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Les arts mécaniques et la science nouvelle
Published online by Cambridge University Press: 28 July 2009
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Lorsqu' on entreprend l'étude de la période historique où prend racine la révolution technique et scientifique qui est à la base de notre civilisation, on découvre vite que l'histoire de cette profonde transformation ne peut être réduite ni à la description de techniques envisagées une à une, ni à l'analyse de découvertes particulières, et bien moins encore — contrairement à ce que certains semblent souhaiter actuellement — à une histoire de la dialectique interne de chaque secteur de la connaissance scientifique. S'interroger sur les raisons qui commandent le passage d'une théorie à une autre, à l'intérieur d'une discipline particulière, est assurément une question d'une importance fondamentale et, sur ce terrain, les historiens de la science sont parvenus à des résultats considérables, même pour la période qui nous intéresse ici. Pourtant, l'historien ne pourra guère — ne fût-ce que pour élucider réellement ces «raisons» — éluder des questions également décisives qui portent sur la situation culturelle dans laquelle durent travailler les hommes de science. Nous entendons par là les définitions et les caractérisations différentes, et parfois divergentes, de la «science»; la place occupée par la connaissance scientifique, non seulement dans le monde de la culture et dans les encyclopédies du savoir, mais aussi dans la conscience de milieux et de groupes sociaux déterminés; les diverses finalités et les buts qui furent à tour de role attribués a la science et à la technique, au sein de civilisations et d'époques diffeérentes; la manière dont furent conçus les rapports entre théories et opérations pratiques; la considération qui fut accordée à ces dernières, tantôt reléguées aux marges de la culture et considérées comme indignes d'un homme libre, tantôt placées au centre de cette même culture comme source, non seulement d'effets admirables, mais aussi d'une connaissance plus approfondie du monde réel.
- Type
- Trois études sur la science
- Information
- European Journal of Sociology / Archives Européennes de Sociologie , Volume 4 , Issue 2 , December 1963 , pp. 221 - 236
- Copyright
- Copyright © Archives Européenes de Sociology 1963
References
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(3) Cf. Zilsel, E., «The Genesis of the Concept of Progress», dans le volume Roots of Scientific Thought, ed. by Wiener, Ph. and Noland, A. (New York 1957), p. 251Google Scholar; Rossi, P., Francesco Bacone: dalla magia alia scienza (Bari 1957).Google Scholar
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(5) «V'è più historia in cent'anni che non ebbe il mondo in quattromila; e più libri si fecero in questi cento che in cinquemila; e l'invenzioni stupende della calamita e stampe ed archibugi, gran segni dell'union del mondo.» Campanella, T., Città del Sole, ed. Bobbio, (Torino 1941), p. 109.Google Scholar
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(9) Cf. Cohen, J. B., «La découverte du nouveau monde et la transformation de l'idee de nature», in L'expirience scientifique au XVIe siècle (Paris 1960), pp. 182–210Google Scholar. Sur ces thèmes, l'ouvrage de Atkinson, G., Les nouveaux horizons de la Renaissance française (Paris 1935)Google Scholar, reste fondamental. Voir également Roméo, R., Le scoperte americane tulle coscienza italiana del Cinquecento (Milano/Napoli 1954)Google Scholar et Kaegi, W., Meditazioni storiche (Bari 1960), pp. 216–237.Google Scholar
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(13) La lettre de Mersenne est publiée dans Lenoble, R., Mersenne et la naissance du mécanisme (Paris 1943), p. 342Google Scholar. De nombreux témoignages sur «la décrépitude du monde» sont réunis dans Haydn, H., The Counter-Renaissance (New York 1960), pp. 525–544Google Scholar. Sur cette crise, cf. Tyllyard, E. M. W., The Elizabethan World Picture (London 1943)Google Scholar; Harris, V., All Coherence Gone (Chicago 1949)Google Scholar; Nicolson, M. H., The Breaking of the Circle (Evanston 1950)Google Scholar; Koyré, A., From the Closed World to the Infinite Universe (Baltimore 1957), pp. 28 sqq.Google Scholar
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(19) Sur les rapports art/nature chez Aristote, cf. Mansion, A., Introduction à la physique aristotélicienne (Louvain/Paris 1945), pp. 94–95, 198–201, 228–234, 256–257Google Scholar. Pour la définition aristotélicienne de l'art comme imitation de la nature, cf. Physique, II, 8, 199a 15–20, 194 a 21–22Google Scholar; Météor., IV, 381b 6.Google Scholar
(20) «Nempe ut ars censeatur solum modo tanquam additamentum quoddam naturæ, cujus scilicet ea sit vis ut naturam (sane) vel inchoatam perficere, vel in deterius vergentem emendare, vel impeditam liberare; minime vero penitus vertere, transmutare, aut in imis concutere possit. Quod ipsum rebus humanis præproperam desperationem intulit. At contra illus animis hominum penitus insidere debuerat; artificialia a naturalibus non Forma aut Essentia, sed Efficiente solummodo, differre […] Neque interest, si res ponatur in ordine ad aliquem effectum, utrum hoc fiat per hominem vel absque homine.» Bacon, F., Works, ed. by Ellis, R. L., Spedding, J., Heath, D. D. (London 1857–1874), I, pp. 496–7.Google Scholar
(21) Bacon, F., op. cit. III, pp. 531, 592Google Scholar; I, pp. 497, 624.
(22) Cf. Descartes, R., Œuvres (éd. Adam et Tannery), IX, p. 321 et cf. IX, pp. 120, 130–1Google Scholar; Kepler, , Opera (1857) I, p. 176, p. 84Google Scholar; Boyle, R., Works (ed. Birch), III, p. 14Google Scholar. Sur cette question, voir maintenant Dijksterhuis, E. J., The Mechanisation of the World Picture (Oxford 1961).Google Scholar
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(26) Cf. Bacon, F., op. cit. I, pp. 74, 126, 129, 457–458Google Scholar; III, pp. 289–290.
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(29) Voir sur ce sujet Febvre, L., «Travail, évolution d'un mot et d'une idée» in Journal de Psychologies XLV (1948), 19–28.Google Scholar
(30) Contre les tentatives fort nombreuses pour nier l'opposition entre science et technique dans le monde antique, restent fondamentales les remarques de Forbes, R. J., Studies in Ancient Technology, vol. I–VI (Leiden 1955–1958)Google Scholar et de Koyré, A., «Les origines du machinisme», in Critique, IV (1948), pp. 610–629Google Scholar. Large examen de cette question dans Edelstein, L., «Recent Trends in the Interpretation of Ancient Science», in Roots of Scientific Thought, op. cit. pp. 96–102.Google Scholar
(31) Lenoble, R., op. cit. p. 391.Google Scholar
(32) Pour un plus ample développement de ces questions et pour une documentation plus développée, je me permets de renvoyer le lecteur à mon livre I filosofi e le macchine (Milano 1962).Google Scholar
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