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Le prologue du quatrième évangile, clé de voûte de la littérature johannique

Published online by Cambridge University Press:  08 June 2012

Luc Devillers
Affiliation:
Faculté de théologie, Université Miséricorde (4218) Av. de l'Europe 20, 1700 Fribourg, Switzerland. email: [email protected]

Abstract

Like its last verse (Jn 1.18), the Prologue of the Johannine Gospel has a double meaning: christological and soteriological. The christological one is mainly connected with John 1–20, the soteriological with John 21, and both are linked to 1 John. Indeed, while the Prologue interacts with the Gospel narrative and with the Epilogue (Jn 21), it works also as a ‘relecture’ (re-reading) of 1 John. It recapitulates the promise by Jesus to lead the believers ‘where he is’—i.e. ‘in(to) the bosom of the Father’ (Jn 1.18//Jn 12.26; 14.2–3, 6; 17.24)—as well as the assertion of the Letter regarding the children of God (Jn 1.12//1 Jn 3.1–2). In adding a Prologue and an Epilogue, the last redactor of Jn created a huge meta-historical arch evoking the whole Divine design, from the Alpha before the Creation (ἐν ἀρχῇ, Jn 1.1–2) to the Omega of the eschatological coming of the Risen One (ἕως ἔρχομαι, Jn 21.22, 23; cf. the παρουσία of 1 Jn 2.28). The Prologue is then the keystone and the reading key of the Johannine literature.

French abstract: Comme son dernier verset (Jn 1.18), le prologue du quatrième évangile a une double signification: christologique et sotériologique. La christologique est surtout liée à Jn 1–20, la sotériologique à Jn 21, et les deux sont liées à 1 Jn. En effet, si le prologue de Jean est en interaction avec le récit évangélique et avec l'épilogue (Jn 21), il offre aussi une relecture de 1 Jn. Il récapitule la promesse faite par Jésus de conduire ceux qui croient en lui ‘là où il est’—c'est-à-dire ‘dans le sein du Père’ (Jn 1.18//Jn 12.26; 14.2–3, 6; 17.24)—, ainsi que l'affirmation de la lettre au sujet des enfants de Dieu (Jn 1.12//1 Jn 3.1–2). En ajoutant un prologue et un épilogue, l'ultime rédacteur de l'évangile créa un grand arc méta-historique retraçant l'ensemble du projet divin, depuis l' alpha d'avant la Création (ἐν ἀρχῇ, Jn 1.1–2) jusqu'à l' omega de la venue eschatologique du Ressuscité (ἕως ἔρχομαι, Jn 21.22, 23; cf. la παρουσία de 1 Jn 2.28). Le prologue de Jean est donc la clé de voûte et la clé de lecture de la littérature johannique.

Type
Articles
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Copyright © Cambridge University Press 2012

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References

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6 ‘La ‘Bible de Jésus’ (et celle de Paul) était une Bible déjà interprétée, vivante et non fossilisée’ (R. Le Déaut, ‘Targum’, DBSup XIII [2002] col. 274*). J'ajouterais volontiers: de même pour la Bible de Jean. J'ai entendu Le Déaut soutenir l'existence de cette pratique exégétique au cours d'une conférence publique donnée à l'École biblique de Jérusalem en 1986.

7 Cf. Le Déaut, ‘Targum’, col. 289*.

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9 Voir, par exemple, Ridderbos, H., ‘The Structure and Scope of the Prologue to the Gospel of John’, NovT 8 (1966) 180201 (200)Google Scholar; Barrett, C. K., The Prologue of St John's Gospel (London: SPCK, 1972)Google Scholar; Dettwiler, A., ‘Le Prologue johannique (Jean 1,1–18)’, La communauté johannique et son histoire (ed. Kaestli, J.-D., Poffet, J.-M., et Zumstein, J.; MdB 20; Genève: Labor et Fides, 1990) 201–2Google Scholar; Léon-Dufour, X., Lecture de l'évangile selon Jean, vol. 1 (Parole de Dieu; Paris: Seuil, 1988) 38, 142Google Scholar. Hofrichter voit dans le prologue la partie la plus ancienne de l'évangile, commentée par la suite: Hofrichter, P., Im Anfang war der ‘Johannesprolog’. Das urchristliche Logosbekenntnis—die Basis neutestamentlicher und gnostischer Theologie (BU 17; Regensburg: Friedrich Pustet, 1986) 1617Google Scholar.

10 Theobald, Ainsi M., Das Evangelium nach Johannes (RNT; Regensburg: Friedrich Pustet, 2009) 106Google Scholar, pour qui cet hymne comprenait Jn 1.1–4, 11–12c, 14*, 16–17, et aurait été développé par la suite.

11 Pour Zumstein, ce serait le premier ‘acte de relecture’ du récit qui suit (‘Le Prologue, seuil du quatrième évangile’, RSR 83 [1995] 217–39 [239]).

12 Anderson, P. N., The Fourth Gospel and the Quest for Jesus: Modern Foundations Reconsidered (New York: T&T Clark, 2006 [2007]) 40, 193Google Scholar; Theobald, Das Evangelium nach Johannes, 34, 120. Dans son article Le Prologue johannique (Jean 1,1–18) et ses “lecteurs implicites”’, RSR 83 (1995) 193216Google Scholar, Theobald cite quelques prédécesseurs: Boismard, Masson, Robinson, Brown (212). Mais, pour lui, ces versets sur Jean-Baptiste constituent le début de la Source des Signes (Das Evangelium nach Johannes, 32–44, 120).

13 Theobald, ‘Le Prologue’, 202–5; Das Evangelium nach Johannes, 115; Scholtissek, K., In Ihm sein und bleiben. Die Sprache der Immanenz in den johanneischen Schriften (HBS 21; Freiburg im Breisgau: Herder, 2000) 185Google Scholar; Gourgues, M., ‘Pour que vous croyiez’. Pistes d'exploration de l'évangile de Jean (Paris: Cerf, 1982) 76–7, 105–38Google Scholar.

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15 Pour Gourgues (cf. ‘Pour que vous croyiez’, n. 13), seuls les v. 1–4 évoquent la préexistence du Verbe; les v. 5–11 font allusion au refus massif de l'incarnation, et les v. 12–18 à son accueil par quelques-uns.

16 Theobald, ‘Le Prologue’, 202.

17 Theobald, Das Evangelium nach Johannes, 108.

18 Scholtissek, In Ihm sein und bleiben, 174, 177.

19 Schnelle, U., Antidoketische Christologie im Johannesevangelium. Eine Untersuchung zur Stellung des 4. Evangeliums in der johanneischen Schule (FRLANT 144; Göttingen: Vandenhoeck & Ruprecht, 1987) 240–2CrossRefGoogle Scholar.

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21 Malgré Minear, P. S., ‘The Original Functions of John 21’, JBL 102 (1983) 8598Google Scholar, cité favorablement par Van Belle, G., ‘L'unité littéraire et les deux finales du quatrième évangile’, Studien zu Matthäus und Johannes/Études sur Matthieu et Jean (FS J. Zumstein; ed. Dettwiler, A. et Poplutz, U.; AThANT 97; Zürich: Theologischer Verlag Zürich, 2009) 297315 (308 n. 50)Google Scholar.

22 Voir mon article Thomas, appelé Didyme (Jn 11.16; 20.24; 21.2). Pour une nouvelle approche du prétendu Jumeau’, RB 113 (2006) 6577Google Scholar.

23 Van Belle, ‘L'unité littéraire’, 309, 310, 315.

24 Genette, G., Palimpsestes. La littérature au second degré (Paris: Seuil, 1982) 231Google Scholar.

25 Zumstein, J., ‘La rédaction finale de l’évangile selon Jean (à l'exemple du chapitre 21)’, La communauté johannique et son histoire (ed. Kaestli et al.) 207–30 (214, 215, 219)Google Scholar.

26 Theobald, Das Evangelium nach Johannes, 70.

27 On peut laisser hors de la discussion 2 Jn et 3 Jn, qui se rattachent à 1 Jn.

28 Voir notamment R. E. Brown, The Community, 161 (La communauté, 175–6); The Epistles of John (AB 30; New York: Doubleday, 1982) 91 n. 210; 125; Ruckstuhl, E., ‘Nachtrag zu den beiden vorausgehenden Aufsätzen’, Jesus im Horizont der Evangelien (SBA 3; Stuttgart: Katholisches Bibelwerk, 1988) 395400Google Scholar; Anderson, The Fourth Gospel, 194; von Wahlde, U. C., The Gospel and Letters of John (Eerdmans Critical Commentary; Grand Rapids: Eerdmans, 2010) 1.ix, 5255, 229; 3.17Google Scholar.

29 Brown, The Epistles, 90–91; Theobald, Das Evangelium nach Johannes, 70.

30 Voir notamment Grayston, K., The Johannine Epistles (NCBC; London: Marshall, Morgan & Scott, 1984)Google Scholar; U. Schnelle, Antidoketische Christologie; ‘Die Reihenfolge der johanneischen Schriften’, NTS 57 (2011) 91–113; Stegemann, E., ‘“Kindlein, hütet euch vor den Götterbildern!”: Erwägungen zum Schluss des 1. Johannesbriefes’, TZ 41 (1985) 284–94Google Scholar; Strecker, G., Die Johannesbriefe (KEK 14; Göttingen: Vandenhoeck & Ruprecht, 1989)CrossRefGoogle Scholar; Talbert, C. H., Reading John: A Literary and Theological Commentary on the Fourth Gospel and the Johannine Epistles (New York: Crossroad, 1992)Google Scholar.

31 Wendt, H. H., Die Johannesbriefe und das johanneische Christentum (Halle: Waisenhaus, 1925) 1Google Scholar (cité par Schnelle, ‘Die Reihenfolge’, 93 n. 10); Lieu, J. M., I, II, & III John: A Commentary (NTL; Louisville/London: Westminster John Knox, 2008) ix, 17Google Scholar; North, W. E. Sproston, The Lazarus Story within the Johannine Tradition (JSNTSup 212; Sheffield: Sheffield University, 2001) 25Google Scholar; Griffith, T., ‘Keep Yourselves from Idols’: A New Look at 1 John (JSNTSup 233; Sheffield: Sheffield University, 2002) 46Google Scholar. Pour ces deux derniers auteurs, voir ma recension, RB 112 (2005) 119–21 (WSN); 121–26 (TG).

32 Zumstein, ‘La rédaction finale’, 230 n. 52.

33 Brown, The Community, 146, 161–2 (La communauté, 159, 176–7); The Churches the Apostles Left Behind (New York: Paulist, 1984) 93Google Scholar, 123 (L'Église héritée des apôtres [LLB 76; Paris: Cerf, 1987] 153–4, 203–4); voir aussi, avec nuances, Zumstein, J., L'évangile selon saint Jean (13–21) (CNT IVb; Genève: Labor et Fides, 2007) 302, 304, 307, 313Google Scholar.

34 Schnelle, ‘Die Reihenfolge’, 93.

35 Schnelle, ‘Die Reihenfolge’, 104–6.

36 Boismard, M.-É., Moïse ou Jésus. Essai de christologie johannique (BETL 84; Leuven: Peeters/Leuven University Press, 1988) 132–5Google Scholar.

37 Von Wahlde, The Gospel and Letters, 1.52–5, 229.

38 Von Wahlde, The Gospel and Letters, 1.353–6.

39 Zumstein, ‘La rédaction finale’, 222.

40 Zumstein, ‘La rédaction finale’, 217.

41 Schnelle, ‘Die Reihenfolge’, 102.

42 Schnelle note avec raison que la première lettre ignore l'emploi absolu de λόγος (Schnelle, ‘Die Reihenfolge’, 101).

43 Van Belle, ‘L'unité littéraire’, 308.

44 Van Belle, ‘L'unité littéraire’, 312–13.

45 Zumstein, ‘Le Prologue’, 238.

46 Van Belle, ‘L'unité littéraire’, 304.

47 Schnelle, Antidoketische Christologie, 256; ‘Die Reihenfolge’, 111.

48 D'après le Dictionnaire de l'Académie française, on appelle clef de voûte ‘la pierre qui achève la voûte en son milieu et qui en assure la solidité’. Au sens figuré, ce terme sert à désigner la pièce maîtresse, décisive d'une affaire ou d'un système.