Hostname: page-component-78c5997874-dh8gc Total loading time: 0 Render date: 2024-11-16T16:09:28.740Z Has data issue: false hasContentIssue false

Gaston François Kengue et Bruno Maurer (dir.), L’expansion de la norme endogène du français en francophonie. Explorations sociolinguistiques, socio-didactiques et médiatiques, France : Editions des archives contemporaines, 2023, 348pp., ISBN : 978 2 813004 72 7.

Review products

Gaston François Kengue et Bruno Maurer (dir.), L’expansion de la norme endogène du français en francophonie. Explorations sociolinguistiques, socio-didactiques et médiatiques, France : Editions des archives contemporaines, 2023, 348pp., ISBN : 978 2 813004 72 7.

Published online by Cambridge University Press:  29 April 2024

Mariem Abid*
Affiliation:
ED 622 Sciences du langage Université Sorbonne Nouvelle Maison de la recherche 4, rue des Irlandais 75005 PARIS, France
Rights & Permissions [Opens in a new window]

Abstract

Type
Book Review
Copyright
© The Author(s), 2024. Published by Cambridge University Press

L’ouvrage dont il est question réunit des contributions autour de la thématique de la variation linguistique qui touche la langue française en francophonie. Dix-huit auteurs s’intéressant chacun à un aspect spécifique de la variation sont réunis. Il porte plus précisément sur l’existence de normes endogènes et leur expansion dans l’espace francophone. L’approche adoptée est tridimensionnelle. Elle tient compte, tout d’abord, du volet linguistique qui porte sur la question de la norme et la variation, ensuite, du volet didactique concernant l’intégration de ces variations dans le milieu scolaire, enfin, le volet culturel qui prend en compte la littérature, la chanson, etc. Ces aspects sont organisés en trois parties distinctes précédées par une introduction générale. Dans la suite, nous présenterons succinctement chaque partie en mettant en évidence les points les plus significatifs reflétant l’objectif de l’ouvrage.

Dans l’introduction, l’auteur explore l’origine de la réflexion sur l'émergence et l’expansion des normes endogènes à travers l’espace francophone, dans le but de comparer le français dans divers pays tout en tenant compte de leur contexte évolutif.

La première partie est une description et analyse de la variation et son rapport à la norme, tant sur le plan linguistique que sociolinguistique. Les articles de cette section couvrent différents domaines linguistiques. Par exemple, Marie-Hélène Côté, Isabelle Racine et Sylvain Detey examinent la perception de la prononciation par 119 auditeurs issus de différentes villes du Canada francophone, concluant à l’existence de deux normes de prononciation : une norme exogène internationale et une norme endogène locale, en fonction de l’origine des auditeurs. Anne-Christel Zeiter, de son côté, se penche sur la notion de francophonie et ses implications sociales à travers l’analyse du langage de deux frères d’origine polonaise résidant en Suisse. Son analyse met en évidence les caractéristiques de la norme endogène ainsi que les marqueurs d’altérité résultant de l’origine étrangère des frères, suggérant ainsi que les allophones vivant dans un pays francophone sont également des francophones présentant des particularités linguistiques. Dans cette même partie, deux études portant sur le Cameroun ont été réalisées. D’une part, Bernard Mulo Farenkia propose une analyse des néologismes phraséologiques qui expriment le compliment en français camerounais dans les réseaux sociaux. D’autre part, Venant Eloudou Eloundou offre une étude sociolinguistique sur la variété du français parlé au Cameroun. Il critique la place que lui accorde certains linguistes qui ne la considèrent pas comme une langue à part entière.

La deuxième partie explore le lien entre la variation linguistique et l’existence de normes endogènes dans le contexte scolaire, souvent considéré comme normatif. Philippe Humbert met en avant le rôle crucial de l’Organisation internationale de la Francophonie dans la légitimation des différentes variétés du français en Afrique, en analysant les directives données par cette organisation aux systèmes éducatifs africains. Dans le même ordre d’idées, Magali Jeannin démontre que les langues locales et les variétés du français en Côte d’Ivoire et au Ghana ne sont pas pleinement intégrées dans l’enseignement où le français standard est privilégié. Samatar Abdallah Doualeh poursuit cette réflexion en se penchant sur la situation à Djibouti, où la question de la variation linguistique dans le français local est abordée dans les manuels scolaires, bien que de manière limitée, contrairement au Ghana et à la Côte d’Ivoire.

La troisième partie de l’ouvrage examine la présence de divers canaux tels que les médias, les réseaux sociaux, la littérature et la chanson, qui favorisent l’expansion des normes linguistiques locales et contribuent à leur légitimation. Dans son article, Ursula Reutner explore comment la littérature peut réhabiliter des formes linguistiques autrefois dévalorisées. Elle démontre que les particularités lexicales sont généralement traitées de manière positive, tandis que les particularités phonétiques et grammaticales sont souvent stigmatisées. Dans leur contribution, Merveille Ndoumgne Soh et Jean-Benoît Tsofack examinent les différentes méthodes utilisées pour exprimer la cyberviolence verbale associée au terme « covidgate », en analysant comment cette violence est formulée et exprimée à travers les mots et le langage utilisés dans les discussions en ligne. Pour ce qui est de la chanson, Gaston François Kengue et Valdes Roberto Penlap Kamdem montrent comment la chanson agit comme un lieu propice à la créativité langagière et à l’émergence de nouvelles formes.

Cet ouvrage a pleinement atteint son objectif principal qui consistait à étudier le dynamisme de la langue française en examinant les différentes variétés présentes dans le contexte francophone. Les variétés étudiées servent de points de comparaison entre les différents pays de la francophonie, chacun possédant des caractéristiques linguistiques propres. Toutefois, un élément commun à ces pays est la prédominance du français hexagonal en tant que langue d’enseignement, notamment dans le milieu scolaire, bien que des canaux tels que les réseaux sociaux et les médias permettent d’accroître la visibilité des variétés endogènes. En résumé, cet ouvrage se révèle pertinent grâce à la complémentarité entre ses différents chapitres et à la cohérence entre ses parties. Dans la première partie, les auteurs explorent le phénomène de la variation sous divers angles : phonétique, lexical, pragmatique, sociolinguistique, etc. Cet ouvrage aborde également la question de la variation et de sa place dans les différents systèmes éducatifs francophones, mettant en garde contre l’exclusion des variétés du français de l’enseignement. Enfin, l’analyse de la présence de ces variétés dans des canaux non normatifs suggère leur expansion. Bien que l’ouvrage soit riche en situations traitées, en approches adoptées et en résultats obtenus, il convient de noter que de nombreux autres pays francophones n’ont pas été inclus, tels que l’Algérie, le Liban, la Tunisie et le Maroc, etc. ce qui pourrait être une piste de développement pour de futures recherches.