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Aux Origines d'une Crise Nobiliaire : Donations Pieuses et Pratiques Successorales en Bordelais du XIIIe au XVIe Siècle1

Published online by Cambridge University Press:  25 October 2017

Robert Boutruche*
Affiliation:
Strasbourg, Université
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Un film d'images saisissantes se déroule sous les yeux de l'observateur curieux de suivre le développement de la crise nobiliaire au crépuscule du Moyen Age. Au premier plan, les dévastations de la Guerre de Cent Ans, dont les textes décomposent en un rythme obsédant les éléments dramatiques : le château-fort du seigneur d'Arbanats, « à une demi-journée de Bordeaux », a été rasé ; des pillards ravagent quotidiennement ses dépendances et les paysans n'osent plus revenir labourer leurs champs ; « le lieu de Gaumont, en Bazadais, est tout détruit » ; la chûtellenie de Rauzan, « sur la frontière de nos ennemis, ne vaut pas trente livres par an »… Non moins brutales, les confiscations réalisées aux dépens des « rebelles », — de Bérard III d'Albret par exemple, dont les biens « sont mis entièrement dans la main du Roi d'Angleterre » et distribués à ses fidèles.

Type
Enquêtes
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1939

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Footnotes

1

Pour l'inventaire général de la documentation, le lecteur voudra bien se reporter à l'Orientation bibliographique, placée à la fin de l'article. Les textes signalés sans indication du dépôt proviennent des Archives départementales de la Gironde.

References

page 161 note 2. Bibliothèque Nationale, Collection Bréquigny, t. 655, p. 147 et 177 ; t. 657, p. 85 ; Archives historiques de la Gironde (A. H. G.), IV, 110, et XXI, 130 et suiv. (années 1343-1438).

page 162 note 1. Nous aurions pu songer à limiter nos investigations au territoire des Anciennes Coutumes de Bordeaux, qui était celui du diocèse et de la sénéchaussée du même nom. Mais, à nos yeux, le Bordelais médiéval n'est pas une division religieuse ou administrative. C'est une entité économique dont l'exploitation de la vigne — sans préjudice de cultures secondflires — forme le ciment. Il est représenté essentiellement pair Bordeaux et ses environs, le Médoc et les Graves jusqu'à la limite de la forot, le Libournais, le Sainl-Emilionrvais, le Bourges et le Blayais, enfin tout TF.ntre-'Deux-Mers. Or, ce dernier pays mordait largement sur l'ancien diocèse de Bazas, dont les coutumes différaient de celles de Bordeaux. Nos observations s'éltendront donc aux usages bazadais.

page 162 note 2. A. H. G., IV, 136 (28 octobre 1375).

page 163 note 1. A. H. G., VI, 152 (11 août 1461).

page 163 note 2. Jbid., X, 484 (10 avril 1379). Les citations entre guillemets de la présente page et dès suivantes ont été recueillies dans les testaments. (Of. Orientation bibliographique, III.)

page 163 note 3. Coll. Doat, t. 43, p. 108 (1337).

page 163 note 4. A. H. G., XXVI, 230 (1338).

page 163 note 5. G. 1726, f° 62 (18 mars 1457).

page 164 note 1. Une messe solennelle est toujours exigée une semaine, un mois et un an après le décès. Le cérémonial en est ordonné avec le même soin qu© celui des obsèques. Dispositions identiques en ce'qui concerne ‘les anniversaires perpétuels, à l'occasion desquels la plupart des testateurs prévoient aussi des « pitances » pour les célébrants et les membres de leur institution : en l'espèce des suppléments destinés à corser leur menu du jour.

page 164 note 2. Certains exigent même une messe « chaque jour da l'année qui soit saint » (Coll. Doat, t. 42, p. 68, 1309). Le droit de patronage et de présentation du chapelain appartient aux héritiers du donateur.

page 164 note 3. A. H. G., X, 121 et 82 (mai 1460) ; XXVXI, 460 (juin 1481) et G. 2862, p. 1 à 4 (1480-1494). Autres exemples dans Arch. Nat., Puy-Paulin, J. 1155, p. 39 (1390) ; etc.

page 164 note 4. A. H. G., LVIII, 1 et suiv, (16 mars 1369). II prélève, en effet, à cette intention 2.000 écus d'or vieux, représentant environ 2.500 livres bordelaises : or, plusieurs textes de l'époque nous prouvent qu'une messe basse coûtait deux sous en moyenne (Cf., par exemple, le testament du jeune Bérard d'Albret : 100 livres pour 1.000 messes, dans. Arch. des Basses-Pyrénées, E. 213, janwier 1374 ; ou celui die son ipère : 50 sous par prêtre pour 2.5 messes, dams A. H. G., XXVI, 290, décembre 1374). — Pour Philippe II, cf. Léon Halkin, La physionomie morale de Philippe II, d'après ses derniers biographes (Revue Historique, t. 179, 1937, p. 361).

page 165 note 1. A. H. G., XXVI, 290 (24 décembre 1874). — Le prieur aura les « émoluments » de la collégiale, et les cinq «hanoines se «partageront tes 250 livres de rente annuelle et perpétuelle assignées par le testateur sur la seigneurie de Rions (soit les revenus d'un capital d'environ 5.000 livres). Bernard dTBscoussans, seigneur die Langoiran, n'exige pas plus de vingt-cinq mille messes ; Ibid., 339 (3 juillet 1338, et Codicille du 6 décembre 1341). Sans préjudice, dans ces testaments comme dains les précédents, de dispositions modns importantes. Ainsi des testateurs font des donations pour acheter du blé « à ops die far ostias » et du vin « à ops d!e far los sacrificis deus auitare » (G. 360, 7 juillet 1290).

page 165 note 2. Car, en raison des dimanches et des fêtes, messes et anniversaires ne pouvaient guère être célébrés cjue deux cent cinquante jours par an. — Ajoutons qu'il existait toute une nâglementaitioii intérieure des services. En 1387, Etienne Ortie, « contrôleur des anniversaires », exige que les membres des Chapitres arrivent aux céirémonies au début de l'Evangile. — Et puis, à côté des chanoines négligents, combien de membres du bas-clergé se disaient qu'il n'y avait pas de petit profit ! Vital de Carie, dhanoine de Saint-André, règle minutieusement l'ordonnance de la messie hebdomadaire qu'il vient die fonder dans son église : si le sacriste et ses clercs fournissent trop parcimonieusement le luminaire, ils ne pourront pas prendre part à la distribution des deniers : avec leur salaire, on achètera les chandelles nécessaires (G. 316, f° 90 v, 7 septemlbre 1390).

page 165 note 3. Brutails, J.-A., Les vieilles églises de la Gironde (Bondeaux, 1912, in-8°)Google Scholar et Courteault, Paul, La cathédrale de Bordeaux (Paris, Laurens, 1935, in-16)Google Scholar.

page 166 note 1. Coll. Doat, t. 41, p. 210 (1296) et 42, p. 68 (13 mai 1309).

page 166 note 2. Coll. Doat, t. 41, p. 146 (30 novembre 1293) ; t. 42, p. 68 (1309) ; t. 44, p. 1 (30 mai 1352).

page 166 note 3. A. IL G., XXVI, 290 (24 décembre 1374).

page 166 note 4. A. H. G., LVIII, 1 (16 mars 1369) ; etc.

page 166 note 5. Ainsi, Arnaud de Noailhan lègue 80 livres tournois à quatre pèlerins qui ironit en son nom « à Monsieur Saint-Jacques, en Galice ». Coll. Doat, t. 43, p. 56 (10 septembre 1334).

page 166 note 6. A. H. G., XXXIV, 376 (2 avril 1328).

page 167 note 1. Maisons Nobles, n° 64, 30 août 1521 ; et 2 E., n° 19, 9 octobre 1527.

page 167 note 2. A. H. G., XXVI, 339 et 390 (1338 et 1374) ; Coll. Doat, t. 43, p. 56, 10 sep., tembre 1334 ; t . 41, p. 146, 30 nov. 1293 ; Maisons Nobles, n° 64, 30 août 1521.

page 167 note 3. Arch. des Basses-Pyrénées, E. 31, 37, 213 (1324 et 1374) ; A. H. G., XXXIV, 377 (1328).

page 167 note 4. … « A maridar moilhers pauibres, et especialement aqueres que io ey despuselades, si son trobades » (Coll. Doat, t. 172, p 8 ; Anselme, VI, 106, 1268).

page 168 note 1. On célébrera, pour le premier, 2.000 messes, et ses enfants auront « autant de blé et de vin qu'il leur en faudra pendant leur vie » ; le second se contentera de 300 messes et ses enfants de 50 livres (Arch. des Basses-Pyrénées, E. 210, 2 septembre 1346 ; et A. H. G., XXVI, 293, 1374).

page 168 note 2. Le remboursement n'est toutefois effectué que jusqu'à concurrence d'une somme fixée.

page 168 note 3. A. H. G., LVIII, 1-18 (16 mars 1369). — Adversaire malheureux de Duguesolin à Cocherel, Jean de Grailly mourut en 1376, prisonnier à la Tour du Temple. Il avait institué « héritier universel » son oncle Archambaud de Grailty. — Avec ces 40.000 écus, correspondant approximativement à 5o.ooo livres bordelaises, Jean de Grailly aurait pu acheter, au début de i368, environ a.5oo tonneaux de « bons vins de Graves » dte l'année (le tonneau ayant une capacité de 900 litres), ou 4.000 tonneaux de « vins anciens » ; ou encore tout un troupeau de 2.000 à 2.500 (pairies de « bons boeufs ». 11 aurait pu payer le dîner (fixé à 2 sous 1/2) de 16.000 « gardes des vendanges » pendant 25 jaours Comptes de l'Archevêché de Bordeaux de 1367-1368, dans A. H. G., XXII, p. 23 et suiv.)

page 168 note 4. Gros legs également de la tante de Jean de Grailly, Catherine de Sainte-Bazeille, de Naude de Tiran, des dames d'Albret.

page 168 note 5. Si l'héritier universel de Jean de Grailly, son oncle Archambaud, était exhérédé, 1' « œuvre » de Saint-André de Bordeaux et l'Archevêché recevraient chacun 10.000 écus d'or (etc.).

page 169 note 1. Coll. Doat, t. 46.

page 169 note 2. Tout an moins légitime, car plusieurs sont affubles de bâtards auxquels ils làguonit des sommes d'argent (pair exemple, A. H. G., X, 144, 28 octobre 1316).

page 169 note 3. G. 316, actes de 1369 à 1390 ; G. 320, p. 3 (5 mars 1387). — Toutes ces pratiques mériteraient une étude approfondie. Qu'on nous permette de signaler l'intérêt des liasses de la série G, par exemple les G. a4i, 3sfi, 327, 523, 524 (XIVe et XVe siècles) : Testaments des chanoines ; droits des Chapitres sur leurs biens ; « lettres royaux » permettant à ces derniers de se porter hériliers de chanoines morts ab intestat ; legs de maisons canoniales. — Les Inventaires des « mobiliers » des chanoines ne sont pas moins suggestifs, ceux par exemple d'Eymeric de Caumont, seigneur de Lauzun, et de Raymond de Cussac (G. 326, 1436-1442). Ils n'en finissent pas d'énumérer leur vaisselle d'or et d'argent, richement ciselée, leurs diamants et pierres précieuses, leurs « missels » rares, leurs « vêtements » somptueux.

page 169 note 4. Tels les Albret ; tels, aussi, des testateurs isolés, comme Isabelle de La Trau.

page 170 note 1. C'est-à-dire le tiers des propres et, sous certaines néserves, les meubles et acquêts.

page 170 note 2. Orientation bibliographique, cotes des testaments.

page 170 note 3. A. H. G., XXVI, 290, 1374.

page 171 note 1. Un bourgeois de Bardeaux ayant légué ioo sous au Chapitre Sainl-André pour deux anniversaires solennels, celui-ci décide de n'en célébrer qu'un seul « quia modici sunt redidlitus pro duobus faciendis » (G. 316, 27 mars 1374). — En revanche, papes et fils de roi dépensent sans compter : Gïément V donne 1.000 sous de revenu au Cbapître pour un seul anniversaire (G. 316, f° 33) ; Jean, duo d'Aquitaine et de Lancastre, attribue 300 sous â l'anniversaire de Jeanne de La Tour, sa sœur, ensevelie « dans le chœur nouvellement construit » de la cathédrale ; mais la défunte sera associée, en outre, à toutes les prières de la communauté (G. 317, p. 1, 1389). — Lorque le testateur n'en décide pas autrement, les chanoines reçoivent, les deux tiers des (revenus de l'anniversaire ; le reste est distribué inégalement entre les chapelains, les clercs et le sacriste (G. 316, f° 1).

page 171 note 2. Orientation bibliographique, III, Exécution des testaments.

page 171 note 3. G. 383 (12 mai 1384). On sait que les juristes distinguent entre la « rente » et le n cens » ; seul celui-ci a un caractère seigneurial et oorniporte notamment saisine et lods et ventes. Mais, avant le XVIe siècle, les Bordelais ne semblent guère avoir saisi cette différenciation. Dans la presque totalité des chartes, « cens et rentes » s© confondent, ou sont employés indisliinctement pour désigner des redevances annuelles, de caractère seigneurial.

page 171 note 4. Arch. des Basses-Pyrénées, E. 186 ; G. 316, f° 139 v ; G. 1.095 (XIVe-XVe siècles). Nombreux exemples, aussi, dans la série H., emtre autres H. 735 (XVe siècle).

page 172 note 1. Par exemple, G. 316, 26 juillet 1369.

page 172 note 2. En voici un témoignage entre mille : Gaillard d'Ornon, chanoine et trésorier de Saint-André, avait laissé à son frère Bertrand, seigneur d'Audenge, 4oo écus d'or vieux pour quatre anniversaires. Bertrand conserve le capital, mai” assigne au Chapitre « 20 livres de rente de bonne monnaie » sur sa propre dîme de Cadaujac. Mis en igoût par l'opération, il lui abandonne, deux ans plus tard, les derniers revenus de cette dîme pour 3oo autres écus d'or (G. 316, f° 17, 1361-1363).

page 172 note 3. On saisit les répercussions du procédé sur la nature die l'alleu. Désormais, deux sortes de droits « réels » pèseront sur cette vigne : en bas, les droits utiles du donateur, puis de ses héritiers ; en haut, le6 droits « êminents » des bénéficiaires. Transformation d'un alleu en oensive, écrit-on généralement. Oui, aux yeux du concédant ; non pas aux yeux des acquéreurs. Pour eux, cette vigne devient un alleu-seigneurie : alleu puisqu'ils ne sont astreints à aucun droit réel supérieur ; seigneurie puisqu'ils n'ont reçu que le domaine éminent et qu'ils prélèveront sur le tenancier les charges accoutumées. Toutefois, une réserve s'impose : l'alleu est donné à l'église contre des prières, donc des services spirituels ; qu'on le veuille ou non, la notion allodiale s'en trouve altérée.

page 173 note 1. De nombreux nobles ont ainsi perdu, en deux temps, tous leurs droits sur des alleux : droits utiles d'abord, cédés à des tenanciers ; droits éminents, ensuite, abandonnés à des églises ou a des bourgeois (G. 315 et 316, 1716-1717, 1735-1728 ; 3 E., n° 84 à 86, 1145, 1631, 10.537 ; Archives Nationales, Fonds de Puy-Paulin…).

page 173 note 2. Par exemple, neuf paysans vendent à Guillaume de Bordile les esporles et les cens qu'Us viennent die constituer sur leurs vignes allodiales, dispersées en huit lieux-dits de ‘la paroisse de Léognian ; puis, ils se déclarent tenanciers de l'acquéreur. Celui-ci transfert ensuite leurs redevances .au Chapitre Saint-André en faveur duquel les paysans passent une nouvelle reconnaissance (G. 316, fos 47v-69v, 1348). — Dams les constitutions de cens, les rédacteurs des chartes font porter, le plus souvent, la qualité allodiale sur les redevances plutôt que sur la terre. On nous dit : « Tel noble vend une esporle et des cens en alleu assignés sur une terre, et il en porte garantie à l'acquéreur. » A cette observation nous rattacherons une formule qui, pour être rare, n'en paraît pas moins énigmatique : un bourgeois de Bordeaux ayant constitué en faveur d'un chapelain de Sainte-Croix des esporles et cens sur des vignes allodiales, lui en donne « bonne et ferme garantie comme d'esporles et cens vendus et assignés sur fief franc en alleu ». (H. 732, f° 45, 11 juillet 1376). Ndn sens ? Nullement. Décomposons, en effet, la formule. Le vendeur fait porter le mot « fief » sur le domaine utile, dont il conserve effectivement la possession à charge de redevances, et l'expression « franc en, alleu » sur le domaine éiminent cédé a l'acquéreur, peur lequel oe dernier ne sera astreint à aucune charge réelle supérieure. Voilà bien un alleu-seigneurie. — Nous croyons que tout cens en alleu porte, en droit, sur une terre anciennement allodiale. Qu'il y ait eu des abus de langage, ou qu'on ait essayé d'attribuer à des fiefs et à des censives la qualité allcdiale, nous n'en disconvenons pas ; mais c'était au risque de fraudeurs ou des négligents. Il semble, par contre, que les simples « rentes » foncières pouvaient être dites « en alleu » sans porter sur des biens allodiaux : on se les représentait comme des hypothèques perpétuelles dont la propriété exclusive appartenait à leur bénéficiaire.

page 173 note 3. G. 1726, f° 80 (21 août 1535). Les moniniaies qui ont servi au paiement sont très variées : des écus au soleil, des doubles ducats, des angelots, des « portugalois » : témoignages des grandes découvertes.

page 174 note 1. Exemples dans les minutes notariales et surtout les séries H. et G. (ainsi G. 346, années 1365-1369). — Parfois, l'église intéressée se charge de l'opération. « Pour oeuvre de l'anniversaire de la très excellente dame Madame Isabelle, fille du très excellent prince roi d'Angleterre », le Ohapîtne iSaint-André achète les esporles elt cens prélevés par Jean de Lalande sur la maison d'un bourgeois de Rcirdeaiux. — Autres acquisitions du même ordre auprès de Bernard de La Roque, seigneur du Gua, et de la femme die Jean de Durforit… (G. 366, 419, 395, années 1383-1418). Une seule communauté peut ainsi drainer des séries de cens d* quelques sous perçus par de nombreux seigneurs. Mais cette concentration n'a pas d'influence, au moins immédiate, sur le dessin parcellaire ni l'exploitation agricole. Les cens fixes en argent étaient les plus recherchés, puisqu'ils échappaient aux fluctuations qui, d'année en année, bouleversaient les prix des denrées. Toutefois, parmi les tenures léguées aux églises, beaucoup (étaient) astreintes à des cens en ‘nature, et un plus grand nombre encore à. l'agrière (redevance proportionnelle à la récolte). Comme pour les dîmes, il fallait donc vendre les produits du sol « au meilleur prix » et en employer le revenu aux anniversaires (G. 316, f° 37v, 38, etc.).

page 174 note 3. Mais juridiquement, l'usurpation est évidente. Supposons qu'une église vende des biens à un laïque : alleux, ils conserveront celte qualité ; oensives, ils rentreront dans une mouvance seigneuriale et assujettiront leur possesseur aux charges habituelles.

page 174 note 3. Nous avons fait observer que la livre bordelaise de 1343 possédait une valeur intrinsèque cinq fois) plus faible que celle de i33a. Inversement, le 1er mai 1368, la livre est renforcée de 40 % Le procureur de l'Archevêché de Bordeaux accueille cette dernière opération avec mélancolie. Les mois précédents, ses tenanciers l'ont payé « en monnaie débile », lui versant, pour une livre, un poids d'argent qui désormais ne vaut plus que douze sous. « Et ainsi sur mille livres que j'avais des recettes de l'Archevêché, quatre cents ont été perdues » (A. H. G., XXI, p. 130 et suiv., et XXII, p. 197).

page 175 note 1. G. 351 6 février 1390) et 1728, fos 103-107.

page 175 note 2. Cf., dans Molinier (ouv. cité, chap. VII), les théories ecclésiastiques pour justifier ces mesures (d'après le Traité d'un Gélestim, le Père Rapine, De conjunctione obituum, — début du xvi6 siècle). — Nous avons cependant la preuve que plusieurs chapellenies ont survécu du xive siècle à la veille de la Révolution. Cf., par exemple, G. 332 : chapellenies fondées par Arnaud et Jean- de Toscanan (titres de 1360 à 1786) et par Ayquem Gassles (ti'tres die; 1417 à 1766) ; G. 323 (titres de 1428 à 1766) ; G. 521 (XVe-XVIIIe), etc.

page 175 note 3. François de Léon, seigneur de Tastes, essaie die mettre ses fondations « à l'abri des adversités du temps ». Si, « par guerres ou par autre inconvénient, la chapellenie qu'il avait instituée dans l'église de Sainte-Croix-du-Mont se perdait, ou que le chapelain ou ses successeurs n'osassent demeurer dans la paroisse », les messes devraient être dites dans le couvent des Franciscains de Saint-Macaire (A. H. G., XXVII, 473, 1513).

page 175 note 4. Nombreux legs de 1.000 à 2.000 livres dans la haute bourgeoisie, et de 20 à 100 livres dhez les « laboureurs ». Peu die grands bourgeois qui n'aient leur chapelle ou qui ne créent des services perpétuels. Pair exemple, G. 1.729, p. 131 (fin du XVe siècle ?) : « Tableau des anniversaires fondés par feu Raymond Eyquem, seigneur de Montaigne ».

page 176 note 1. Sur cette mentalité, remarques générales dans Auffroy, ouv. cité, p. 557-560.

page 176 note 2. C'est pourquoi, à partir de la fin du XVe siècle, tours obituaires et môme leurs livres d'anniversaires mentionnent surtout des noms d'ecclésiastiques.

page 176 note 3. Ces institutions ont, peu souffert d© la guerre, car la plupart do leurs biens étaient, dans la région du Bordelais qui demeura à l'abri des envahisseurs jusqu'en 1451. Des chanoines et «tes bénéficiers ne s'en plaignent pas moins, dos « grans mortalilez » et de la peste, ou pleurent sur les malheurs du temps et l'insuffisance de leurs prébendes (G. 1.030, f° 1771v, 1400). Beaucoup plus fondées, par contre, les lamentations des couvents bénédictins et des églises de l'Entre-Deux-Mers, du Libournais et du Médoc, situés sur les routes d'invasion.

page 177 note 1. A. H. G., IV, 131 (1374).

page 177 note 2. Cf. Orientation bibliographique, 111, Exécution des testaments.