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Médéric Gasquet-Cyrus, En finir avec les idées fausses sur la langue française. Paris : Éditions de l’atelier, 2023, 158 pp., ISBN : 978 2 7082 54 06 0.

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Médéric Gasquet-Cyrus, En finir avec les idées fausses sur la langue française. Paris : Éditions de l’atelier, 2023, 158 pp., ISBN : 978 2 7082 54 06 0.

Published online by Cambridge University Press:  30 November 2023

Marie-Madeleine Bertucci*
Affiliation:
UFR LSH, CY Cergy Paris Université, les Chênes 2 33, boulevard du Port F-95 011 Cergy Pontoise cedex France
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Abstract

Type
Book Review
Copyright
© The Author(s), 2023. Published by Cambridge University Press

L’ouvrage de Médéric Gasquet Cyrus, En finir avec les idées fausses sur la langue française, paru en 2023 aux Éditions de l’atelier, comporte 158 pages. Il se développe en trois parties. La première est intitulée : Le français est en danger, la seconde : Le français est une langue pure et unique et la troisième : Bien parler français, c’est respecter les normes.

L’ouvrage aborde d’emblée les discours déclinistes des puristes, en dénonçant d’abord les idées reçues et les stéréotypes nombreux que ces derniers développent autour de la décadence du français et des menaces de tous ordres censés, non seulement affaiblir son statut d’objet de musée, mais aussi entraver la transmission d’une langue qu’il convient avant tout de protéger en la rendant imperméable au changement linguistique et au processus variationnel qui affecte toute langue. Médéric Gasquet-Cyrus (désormais MGC) s’emploie prioritairement à contrer cette vision pessimiste en mettant en évidence les nombreux indices de la vitalité du français dans le monde, langue officielle de treize pays, langue co-officielle de seize autres et langue d’enseignement pour quatre-vingt-treize millions d’élèves (p. 21–22). Il souligne en particulier les insuffisances des arguments relatifs aux dangers représentés par certaines pratiques langagières, brandies comme autant d’épouvantails par les déclinistes, parmi lesquelles figurent notamment et pêle-mêle l’écriture inclusive, les parlers jeunes, l’écriture SMS (p. 20), l’invasion du français par les anglicismes (p. 33) ou par l’arabe (p. 49) ou encore les accents ethnicisés (p. 51), lesquels altèreraient la pureté de la prononciation traditionnelle du français. Les principes de la défense de la langue française portés par les puristes se résument essentiellement au respect qu’il faut accorder à une langue française non seulement homogène et inaltérable (p.22 ; 59) mais aussi magnifiée et sacrée (p. 58–59), à la défense d’un monolinguisme exclusif en français même dans des villes plurilingues depuis l’Antiquité comme Marseille (p. 26), et enfin à la condamnation clivante de formes dénoncées comme populaires rassemblées dans la catégorie fourre-tout et stigmatisée des fautes de français (p. 43 ; 125 ; 130). L’origine de cette conception tiendrait à l’amalgame constamment entretenu, depuis le XVIIe siècle (p. 24), entre la langue française et la littérature (p. 62), qui fait du français la langue de Molière et non celle des locuteurs (p. 58 ; 61). Cette conception élitiste du français, fondamentalement clivante, a pour conséquence de minoriser et d’inférioriser les variétés de français, qui ne sont pas littéraires en leur refusant toute légitimité (p. 48) et ce, même si leur visibilité est manifeste, comme le sont les variétés endogènes de français de l’espace francophone et leur ancrage dans des contextes plurilingues qui leur confèrent des traits spécifiques (p. 52 ; 59 ; 78 ; 95), lesquels sont perceptibles notamment dans les chansons d’Aya Nakamura dont le succès international indéniable contribue, quoi qu’en pensent ses détracteurs, à la diffusion du français (p. 53).

Dans la section 8 de la première partie, qui constitue un des chapitres les plus saillants de l’ouvrage, MGC propose une intéressante mise au point sur la pauvreté quantitative supposée du lexique de certains jeunes, de fait les plus défavorisés, qui ne possèderaient que quelques centaines de mots, trois-cent-cinquante à quatre-cents selon le linguiste Alain Bentolila, alors qu’un locuteur expert aurait à sa disposition deux-mille-cinq-cents mots (p. 44). MGC déconstruit de manière très documentée le point de vue de ce dernier en soulignant qu’il ne précise ni vraiment quels sont les jeunes en question, ni comment il a obtenu ses données, voire qu’il se contredit au fil de ses interviews sur l’un ou l’autre de ces points, ce qui a conduit la presse nationale française ces dernières années à s’interroger sur la finalité réelle de ces propos très stigmatisants et pénalisants pour les jeunes concernés (p. 48).

Après une première partie visant à préciser l’étroitesse de la conception normative du français qui vient d’être évoquée, MGC analyse dans la deuxième moitié de l’ouvrage, un certain nombre de poncifs qu’il s’emploie à critiquer et en particulier les clichés du prétendu génie de la langue française (p. 58 ; 73), de l’éviction des langues régionales par l’édit de Villers-Cotterêts (p. 66), de la pureté du français de Tours (p. 67), de la logique, de la clarté (p. 70) et de la beauté (p. 149) inhérentes au français.

L’ouvrage se termine par une bibliographie sélective incluant des ressources en ligne, laquelle est complétée au fil du texte par de nombreuses références figurant dans les notes de bas de page, ce qui fait de cet ouvrage un ouvrage d’érudition, qui donne au lecteur de nombreux éléments pour approfondir la question traitée. Pour finir, on soulignera l’intérêt de ce travail non seulement pour les étudiants, les enseignants et les chercheurs mais aussi pour tout lecteur intéressé par une mise en perspective critique des représentations stéréotypées attachées au français.