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Probabilité et support inductif. Sur le théorème de Popper-Miller (1983)

Published online by Cambridge University Press:  13 April 2010

Guillaume Rochefort-Maranda
Affiliation:
Université du Québec à Montréal

Abstract

In 1983, in an open letter to the journal Nature, Karl Popper and David Miller set forth a particularly strong critical argument which sought to demonstrate the impossibility of inductive probability. Since its publication the argument has faced many criticisms and we argue in this article that they do not reach their objectives. We will first reconstruct the demonstration made by Popper and Miller in their initial article and then try to evaluate the main arguments against it. Although it is possible to conceptualize logically the idea of induction, it is shown that it is not possible on traditional Bayesian grounds.

Type
Articles
Copyright
Copyright © Canadian Philosophical Association 2004

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References

Notes

1 Le terme est ici employé sans distinguer en rien confirmation et corroboration. Dorénavant, nous ferons toujours la distinction entre le terme «confirmation», qui est associé au bayésianisme, et le terme «corroboration», qui est associé au falsificationnisme.

2 Michalos, A. C., The Popper-Carnap Controversy, La Haye, Martinus Nijhoff, 1971.CrossRefGoogle Scholar

3 Voir Dubucs, J., «Carnapes ab omni nævo vindicatus», Cahiers du CREA, 1990, no 14, p. 97120Google Scholar; Costa, N. C. A. da et Fench, S., «Pragmatic Probability, Logical Omniscience and the Popper-Miller Argument», Fundamenta Scientiœ, 1988, vol. 9, p. 4353Google Scholar; et Mura, A., «When Probabilistic Support Is Inductive», Philosophy of Science, 1991, vol. 57, no2, p. 278289.CrossRefGoogle Scholar

4 Miller, D. W., «Reply to Zwirn & Zwirn», Cahiers du CREA, 1990, no 14, p. 151.Google Scholar

5 Popper, K. R. et Miller, D., «A Proof of the Impossibility of Inductive Probability», Nature, 1983, no 302, p. 687688CrossRefGoogle Scholar; trad, franç. Boyer, de A. et Andler, D. dans Popper, K. R., Le Réalisme et la science. Post-scriptum a la Logique de la découverte scientifique, vol. I, 1990, Paris, Hermann, p. 416.Google Scholar

6 Popper et Miller appellent ce facteur (Ex (h, e)) «la partie ampliative ou transcendante de h», car il contient ce qui va au-delà de la preuve factuelle, c'est à-dire ce qui n'est pas impliqué par e.

7 Pour des raisons de simplicité, notre reconstruction de l'argument de 1983 ne fait pas explicitement état de la connaissance d'arrière-plan b. Elle demeure sous-en ten due et cela n'affecte en rien le résultat final.

8 Popper et Miller, «A Proof of the Impossibility of Inductive Probability», p. 416.

9 La véritable position de Gillies se rapporte au fait que l'équation D qui suit permet d'identifier une cause purement déductive au support que e apporte à h. Selon lui, puisque l'induction est un concept controversé et que la déduction ne l'est pas, on devrait accepter la conclusion éliminativiste de Popper et Miller. (Voir Chihara, C. S. et Gillies, D. A., «An Interchange on the Popper-Miller Argument», Philosophical Studies, vol. 54, 1988, p. 5CrossRefGoogle Scholar; et Gillies, D. A., «In Defense of the Popper-Miller Argument», Philosophy of Science, vol. 53, 1986, p. 110113CrossRefGoogle Scholar.) Cette conclusion ne nous satisfait pas, car elle fait appel au concept plutôt relatif de «concept controversé».

10 Voir Jeffrey, R., «The Impossibility of Inductive Probability”, Nature, vol. 310, 1984, p. 433CrossRefGoogle Scholar; et Popper, K. R. et Miller, D., «Reply to Levi, Jeffrey and Good», Nature, vol. 310, 1984, p. 434.CrossRefGoogle Scholar

11 Zwirn, D. et Zwirn, H., «L'argument de Popper et Miller contre la justification probabiliste de l'induction», L'Âge de la science, no 2, Paris, Éditions Odile Jacob, 1989, p. 59.Google Scholar

12 Boyer, A., «Une logique inductive probabiliste est-elle seulement possible?», Cahiers du CREA, no 14, 1990, p. 139Google Scholar; repris dans Boyer, A., Introduction à la lecture de Karl Popper, Paris, Presses d'ENS, 1994.Google Scholar

13 En fait, Nambiar, K. («A Note on Inductive Probability», Applied Mathematics Letters, 1994, p. 4143Google Scholar) soutient que la valeur de p(he), interprétée correctement, peut augmenter, car la valeur de vérité deh et de e augmente au fur et à mesure que nous vérifions e et confirmons h. Bien qu'il soit possible de formalizer une telle intuition, nous pensons que cette remarque n'a pas sa place dans la controverse. Il faut faire la distinction entre la proposition (he), qui fait partie du contenu de l'hypothèse non testéeh, et (he)*, dont fait partie l'hypothèse confirmée h. La première s'insère dans le cadre d'une analyse de ce qui peut être confirmé dans h, la seconde présuppose déjè la confirmation de h. Par ailleurs, Giovanni Blandino semble commettre le même type d'erreur dans «Critical Remarks on an Argumentation by K. Popper and D. Miller : Discussion about Induction», Epistemologia, vol. 7, 1984, p. 188.Google Scholar

14 Sur ce point, Charles Chihara présente un argument très semblable à celui de Gaifman, dans l'article qu'il a écrit conjointement avec Gillies, Donald, «An Interchange on the Popper-Miller Argument», Philosophical Studies, vol. 54, 1988, p. 18Google Scholar. Earman, J. (notamment duns Bayes or Bust? A Critical Examination of Bayesian Confirmation Theory, Cambridge, Mass., MIT Press, 1992Google Scholar) approuve cet argument. Nous pensons toutefois qu'il est suffisant de presenter celui de Gaifman dans cette section de notre article.

15 Gaifman, H., «On Inductive Support and Some Recent Tricks», Erkenntnis, vol. 22, 1985, p. 19.CrossRefGoogle Scholar

16 Il existe en réalité de multiples façons d'exprimer le support deh étant donné e (voir Landsberg, P. T. et Wise, J., «Components of Probabilistic Support: The Two-Proposition Case», Philosophy of Science, vol. 55, 1988, p. 402414)CrossRefGoogle Scholar. Les deux auteurs de cet article avancent d'ailleurs une position qui s'apparente très fortement à celle de Dunn et Hellman. Ils ne considérent pas que la décomposition de Popper et Miller soit si bien justifiée que ce soit la seule possible.

17 Dunn, J. M. et Hellman, G., «Dualling : A Critique of an Argument of Popper and Miller», The British Journal for the Philosophy of Science, vol. 37, 1986, p. 222.CrossRefGoogle Scholar

18 Eells, E., «Popper and Miller, and Induction and Deduction»,à paraître dans Proceedings of the Seventh Asian Logic Conference(2000)Google Scholar, http://philosophy.wisc.edu/eells/papers/pmalc.pdf, p. 8.

19 Good, I. J., «Discussion : A Suspicious Feature of the Popper/Miller Argument», Philosophy of Science, vol. 57, 1990, p. 536.CrossRefGoogle Scholar

20 Good, I. J., «Probabilistic Induction Is Inevitable», Journal of Statistical Computation and Simulation, vol. 20, 1985, p. 323.CrossRefGoogle Scholar

21 R. Jeffrey, «The Impossibility of Inductive Probability», p. 433.

22 Voir Goodman, N., Fact, Fiction and Forecast, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1954Google Scholar; trad, franç, Jacob, de P., Faits, fictions et prédictions, Paris, Éditions de Minuit, 1984.Google Scholar

23 Popper, K. R. et Miller, D., «Why Probabilistic Support Is Not Inductive», Philosophical Transactions of the Royal Society of London, noA321, 1987, p. 573.Google Scholar

24 Pour une autre critique de Dunn et Hellman, voir Howson, C., «On a Recent Objection to Popper and Miller's “Disproof” of Probabilistic Induction», Philosophy of Science, vol. 56, 1989, p. 675680.CrossRefGoogle Scholar

25 Eells, «Popper and Miller, and Induction and Deduction», p. 8.

26 Une démonstration de l'unicité de la définition de Ex(h, e) peut être retrouvée dans Zwirn et Zwirn, «L'argument de Popper et Miller contre la justification probabiliste de l'induction», p. 59–81, et Miller, «Reply to Zwirn & Zwirn», p. 149–153. Cependant, cette démonstration, dont on peut retrouver l'esquisse dans Elby, A., «Contentious Contents: For Inductive Probability», The British Journal for the Philosophy of Science, vol. 45, 1994, p. 193200CrossRefGoogle Scholar, nous semble plus simple et elle établit un lien manifeste avec les exigences de Jeffrey. Ceci nous permet d'identifier la restriction (Cn(x) ∩(A 2) = ∅) comme étant responsable de la divergence d'opinions. Elle a par contre le desavantage de présupposer que h implique e, ce qui n'est pas nécessaire à l'argument de 1983 (Popper et Miller, «Why Probabilistic Support Is Not Inductive», p. 572).

27 Même s'il ne justifie pas vraiment sa préférence, nous devons indiquer que Gaifman semble se ranger du côté de Jeffrey dans ce débat à propos de la définitione Ex(h, e). Si nous voulons être charitable, nous dirons que la validité de l'intervention de Gaifman dépend de celle de Jeffrey.

28 Zwirn et Zwirn, «L'argument de Popper et Miller contre la justification probabiliste de l'induction», p. 68.

29 Redhead, M., «On the Impossibility of Inductive Probability», The British Journal for the Philosophy of Science, vol. 36, 1985, p. 187.CrossRefGoogle Scholar

30 La position de Redhead est reprise par un bon nombre de personnes, et c'est pour cette raison que nous la considérons comme un point tournant. James Cussens, Burke Townsend, Elby, Zwirn et Zwirn font partie de ceux qui ont fait bande à part avec la terminologie de Popper et Miller. Bien que ces deux derniers critiquent l'inductivisme, nous associons leurs noms à celui de Redhead, car leur préférence pour la condition 2 d'Elby afin de définir Ex(h, e) est manifeste. De plus, il faut mentionner Howson, Colin et Franklin, AllanA Bayesian Analysis of Excess Content and the Localisation of Support», The British Journal for the Philosophy of Science, vol. 36, 1989, p. 425431CrossRefGoogle Scholar), qui ont défini une nouvelle mesure de contenu d'une proposition dans le but de perfectionner les intuitions de Redhead.

31 Good donne une definition de Ex(h, e) qui est semblable a celle de Redhead. Selon lui, Ex(h, e) est «l'ensemble H des déductions de h qui ne sont pas des eductions de e» (Good, I. J., «The Impossibility of Inductive Probability», Nature, no 310, 1984, p. 434CrossRefGoogle Scholar). Il n'argumente malheureusement pas de manière satisfaisante en faveur de sa définition. Il se contente de dire qu'à ses yeux, elle est plus intuitive.

32 Si Ex(h, e) = (he), alors une simple falsification vérifie cet énoncé. À ce sujet, Elby de meme que Zwirn et Zwirn laissent entendre qu'il s'agit là d'une thèse qui porte atteinte au falsificationnisme. Nous ne sommes pas de cet avis. Cette propriété de Ex(h, e), bien que gênante pour un confirmationniste, ne l'est pas pour un falsificationniste. Le but de ce dernier est de falsifier une hypothèse, et cela n'est évidemment pas remis en cause par la vérification de e. Si, par le fait même, il détermine la valeur de vérité de ce que les inductivistes tentent d'obtenir par une tout autre méthode, cela est d'autant plus louable qu'il évite les difficultés intrinsèques aux inférences inductives. Il ne faut pas oublier qu'il n'existe pas de probabilité inductive pour Popper et Miller. Les accuser d'identifier le falsificationnisme à une méthodologie inductiviste comme le font Zwirn et Zwirn, c'est jouer insidieusement sur les mots (Miller, «Reply to Zwirn & Zwirn», p. 151).

33 Popper et Miller sont conscients des difficultés terminologiques («Why Probabilistic Support Is Not Inductive», p. 582), mais leurs arguments ne nous semblent pas suffisants pour éliminer les divergences. Ils se contentent de dire qu'une proposition logiquement indépendante de e entretient nécessairement des relations déductives avec cette dérniere. Or, le problème dont il est question n'est pas essentiellement celui de remplacer le concept de support inductif par celui de support partiellement déductif, mais de prouver que le support inductif ne peut pas être explicité à l'aide de la logique des probabilités.

34 Elby, «Contentious Contents : For Inductive Probability», p. 200.

35 Ibid., p. 198.

36 Zwirn et Zwirn, «L'argument de Popper et Miller contre la justification probabiliste de l'induction», p. 78; «Logique inductive et soutien probabiliste», Dialogue, vol. 32, 1993, p. 299301.Google Scholar

37 Miller, «Reply to Zwirn & Zwirn», p. 150.

38 Colin Howson et Peter Urbach, d'après nous, l'ignorent injustement. Voir Howson, C. et Urbach, P., Scientific Reasoning: The Bayesian Approach, La Salle, Open Court, 1989, 2e édition, 1993, p. 398.Google Scholar

39 L'énoncé observationnel e est bien entendu hypothétique, mais on s'entend généralement pour dire qu'il est vrai par convention. Sans cela, il n'y aurait plus aucune différence entre une hypothèse et une observation.

40 Peut-être pourrions-nous mesurer le degré de dépendance déductive que h entretient avec e selon que n est plus ou moins grand?

41 L'effet de contre-support probabiliste associé à la proposition (eh) a capté à tort l'attention de certains commentateurs. Andrés Rivadulla, par exemple, ne comprend pas pourquoi le contre-support déductif probabiliste devrait signifier la contre-induction (Rivadulla, A., «Probabilistic Support, Probabilistic Induction and Bayesian Confirmation Theory», The British Journal for the Philosophy of Science, vol. 45, 1994, p. 480CrossRefGoogle Scholar). De plus, Georg Dorn (Deductive, Probabilistic and Inductive Dependence : An Axiomatic Study in Probability Semantics, Françfort-sur-le-Main, Verlag Peter Lang, 1997Google Scholar) a mis l'accent sur le fait que Popper et Miller auraient prouvé que la contre-induction probabiliste existe et done que l'argument de 1983 ne pouvait pas 'liminer le concept d'induction probabiliste. Nous soutenons qu'il s'agit là de commentaries déplacés, puisque l'objectif de Popper et Miller est de démontrer que le support probabiliste ne peut être un support inductif, peu importe la définition que l'on a jusqu'à maintenant donnée à Ex(h, e).

42 Voir Townsend, B., «Partly Deductive Support in the Popper-Miller Argument», Philosophy of Science, vol. 56, 1989, p. 490496CrossRefGoogle Scholar, pour un questionnement général quant a la pertinence de diviser le support probabiliste deh entre un support déductif et un autre inductif.

43 Voir Eells, E., «On the Alleged Impossibility of Inductive Logic», The British Journal for the Philosophy of Science, vol. 39, 1988, p. 111116CrossRefGoogle Scholar, et Eells, «Popper and Miller, and Induction and Deduction», p. 1–23.

44 Voir Eells, «On the Alleged Impossibility of Inductive Logic», p. 112.

45 Ibid., p. 114.

46 Nous nommerons cette thése la «thèse forte de Popper et Miller».

47 Popper et Miller, «Why Probabilistic Support Is Not Inductive», p. 575.

48 Nous nommerons cette thèse la «thèse faible de Popper et Miller».

49 Cussens, J., «Deduction, Induction and Probabilistic Support», Synthese, vol. 108, 1996, p. 7.CrossRefGoogle Scholar

50 Une algèbre de Lindenbaum est essentiellement une algèbre de Boole dont les éléments sont des classes d'équivalence de formules logiquement équivalentes dans le langage utilisé.

51 Cussens, «Deduction, Induction and Probabilistic Support», p. 8.

52 Ibid., p. 9.

53 Contre la démonstration de Popper et Miller, Gerhard Wasserman affirme que toute valeur numérique de probabilité inductive est un non-sens. Popper et Miller s'attaqueraient done à un faux problème puisqu'ils ne peuvent prevoir quelle pourrait être une valeur de probabilité d'hypothèse adequate (Wasserman, G. D., «On the Nature of Inductive Probabilities», Methodology and Science, vol. 18, 1985, p. 131Google Scholar). Cette critique ne nous convainc pas, car Popper et Miller n'utilisent pas de valeur numérique dans leur démonstration si ce n'est 0 et 1— valeurs plutôt non controversées (Popper et Miller, «Why Probabilistic Support Is Not Inductive», p. 589).

54 Voir Levi, I., «The Impossibility of Inductive Probability», Nature, vol. 310, 1984, p. 433.CrossRefGoogle Scholar

55 Pour plus d'informations à ce sujet, voir Fitelson, B., Studies in Bayesian Confirmation Theory, University of Wisconsin, MadisonGoogle Scholar, http://fitelson.org/thesis.pdf, 2001.

56 Voir aussi Good, I. J., «A Reinstatement, in Response to Gillies, of Redhead's Argument in Support of Induction», Philosophy of Science, vol. 54, 1987, p. 470472.CrossRefGoogle Scholar

57 Voir Eells, «On the Alleged Impossibility of Inductive Logic», p. 113.

58 Voir Gillies, «In Defense of the Popper-Miller Argument», p. 110–113.