Situé à l'extrémité sud-est des ruines de l'antique ville de Kish, le tell A reste célèbre dans l'histoire de l'archéologie. Les fouilles anglo-américaines dirigées par Stephen Langdon et Ernest Mackay y mirent au jour, lors des campagnes de 1923 et 1925, cent cinquante sépultures présargoniques creusées dans les ruines d'un palais sumérien. Ces deux découvertes, sans équivalent à l'époque, furent à l'origine de la publication immédiate des travaux sur le tell A. Actuellement, ces données s'intègrent mieux dans nos connaissances sur le troisième millénaire mais la masse d'informations sociologiques que représente le cimetière A n'avait fait l'objet que de rares études.
Or, il est acquis depuis les travaux de Lewis Binford et Arthur Alan Saxe que les pratiques funéraires véhiculent des renseignements “potentiels” sur la société qui les produit. En s'appuyant sur des exemples ethnographiques, ces chercheurs démontrèrent que l'hétérogénéité des rites funéraires d'un groupe précis était liée au degré de complexité de l'organisation sociale, et que chaque traitement contenait implicitement les caractéristiques sociales (âge, sexe, type de décès…) de l'individu défunt auquel il se rapportait. C'est dans cette optique que nous tenterons de réinterpréter le cimetière A de Kish.
Il convient toutefois de s'attarder sur la documentation disponible. Le rapport de fouille d'E. Mackay présente d'importantes lacunes. Les limites exactes de la fouille ne sont pas connues. On ignore la position et l'étendue du cimetière. Mackay notait à plusieurs reprises que des objets semblables à ceux des tombes jonchaient la surface du tell A. Ne disposant d'aucun plan, nous en sommes réduits à supposer que les 150 sépultures découvertes ne constituent qu'une partie représentative de la nécropole et que de nombreuses tombes ont subi l'action de l'érosion (ou du pillage) alors que d'autres n'ont pas encore été fouillées.