Published online by Cambridge University Press: 28 April 2020
Le concept de neuroleptique déshinibiteur est utilisé par les psychiatres français depuis environ 20 ans. Cet effet suppose l’existence d’une efficacité thérapeutique portant sur la symptomatologie déficitaire des schizophrènes. Tous les neuroleptiques ne présentent pas cette propriété, de plus,en accord avec les travaux pharmacologiques, il semble que l’existence de cette propriété soit liée à l’emploi de faibles posologies. Lorsqu’on augmente les doses, leur profil devient identique à celui des neuroleptiques classiques. On a de plus montré en pharmacologie que ces neuroleptiques originaux facilitent à faible dose le fonctionnement de certains systèmes dopaminergiques.
Par ailleurs, l’observation clinique suggère que les syndromes productifs et déficitaires sont non seulement différents mais s’opposent sur de nombreux points. Les stimulants dopaminergiques (amphétamine) sont capables d’induire des syndromes productifs, ce type de pathologie est améliorée par les bloqueurs dopaminergiques (Neuroleptiques classiques). On oublie souvent que les bloqueurs dopaminergiques sont capables d’induire un syndrome de type déficitaire et que ce type de pathologie semble bénéficier d’une facilitation du fonctionnement dopaminergique (Neuroleptiques antidéficitaires faibles doses, Dopa) (tableau 1). Nous avons donc fonnulé l’hypothèse que deux types d’anomalies du fonctionnement dopaminergique en partie opposés étaient à l’origine des deux types de symptomatologies. La dopamine constituerait donc un élément modulant (sans l’expliquer) de la symptomatologie schizophrénique. Pour souligner cette dimension symptomatique nous avons proposé d’appeler les deux groupes de neuroleptiques antiproductifs et antidéficitaires plutôt qu’antipsychotiques et désinhibiteurs.
Un certain nombre d’études thérapeutiques semblent confirmer la réalité de l’effet antidéficitaire. La plupart de ces produits étant commercialisés depuis plus de dix ans en France, nous avons voulu vérifier si cette longue expérience retrouvait au niveau de la pratique les caractéristiques de l’effet antidéficitaire prenant en compte simultanément le type de malade, le choix d’une sous-classe de neuroleptiques et un type de posologie. Cent psychiatres ont décrit leur opinion sur l’utilité ou pas de huit neuroleptiques en fonction de l’indication. Les syndromes productifs (paranoïdes et mixtes aigus) sont traités par des substances sédatives (lévomépromazine, cyamémazine), antiproductives (chlorpromazine, halopéridol, fluphénazine) ou des doses élevées de neuroleptiques antidéficitaires (pipotiazine). Les syndromes déficitaires aigus ou chroniques sont traités par les produits antidéficitaires (pipotiazine, pimozide, sulpiride). L’utilité des substances antiproductives lorsqu’un syndrome déficitaire est présent est niée par la majorité des prescripteurs (tableau 2). Les posologies proposées sont classiques pour les syndromes productifs. Les posologies proposées dans le traitement des syndromes déficitaires par les substances antidéficitaires sont quatre à cinq fois plus faibles que celles proposées pour les mêmes substances comme traitement antiproductif (tableau 3). Les schizophrénies paranoïdes et mixtes stabilisées sont traitées selon deux stratégies dont les posologies se chevauchent très peu : soit posologie antiproductive la plus faible possible, soit posologie antidéficitaire environ deux fois plus faible (figure 1).
En pratique, ces résultats semblent montrer qu’en cas de syndrome déficitaire, aigu, chronique ou survenant chez des malades antérieurement paranoïdes ou mixtes, le choix d’une faible posologie de certains neuroleptiques est une habitude thérapeutique qui persiste à long terme en France.
The concept of disinhibitory neuroleptic has been used by Franck psychiatrists for approximately 20 years. This effect supposes the existence of a therapeutic action on the negative symptoms of schizophrenic patients. All neuroleptics do not present this property; furthermore, according to pharmacological data, its existence seems to be related to low-dose administration. When doses are increased, their profile becomes identical to that of the classical neuroleptics. Pharmacological studies have moreover shown that low doses of these novel neuroleptics facilitate the functioning of certain dopaminergic systems.
In addition to these findings, clinical studies suggest that positive and negative syndromes not only differ, but to some extent are opposed. The dopaminergic stimulants (amphetamines) are able to induce positive syndromes; this type of pathology is improved by dopaminergic blocking agents (classical neuroleptics). One often overlooks the fact that the dopaminergic blocking agents are able to induce a negative-type syndrome and that this type of pathology seems to benefit from the facilitation of dopaminergic functioning (low-dose energizing neuroleptics**, Dopa). Table 1.
We have thus formulated the hypothesis that the two types of symptomatology are founded in two types of partially opposed abnormalities in dopaminergic functioning. Dopamine would therefore constitute a modulating (but not a causative) element in schizophrenic symptomatology. To emphasize this symptomatic dimension, we have proposed calling the two groups of neuroleptics «antiflorid**» and «energizing», rather than antipsychotic and disinhibitory.
A number of therapeutic studies seem to confirm the reality of an energizing action. Since most of these drugs have been marketed in France for more than ten years, we sought to verify whether this extensive experience would allow characterization of the energizing effect through simultaneous consideration of patient type, choice of neuroleptic sub-class and type of dosage. One hundred psychiatrists assessed the usefulness (or not) of eight neuroleptics, as a function of indication. The results show that positive syndromes (paranoid and acute mixed) were treated with sedatives (levomepromazine, cyamemazine), antiflorid (chlorpromazine, haloperidol, fluphenazine) or high doses of energizing (pipotiazine) neuroleptics. Acute or chronic negative syndromes were treated with energizing neuroleptics (pipotiazine, pimozide, sulpiride) (table 2). The proposed dosages for positive syndromes were standard. Usefulness of antiflorid agents in the presence of a negative syndrome was considered nil by the majority. The proposed dosages for treatment of negative syndromes by energizing agents were four to five times lower than proposed dosages of the same agents administered for treatment of positive syndromes (table 3).
Paranoid and mixed schizophrenic patients were treated according to two strategies during the stable follow up period, with very little dosage overlap: either a minimal dosage of an antiflorid neuroleptic, or an energizing neuroleptic administered at approximately half that dosage (figure 1). In practice, these results seem to show that in acute or chronic negative syndromes, or when a negative syndrome is present in patients with a history of paranoid or mixed symptomatology, the choice of a low dosage of certain neuroleptics to the exclusion of the others constitutes an extremely well-established therapeutic habit in France.
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