historiographie française cédait à l’engouement pour la micro-storia italienne, j’ai exprimé un certain scepticisme (ainsi que bien d’autres spécialistes du monde extra-européen, dont Denys Lombard et Serge Gruzinski) face aux prétentions ‘universalistes’ de ce genre. Comme Francesca Trivellato l’a fait remarquer lors de la parution en anglais du présent ouvrage, j’ai été amené à revoir mon point de vue : il me semble désormais possible, et même souhaitable, d’établir un rapprochement entre histoire ‘connectée’ ou ‘globale’ et micro-histoire. Cela suppose néanmoins que l’on rende justice à la complexité des archives disponibles et à la diversité des contextes historiographiques. »
67 Voir à ce sujet, dans le présent numéro, « Une revue en langues », art. cit.
68 Barbara Cassin (dir.), Vocabulaire européen des philosophies. Dictionnaire des intraduisibles, Paris, Éd. du Seuil/Le Robert, 2004.
69 Parmi les manuels d’histoire globale, outre Sebastian Conrad, cité ci-dessus, on retiendra Alessandro Stanziani, Les entrelacements du monde. Histoire globale, pensée globale, Paris, CNRS Éditions, 2018 ; Bartolomé Yun Casalilla, Iberian World Empires and the Globalization of Europe 1415-1668, Singapour, Palgrave Macmillan, 2019. Sur l’articulation de la critique de la microhistoire et de ses effets sur le rôle de l’histoire, voir le dossier des Annales sur « La longue durée en débat », Annales HSS, 70-2, 2015, p. 285-378.
70 Le texte de commentaire aux deux articles de S. Gruzinski et S. Subrahmanyam est rédigé par Roger Chartier, qui rappelle que l’un des cadres du débat est celui du 19e congrès international des sciences historiques d’Oslo en 2000, où la question du global est à l’ordre du jour : Roger Chartier, « La conscience de la globalité (commentaire) », Annales HSS, 56-1, 2001, p. 119-123. Il rappelle aussi l’aversion de S. Gruzinski pour la microhistoire, car « elle fait négliger le lointain » (p. 119). R. Chartier n’en est pas moins particulièrement critique sur les problèmes de méthode que posent les deux textes.
71 Dossier « Size Matters: Scales and Spaces in Transnational and Comparative History », The International History Review, 33-4, 2011, p. 573-728 ; Sebouh David Aslanian et al., « AHR Conversation. How Size Matters: The Question of Scale in History », The American Historical Review, 118-5, 2013, p. 1431-1472, ici p. 1468-1469 ; dossier « Produzione di saperi. Costruzione di spazi », Quaderni storici, 48-1, 2012, p. 3-193 ; C. G. De Vito, « Verso una microstoria translocale (micro-spatial history) », art. cit. Pour une bibliographie récente sur ce thème, voir les nombreuses références suggérées par Romain Bertrand et Guillaume Calafat, « La microhistoire globale : affaire(s) à suivre », Annales HSS, 73-1, 2018, p. 3-18.
72 À titre d’exemple, citons la fondation, en 2016, des revues Global Intellectual History, Journal of Global Slavery et Global Humanities: Studies in Histories, Cultures, and Societies. On peut aussi renvoyer à Thomas DaCosta Kaufmann, Catherine Dossin et Béatrice Joyeux-Prunel (dir.), Circulations in the Global History of Art, Londres, Routledge, 2015 ou encore à S. Moyn et A. Sartori (dir.), Global Intellectual History, op. cit.
73 Voir en particulier le dossier « Réseaux marchands », Annales HSS, 58-3, 2003, p. 569-672 et, notamment, Francesca Trivellato, « Juifs de Livourne, Italiens de Lisbonne, hindous de Goa. Réseaux marchands et échanges interculturels à l’époque moderne », p. 581-603. L’introduction du volume, par un spécialiste de Florence et de la Renaissance (Anthony Molho) et un spécialiste de l’empire portugais (Diogo Ramada Curto), tous deux professeurs au département d’histoire et civilisation de l’Institut universitaire européen, à Florence, inscrit la réflexion sur les réseaux marchands dans le sillage braudélien, mais avec un objectif précis : « comment [sa lecture] peut-elle contribuer à une nouvelle approche de l’histoire globale de l’Europe moderne ? » (Anthony Molho et Diogo Ramada Curto, « Les réseaux marchands à l’époque moderne », Annales HSS, 58-3, 2003, p. 569-579, ici p. 569).
74 Les travaux marquants sont rappelés dans le dossier « Micro-analyse et histoire globale », ouvert par la longue analyse de R. Bertrand et G. Calafat, « La microhistoire globale : affaire(s) à suivre », art. cit., p. 13. Voir également George E. Marcus, « The Ambition of Fieldwork », Terrains/Théories, 5, 2016, DOI : https://doi.org/10.4000/teth.856.
75 Voir, dans le présent numéro, « Après le tournant documentaire », art. cit.
76 Les jeux d’échelles ont trouvé un débouché réflexif certes hors des Annales, mais dans leur proximité intellectuelle : voir Jean-Claude Passeron et Jacques Revel (dir.), Penser par cas, Paris, Éd. de l’EHESS, 2005, paru dans la collection « Enquête ». D’abord revue, puis collection, cet espace éditorial a régulièrement accompagné les Annales dans leur mise en réflexivité des sciences sociales. On se réfère par exemple à Bernard Walliser (dir.), La cumulativité du savoir en sciences sociales, Paris, Éd. de l’EHESS, 2010, suivi de Bernard Walliser (dir.), La distinction des savoirs, Paris, Éd. de l’EHESS, 2015.
77 M. Werner et B. Zimmermann, « Penser l’histoire croisée : entre empirie et réflexivité », art. cit., p. 28.
78 Éloi Ficquet et Aïssatou Mbodj-Pouye, « Cultures de l’écrit en Afrique. Anciens débats, nouveaux objets », É. Ficquet et A. Mbodj-Pouye (dir.), no spécial « Cultures écrites en Afrique », Annales HSS, 64-4, 2009, p. 751-764, ici p. 751. Les auteurs, qui introduisent les articles de Catarina Madeira Santos, de Camille Lefebvre et de Pascale Barthélémy, ne manquent pas d’indiquer, dans la première note de leur texte, que le dernier dossier des Annales consacré à l’Afrique remonte alors à 1985 : « Dans les Annales, outre la publication régulière d’articles ayant trait à l’Afrique, le seul dossier consacré au continent est paru en novembre-décembre 1985, sous le titre : ‘L’Afrique : un autre espace historique’, sous la direction de Marc Augé, Jean-Pierre Chrétien et Claude-Hélène Perrot, reprenant un projet initié par Yves Person » (Marc Augé, Jean-Pierre Chrétien et Claude-Hélène Perrot [dir.], no spécial « L’Afrique : un autre espace historique », Annales ESC, 40-6, 1985).
79 C’est pourquoi il serait important de revenir sur les usages trop commodes de la notion de « contexte », insuffisamment interrogée dans la perspective qui nous intéresse ici.
80 Sur ces articulations, voir le numéro spécial coordonné par Alice Ingold et son introduction « Écrire la nature. De l’histoire sociale à la question environnementale ? », no spécial « Environnement », Annales HSS, 66-1, 2011, p. 11-29. Voir aussi les dossiers « La longue durée en débat » et « Histoire des sciences », Annales HSS, 70-2, 2015, respectivement p. 285-378 et 381-435, et le dossier « Anthropocène », Annales HSS, 72-2, 2017, p. 263-378.
81 C. G. De Vito, « History Without Scale », art. cit. Vaste et détaillée, cette critique se joue parfois de la chronologie et des contextes de production du concept d’échelle.
82 R. Bertrand et G. Calafat, « La microhistoire globale : affaire(s) à suivre », art. cit. Certains de ces projets sont aussi présentés dans les comptes rendus, qui ont été laissés à l’écart de cette réflexion, mais dont la lecture invite à nuancer les propos que nous soumettons aux lecteurs, tout en rappelant la part contingente et pragmatique de la fabrique d’une revue.