J'AI lu deux fois (et même en ce qui concerne l'admirable étude des conditions rurales au XVIIIe siècle, trois fois) le monumental ouvrage de Pierre Vilar, la Catalogne dans l'Espagne moderne. Ce livre, riche, volumineux, n'est certes pas une thèse ordinaire et n'a été présenté comme telle à la Sorbonne qu'incidemment, pour obéir à une règle de courtoisie et de carrière. la soutenance en a d'ailleurs été brillante, ce qui prouve que la longueur de la thèse, malgré le cri d'alarme déjà oublié de Roland Mousnier , n'a rien à voir avec la qualité des oeuvres. Des thèses maigres ont porté leurs auteurs jusqu'aux plus hautes destinées de l'Université — tant mieux ! Une thèse anormalement ample a permis cette fois à Pierre Vilar de succéder à Ernest Labrousse, à l'un des postes-clefs de notre enseignement historique. D'ailleurs, il eût été facile à l'auteur de détacher les quelque 400 pages du second volume sur la production agricole (pp. 191-585), de les étoffer d'un avertissement, de les assortir des références d'usage, et il nous aurait offert, à ce compte-là, une thèse classique aussi riche et neuve que celles de Goubert, de Baehrel et de Le Roy Ladurie, que je place toutes trois très haut. Mais laissons ces considérations dérisoires. Le livre de Pierre Vilar appelle des discussions d'un plus haut intérêt.