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De Devereux à Nathan : une lecture ethnopsychiatrique de la schizophrénie

Published online by Cambridge University Press:  15 April 2020

W. Alarcon*
Affiliation:
Centre hospitalier Mas Careiron, Uzès, France
*
Adresse e-mail :[email protected]

Abstract

Au milieu du 19e siècle, en rupture avec les théories des aliénistes tels que Pinel et Esquirol, a émergé l’idée que la folie serait le signe de la décadence d’une civilisation corrompue par la modernité. Certaines théories ethnopsychiatriques, étudiant les troubles mentaux au sein d’un milieu culturel donné, s’opposent à la conception hippocratique d’une folie endogène (Folie-Maladie) en réaffirmant les conceptions exogènes (Folie-Sacré), décrites de façon similaire sous nos latitudes au Moyen-Âge chrétien. À l’image de Devereux, certaines figures de l’ethnopsychiatrie, sous l’influence conjointe de la psychanalyse et du structuralisme, prendront comme acquis fondamental l’idée relativiste selon laquelle l’interprétation du symptôme serait plus importante que le symptôme lui-même, la culture et le symbolique occultant quasiment le biologique. Devereux élaborera dans cette optique une théorie socioculturelle de la schizophrénie qu’il considérera comme le désordre ethnique caractéristique de la société occidentale dysfonctionnelle. Pour lui, ce trouble mental serait absent des sociétés authentiquement primitives et n’apparaîtrait en leur sein que suite aux processus d’acculturation qu’elles subissent [1]. Dans le sillage de cette pensée, Tobie Nathan développera quant à lui une théorie sociale et culturelle de la Folie [2]. Faisant fi des connaissances scientifiques au profit de la cosmogonie traditionnelle, il suppose que les populations étrangères n’auraient pas la même façon de penser le sujet et l’inconscient psychique, rendant toute théorie psychiatrique, neurodéveloppementale comme psychanalytique, inutilisable. En cherchant systématiquement des symboliques différentes à toute anomalie clinique, ce courant de l’ethnopsychiatrie tombe souvent dans la surinterprétation culturaliste. Nous questionnerons enfin l’idée que cet aspect de la pensée ethnopsychiatrique, en s’appuyant sur la culpabilité occidentale issue de la colonisation, répondrait au besoin de l’« Homme blanc » de réparer la faute dont on l’accuse, celle d’avoir souillé de façon indélébile la pureté originelle fantasmée des sociétés traditionnelles et d’y avoir importé jusqu’aux pathologies psychiatriques les plus graves

Type
Congrès français de psychiatrie: Rencontres avec l’expert
Copyright
Copyright © European Psychiatric Association 2015

Déclaration de liens d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.

References

Références

Devereux, G.Bastide, R.Gobard, H.Jolas, T.Essais d’ethnopsychiatrie générale. Paris: Gallimard: 1983Google Scholar
Nathan, T.Stengers, I.Médecins et sorciers. Paris: La Découverte: 2012Google Scholar
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