Article contents
Fabriquer l'histoire des sciences modernes
Réflexions sur une discipline à l'ère de la mondialisation
Published online by Cambridge University Press: 20 January 2017
Résumé
De quoi l’histoire des sciences est-elle l’histoire ? En quoi les travaux qui s’en réclament définissent-ils un domaine homogène ? Quels en sont les défis actuels ? La récente traduction en français des travaux de Simon Schaffer et la publication dans ce même volume des Annales de son article issu de la conférence Marc Bloch 2014 sont les deux prétextes d’une réflexion historiographique sur les bouleversements profonds qui ont affecté le domaine dans les trente dernières années, principalement en France, depuis sa recomposition à partir de l’apport des sociologues et anthropologues des sciences. Il s’agit en outre de mesurer les effets de l’abandon d’un des paradigmes fondateurs de l’histoire des sciences, celui de la révolution scientifique comme avènement de la modernité en science, nourri d’une vision européocentrique de la production des savoirs. Si aujourd’hui la plupart des travaux qui concernent la période moderne partagent un même souci de démarcation vis-à-vis d’une telle approche, ils sont aussi confrontés à d’autres défis : celui des processus de la mondialisation par la science, celui de la multiplicité des sites et des configurations sociales qui participent à la mondialisation. Ces défis interrogent les méthodes et les styles en histoire des sciences, comme plus généralement dans les sciences sociales.
Abstract
What kind of history is the history of science? To what extent does the academic research labeled as such delineate a homogeneous field? What are the current challenges that it faces? The recent translation of Simon Schaffer's works into French, along with the publication of his 2014 Marc Bloch Lecture in the Annales, provides the framework for this article's historiographical reflection on the profound changes that have taken place within the field over the last thirty years, particularly within a French context. The analysis is twofold. First, it aims to trace how new approaches to the sociology and anthropology of science have reconfigured the boundaries of the field. Second, it considers the effect of the abandonment of one of its major historiographical paradigms by most of the scholars currently working on early modern science: the scientific revolution as the rise of scientific modernity, underpinned by a Eurocentric vision of the production of knowledge. Although most research on the early modern period now strives to distance itself from this narrative, it must also face new challenges and questions—in particular the role of science in the processes of globalization and the multiplicity of sites and social configurations that participate in it. These challenges point towards new methods and styles in the history of science, and, more broadly, the social sciences.
- Type
- Histoire des sciences
- Information
- Copyright
- Copyright © Les Éditions de l’EHESS 2015
Footnotes
Mes remerciements vont en premier lieu au comité de lecture des Annales, qui a lu attentivement et critiqué les premières versions de cette réflexion. Ils s’adressent aussi aux collègues qui ont bien voulu me faire part de leurs doutes, commentaires et réflexions avec franchise et générosité : Wolf Feuerhahn, Sabina Loriga, Rafael Mandressi, Dominique Pestre, Silvia Sebastiani, Stéphane Van Damme et tout particulièrement Simon Schaffer.
References
1- Schaffer, Simon, La fabrique des sciences modernes, XVIIe-XIXe siècle, trad. par Aït-Touati, F., Marcou, L. et Van Damme, S., Paris, Éd. du Seuil, 2014 Google Scholar. Cet ouvrage constitue ainsi l’un des premiers « livres » de l’auteur, qui suit de trois ans un recueil d’articles traduits en espagnol, Trabajos de cristal: Ensayos de historia de la ciencia, 1650-1900, trad. par M. Martínez-Lage et J. Pimentel, Madrid, Marcial Pons, 2011. Ce dernier propose un autre choix de textes qui met plus nettement en relief que le volume français la dimension technologique de l’enquête mise en oeuvre par S. Schaffer durant toutes ces années. Dans la sélection française, à l’exception de « Newton à la plage », tous les articles traduits ont été rédigés entre le milieu des années 1980 et le milieu des années 1990. Il convient enfin de souligner que le titre relève d’un choix de l’éditeur et non de l’auteur.
2- Shapin, Steven, Une histoire sociale de la vérité. Science et mondanité dans l’Angleterre du XVIIe siècle, trad. par Coavoux, S. et Steiger, A., Paris, La Découverte, [1994] 2014 Google Scholar.
3- Daston, Lorraine, L’économie morale des sciences modernes. Jugements, émotions et valeurs, trad. par Lézé, S., Paris, La Découverte, [1995] 2014 Google Scholar. L’article est accompagné de deux textes de Stéphane VAN DAMME, « Lorraine Daston et la nouvelle histoire intellectuelle des sciences », p. 7-18 et « Nous n’avons jamais été désintéressés : les sciences entre moralisation, éthique et affects », p. 65-108. Lui-même acteur important de la communauté internationale des historiens des sciences, S. Van Damme est l’auteur de nombreux travaux qui ont largement contribué au renouvellement du domaine pour l’époque moderne. On se limitera ici à citer son dernier livre : À toutes voiles vers la vérité. Une autre histoire de la philosophie au temps des Lumières, Paris, Éd. du Seuil, 2014. Il a enfin contribué à la traduction de recueil de S. Schaffer cité ci-dessus.
4- De la vaste production de Shapin, Steven, on retiendra l’importante contribution à l’histoire contemporaine des scientifiques, The Scientific Life: A Moral History of a Late Modern Vocation, Chicago, Chicago University Press, 2008 CrossRefGoogle Scholar.
5- Pour S. Schaffer, le paradigme était résolument dépassé dans l’étude de la controverse entre Robert Boyle et Thomas Hobbes. Dans le cas de Lorraine Daston, outre S. Van Damme cité ci-dessus, voir Fassin, Didier, « Les économies morales revisitées », Annales HSS, 64-6, 2009, p. 1237–1266 Google Scholar.
6- Biagioli, Mario, Galileo, Courtier: The Practice of Science in the Culture of Absolutism, Chicago, University of Chicago Press, 1993 Google Scholar. Il n’est pas certain que l’ouvrage ait circulé dans l’espace de travail français, mais sa connaissance a sans doute été facilitée par la publication, deux ans plus tard, de son article, «Le prince et les savants. La civilité scientifique au XVIIe siècle », Annales HSS, 50-6, 1995, p. 1417-1453. En mettant au centre de l’analyse la perspective sociologique développée par Norbert Elias dans ses travaux sur les sociétés de cour d’Ancien Régime, il proposait un déplacement de l’enquête sociologique des sciences, sur un mode très différent de celui des science studies : avec lui, la cour (et donc le prince) devenait l’un des principaux centres de l’innovation savante. En cela aussi, il franchissait un pas dans les études galiléennes, en allant au-delà de l’analyse de Redondi, Pietro, Galilée hérétique, trad. par Aymard, M., Paris, Gallimard, [1983] 1988 Google Scholar, visant à relire, sous l’angle de la philosophie atomiste, les tenants et les aboutissants du procès de Galilée.
7- Shapin, Steven et Schaffer, Simon, Léviathan et la pompe à air. Hobbes et Boyle entre science et politique, trad. par Piélat, T., Paris, La Découverte, [1985] 1993 Google Scholar.
8- Dès 1982 paraissait Michel Callon et Bruno Latour (dir.), La science telle qu’elle se fait. Anthologie de la sociologie des sciences de langue anglaise, Paris, Pandore, repris en 1991 aux éditions La Découverte, dont la réception immédiate demande à être étudiée. Deux contributions de S. Shapin étaient ainsi rendues accessibles en français, «Une pompe de circonstance : la technologie littéraire de Boyle » [1984], p. 37-86 ; « La politique des cerveaux : la querelle phrénologique au XIXe siècle à Édimbourg » [1975], p. 146-199.
9- Koyré, Alexandre, From the Closed World to the Infinite Universe, Baltimore, Johns Hopkins Press, 1957, p. VII Google Scholar : « When studying the history of scientific and philosophical thought in the sixteenth and seventeenth century – they are indeed so closely interrelated and linked together that, separated, they become ununderstandable – I have been forced to recognize, as many others have before me, that during this period human, or at least European, minds underwent a deep revolution which changed the very framework and patterns of our thinking and of which modern science and modern philosophy are, at the same time, the root and the fruit. This revolution or, as it has been called, this ‘crisis of European consciousness’, has been described and explained in many different ways. » Ses deux ouvrages majeurs s’intitulent Études d’histoire de la pensée philosophique, Paris, Armand Colin, 1961, et Études d’histoire de la pensée scientifique, Paris, PUF, 1966. Sur A. Koyré, voir Redondi, Pietro (éd.), no spécial « Science: The Renaissance of a History », History and Technology: An International Journal, 4-1/4, 1987 Google Scholar ; Koyré, Alexandre, De la mystique à la science. Cours, conférences et documents (1922-1962), éd. par Redondi, P., Paris, Éd. de l’EHESS, 1986 Google Scholar.
10- La revue Science in Context est ainsi fondée en 1987 : « Science in Context is an international journal […] devoted to the study of the sciences from the points of view of comparative epistemology and historical sociology of scientific knowledge. The journal is committed to an interdisciplinary approach to the study of science and its cultural development – it does not segregate considerations drawn from history, philosophy and sociology. Controversies within scientific knowledge and debates about methodology are presented in their contexts. »
11- On notera que le compte rendu, en France, de l’édition originale en anglais de Léviathan est rédigé sur un mode critique : compte rendu de Dominique PESTRE de l’ouvrage de Shapin, S. et Schaffer, S., Leviathan and the Air-Pump: Hobbes, Boyle, and the Experimental Life, Princeton, Princeton University Press, 1985 Google Scholar pour la Revue d’histoire des sciences, 1990, 43-1, p. 109-116.
12- Guesnerie, Roger et Hartog, François (dir.), Des sciences et des techniques. Un débat, Paris, Éd. de l’EHESS, 1998 Google Scholar.
13- Pestre, Dominique, « Pour une histoire sociale et culturelle des sciences, nouvelles définitions, nouveaux objets, nouvelles pratiques », Annales HSS, 50-3, 1995, p. 487–522 Google Scholar. La même année, la revue publiait un dossier « Rhétorique et civilité. L’histoire des sciences, XVIe-XVIIe s. », Annales HSS, 50-6, 1995, composé de Giovanna Ciffoletti, «La question de l’algèbre. Mathématiques et rhétorique des hommes de droit dans la France du XVIe siècle », p. 1385-1416 et de M. Biagioli, « Le prince et les savants… », art. cit. Dans les Annales HSS, 52-5, 1997, un dossier sur « Les expéditions scientifiques » présentait les travaux de Marie-Noëlle Bourguet et Christian Licoppe, « Voyages, mesures et instruments. Une nouvelle expérience du monde au Siècle des lumières », p. 1115-1151, et de Kapil Raj, « La construction de l’empire de la géographie. L’odyssée des arpenteurs de Sa Très Gracieuse Majesté, la reine Victoria, en Asie centrale », p. 1153-1180.
14- On renverra ici à Jacques Le Goff et Pierre Nora (dir.), Faire de l’histoire, vol. 1, Nouveaux problèmes ; vol. 2, Nouvelles approches ; vol. 3, Nouveaux objets, Paris, Gallimard, 1974, dont le titre de l’article de D. Pestre, « Pour une histoire sociale… », art. cit., reprend la tripartition.
15- Callon, Michel, « Éléments pour une sociologie de la traduction. La domestication des coquilles Saint-Jacques et des marins-pêcheurs dans la baie de Saint-Brieuc », no spécial «La sociologie des Sciences et des Techniques », L’année sociologique, 3e s., 36, 1986, p. 169–208 Google Scholar. La version anglaise paraissait la même année dans Law, John (éd.), Power, Action and Belief: A New Sociology of Knowledge ?, Londres/Boston, Routledge/Kegan Paul, 1986 Google Scholar. Pour une synthèse, voir Akrich, Madeleine, Callon, Michel et Latour, Bruno, Sociologie de la traduction. Textes fondateurs, Paris, Presses des Mines, 2006 CrossRefGoogle Scholar. Voir aussi Latour, Bruno, Nous n’avons jamais été modernes. Essai d’anthropologie symétrique, Paris, La Découverte, 1991 Google Scholar.
16- Sur le Centre international de synthèse, voir Biard, Agnès, Bourel, Dominique et Brian, Éric (dir.), Henri Berr et la culture du XXe siècle. Histoire, science et philosophie, Paris, Albin Michel, 1996 Google Scholar ; Gattinara, Enrico Castelli, Les inquiétudes de la raison. Épistémologie et histoire en France dans l’entre-deux-guerres, Paris, Vrin/Éd. de l’EHESS, 1998 Google Scholar.
17- Pestre, Dominique, « Introduction », in Pestre, D. (dir.), L’étude sociale des sciences. Bilan des années 1970 et 1980 et conséquences pour le travail historique, Paris, Cité des sciences et de l’industrie, 1992, p. 5–13 Google Scholar.
18- Latour, Bruno, « Les chantiers actuels des études sociologiques sur les sciences exactes », in Guesnerie, R. et Hartog, F. (dir.), Des sciences…, op. cit., p. 11–24 Google Scholar. Le titre modeste de cette contribution était rapidement démenti par la définition des science studies proposée en ouverture : « […] domaine jusqu’ici marginal et qui recoupe ou reformate des préoccupations venues de l’histoire, de la philosophie, de la sociologie, de l’anthropologie, de l’économie et de la psychologie appliquées aux pratiques scientifiques et techniques, telles qu’elles s’élaborent dans les laboratoires et les bureaux d’études » (p. 11). Voir, depuis, Dominique PESTRE, Introduction aux science studies, Paris, La Découverte, 2006, qui fait la synthèse des réflexions précédentes et les développe.
19- Voir la table des matières qui, autour de sept thèmes, regroupe une trentaine d’articles : la sociologie des sciences y est mise en binôme avec l’histoire intellectuelle, comme, plus loin, l’épistémologie se trouve confrontée à l’histoire sociale ; les aires culturelles y sont traitées sous l’angle des relations entre traditions savantes et cognition ; une section entière est dédiée à la question de l’objectivité scientifique, autour de la proposition de L. Daston.
20- Voir supra, n. 9.
21- L’âge d’or des grandes synthèses connut un premier moment de gloire dans les années 1950 : Hall, Alfred Rupert, The Scientific Revolution, 1500-1800: The Formation of the Modern Scientific Attitude, Londres, Longmans, Green and Co., 1954 Google Scholar ; A.Koyré, From the Closed World…, op. cit. ; Kuhn, Thomas S., La Révolution copernicienne, trad. par Hayli, A., Paris, Fayard, [1957] 1973 Google Scholar ; Butterfield, Herbert, The Origins of Modern Science, 1300-1800, New York, Free Press, [1949, éd. rev. 1957] 1997Google Scholar. Il a été relayé en France par exemple par Taton, René (dir.), Histoire générale des sciences, 3 vol., Paris, PUF, 1957-1964 Google Scholar. Pour les remises en perspective, à partir des années 1990, voir David Lindberg, C. et Westman, Robert S. (éd.), Reappraisals of the Scientific Revolution, Cambridge, Cambridge University Press, 1990 Google Scholar ; Shapin, Steven, La révolution scientifique, trad. par Larsonneur, C., Paris, Flammarion, [1996] 1998 Google Scholar ; Osler, Margaret J. (dir.), Rethinking the Scientific Revolution, Cambridge, Cambridge University Press, 2000 Google Scholar ; Dear, Peter, Revolutionizing the Sciences: European Knowledge and its Ambitions, 1500-1700, Princeton, Princeton University Press, 2001 Google Scholar. Pour une présentation de cette historiographie, voir Cohen, H. Floris, The Scientific Revolution: A Historiographical Inquiry, Chicago, University of Chicago Press, 1994 Google Scholar.
22- Sur le cas de Descartes, voir Azouvi, François, Descartes et la France. Histoire d’une passion nationale, Paris, Fayard, 2002 Google Scholar ; Damme, Stéphane Van, Descartes. Essai d’histoire culturelle d’une grandeur philosophique, Paris, Presses de Sciences Po, 2002 Google Scholar. On pourrait faire le même type de travail pour tous les « héros nationaux » et lire l’historiographie qui leur a été consacrée comme un processus de « nationalisation », dans la lignée d’un type d’histoire des sciences constitué comme genre à partir des Lumières. Sur Galilée l’Italien, voir Geymonat, Ludovico, Galilée, trad. par Rosset, F.-M., Paris, R. Laffont, [1957] 1968 Google Scholar.
23- Le programme « Science et Empires » est animé par la commission du même nom, qui relève de la division d’histoire des sciences de l’Union internationale d’histoire et philosophie des sciences et technologies. Parmi les publications dans le domaine, voir MacLeod, Roy et Rehbock, Philip F. (éd.), Nature in its Greatest Extent: Western Science in the Pacific, Honolulu, University of Hawaii Press, 1988 Google Scholar ; Jami, Catherine, PETITJEAN, Patrick et Moulin, Anne-Marie (dir.), Science and Empires: Historical Studies about Scientific Development and European Expansion, Dordrecht, Kluwer, 1992 Google Scholar. Pour importante qu’elle fût, et pour ce qu’elle indiquait de la capacité de la recherche française à être présente sur ce terrain – il convient de rappeler ici la publication de Rashed, Roshdi (dir.), Histoire des sciences arabes, 3 vol., Paris, Éd. du Seuil, 1997 Google Scholar –, ce n’est pas avant la fin de la décennie 1990 qu’une approche de ce type a commencé à s’ancrer dans le paysage plus ordinaire de l’histoire des sciences, notamment dans le cadre des séminaires du Centre de recherche en histoire des sciences et des techniques.
24- Éric Brian, « Action et abstraction. Notes d’actualité sur l’histoire des sciences », in R. Guesnerie et F. Hartog (dir.), Des sciences…, op. cit., p. 41. Voir en outre Id., «Ce que l’histoire des sciences peut apprendre de l’histoire. Le cas de l’Académie royale des Sciences à l’époque moderne », in La science à l’époque moderne, Paris, Presses de l’université de Paris-Sorbonne, 1998, p. 59-70, publié sous l’égide de l’Association des historiens modernistes des universités.
25- Roche, Daniel, Le siècle des Lumières en province. Académies et académiciens provinciaux, 1680-1789, Paris/La Haye, EHESS/Mouton, 1978 Google Scholar ; Id., Les Républicains des lettres. Gens de culture et Lumières au XVIIIe siècle, Paris, Fayard, 1988. Sur son héritage et les voies multiples à travers lesquelles il a irrigué l’histoire historienne des sciences et des techniques, voir Milliot, Vincent, Minard, Philippe et Porret, Michel (dir.), La grande chevauchée. Faire de l’histoire avec Daniel Roche, Genève, Droz, 2011 Google Scholar.
26- Eisenstein, Elizabeth L., La révolution de l’imprimé à l’aube de l’Europe moderne, trad. par Sissung, M. et Duchamp, M., Paris, La Découverte, [1983] 1991 Google Scholar ; dans la tradition française inaugurée par Lucien Febvre, voir Martin, Henri-Jean et Chartier, Roger (dir.), Histoire de l’édition française, 4 vol., Paris, Promodis, 1982-1986 Google Scholar.
27- Lepetit, Bernard, Carnet de croquis. Sur la connaissance historique, Paris, Albin Michel, 1999 Google Scholar. Avec Daniel Nordman affleuraient les thématiques impériales et coloniales, dans le sillage de l’enquête organisée autour de la Méditerranée : Bourguet, Marie-Noëlle et al. (dir.), L’invention scientifique de la Méditerranée. Égypte, Morée, Algérie, Paris, Éd. de l’EHESS, 1998 Google Scholar.
28- Perrot, Jean-Claude, Une histoire intellectuelle de l’économie politique, XVIIe-XVIIIe siècles, Paris, Éd. de l’EHESS, 1992 Google Scholar ; Bourguet, Marie-Noëlle, Déchiffrer la France. La statistique départementale à l’époque napoléonienne, Paris, Éd. des Archives contemporaines, 1988 Google Scholar ; Brian, Éric, La mesure de l’État. Administrateurs et géomètres au XVIIIe siècle, Paris, Albin Michel, 1994 Google Scholar.
29- Roger, Jacques, Buffon : un philosophe au Jardin du Roi, Paris, Fayard, 1989 Google Scholar ; Id., Pour une histoire des sciences à part entière, éd. par C. Blanckaert, Paris, Albin Michel, 1995 ; Blanckaert, Claude (dir.), Le terrain des sciences humaines. Instructions et enquêtes (XVIIIe-XXe siècle), Paris, L’Harmattan, 1996 Google Scholar ; Corsi, Pietro, Lamarck. Genèse et enjeux du transformisme, 1770-1830, trad. par Ménard, D., Paris, CNRS Éditions, [1983] 2000 Google Scholar.
30- Jacob, Margaret, The Cultural Meaning of the Scientific Revolution, New York, Knopf, 1988 Google Scholar ; MINARD, Philippe, La fortune du colbertisme. État et industrie dans la France des Lumières, Paris, Fayard, 1998 Google Scholar ; Hilaire-Pérez, Liliane, L’invention technique au siècle des Lumières, Paris, Albin Michel, 2000 Google Scholar.
31- Comptes rendus de S. Shapin et S. Schaffer, Léviathan…, op. cit., par Chartier, Roger, dans Le Monde des livres, 28 janvier 1994, p. VIII Google Scholar ; Redondi, Pietro, dans les Annales HSS, 51-2, 1996, p. 362–364 Google Scholar ; Chabaud, Gilles, dans Revue d’histoire moderne et contemporaine, 43-2, 1996, p. 382–384 Google Scholar ; Blondiaux, Loïc, dans Politix, 8-32, 1995, p. 176–181 Google Scholar. Sur une critique de la formation historienne des historiens des sciences dans les années 1980-1990, voir Lorraine Daston, « Science Studies and the History of Science », in J. Chandler et A. I. Davidson (éd.), no spécial « The Fate of Disciplines », Critical Inquiry, 35-4, 2009, p. 798-816.
32- R. Chartier, Compte rendu…, art. cit, p. VIII.
33- Ce constat fait, on sera alors d’autant plus étonné que l’ouvrage de S. Shapin, Une histoire sociale…, op. cit., qui a été rédigé et publié dans sa version originale en anglais moins d’une dizaine d’années après Léviathan, et qui en constitue un prolongement du double point de vue méthodologique et thématique, ne soit paru que récemment dans sa traduction française. C’était pourtant un travail important, audacieux et novateur, qui pouvait parler à un vaste groupe de spécialistes venus de traditions intellectuelles différentes. Voir le compte rendu de Jean-Yves Grenier, « Les habits de la vérité. La validation scientifique vue comme une production sociale, selon Steven Shapin », Libération, 5 juin 2014, p. VI-VII.
34- Pour une formulation de la notion, voir la critique de Gibbons, Michael et al. (dir.), The New Production of Knowledge: The Dynamics of Science and Research in Contemporary Societies, Londres, Sage Publications, 1994 Google Scholar : Dominique Pestre, « La production des savoirs entre académies et marché. Une relecture historique du livre : ‘The New Production of Knowledge’, édité par M. Gibbons », Revue d’économie industrielle, 79-1, 1997, p. 163- 174, repris notamment sous le titre «La notion de régime de savoirs », in Id., Science, argent et politique. Un essai d’interprétation, Paris, INRA, 2003, p. 31-36. Sur le moment contemporain, voir Id., À contre-science. Politiques et savoirs des sociétés contemporaines, Paris, Éd. du Seuil, 2013 ; Pestre, D. (dir.), Le gouvernement des technosciences. Gouverner le progrès et ses dégâts depuis 1945, Paris, La Découverte, 2014 Google Scholar.
35- L’étude conjointe de Philippe Descola et Bruno Latour est menée par de Fornel, Michel et Lemieux, Cyril, « Quel naturalisme pour les sciences sociales ? », in de Fornel, M. et Lemieux, C. (dir.), Naturalisme versus constructivisme , Paris, Éd. de l’EHESS, 2007, p. 7–25 CrossRefGoogle Scholar. Voir, plus généralement, Alice Ingold, « Écrire la nature. De l’histoire sociale à la question environnementale ? », in A. Ingold (dir.), no spécial « Environnement », Annales HSS, 66-1, 2011, p. 11-29. A. Ingold met notamment en avant un changement de paradigme dans le rapport des sciences sociales à la nature : « l’idée d’une rupture historique dans les rapports des sociétés à la nature ; la dimension planétaire des phénomènes écologiques ; et, enfin, une réflexivité inédite des sociétés dans leur rapport à l’environnement » (p. 11). Pour un état de l’ample production dans ce domaine, les 83 pages de comptes rendus qui suivent le dossier des Annales de 2011 sont particulièrement illustratives de l’explosion d’un domaine qui tend de plus en plus à s’autonomiser de l’ensemble et dont la diversité des approches se double de celle des espaces ou des périodes.
36- B. Latour, Nous n’avons jamais été modernes…, op. cit., p. 25. Dans cet essai iconoclaste par son ton et ses objets, un paragraphe est consacré à la « Crise de la critique » (p. 13), aux « trois répertoires distincts pour parler de notre monde : la naturalisation, la socialisation, la déconstruction ». La naturalisation est associée à l’essor de la neurobiologie et à Jean-Pierre Changeux, récusé par l’analyse de B. Latour, qui, dans les pages suivantes et au moment de requalifier le moderne, s’appuie sur l’enquête de P. Descola.
37- Descola, Philippe, Leçon inaugurale. Chaire d’Anthropologie de la nature, Paris, Collège de France, 2001, p. 1 Google Scholar. Plus généralement, voir Id., Par-delà nature et culture, Paris, Gallimard, 2005. Sur l’entreprise de P. Descola, voir la lecture critique de Lenclud, Gérard, « L’universalisme ou le pari de la raison. Note sur (et contre) le relativisme », L’universalisme ou le pari de la raison. Anthropologie, histoire, psychologie, Paris, Gallimard, 2013 Google Scholar.
38- Larrère, Catherine, Les philosophies de l’environnement, Paris, PUF, 1997 Google Scholar ; Id., Du bon usage de la nature. Pour une philosophie de l’environnement, Paris, Aubier, 1997 ; Id., «La question de l’écologie. Ou la querelle des naturalismes », no spécial « Naturalismes d’aujourd’hui », Cahiers philosophiques, 127, 2011, p. 63-79, où l’on trouve en outre une interview de P. Descola ; Drouin, Jean-Marc, L’écologie et son histoire : réinventer la nature, Paris, Flammarion, [1991] 1999 Google Scholar.
39- Ingold, Tim, « Human Worlds are Culturally Constructed: Against the Motion », in Ingold, T. (dir.), Key Debates in Anthropology, Londres, Routledge, 1996, p. 112–118 Google Scholar ; Id., « Eight Themes in Anthropology of Technology », Social Analysis: The International Journal of Social and Cultural Practice, 41-1, 1997, p. 106-138 ; Id., « Hunting and Gathering as Ways of Perceiving the Environment » et « Building, Dwelling, Living: How Animals and People Make Themselves at Home in the World », The Perception of the Environment: Essays on Livelihood, Dwelling and Skill, Londres, Routledge, 2000, respecti- vement p. 40-60 et 172-188.
40- Locher, Fabien et Quenet, Grégory (dir.), no spécial « Histoire de l’environnement », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 56-4, 2009 Google Scholar ; Fressoz, Jean-Baptiste et al., Introduction à l’histoire environnementale, Paris, La Découverte, 2014 Google Scholar ; Quenet, Grégory, Qu’est-ce que l’histoire environnementale ?, Seyssel, Champ Vallon, 2014 Google Scholar.
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42- Voir notamment les travaux sur les pollutions de Massard-Guilbaud, Geneviève, Histoire de la pollution industrielle. France (1789-1914), Paris, Éd. de l’EHESS, 2010 Google Scholar ; Roux, Thomas Le, Le laboratoire des pollutions industrielles. Paris, 1770-1830, Paris, Albin Michel, 2011 Google Scholar.
43- Sur la dimension historique, voir le no spécial « Climat et histoire, XVIe-XIXe siècle », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 57-3, 2010, et en particulier Emmanuel Garnier, « Fausse science ou nouvelle frontière ? Le climat dans son histoire », p. 7-41. Sur les problèmes de la modélisation, voir Dalmedico, Amy Dahan (dir.), Les modèles du futur. Changement climatique et scénarios économiques : enjeux scientifiques et politiques, Paris, La Découverte, 2007 Google Scholar.
44- Chakrabarty, Dipesh, « Le climat de l’histoire. Quatre thèses » [2009], trad. de Nordmann, C., Revue internationale des livres et des idées, 15, 2010, p. 22–31 Google Scholar ; Id., « Climate and Capital: On Conjoined Histories », Critical Inquiry, 41-1, 2014, p. 1-23, qui s’ouvre sur cette déclaration : « Anthropogenic global warming brings into view the collision – or the running up against one another – of three histories that, from the point of view of human history, are normally assumed to be working at such different and distinct paces that they are treated as processes separate from one another for all practical purposes : the history of the earth system, the history of life including that of human evolution on the planet, and the more recent history of industrial civilization (for many, capitalism) » (p. 1).
45- Ibid., p. 3-4.
46- Id., Provincializing Europe: Postcolonial Thought and Historical Difference, Princeton, Princeton University Press, 2000.
47- Armitage, David et Guldi, Jo, The History Manifesto, Cambridge, Cambridge University Press, 2014 Google Scholar, discuté dans le dossier « Longue durée » publié dans ce même numéro des Annales, p. 285-378.
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49- On prendra, à titre d’exemple, le dossier « Roundtable: History Meets Biology », The American Historical Review, 119-5, 2014, p. 1492-1629.
50- Feuerhahn, Wolf et Mandressi, Rafael (dir.), no spécial « Les sciences de l’homme à l’âge du neurone », Revue d’histoire des sciences humaines, 25, 2011 Google Scholar ; Shryock, Andrew et Smail, Daniel L. (éd.), Deep History: The Architecture of Past and Present, Berkeley, University of California Press, 2011 Google Scholar.
51- Smail, Daniel L., On Deep History and the Brain, Harvard, Harvard University Press, 2008 Google Scholar. Voir, à titre d’exemple, no hors-série « Traduire et introduire », Tracés. Revue de sciences humaines, #14, 2014, qui lui consacre une partie du numéro, et notamment la critique que lui adresse Rafael MANDRESSI, « L’historien, le cerveau et l’ivresse des profondeurs », p. 113-126.
52- Se creuse ainsi le fossé entre ces approches et celles qui travaillent avec des acteurs sociaux : voir Grove, Richard H., Green Imperialism: Colonial Expansion, Tropical Island Edens and the Origins of Environmentalism, 1600-1860, Cambridge, Cambridge University Press, 1995 Google Scholar ; Schiebinger, Londa et Swan, Claudia (dir.), Colonial Botany: Science, Commerce, and Politics in the Early Modern World, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 2005 Google Scholar, qui accueille notamment l’article de Marie-Noëlle Bourguet, « Measurable Difference: Botany, Climate and the Gardener's Thermometer in Eighteenth- Century France », p. 270-286 ; Safier, Neil, Measuring the New World: Enlightenment Science and South America, Chicago, Chicago University Press, 2008 Google Scholar.
53- Braunstein, Jean-François (dir.), Canguilhem. Histoire des sciences et politique du vivant, Paris, PUF, 2007 Google Scholar ; Bert, Jean-François et Lamy, Jérôme (dir.), Michel Foucault. Un héritage critique, Paris, CNRS Éditions, 2014 Google Scholar, qui publie une interview de S. Schaffer particulièrement intéressante pour notre réflexion. Voir en outre Schaffer, Simon, «How Disciplines Look », in Barry, A. et Born, G. (dir.), Interdisciplinarity: Reconfiguration of the Natural and Social Sciences, Londres, Routledge, 2013, p. 57–81 Google Scholar.
54- Haraway, Donna, Des singes, des cyborgs et des femmes. La réinvention de la nature, trad. par Bonis, O., Paris/Arles, Jacqueline Chambon/Actes Sud, [1991] 2009 Google Scholar ; Id., Manifeste cyborg et autres essais. Sciences, fictions, féminismes, éd. par L. Allard, D. Gardey et N. Magnan, Paris, Exils, 2007 ; Id., Manifeste des espèces de compagnie. Chiens, humains et autres partenaires, trad. par J. Hansen, Paris, Éd. de l’Éclat, [2002] 2010.
55- Simon Schaffer, « Newton à la plage : l’ordre de l’information dans les Principia mathematica » [2005], La fabrique…, op. cit., p. 15-54. Le titre est lui-même un emprunt à l’opéra de Philipp Glass, monté et mis en scène par Robert Wilson, en 1976, Einstein on the Beach.
56- Id., « The Asiatic Enlightenments of British Astronomy », in Schaffer, S. et al. (dir.), The Brokered World: Go-Betweens and Global Intelligence, 1770-1820, Sagamore Beach, Science History Publications, 2009, p. 49–104 Google Scholar.
57- Ibid., p. 51. Sur Tafazzul, voir p. 53.
58- Raj, Kapil, « Mapping Knowledge Go-Betweens in Calcutta, 1770-1820 », in Schaffer, S. et al. (dir.), The Brokered World…, op. cit., p. 105–150 Google Scholar.
59- S. Schaffer, « The Asiatic Enlightenments… », art. cit. p. 53.
60- Id., « Les cérémonies de la mesure. Repenser l’histoire mondiale des sciences », Annales HSS, 70-2, 2015, p. 409-436.
61- Clark, William, Golinski, Jan et Schaffer, Simon (dir.), The Sciences in Enlightened Europe, Chicago, Chicago University Press, 1999 Google Scholar. Pour une analyse d’ensemble de la trajectoire de S. Schaffer, voir Stéphane VAN DAMME, « Laborieuse Nature. Penser le travail des sciences exactes avec Simon Schaffer », La vie des idées, 27 mai 2014, http://www.laviedesidees.fr/Laborieuse-Nature.html.
62- Le paradigme centre/périphérie a été synthétisé dans les années 1960 par Basalla, George, « The Spread of Western Science », Science, 156-3775, 1967, p. 611–622 Google Scholar. Depuis, on notera l’essor de la recherche sur les autres espaces européens. Sur la catholicité, italienne ou ibérique, depuis une bonne dizaine d’années, on renverra notamment à Cañizares-Esguerra, Jorge, Nature, Empire, and Nation: Explorations of the History of Science in the Iberian World, Stanford, Stanford University Press, 2006 Google Scholar ; Bleichmar, Daniela et al. (dir.), Science in the Spanish and Portuguese Empires, 1500-1800, Stanford, Stanford University Press, 2009 Google Scholar. Voir Romano, Antonella (dir.), Rome et la science moderne entre Renaissance et Lumières, Rome, École française de Rome, 2008 Google Scholar ; Andretta, Elisa, Roma medica. Histoire d’un système médical au XVIe siècle, Rome, École française de Rome, 2011 Google Scholar. Plus généralement les géographies de la production des savoirs ont été au coeur de recherches abondantes qui ont toutes contribué au décentrement des questionnaires et des zones de l’enquête : Cook, Harold J., Matters of Exchange: Commerce, Medicine, and Science in the Dutch Golden Age, New Haven, Yale University Press, 2007 Google Scholar ; Günergun, Feza et Raina, Dhruv (dir.), Science between Europe and Asia: Historical Studies on the Transmission, Adoption and Adaptation of Knowledge, New York, Springer, 2011 Google Scholar ; Kontler, László et al. (dir.), Negotiating Knowledge in Early Modern Empires: A Decentered View, New York, Palgrave Macmillan, 2014 Google Scholar.
63- Le primat mathématique italien de la Renaissance a pris fin avec la périphérisation de l’Italie dès lors que celle-ci n’avait plus de Galilée en réserve et que le modèle de la panthéonisation est passé par celui du martyre. La légende noire qui a pesé sur la péninsule Ibérique est profondément associée au récit de son incapacité à avoir pris le train de la modernité au moment opportun.
64- Le modèle de la révolution scientifique est aussi physico-mathématique, comme on a pu le souligner plus haut.C’est donc à l’aune de l’essor de ce domaine qu’a été mesurée la modernisation, dans la logique d’une vision téléologique de l’histoire qui proposait une continuité entre la « révolution scientifique » et la « révolution industrielle ». Le déplacement des questionnaires des sciences physico-mathématiques vers celles de la nature a ainsi été essentiel dans la recomposition des agendas de la recherche, dans les trente dernières années, avec une accélération accrue depuis le début des années 2000.
65- Needham, Joseph, La science chinoise et l’Occident. Le grand titrage, trad. par Jacob, E., Dessureault, R. et Rey, J.-M., Paris, Éd. du Seuil, [1969] 1973, p. 55 Google Scholar. Pour une lecture critique, voir Kapil Raj, « Rescuing Science from Civilisation: Commerce, Circulation and the ‘Asiatic Mode of (Knowledge) Production’ until c. 1700 », in A. Bala (dir.), The Bright Dark Ages: Rethinking Needham's Grand Question, à paraître.
66- Voir, à cet égard, le recueil d’articles de Raj, Kapil, Relocating Modern Science: Circulation and the Construction of Knowledge in South Asia and Europe, 1650-1900, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2007, et sa stimulante introduction, p. 1–26 Google Scholar.
67- Voir supra n. 62.
68- S. Schaffer, La fabrique…, op. cit., p. 8.
69- S. Schaffer, « Les cérémonies… », art. cit., p. 410.
70- Ibid. : « il ne s’agit pas ici de prolonger les propositions de cette ethnographie universelle d’un système rituel global », p. 422.
71- À partir de l’ouvrage de Revel, Jacques (dir.), Jeux d’échelles. La micro-analyse à l’expérience, Paris, Gallimard/Seuil, 1996 Google Scholar, issu d’un séminaire de recherche de l’EHESS, les enquêtes et débats se sont multipliés dans la décennie suivante, posant avec acuité la question des échelles en même temps que celle des méthodes. À titre de rappel, les propositions d’histoire croisée et d’histoires connectées se sont développées en parallèle : en 2001, le no 56-1 des Annales HSS contient deux dossiers : «Une histoire à l’échelle globale. Braudel et l’Asie », est composé de deux articles de Roy Bin Wong (” Entre monde et nation : les régions braudéliennes en Asie », p. 5-41) et Maurice Aymard (” De la Méditerranée à l’Asie : une comparaison nécessaire [commentaire] », p. 43-50) adoptant une perspective économique ; « Temps croisés, mondes mêlés » réunit deux articles de Sanjay Subramanhyam («Du Tage au Gange au XVIe siècle : une conjoncture millénariste à l’échelle eurasiatique », p. 51-84) et de Serge Gruzinski (” Les mondes mêlés de la Monarchie catholique et autres ‘connected histories’ », p. 85- 117), discutés par Roger Chartier (” La conscience de la globalité [commentaire] », p. 119-123) selon un point de vue culturel. Dans les mêmes années, le livre de Werner, Michael et Zimmermann, Bénédicte (dir.), De la comparaison à l’histoire croisée, Paris, Seuil, 2004 Google Scholar, pose la question des échelles de l’analyse en des termes distincts.
72- S. Schaffer, La fabrique…, op. cit., p. 7.
73- Id., « The Asiatic Enlightenments… », art. cit.
74- Pollock, Sheldon, « Future Philology ? The Fate of a Soft Science in a Hard World », Critical Inquiry, 35-4, 2009, p. 931–961 Google Scholar.
75- La découverte de Michel Foucault est plus précoce pour lui que pour ses collègues du monde anglophone : elle intervient à l’occasion de son séjour à Paris au début des années 1980 et de la fréquentation des cours du Collège de France. Voir Schaffer, Simon, « Taxonomie, discipline, colonies : Foucault et la Sociology of Knowledge. Entretien avec Simon Schaffer », in Bert, J.-F. et Lamy, J. (dir.), Michel Foucault…, op. cit., p. 363–374, ici p. 364-365Google Scholar.
76- Schaffer, S., « Mesurer la vertu : eudiométrie, Lumières et médecine pneumatique » [2006], La fabrique…, op. cit., p. 217–257 Google Scholar ; voir aussi p. 12.
77- Id., « Les techniques de l’expérimentateur, les mains du teinturier et le planétarium électrique » [1997], ibid., p. 171-216, ici p. 216.
78- Id., « Quand les astronomes marquent leur temps. Discipline et ‘équation personnelle’ » [1991], ibid., p. 259-297, ici p. 263. On doit noter qu’il s’agit d’un des plus anciens articles publiés dans le volume français.
79- Ibid.
80- Id., « Taxonomie, discipline, colonies… », art. cit., p. 371.
81- Id., La fabrique…, op. cit., p. 7.
82- Sur ce point, un seul article ne suffirait pas à poser les jalons d’une histoire faite de divergences profondes et de projets d’alliances, dont le programme « Sciences, technologie et société » constituerait l’expression la plus contemporaine, à l’instar de l’étude des « technosciences ».
83- Sur le versant d’une réévaluation européenne, on renvoie à Jan De Vries et à son approche des mutations technologiques de l’Europe moderne en termes de « révolution industrieuse » ; Vries, Jan De, The Industrious Revolution: Consumer Demand and the Household Economy, 1650 to the Present, Cambridge, Cambridge University Press, 2008 Google Scholar. Sur le versant de l’histoire globale, on se réfère à la proposition de Pomeranz, Kenneth, Une grande divergence. La Chine, l’Europe et la construction de l’économie mondiale, trad. par Wang, N. et Arnoux, M., Paris, Albin Michel/MSH, [2000] 2010 Google Scholar, qui rouvre la « question de Needham ».
84- Schaffer, Simon, « L’inventaire de l’astronome. Le commerce d’instruments scientifiques au XVIIIe siècle (Angleterre-Chine-Pacifique) », Annales HSS, 60-4, 2005, p. 791–815 Google Scholar. On en rappelle l’objectif : « Deux aspects de l’usage des instruments sont ici envisagés : construisant du savoir, ils agissent comme médiateurs entre le monde et leurs utilisateurs ; en élaborant des communautés de savoir, ils opèrent une médiation entre les différents utilisateurs. L’histoire des sciences a cherché ces derniers temps à démontrer l’articulation entre ces deux usages, car la question du savoir relève de l’ordre social » (p. 791).
85- Id., La fabrique…, op. cit., p. 7.
86- Ibid., p. 8.
87- Ibid.
88- Id., « La philosophie naturelle et le spectacle public au XVIIIe siècle » [1983], La fabrique…, op. cit., p. 115-170.
89- S. Schaffer, La fabrique…, op. cit., p. 11-12.
90- Ibid., p. 7 sq.
91- S. Schaffer fait référence aux Voyages de Gulliver de Jonathan Swift (1726), aux Voyages contenant la description des États du Grand Mogol de François Bernier (1699) et aux Lettres persanes de Montesquieu (1721).
92- Subrahmanyam, Sanjay, « Hearing Voices: Vignettes of Early Modernity in South Asia, 1400-1750 », Daedalus, 127-3, 1998, p. 75–104, ici p. 99-100Google Scholar.
93- Bertrand, Romain, L’histoire à parts égales. Récits d’une rencontre Orient-Occident, XVIe-XVIIe siècle, Paris, Éd. du Seuil, 2011 Google Scholar ; voir la discussion critique de cet ouvrage dans Monde(s). Histoire, espaces, relations, 3, 2013, p. 147-169.
94- On renverra à un exercice du même type chez Gruzinski, Serge, Quelle heure est-il là-bas ? Amérique et islam à l’orée des Temps modernes, Paris, Éd. du Seuil, 2008 Google Scholar.
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- Cited by
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Translation available: Making the History of Early Modern Science: Reflections on a Discipline in the Age of Globalization *