Article contents
Une conception sociopolitique de la nation
Published online by Cambridge University Press: 13 April 2010
Abstract
I submit what, I believe, is a fairly new definition of the nation, one which I call the sociopolitical conception. I try to avoid as much as possible the traditional dichotomy between the exclusively civic and ethnic accounts, and try to explain my reasons for doing so. I also adopt as a general framework a certain conceptual pluralism which allows me to use many different concepts of the nation. After that, I proceed by formulating some constraints on any acceptable new definition. My own sociopolitical conception is then finally introduced. The sociopolitical nation is a political community, most often composed, sociologically, of a national majority, national minorities, and individuals with other national origins. The concept of national majority is crucial for the account and refers to the largest sample in the world of a given population sharing a common language, history, and culture. National minorities are defined as extensions of neighbouring nations, while individuals of other national origins are those members of ethnic minorities that have come from immigration. There would be no sociopolitical nation if there were no national majority, but this is compatible with a pluricultural and multi-ethnic view of the nation, since the political community may also include national minorities and individuals with a different origin. I end the article by showing that this definition meets the constraints that were initially introduced.
- Type
- Articles
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- Dialogue: Canadian Philosophical Review / Revue canadienne de philosophie , Volume 37 , Issue 3 , Summer 1998 , pp. 435 - 471
- Copyright
- Copyright © Canadian Philosophical Association 1998
References
Notes
1 Je ne ferai pas, pour les fins de la présente discussion, une distinction tranchée entre le peuple et la nation. Pour plusieurs auteurs, la notion de peuple renvoie à une réalité strictement sociologique alors que celle de la nation serait davantage politique. Cette première observation explique peut-être en partie ma réticence à distinguer les deux notions. Comme on le verra, je chercherai à développer un concept sociopolitique de la nation. Je ne veux done pas imposer une distinction tranchée entre une notion sociologique (le peuple) et une notion politique (la nation). En outre, ceux qui font cette distinction proposent une caracterisation univoque de la nation. En faisant la distinction entre les deux concepts, on souscrit d'emblée à une certaine conception particulière de la nation. Or, puisque je désire, au contraire, endosser un pluralisme conceptuel en cette matière, j'ai tendance à rejeter une distinction fixée une fois pour toutes entre les deux notions. J'utiliserai done indifféremment les expressions «peuple» et «nation». Ceci étant dit, on pourrait quand même admettre une distinction minimale entre les deux concepts. Quelle que soit la définition adoptée, le «peuple» pourrait reférer à une notion sociologique et par conséquent à un certain type de regroupement populationnel, alors que la «nation» désignerait le peuple en tant que dépositaire de certains droits. Autrement dit, ce serait le peuple en tant que groupe ayant une certaine personnalité juridique et politique. Pour une distinction de ce genre, voir Michael Ignatieff, «Québec : la société distincte, jusqu'où?», dans Jacques Rupnik, dir., Le déchirement des nations, Paris, Seuil, p. 139–156. Voir page 141. C'est seulement lorsque l'on se rapporte à des «peuples» qui n'ont pas ou peu de personnalité juridique et politique (comme les «nations» culturelles ou les «nations» diasporas) que l'on sent impérieusement la nécessité de distinguer entre les deux notions. Mais puisque je suis enclin à proposer un certain type de reconnaissance politique et juridique autant pour les nations diasporas et culturelles que pour les autres, j'ai done une raison supplémental de renoncer à imposer une distinction trop tranchée entre les deux concepts. Quoi qu'il en soit, la plupart des distinctions conceptuelles peuvent être faites en utilisant seulement le terme «nation». On pourra à l'aide de cette expression parler de la nation exclusivement civique (ou politique), de la nation ethnique, de la nation culturelle, de la nation diaspora et de la nation sociopolitique.
2 Pour un survol récent de la littérature sur le sujet, voir Hutchinson, John et Smith, Anthony D., dir., Nationalism, Oxford, Oxford University Press, 1994Google Scholar; Balakrishnan, Gopal, dir., Mapping the Nation, New York, Verso, 1996Google Scholar; Dahbour, Omar et Ishay, Micheline R., dir., The Nationalism Reader, New Jersey, Humanities Press, 1995Google Scholar; et Delannoi, Gil et Taguieff, Pierre-André, dir., Théories du nationalisme, Paris, Éditions Kimé, 1991.Google Scholar
3 Renan, Ernest, Qu'est-ce qu'une nation?, Paris, Calmann-Lévy, 1882.Google Scholar
4 La conception exclusivement civique est à notre époque défendue par un très grand nombre de penseurs. On peut mentionner à titre d'exemples : Habermas, Jürgen, «Citoyenneté et identityé nationale», dans J. Lenoble et N. Dewandre, dir., L'Europe au soir du siècle: identityé et démocratic, Paris, Éditions Esprit, 1992Google Scholar; Finkielkraut, Alain, La défaite de la pensée, Paris, Gallimard, 1987Google Scholar; Greenfeld, Liah, Nationalism: Five Roads to Modernity, Cambridge, MA, Harvard University Press, 1993Google Scholar; Taguieff, Pierre-André, «Nationalisme et anti-nationalisme. Le debat sur l'identityé française», dans Nations et nationalismes. Les dossiers de l'état du monde, Paris, La Découverte, 1995, p. 127–135Google Scholar; et Schnapper, Dominique, La communauté des citoyens, Paris, Gallimard, 1994Google Scholar. Plus près de chez nous, on lira avec profit Bariteau, Claude, «Pour une conception civique du Québec», L'Action nationale, vol. 86, n°7 (1996), p. 105–168.Google Scholar
5 von Herder, Johann Gottfried, Idées pour la philosophic de l'histoire de l'humanité, Paris, Aubier, 1962.Google Scholar
6 Même si très peu de penseurs souscrivent à une conception purement ethnique de la nation, plusieurs croient qu'il existe une composante ethnique incontournable. Parmi ceux-ci, mentionnons Smith, Anthony D., The Ethnic Origins of Nations, Oxford, Blackwell, 1986Google Scholar et National Identity, Londres, Penguin Books, 1991Google Scholar; Geertz, Clifford, «The Integrative Revolution: Primordial Sentiments and Civil Politics in the New States», dans Clifford Geertz, dir., The Interpretation of Cultures, Londres, Fontana Press, 1993, p. 255–310Google Scholar; Berghe, Pierre Van Den, The Ethnic Phenomenon, New York, Elsevier, 1979Google Scholar; et Connor, Walker, Ethnonationalism: the Quest for Understanding, Princeton, Princeton University Press, 1994Google Scholar. Pour un survol de la littérature sur cette question, voir Hutchinson, John et Smith, Anthony D. dir., Ethnicity, Oxford, Oxford University Press, 1997.Google Scholar
7 Voir à ce sujet mon «Introduction: Questioning the Ethnic / Civic Dichotomy», dans Jocelyne Couture, Kai Nielsen et Michel Seymour, dir., Rethinking Nationalism, Calgary, University of Calgary Press, 1998, p. 1–61.
8 On trouvera un tres beau plaidoyer en faveur des Etats multinationaux dans le remarquable ouvrage de Stéphane Pierré-Caps, La multination, Paris, Odile Jacob, 1995.
9 De bons exemples de nationalisme culturel se trouvent dans Charles Taylor, Rapprocher les deux solitudes, Sainte-Foy, Les Presses de l'Université Laval, 1992; Dumont, Fernand, Raisons communes, Montréal, Boréal, 1995Google Scholar; Kymlicka, Will, Multicultural Citizenship, Oxford, Clarendon Press, 1995Google Scholar; Hutchinson, John, The Dynamics of Cultural Nationalism, Londres, Allen and Unwin, 1987Google Scholar; Tamir, Yael, Liberal Nationalism, Princeton, Princeton University Press, 1993Google Scholar; et Miller, David, On Nationality, Oxford, Oxford University Press, 1995.Google Scholar
10 Voir mon «Introduction», dans Rethinking Nationalism, section V, p. 30–44.
11 Voir Rawls, John, «Kantian Constructivism in Moral Theory», Journal of Philosophy, vol. 77, n°9 (1980), p. 515–572Google Scholar; voir aussi Rawls, John, Political Liberalism, New York, Columbia University Press, 1993, p. 31, note 34.Google Scholar
12 Sur la notion de communauté imaginée, voir Benedict Anderson, Imagined Communities. Reflections on the Origin and Spread of Nationalism, New York, Verso, 1983.
13 Pour se rendre compte de l'abondance des publications récentes portant sur le nationalisme, voir la bibliographie à la fin de Rethinking Nationalism.
14 Les notions de «structure de culture» et de «contexte de choix» sont empruntées a Will Kymlicka. Voir son Liberalism, Community and Culture, Oxford, Clarendon Press, 1989.
15 Voir notamment les critiques de Margaret Moore addressées au nationalisme culturel de David Miller, dans «Miller's Ode to National Homogeneity», Nations and Nationalism, vol. 2 (novembre 1996), p. 423–429; voir aussi mon «Introduction» à Rethinking Nationalism, p. 30–44.
16 Voir Gentil Puig Moreno, «Les langues dans l'État espagnol», dans Henri Giordan, dir., Les minorités en Europe, Paris, Éditions Kimé, 1992, p. 273.
17 Pour une étude exclusivement consacrée à la notion de diaspora, voir Cohen, Robin, Global Diasporas, Londres, University College of London Press, 1995.Google Scholar
18 La même remarque vaut pour les francophones hors Québec (à l'exception de ceux de l'Acadie qui forment la nation acadienne). Les francophones hors Québec sont le prolongement de la majorité nationale canadienne-française.
19 Voir Rawls, Political Liberalism, p. 41.
20 Pour un argument justifiant l'admission des droits collectifs, voir mon «Antiindividualisme, droits collectifs et États multinationaux», dans Weinstock, Daniel, dir., Le déft dupluralisme, Lekton, vol. 4, n°1 (1994), p. 41–80.Google Scholar
21 Parmi les ouvrages récents qui soulèvent le problème moral de l'exercice du droit à l'autodétermination, mentionnons Buchanan, Allen, Secession: The Morality of Political Divorce. From Fort Sumter to Lithuania and Quebec, Boulder, Westview, 1991Google Scholar; Caney, Simon, George, David et Jones, Peter, dir., National Rights: International Obligations, Boulder, CO, Westview Press, 1996Google Scholar; McKim, Robert et McMahan, Jeff, dir., The Morality of Nationalism, Oxford, Oxford University Press, 1997Google Scholar; et Lehning, Percy B., dir., Theories of Secession, Londres, Routledge, 1998.Google Scholar
22 Kumar, Radha, «The Troubled History of Partition», Foreign Affairs, vol. 76, n°1 (1997), p. 22–34.CrossRefGoogle Scholar
23 Même Stéphane Pierré-Caps dans La multination et Will Kymlicka dans Multicultural Citizenship ne distinguent pas clairement les minorités nationales et les nations. Pour eux, certaines nations sont des minorités nationales. Voir à ce sujet mon «Introduction» à Rethinking Nationalism, p. 45–55.
24 Voir Rawls, John, «The Law of Peoples», dans Stephen Shute et Susan Hurley, dir., On Human Rights: The Oxford Amnesty Lectures 1993, New York, Basic Books, 1993, traduit par Bertrand Guillarme sous le titre Le droit des gens, Paris, Le Seuil, 1996.Google Scholar
25 Sur ce thème, voir la contribution récente de Margaret Canovan, Nationhood and Political Theory, Cheltenham, Edward Elgar, 1996.
26 Voir À l'aube d'un rapprochement. Points saillants du Rapport dela Commission royale sur les peuples autochtones, Ottawa, Ministère des approvisionnements et services, 1996, p. 25–26.
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- Cited by