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Une vie sur plusieurs continents: Microhistoire globale d’un agent arménien de la Compagnie des Indes orientales, 1666-1688
Published online by Cambridge University Press: 24 May 2019
Résumés
En 1666, Jean-Baptiste Colbert décidait d’engager Martin di Marcara Avachinz, un marchand arménien originaire de Perse et d’Inde, comme agent de la Compagnie française des Indes orientales nouvellement instituée. Ce dernier réussit à négocier, auprès du souverain du sultanat de Golconde, l’octroi d’un édit qui permettait aux Français d’ouvrir un comptoir dans le port de Masulipatam en 1669. Cependant, peu de temps après, Marcara fut brutalement arrêté, torturé et envoyé en France par ordre de son supérieur, François Caron. Cet article propose une analyse fouillée des factums, les mémoires judiciaires produits durant son procès tenu à Paris à la suite de sa libération en 1675. À travers une « microhistoire globale » de la vie de Marcara, suivie d’un continent à l’autre, il s’agit de mieux comprendre les mécanismes du commerce de longue distance dans l’océan Indien. L’enjeu est d’abord de comparer le réseau de la Compagnie française des Indes orientales et des autres compagnies à charte avec celui des diasporas négociantes « sans État », représentées ici par les marchands arméniens venus de la Nouvelle-Djoulfa, la ville d’où est originaire Marcara, à la périphérie de la capitale safavide Ispahan. L’article examine ensuite le fonctionnement et le rôle des factums dans la France de l’époque moderne. Enfin, il revient sur la façon dont l’histoire « exceptionnellement normale » de la vie de Marcara témoigne des perceptions françaises de l’Orient, notamment de l’hostilité et de la crainte à l’égard de certaines communautés de marchands, banquiers et courtiers arméniens et indiens.
Abstracts
In 1666, French minister of finance Jean Baptist Colbert hired Martin di Marcara Avachinz, an Armenian merchant from Iran and India, as an agent for his newly established Compagnie française des Indes orientales. Soon after the Armenian secured a royal edict from the ruler of the sultanate of Golconda (Southern India) to set up a French trading center in the port of Masulipatam in 1669, he was summarily arrested, tortured, and sent to France by his superior François Caron. This article provides a close reading of judicial sources known as factums, produced during Marcara’s sensational trial following his release from prison in 1675. Through a “global microhistory” of Marcara’s life across continents, this essay seeks to contribute to a deeper understanding of early modern long-distance trade in the Indian Ocean. It does so by comparing the network of the Compagnie des Indes orientales and other joint-stock corporations with the “stateless” nature of the trade diaspora network represented by Armenian merchants from Marcara’s township of New Julfa on the outskirts of the Safavid capital of Isfahan. The essay sheds light on how factums functioned in early modern France and concludes by exploring how the “exceptionally normal” story of Marcara’s life provides a useful window onto French perceptions of the Orient and the fear induced by certain mercantile communities such as Armenian and Indian bankers and brokers.
- Type
- Micro-analyse et histoire globale
- Information
- Copyright
- © Éditions de l'EHESS
Footnotes
Je tiens à remercier Houri Berberian, Olivier Raveux, Guillaume Calafat, Sanjay Subrahmanyam, Cátia Antunes, Fahad Bishara, Zara Pogossian, John-Paul Ghobrial, Maxine Berg, Romain Bertrand et Michael O’Sullivan pour les commentaires apportés aux premières versions de ce texte. Je remercie également Thierry Oharera pour l’aide indispensable apportée à la vérification de mes traductions du français. Cet article a également bénéficié des commentaires et des suggestions des relecteurs anonymes des Annales qui m’ont aidé à en renforcer les principales thèses. Je suis bien évidemment seul responsable des erreurs éventuelles et des partis pris qui subsistent.
References
1 Domingo Fernández Navarrete, Tratados historicos, politicos, ethicos, y religiosos de la monarchia de China. Descripcion breve de aquel imperio y exemplos raros de emperadores y magistrados del, Madrid, Imprenta Real, 1676. Je m’appuie ici sur la traduction anglaise : « An Account of the Empire of China, Historical, Political, Moral and Religious, Written in Spanish », in A Collection of Voyages and Travels, Some Now First Printed from Original Manuscripts, Others Translated Out of Foreign Languages, and Now First Published in English, Londres, Awnsham and John Churchill, 1704, vol. 1. Voir également Cummins, James S. (éd.), The Travels and Controversies of Friar Domingo Navarrete, 1618-1686, Cambridge, Hakluyt Society at the University Press, 1962, 2 volGoogle Scholar.
2 D. Fernández Navarrete, « An Account of the Empire of China… », op. cit., p. 323. Bien que Navarrete qualifie Marcara de « directeur » du comptoir de Masulipatam, la question de sa position exacte au sein de la compagnie n’est pas claire.
3 Subrahmanyam, Sanjay, Three Ways to Be Alien: Travails and Encounters in the Early Modern World, Waltham, Brandeis University Press, 2011, p. 20Google Scholar [Comment être un étranger. Goa-Ispahan-Venise, xvie-xviiie siècles, trad. par M. Dennehy, Paris, Alma, 2013].
4 D. Fernández Navarrete, « An Account of the Empire of China… », op. cit., p. 323.
5 Kaeppelin, Paul, La Compagnie des Indes orientales et Francois Martin. Étude sur l’histoire du commerce et des établissements français dans l’Inde sous Louis XIV (1664-1719), Paris, A. Challamel, 1908Google Scholar.
6 Rantoandro, Gabriel, « Un marchand arménien au service de la Compagnie française des Indes : Marcara Avanchinz », Archipel, 17, 1979, p. 99-114CrossRefGoogle Scholar.
7 Ménard-Jacob, Marie, La première Compagnie des Indes, 1664-1704. Apprentissages, échecs et héritage, Rennes, Pur, 2016, p. 137-138Google Scholar, 183-184 et 205. Cette étude contient plusieurs passages intéressants sur Marcara (appelé Macara), mais elle ne fait aucun usage direct des factums. Baghdiantz McCabe, Ina, The Shah’s Silk for Europe’s Silver: The Eurasian Trade of the Julfa Armenians in Safavid Iran and India, 1530-1750, Atlanta, Scholars Press, 1999, p. 295-325Google Scholar, suivant les pistes tracées par Rantoandro, consacre un chapitre à l’« affaire Marcara ». Toutefois, elle rassemble une documentation d’origine européenne incomplète sur Marcara, l’interprète mal et néglige absolument les archives du monastère du Saint-Sauveur de la Nouvelle-Djoulfa, à Ispahan, qui contiennent des milliers de pièces sur les réseaux marchands arméniens dans l’océan Indien.
8 Le terme a été avancé par Andrade, Tonio, « A Chinese Farmer, Two African Boys, and a Warlord: Toward a Global Microhistory », Journal of World History, 21-4, 2010, p. 573-591Google Scholar. Voir également Aslanian, Sebouh David et al., « AHR Conversation: How Size Matters: The Question of Scale in History », The American Historical Review, 118-5, 2013, p. 1431-1472CrossRefGoogle Scholar ; Trivellato, Francesca, « Is There a Future for Italian Microhistory in the Age of Global History ? », California Italian Studies, 2-1, 2011, p. 1-22Google Scholar, https://escholarship.org/uc/item/0z94n9hq ; Ghobrial, John-Paul A., « The Secret Life of Elias of Babylon and the Uses of Global Microhistory », Past and Present, 222-1, 2014, p. 51-93CrossRefGoogle Scholar.
9 F. Trivellato, « Is There a Future… », art. cit., p. 4-5.
10 Sur la Cio et le commerce français dans l’océan Indien, voir P. Kaeppelin, La Compagnie des Indes orientales et Francois Martin…, op. cit. ; Sottas, Jules, Histoire de la Compagnie royale des Indes orientales, 1664-1719, Paris, Plon-Nourrit, 1905Google Scholar ; Cole, Charles Woolsey, Colbert and a Century of French Mercantilism, New York, Columbia University Press, 1939, vol. 1, p. 475-532Google Scholar ; Ames, Glenn Joseph, « Colbert’s Indian Ocean Strategy of 1664-1674: A Reappraisal », French Historical Studies, 16-3, 1990, p. 536-559CrossRefGoogle Scholar ; Id., Colbert, Mercantilism, and the French Quest for Asian Trade, DeKalb, Northern Illinois University Press, 1996 ; M. Ménard-Jacob, La première Compagnie des Indes…, op. cit.
11 Declaration du Roy. L’une, portant etablissement d’une compagnie pour le commerce des Indes orientales, l’autre en faveur des officiers de son conseil & cours souveraines interessées en ladite compagnie, & en celle des Indes occidentales, Paris, Par les imprimeurs ordinaires du roy, 1664, art. xxvii, xxxi, xxvi et xxviii. Cette charte contient quarante-huit articles. On en trouve une copie dans Paris, Bibliothèque nationale de France (ci-après BNF), ms. fr. 8972, « Recueil de pièces, la plupart imprimées, sur la Compagnie française pour le commerce des Indes orientales ». Voir également J. Sottas, Histoire de la Compagnie royale des Indes orientales…, op. cit., p. 10-14.
12 Adams, Julia, « Principals and Agents, Colonialists and Company Men: The Decay of Colonial Control in the Dutch East Indies », American Sociological Review, 61-1, 1996, p. 12-28CrossRefGoogle Scholar, ici p. 13. Pour une discussion, voir Steensgaard, Niels, « The Companies as a Specific Institution in the History of European Expansion », in Boulle, P. H., Companies and Trade: Essays on Overseas Trading Companies during the Ancien Régime, éd. par L. Blussé et F. Gaastra, Leyde, Leiden University Press, 1981, p. 245-264CrossRefGoogle Scholar ; Prakash, Om, The New Cambridge History of India, vol. 5, European Commercial Enterprise in Pre-Colonial India, Cambridge, Cambridge University Press, 1998Google Scholar, chap. 3 ; Dermigny, Louis, « Le fonctionnement des Compagnies des Indes. East India Company et Compagnie des Indes », in Mollat, M. (dir.), Sociétés et compagnies de commerce en Orient et dans l’océan Indien, Beyrouth, H. Eid, 1970, p. 453-466Google Scholar.
13 Stern, Philip J., The Company-State: Corporate Sovereignty and the Early Modern Foundations of the British Empire in India, Oxford, Oxford University Press, 2011, p. 3CrossRefGoogle Scholar et 61. Cependant, il est important de noter que, de facto, jusqu’au milieu du xviiie siècle, la compagnie n’avait pas, dans l’océan Indien, la puissance financière ou militaire qui lui aurait permis d’agir comme un pouvoir colonial.
14 L. Dermigny, « Le fonctionnement des Compagnies des Indes… », art. cit., p. 459 ; G. J. Ames, Colbert, Mercantilism, and the French Quest…, op. cit., p. 19 ; Dirk Van der Cruysse, Louis XIV et le Siam, Paris, Fayard, 1991, p. 125 ; Carré, Barthélemy, Le courrier du roi en Orient. Relations de deux voyages en Perse et en Inde, 1668-1674, éd. par D. Van der Cruysse, Paris, Fayard, 2005, p. 29Google Scholar.
15 G. J. Ames, « Colbert’s Indian Ocean Strategy… », art. cit., p. 539. Sur les différences importantes entre grandes compagnies des Indes orientales, voir Morineau, Michel, Les grandes compagnies des Indes orientales, xvie-xixe siècles, Paris, Puf, 1994, p. 45Google Scholar, et l’essai de L. Dermigny, « Le fonctionnement des Compagnies des Indes… », art. cit.
16 D. Van der Cruysse, Siam and the West…, op. cit., p. 102.
17 L. Dermigny, « Le fonctionnement des Compagnies des Indes… », art. cit., p. 454.
18 S. Subrahmanyam, Three Ways to Be Alien…, op. cit., p. 19 ; G. J. Ames, « Colbert’s Indian Ocean Strategy… », art. cit., p. 541.
19 D. Van der Cruysse, Siam and the West…, op. cit., p. 103 ; B. Carré, Le courrier du roi en Orient…, op. cit., p. 30.
20 Sur la place de Caron dans la première Cio, voir M. Ménard-Jacob, La première Compagnie des Indes…, op. cit., p. 35-38.
21 Boxer, Charles R., « Introduction », in Caron, F. et Schouten, J., A True Description of the Mighty Kingdoms of Japan and Siam, éd. par C. R. Boxer, Londres, The Argonaut Press, 1935, p. xcvGoogle Scholar ; Id., The Dutch Seaborne Empire, 1600-1800, Londres, Hutchinson, 1965, p. 57.
22 Pearson, Michael, The Indian Ocean, Londres, Routledge, 2003, p. 157CrossRefGoogle Scholar. Sur le commerce privé et la Voc, voir C. R. Boxer, The Dutch Seaborne Empire…, op. cit., p. 225-226. Sur la vie de famille de Caron à Batavia dans les années 1640, voir Taylor, Jean Gelman, The Social World of Batavia: Europeans and Eurasians in Colonial Indonesia, Wisconsin, University of Wisconsin Press, 2009, p. 43-45Google Scholar.
23 François Martin, Mémoires de François Martin, fondateur de Pondichéry (1665-1696), éd. par A. Martineau, Paris, Société d’éditions géographiques, maritimes et coloniales, 1931-1934, vol. 1, p. 99, cité dans Furber, Holden, Rival Empires of Trade in the Orient, 1600-1800, Minneapolis, University of Minnesota Press, 1976, p. 106Google Scholar.
24 C. H. Boxer, « Introduction », art. cit., p. cx.
25 Abbé Carré, The Travels of the Abbé Carré in India and the Near East, 1672 to 1674, 3 vol., trad. par M. Fawcette, éd. par C. Fawcett, New Delhi, Asian Educational Services, [1947] 1990, reprint, vol. 2, p. 381 ; B. Carré, Le courrier du roi en Orient…, op. cit., p. 708.
26 Sur le déclin de la compagnie, voir G. J. Ames, Colbert, Mercantilism, and the French Quest…, op. cit., p. 186-191 ; M. Ménard-Jacob, La première Compagnie des Indes…, op. cit., p. 280-285 ; O. Prakash, European Commercial Enterprise…, op. cit., p. 79-80.
27 Sur le réseau djoulfiote, voir Shushanik Khachikian, Nor Jughayi hay vacharakanut’iwnĕ ev nra arṙevtratntesakan kaperě Rusastani het xvii-xviii darerum [Le commerce arménien de la Nouvelle-Djoulfa et ses liens commerciaux et économiques avec la Russie aux xviie et xviiie siècles], Erevan, Haykakan Ssh Ga Hratarakch’ut’yun, 1988 ; Edmund M. Herzig, « The Armenian Merchants of New Julfa, Isfahan: A Study in Pre-modern Asian Trade », Ph. D., St. Antony’s College, Université d’Oxford, 1991 ; Aslanian, Sebouh David, From the Indian Ocean to the Mediterranean: The Global Trade Networks of Armenian Merchants from New Julfa, Berkeley, University of California Press, 2011Google Scholar.
28 Pour une comparaison de la structure sociale agnatique des Djoulfiotes et des corporations à actions de leurs homologues européens, voir Aslanian, Sebouh David, « Julfan Merchants and European East India Companies: Overland Trade, Protection Costs, and the Limits of Collective Self-Representation in Early Modern Period », in Kondo, N. (dir.), Mapping Safavid Iran, Tokyo, Tokyo University of Foreign Studies, 2015, p. 189-222Google Scholar.
29 Sur le concept de « go-between », voir Schaffer, Simon et al. (dir.), The Brokered World: Go-Betweens and Global Intelligence, 1770-1820, Sagamore Beach, Science History Publications, 2009Google Scholar, en particulier Kapil Raj, « Mapping Knowledge Go-Betweens in Calcutta, 1770-1820 » et Sanjay Subrahmanyam, « Between a Rock and a Hard Place: Some Afterthoughts », respectivement p. 105-150 et 429-440.
30 Sur l’ambassade de Khwaja Israel di Sarhat’s à la cour moghole en 1716, voir Londres, British Library (ci-après BL), IOR H/Misc/69.
31 BNF, ms. fr. 8972, f. 68v, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 2.
32 BNF, ms. fr. 8972, f. 68v, p. 2.
33 BNF, ms. fr. 8972, f. 68v, p. 2.
34 La correspondance personnelle et commerciale d’Agha di Mattus est archivée dans le fonds « Aquisti e Doni, 123 and 124 » des Archives d’État de Florence (ci-après ASFI) ; un de ses livres de comptes est conservé à Venise au sein des Archives de la bibliothèque du Museo Correr, « Tomar Book », P.D. 66.c.
35 Ruply était un Djoulfiote catholique qui avait déménagé à Alep puis à Smyrne près de six ou sept ans avant que des circonstances ne le poussent à faire publier un factum, vers 1678, présentant son cas à la population parisienne et, tout particulièrement, à Louis XIV, dont il recherchait la protection durant son procès. Il raconte son histoire d’une manière remarquablement proche du récit de Marcara, voyageant à Alep, Smyrne, Naples, Rome, Gênes et Venise, avant de s’établir à Livourne, puis de s’installer en France, où on lui vola ses diamants. Son procès sensationnel fut conclu en sa faveur à Paris au milieu des années 1670, précisément au moment où celui de Marcara commençait. Pour plus de détails sur le cas de Ruply, voir Memoires Servans A l’eclaircisessement des faits inserez en la plainte presentée a Sa Majesté par le sieur Raphael Ruply negociant Armenien de la ville d’Hispahan, demandeur & accusateur [non daté, 1678 ?], in Nouvelle requête du sieur Ruply, avec la réponse du sieur Martinon et les réplique dudit Ruply, dont nosseigneurs les commissaires sont très humblement suppliés de vouloir prendre la lecture, s. l., s. d.
36 BNF, ms. fr. 8972, f. 68v, p. 2-3. Ce manuscrit ne mentionne pas le nom du banquier mais l’édition postérieure, dans le ms. 20564, fournit le nom de « Joseph Armand », orthographe francisée de Giuseppe Armano.
37 Ce que confirme l’article récent Mazzei, de Rita, « Un mercante al servizio della Serenissima Repubblica. Il ‘console’ veneto Giuseppe Armano nella Livorno del Seicento », Rivista storica italiana, 128-3, 2016, p. 849-890Google Scholar, ici p. 868. Voir Archivio di Stato di Livorno, Capitano poi Governatore ed Auditore, 2607, f. 44 et 424, pour plus de renseignements sur Giuseppe Armano et l’argent qu’il devait à des marchands arméniens, Aghamal Sawali et Martino di Marcara (c’est-à-dire Marcara Avachintz). Le f. 424 contient une supplique de Marcara selon laquelle Armano lui aurait volé des balles de soie (il est fait mention de six ou sept connaissements portant témoignage de ces transactions). Le rescrit au bas de la supplique porte la date du 17 août 1662 ; Marcara est alors en prison à Florence depuis deux ans. Le f. 44, rescrit du 10 mai 1659, donne des références au procès intenté par Marcara devant le tribunal de la Mercanzia de Florence afin de solder ses comptes avec Armano. Les informations fournies ici semblent correspondre aux déclarations de Marcara dans les mémoires imprimés à Paris.
38 BNF, ms. fr. 8972, f. 69r. Pour Francis Richard, l’évêque de Babylone est Monseigneur Duchemin (Placide Louis du Chemin). Voir Raphaël du Mans, Raphaël du Mans. Missionnaire en Perse au xviie siècle, vol. 2, Estats et mémoire, éd. par F. Richard, Paris, Société d’histoire de l’Orient/L’Harmattan, 1995, p. 279, n. 389 ; A Chronicle of the Carmelites in Persia and the Papal Mission of the xviith and xviiith Centuries, Londres, Eyre and Spottiswoode, 1939, vol. 1, p. 402.
39 BNF, ms. fr. 8972, f. 193v-223v, Instruction memorable contenant les contestations d’entre Martin Marcara Avachin gentilhomme persan […] et les sieurs directeurs generaux de la Compagnie.
40 BNF, ms. fr. 8972, f. 195v, Instruction memorable…
41 BNF, ms. fr. 8972, f. 196, Instruction memorable…
42 Muir, Edward et Ruggiero, Guido, « Introduction: The Crime of History », in Muir, E. et Ruggiero, G. (dir.), History From Crime, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1994, p. viiGoogle Scholar.
43 Fleuriaud, Geoffrey, « Le factum et la recherche historique contemporaine. La fin d’un malentendu ? », Revue de la Bnf, 37-1, 2011, p. 49-53Google Scholar, ici p. 49.
44 Ibid.
45 Maza, Sarah, « Le tribunal de la nation. Les mémoires judiciaires et l’opinion publique à la fin de l’Ancien Régime », Annales ESC, 42-1, 1987, p. 73-90Google Scholar ; Id., Private Lives and Public Affairs: The Causes Célèbres of Prerevolutionary France, Berkeley, University of California Press, 1993, p. 8.
46 Bell, David A., Lawyers and Citizens: The Making of a Political Elite in Old Regime France, Oxford, Oxford University Press, 1994, p. 31Google Scholar.
47 Biet, Christian, « Judicial Fiction and Literary Fiction: The Example of the Factum », Law and Literature, 20-3, 2008, p. 403-422CrossRefGoogle Scholar, ici p. 403 ; S. Maza, Private Lives and Public Affairs…, op. cit., p. 15.
48 Ibid., p. 15 ; Davis, Natalie Zemon, Fiction in the Archives: Pardon Tales and Their Tellers in Sixteenth-Century France, Stanford, Stanford University Press, 1987, p. 3Google Scholar.
49 S. Maza, Private Lives and Public Affairs…, op. cit., p. 15.
50 Comme l’a entrevu l’étude de G. Rantoandro, « Un marchand arménien… », art. cit., p. 100. En revanche, I. Baghdiantz McCabe, The Shah’s Silk for Europe’s Silver…, op. cit., p. 299, néglige absolument cet aspect.
51 BNF, ms. fr. 8972, f. 91, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 47.
52 Ibid. Le vrai frère de Marcara, Hovannes ou Jean, mourut à Chinsura et non pas à Paris en 1697.
53 BNF, ms. fr. 8972, f. 92v, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 50.
54 « Requeste d’employ servant d’abondant de justification pour lesdits Sieurs Marcara & fils contre lesdits Sieurs Directeurs des Indes Orientales », in Plaintes universelles sur les ruines des déprédations et interruption du commerce, s. l., s. d., f. 102r.
55 Se référant à l’amitié de Francois de Lopis, marquis de Mondevergue, envers Marcara, Colbert écrit : « cette conduite est attribuée à une grande amitié qu’il a pour le sieur Marcara, Persien-Arménien auquel il a fait donner, de son autorité, une charge de conseiller au conseil et augmenté ses appointemens jusqu’à 7 200 livres par an » (« Sur L’estat Présent de la Compagnie Orientale de France Dans L’isle Dauphine et dans les Indes », in J.-B. Colbert, Lettres, instructions et mémoires de Colbert, éd. par P. Clément, Paris, Imprimerie impériale, 1865, vol. 3, partie 2, p. 425).
56 M. Ménard-Jacob, La première Compagnie des Indes…, op. cit., p. 34-51.
57 C. W. Cole, Colbert and a Century of French Mercantilism, op. cit., vol. 1, p. 513 ; G. J. Ames, Colbert, Mercantilism, and the French Quest…, op. cit., p. 37 (c’est moi qui souligne).
58 G. Rantoandro, « Un marchand arménien… », art. cit., p. 103.
59 Ibid., p. 112, n. 17.
60 Abbé Carré, The Travels of the Abbé Carré in India and the Near East…, op. cit., vol. 3, p. 787 ; B. Carré, Le courrier du roi en Orient…, op. cit., p. 1003-1004.
61 BL, IOR, « Factory Record », G/36/105, f. 185.
62 Aix-en-Provence, Archives nationales d’outre-mer (ci-après ANOM), C 2 63, f. 59r.
63 D. Fernández Navarrete, « An Account of the Empire of China… », op. cit., vol. 1, p. 323.
64 Urbain Souchu de Rennefort, Mémoires pour servir a l’histoire des Indes orientales contenans la navigation des quatre premiers vaisseaux de la Compagnie ; l’établissement du conseil souverain à l’Isle de Madagascar, pour le gouvernement des Indes orientales. Le Voyage de monsieur de Mondevergue viceroy des Indes, & admiral des mers par de-là l’Équateur. Le recit succint de l’expedition de monsieur de La Haye, successeur de monsieur de Mondevergue ; l’abandonnement de l’isle de Madagascar ; la prise & la perte de la ville de S. Thomé sur la côte de Coromandel, Paris, A. Seneuze, 1688, p. 243.
65 M. Ménard-Jacob, La première Compagnie des Indes…, op. cit., p. 44.
66 J.-B. Colbert, « Sur L’estat Présent de la Compagnie Orientale de France… », op. cit., p. 425.
67 F. Martin, Mémoires…, op. cit., vol. 1, p. 203-204 ; J. Sottas, Histoire de la Compagnie royale des Indes orientales…, op. cit., p. 45 ; M. Ménard-Jacob, La première Compagnie des Indes…, op. cit., p. 96-97. François de La Boullaye Le Gouz et Nicolas Claud de Lalain avaient visité une première fois l’Iran en 1665 afin d’obtenir des privilèges pour établir une base à Bandar Abbas. Sur La Boullaye Le Gouz et l’histoire des relations entre la France et la Perse safavide, voir Lawrence Lockhart, The Fall of the Ṣafavī Dynasty and the Afghan Occupation of Persia, Cambridge, Cambridge University Press, 1958, p. 430-431. Il fallut presque deux ans pour qu’une première flotte française arrive dans le comptoir de Surat.
68 G. Rantoandro, « Un marchand arménien… », art. cit., p. 103-104. Écrivant à un correspondant inconnu, probablement autour de 1668 lorsque le Hollandais et l’Arménien étaient encore en bons termes, Caron explique : « Sçachant que vous aviez beaucoup d’affection pour luy, je le servis en tout ce qui m’a esté possible, si bien qu’il vint aux Indes avec moy, avec les mesmes estats et appointements qu’avoit feu Monsieur De Ligne, et je puis vous asseurer que Monsieur le Vice-roy (De Mondevergue), vostre bon amy, et moy, avons bien fait nostre devoir sur ce sujet… » (ibid., p. 113).
69 BNF, ms. fr. 8972, f. 72v, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 10.
70 BNF, ms. fr. 8972, f. 72, p. 9.
71 BNF, ms. fr. 8972, f. 72, p. 9.
72 BNF, ms. fr. 8972, f. 72, p. 9.
73 BNF, ms. fr. 8972, f. 73, p. 10.
74 BNF, Nouvelle acquisition française (ci-après Naf) 9352, lettre écrite par Marcara depuis Masulipatam, 12 janv. 1670, f. 39 sq. Voir P. Kaeppelin, La Compagnie des Indes orientales et Francois Martin…, op. cit., p. 67. G. Rantoandro, « Un marchand arménien… », art. cit., p. 106, mentionne une somme de 150 000 livres.
75 Agnazarbec est décrit comme un converti à l’islam ou un « renégat » par Martin, officiel de la Cio et ennemi de Marcara, qui, plus tard, s’éleva au rang de directeur de la compagnie et fut l’architecte de ses fortunes en Inde. Dans ses Mémoires, Martin rappelle comment, alors qu’il campait avec son entourage en dehors de la cité de Golconde le 15 juin 1670, il fut visité par un certain « Agnazarbek un Arménien renié, joaillier du roi de Golconde, assez en crédit à la cour, ami particulier de Macara ». Il note également qu’Agnazarbek était « suivi de 11 ou 12 marchands arméniens dont il est le protecteur » (F. Martin, Mémoires…, op. cit., vol. 1, p. 262). La relation de François Bernier, philosophe et voyageur français au service de la Compagnie des Indes, célèbre chirurgien à la cour de l’empereur moghol Aurangzeb, confirme le récit de Martin sur Agnazarbec. Bernier semble apprécier la haute position d’Agnazarbec, ou Haknatsar [Hakhnazar], dans la politique intérieure et l’administration de la cour de Golconde. Voir Morison, Theodore, « Minute by M. Bernier upon the Establishment of Trade in the Indies dated 10th March, 1668 », Journal of the Royal Asiatic Society, 1-1, 1933, p. 1-23Google Scholar, ici p. 17 ; Castonnet des Fosses, Henri (éd.), « François Bernier : documents inédits sur son séjour dans l’Inde », Mémoires de la société nationale d’agriculture, sciences et arts d’Angers, 26, 1884, p. 209-242Google Scholar. Pour des études sur Bernier, voir Burke, Peter, « The Philosopher as Traveler: Bernier’s Orient », in Elsner, J. et Rubiés, J. P. (dir.), Voyages and Visions: Towards a Cultural History of Travel, Londres, Reaktion Books, 1999, p. 124-138Google Scholar ; Tinguely, Frédéric (éd.), Un libertin dans l’Inde moghole. Les voyages de François Bernier (1656-1669), Paris, Chandeigne, 2008Google Scholar. Le véritable nom arménien d’Agnazarbec était en fait Hakhnazar bek (Հախնազար բէկ) et, bien que nous sachions peu de chose à son sujet, nous disposons d’une documentation en arménien concernant ses activités commerciales. Les archives du monastère du Saint-Sauveur à la Nouvelle-Djoulfa (Ispahan) contiennent un dossier de documents datant des années 1680, envoyés depuis Hyderabad. L’un d’eux est un contrat de commenda rédigé à Hyderabad en 1680 entre Martiros di Sargis et Hakhnazarbek, dans lequel ce dernier, qui représente la partie principale de ce contrat, est décrit comme սահապ հախնազար բէկ (Sahab Hakhnazarbek) ou maître Hakhnazarbek. Dans la même liasse, une lettre écrite par le fils de Hakhnazarbek, Mahmad Tagheh, et adressée à l’agent d’Hakhnazar, Martiros, datée du 1 Nadar, l’année d’Azaria 72 (1688), mentionne le père du rédacteur comme étant Hakhnazarbek (Իմ խէր հախ նազար բէկն). Voir Nouvelle-Djoulfa, Archives du monastère du Saint-Sauveur de la Nouvelle-Djoulfa, « Namakner Hayderabatis » (Lettres d’Hyderabad).
76 BNF, ms. fr. 8972, f. 75v et 76, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 16-17.
77 Subrahmanyam, Selon Sanjay, The Political Economy of Commerce: Southern India, 1500-1650, Cambridge, Cambridge University Press, 1990, p. 375CrossRefGoogle Scholar, le terme était « utilisé dans le sultanat de Golconde pour désigner les gouverneurs de zones limitées ».
78 Subrahmanyam, Sanjay, « Persians, Pilgrims and Portuguese: The Travails of Masulipatnam Shipping in the Western Indian Ocean, 1590-1665 », Modern Asian Studies, 22-3, 1988, p. 503-530CrossRefGoogle Scholar, ici p. 507-508.
79 Ibid., p. 504-505.
80 BNF, ms. fr. 8972, f. 76, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 17. Jabarbec fut peu après, en décembre 1669, remplacé au poste de gouverneur par Mahmud Ali Khan.
81 BNF, ms. fr. 8972, f. 76v, p. 18.
82 BNF, ms. fr. 8972, f. 76v, p. 18.
83 BNF, ms. fr. 8972, f. 77, p. 19.
84 BNF, ms. fr. 8972, f. 77v, p. 20.
85 BNF, Naf 9352, f. 39, Marcara Avachinz, « Lettres de Marcara Avachin, datées du comptoir de Mazulipatam, 12 janvier 1670, avec un firman du roi de Golconde ». La même lettre est enregistrée dans ANOM, C 2 62, f. 67r.
86 BNF, Naf 9352, f. 39.
87 Foster, William (éd.), The English Factories in India, 1668-1669, Oxford, The Clarendon Press, 1927, p. 287Google Scholar ; D. Fernández Navarrete, « An Account of the Empire of China… », op. cit., p. 321, décrivait le comptoir français de Masulipatam comme « une vaste et grande demeure ».
88 S. Subrahmanyam, Three Ways to Be Alien…, op. cit., p. 21.
89 I. Baghdiantz McCabe, Shah’s Silk for Europe’s Silver…, op. cit., p. 313-314.
90 Ibid., p. 272.
91 Le shahbandar était d’ordinaire le capitaine du port (littéralement le roi ou le dirigeant du port), mais le terme désignait également un officiel qui servait comme « Prévôt des Marchands » : Sherwani, Arun Khan, History of the Qutb Shāhī Dynasty, New Delhi, Munshiram Manoharlal Publishers, 1978, p. 513Google Scholar.
92 Kōtwāl signifiait l’« officier en charge du droit et de l’ordre dans une ville ». Voir S. Subrahmanyam, The Political Economy of Commerce…, op. cit., p. 375. Sherwani définit cette fonction comme celle de « commissaire de police » (A. K. Sherwani, History of the Qutb Shāhī Dynasty, op. cit., p. 509).
93 « Requeste D’employ… », op. cit., fol. 103v, p. 4 : « que le sieur Marcara avoit fait une dépense considerable dans le voyage de Surate a Golconde à cause des Armeniens ».
94 G. Rantoandro, « Un marchand arménien… », art. cit., p. 109.
95 F. Martin, Mémoires…, op. cit., vol. 1, p. 275.
96 F. Martin, Mémoires…, op. cit., vol. 1, p. 276. Voir également une brève mention de cette violente escarmouche dans S. Subrahmanyam, The Political Economy of Commerce…, op. cit., p. 280.
97 D. Fernández Navarrete, « An Account of the Empire of China… », op. cit., p. 325.
98 F. Martin, Mémoires…, op. cit., vol. 1, p. 282.
99 BNF, ms. fr. 8972, f. 86, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 37. F. Martin, Mémoires…, op. cit., vol. 1, p. 287 et 288, donne la date du 20 octobre. D. Fernández Navarrete, « An Account of the Empire of China… », op. cit., p. 326, qui accompagna également les prisonniers durant leur voyage à Surat, donne la date du 17 octobre, mais établit que son équipage embarqua sur le vaisseau à 11 heures du soir.
100 I. Baghdiantz McCabe, Shah’s Silk for Europe’s Silver…, op. cit., p. 312.
101 Ibid.
102 Sur la notion influente de « capitalisme de portefeuille », voir Subrahmanyam, Sanjay et Bayly, Christopher A., « Portfolio Capitalists and the Political Economy of Early Modern India », The Indian Economic Social History Review, 25-4, 1988, p. 401-424CrossRefGoogle Scholar ; pour une application du terme aux communautés marchandes arméniennes, voir S. D. Aslanian, « Julfan Merchants and the European East India Companies… », art. cit.
103 I. Baghdiantz McCabe, Shah’s Silk for Europe’s Silver…, op. cit., p. 312.
104 Ibid.
105 F. Martin, Mémoires…, op. cit., vol. 1, p. 289.
106 Ibid.: « que la procédure qu’on avait fait[e] à Masulipatam contre lui n’etait pas dans les formes ». Voir également ANOM, C 2 5, f. 172r (pour le dossier original dans les archives de la Cio).
107 F. Martin, Mémoires…, op. cit., vol. 1, p. 289-290.
108 Andrews, Richard Mowery, Law, Magistracy, and Crime in Old Regime Paris, 1735-1789, Cambridge, Cambridge University Press, 1994, p. 27Google Scholar.
109 En qualifiant Marcara et les Arméniens de tricheurs et d’escrocs, la compagnie et son procureur avaient peut-être à l’esprit un certain Philippe de Zagly, véritable imposteur qui, comme Marcara, avait voyagé depuis la Nouvelle-Djoulfa jusqu’à Paris dans les années 1660. Utilisant son bel esprit, ses aptitudes linguistiques, sa bonne mine et sa grande curiosité, il était parvenu à duper la bonne société parisienne en se faisant passer pour un noble venu d’Iran. Il publia des mémoires en recomposant son lignage au moment même où se déroulait le procès de Marcara. Zagly se disait le descendant d’un membre de la dynastie safavide. Protégé par une aristocratie parisienne fascinée par le personnage (le duc d’Orléans fut même son parrain lors de sa conversion au catholicisme), il épousa la belle-sœur de Jean-Baptiste Tavernier. L’imposteur arménien fut bientôt découvert mais, habile dissimulateur, il parvint adroitement à déguiser sa véritable identité pendant près de trente ans, profitant des connaissances sommaires que les Français avaient de la Perse. Par conséquent, sous le nom de Philippe, comte de Zagly et comte de Siry, ainsi que de Schick Alli Beg Sanis, il négocia des traités avec le duché de Courlande et la Suède en 1696-1697, parvenant à dérouter les exportations de soie des routes ottomanes à travers la Lettonie et la mer Baltique. Il entama des négociations avec le roi de Pologne le 7 janvier 1697 pour mettre en place des « comptoirs » arméniens à Gdańsk et dans d’autres places de la république de Pologne-Lituanie. Voir Gulbenkian, Roberto, « Philippe de Zagly, marchand arménien de Julfa, et l’établissement du commerce persan en Courlande en 1696 », Revue des études arméniennes, 7, 1970, p. 361-426Google Scholar ; Herzig, Edmund, « A Response to ‘One Asia or Many ? Reflections from a Connected History’ », Modern Asian Studies, 50-1, 2016, p. 44-51CrossRefGoogle Scholar.
110 Goffman, Erving, La mise en scène de la vie quotidienne, Paris, Éd. de Minuit, 1992Google Scholar.
111 BNF, ms. fr. 8972, f. 68, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 2.
112 BNF, ms. fr. 8972, f. 68, p. 2.
113 Ce passage se trouve uniquement dans le récit de Marcara, et non dans les archives de la défense. Voir « Requeste d’employ… », op. cit., f. 104, p. 5. Voir aussi S. Subrahmanyam, Three Ways to Be Alien…, op. cit., p. 154, n. 58.
114 Miriam Eliav-Feldon, Renaissance Impostors and Proofs of Identity, Londres, Palgrave Macmillan, 2012 ; Natalie Zemon Davis, Trickster Travels: A Sixteenth-Century Muslim between Worlds, New York, Hill and Wang, 2006. Sur la dissimulation et la nature fluctuante des identités durant la période moderne, voir Valentin Groebner, Who Are You ? Identification, Deception, and Surveillance in Early Modern Europe, trad. par M. Kyburz et J. Peck, New York, Zone Books, [2004] 2007 ; S. Subrahmanyam, Three Ways to Be Alien…, op. cit.; Flores, Jorge et Subrahmanyam, Sanjay, « The Shadow Sultan: Succession and Imposture in the Mughal Empire, 1628-1640 », Journal of the Economic and Social History of the Orient, 47-1, 2004, p. 80-121CrossRefGoogle Scholar.
115 BNF, ms. fr. 8972, f. 196, Instruction memorable contenant les contestations d’entre Martin Marcara Avachin gentilhomme persan […] et les sieurs directeurs generaux de la Compagnie, p. 7.
116 BNF, ms. fr. 8972, f. 194r, p. 3.
117 Pour un sommaire listant ces différentes pièces, voir BNF, ms. fr. 8972, f. 176v, Memoire des Pieces que le Sieur Marcara fournit & employe d’abondant pour sa justification, contre les Sieurs Directeurs Generaux des Indes Orientales, p. 10. Une copie du certificat vénitien est enregistrée dans les archives notariées copiées à la main par Ghevont Alishan et préservées dans les Archives Alishan, à San Lazzaro. La copie originale se trouve dans Archivio di Stato di Venezia, Atti Notarile, 12070, Protocolli, Francesco Simbeni, f. 194r-v. Je remercie Mathieu Grenet qui m’a aidé à retrouver cet acte.
118 BNF, Res Z-Thoisy-87, f. 291, p. 1, Estat de la Contestation Pendante au Conseil, au rapport de Monsieur Quentin de Richebourg, pour les sieurs Directeurs de la Compagnie des Indes Orientales, Défendeurs & demandeurs contre Martin Marcara, se disant Gentilhomme Persan, demandeur & défendeur, Paris, 1682.
119 BNF, Res Z-Thoisy-87, f. 292v, p. 4.
120 BNF, Res Z-Thoisy-87, f. 291v, p. 2.
121 Victor Turner, Le phénomène rituel. Structure et contre-structure, trad. par G. Guillet, Paris, Puf, [1969] 1990, p. 96.
122 S. Subrahmanyam, Three Ways to Be Alien…, op. cit., p. 21-22.
123 L’ancêtre de cette famille était un huguenot, Isaac Boutet de L’Estoile (écrit également L’Etoille ou L’Estoille), de Lyon ou de Charente en France, qui était arrivé à Ispahan dans la première moitié du xviie siècle et fut retenu par Shah Abbas Ier comme orfèvre, avant de se consacrer au commerce privé. En 1643, il épousa une Arménienne de la Nouvelle-Djoulfa (Maria) et eut au moins avec elle cinq fils qui se distinguèrent au service de la Cio ou comme représentants du roi de France en Iran et en Inde. Lorsque ceux-ci furent appelés au nom du bureau des directeurs de la compagnie pour réfuter les affirmations de Marcara sur sa prétendue noblesse, ils défendirent les intérêts de leur employeur avec la loyauté attendue. Voir Calmard, Jean, « The French Presence in Safavid Persia: A Preliminary Study », in Herzig, E. et Floor, W. (dir.), Iran and the World in the Safavid Age, New York, I. B. Tauris, 2012, p. 309-325Google Scholar, ici p. 316, et p. 316-319 pour des études sur cette famille et sur son arbre généalogique ; M. Ménard-Jacob, La première Compagnie des Indes…, op. cit., p. 180-181 ; Kroell, Ann, « Alexandre de Lestoille, dernier agent de la Compagnie royale des Indes en Perse », Moyen-Orient et océan Indien, 1-1, 1984, p. 65-72Google Scholar ; Raphaël du Mans, Raphaël du Mans. Missionnaire en Perse au xviie siècle, op. cit., vol. 2, p. 203, n. 170. L’abbé Carré resta dans la maison de Louis-Guilherne de L’Estoille à la Nouvelle-Djoulfa durant sa première visite en 1669 : B. Carré, Le courrier du roi en Orient…, op. cit., p. 258.
124 BNF, Res Z-Thoisy-87, Estat de la Contestation Pendante au Conseil…, f. 322r-v, p. 63-64.
125 Pour une analyse subtile de ce lieu commun et de ses usages fréquents par le gouverneur français, François Dupleix, et par son homologue militaire, Charles de Bussy, voir Subrahmanyam, Sanjay, Europe’s India: Words, People, Empires, 1500-1800, Harvard, Harvard University Press, 2017, p. 231-238CrossRefGoogle Scholar, ici p. 231 ; Id., L’Inde sous les yeux de l’Europe. Mots, peuples, empires, 1500-1800, trad. par J. Blayac, Paris, Alma, [2017] 2018, p. 292-300, ici p. 292.
126 BNF, Res Z-Thoisy-87, Estat de la Contestation Pendante au Conseil, f. 322v, p. 62.
127 BNF, Res Z-Thoisy-87, f. 321v, p. 62 : « On Sçait par une Fâcheuse experience, que les Orientaux sont naturellement fourbes & sans Foy. »
128 BNF, ms. fr. 8972, f. 194v, Instruction memorable contenant les contestations d’entre Martin Marcara Avachin gentilhomme persan […] et les sieurs directeurs generaux de la Compagnie, p. 4.
129 BNF, ms. fr. 8972, f. 192v (non paginé).
130 BNF, ms. fr. 8972, f. 168v, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 70.
131 Jean-Baptiste Tavernier, Les six voyages de Jean-Baptiste Tavernier, qu’il a fait en Turquie, en Perse et aux Indes, pendant l’espace de quarante ans, accompagnez d’observations sur la religion, le gouvernement, les coutumes et le commerce, avec les figures, le poids, et la valeur des monnoyes qui y ont cours, première partie, Où il n’est parlé que de la Turquie et de la Perse, Paris, G. Clouzier et C. Barbin, 1676, p. 527.
132 BNF, ms. fr. 8972, f. 103v, Factum contenant l’histoire tragique pour le Sieur Martin Marcara Avasinz, p. 8.
133 Georges Roques, La manière de négocier aux Indes, 1676-1691. La compagnie des Indes et l’art du commerce, éd. par V. Bérinstain, Paris, École française d’Extrême-Orient/Maisonneuve et Larose, 1996, p. 26.
134 Ibid.
135 Ibid., p. 25.
136 Ray, Indrani, « Of Trade and Traders in the Seventeenth Century: An Unpublished French Memoir by Georges Roques », Occasional Papers, 26, Calcutta, Center for Studied in the Social Sciences, 1979, p. viiGoogle Scholar.
137 Ibid. p. ix-x.
138 G. Roques, La manière de négocier aux Indes…, op. cit., p. 147.
139 S. Subramanyam, Three Ways to Be Alien…, op. cit., p. 19. Sur la vision, largement partagée à l’époque moderne, selon laquelle Shah Abbas Ier était un dirigeant éclairé et bienveillant, en particulier envers les Arméniens, voir Herzig, Edmund, « The Deportation of the Armenians in 1604-1605 and Europe’s Myth of Shah Abbās I », in Melville, C. (dir.), Persian and Islamic Studies in Honour of p. W. Avery, Cambridge, University of Cambridge, Centre of Middle Eastern Studies, 1990, p. 59-71Google Scholar.
140 S. Subrahmanyam, Three Ways to Be Alien…, op. cit., p. 19.
141 G. Roques, La manière de négocier aux Indes…, op. cit., p. 147.
142 Ibid., p. 149.
143 Bernhard Struck, Kate Ferris et Jacques Revel, « Introduction: Space and Scale in Transnational History », no spécial « Size Matters: Scales and Spaces in Transnational and Comparative History », The International History Review, 33-4, 2011, p. 573-584, ici p. 577 ; Steensgaard, Niels, The Asian Trade Revolution of the Seventeenth Century: The East India Companies and the Decline of the Caravan Trade, Chicago, University of Chicago Press, 1974Google Scholar.
144 Findlen, Paula, « Early Modern Things: Objects in Motion, 1500-1800 », in Findlen, P. (dir.), Early Modern Things: Objects and Their Histories, 1500-1800, New York, Routledge, 2013, p. 1-28Google Scholar.
145 Colley, Linda, The Ordeal of Elizabeth Marsh: A Woman in World History, Londres, HarperPress, 2007, p. 300Google Scholar. Sur les différentes tendances de l’histoire globale, voir l’étude convaincante de Hunt, Lynn, Writing History in the Global Era, New York, W. W. Norton and Company, 2014Google Scholar, notamment le deuxième chapitre. Pour une microhistoire globale fondamentale sur une diaspora négociante, voir Trivellato, Francesca, The Familiarity of Strangers: The Sephardic Diaspora, Livorno, and Cross-Cultural Trade in the Early Modern Period, New Haven, Yale University Press, 2009Google Scholar. Pour un travail de microhistoire globale sur un individu de l’époque moderne, voir J.-P. A. Ghobrial, « The Secret Life of Elias of Babylon… », art. cit.
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150 B. Struck, K. Ferris et J. Revel, « Introduction… », art. cit.
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- 2
- Cited by
Linked content
Translation available: A Life Lived Across Continents: The Global Microhistory of an Armenian Agent of the Compagnie des Indes Orientales, 1666–1688