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L'esthétique de Hegel au carrefour de la parole et de l'action

Published online by Cambridge University Press:  13 April 2010

Claude Thérien
Affiliation:
Université du Québec à Trois-Rivières

Abstract

The following paper is not a literal exegesis of Hegel's æsthetics, but rather the attempt to encounter his æsthetics from a philosophical perspective which considers the æsthetic experience as intuition of finitude. From this perspective our purpose is to indicate the contemporary philosophical relevance of Hegel's æsthetics by underscoring some elements of it which can help us to rethink the relation between æsthetic experience and the subject in his interaction with his world. The question of this essay is: how can æsthetic experience be a substantial experience for the modern subject?

Type
Articles
Copyright
Copyright © Canadian Philosophical Association 2000

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References

Notes

1 Je renvoie ici aux nombreux travaux philologiques et philosophiques d'Annemarie Gethmann-Siefert, laquelle a mis en lumière le rôle que Heinrich Gustav Hotho a joué comme premier éditeur des Cours sur l'esthétique dans l'ordonnancement et l'unité systématiques attribués à ceux-ci. On peut trouver les références bibliographiques relatives à cette discussion dans : Annemarie Gethmann-Siefert, Einführung in die ästhetik, Munich, Wilhelm Fink Verlag, 1995, p. 204–205. En langue française, le lecteur pourra se référer à l'ouvrage collectif publié sous la direction de Fabbri, V. et Vieillard-Baron, J.-L., Esthétique de Hegel, Paris-Montréal, L'Harmattan, 1997Google Scholar. On y trouve un article d'Annemarie Gethmann-Siefert intitulé : «Art et quotidienneté. Pour une réhabilitation de la jouissance esthétique» qui fait le point sur la question à la lumière de nouveaux documents sur l'esthètique de Hegel. Cf. p. 49–88. Le lecteur pourra également consulter sur cette question la présentation de Jean-Pierre Lefebvre qui introduit la nouvelle traduction des Cours d'esthétique que celui-ci a réalisée avec Veronika von Schenk. Cf. Cours d'esthétique, Paris, Aubier, 1995, p. VIIXLIV.Google Scholar

2 J'emprunte ici cette image du carrefour à Yves Bonnefoy, bien que mon utilisation du terme vise, comme le lecteur pourra le constater, autre chose que la sienne. Bonnefoy utilise l'image du carrefour pour déconstruire l'illusion d'un arrière-pays, «un pays d'essence plus haute, oú j'aurais pu aller vivre et que désormais j'ai perdu». II s'interroge sur cette aspiration de l'homme, ce besoin récurrent qui le caractérise à penser que le véritable lieu de plénitude est toujours un de ces pays lointains, lesquels représentent toujours quelques arrièrepays, un pays autre d'une absolue présence qui lui semble toujours à jamais perdue. Cf. Bonnefoy, Y., L'arrière-pays, Paris, Flammarion (Champs), 1982, p. 7, 12, 21.Google Scholar

3 Cf. Genette, G., L'æuvre de l'art, tome I : Immanence et transcendance, Paris, Éditions du Seuil, 1994Google Scholar; Genette, G., L'æuvre de l'art, tome II: La relation esthétique, Paris, Éditions du Seuil, 1997Google Scholar; et Schaeffer, J.-M., Les célibataires de l'art. Pour une esthétique sans mythes, Paris, Gallimard, 1996.Google Scholar

4 Sur ce rapport entre art et religion, on consultera, outre les chapitres que Hegel a consacrés à cette problématique dans la Phénoménologie de l'esprit (section VII, «La religion»), la troisième partie de la philosophie de l'esprit («L'esprit absolu», §553–577), dans Enzyklopädie der philosophischen Wissenschaften III (Werlee 10), Francfort, Suhrkamp, 1986, en particulier, le §562, p. 371Google Scholar; Encyclopédie des sciences philosophiques III. La philosophie de l'esprit, trad. Bourgeois, B., Paris, Vrin, 1988, p. 349Google Scholar. A cet endroit, Hegel aborde explicitement la question du «besoin de l'art» (das Bedürfnis der Kunsi) dans les religions. Dans les Cours sur l'esthétique, cette perspective est reprise dans la section intitulée : “Position de l'art par rapport à la réalité finie, la religion et la philosophie» Cf. Hegel, G. W. F., Vorlesungen über die Ästhetik I (Werke 13), Francfort, Suhrkamp, 1986, p. 127144Google Scholar; Es(I), Esthétique 1, trad. Bernard, C., revue et complétée par B. Timmermans et P. Zaccaria, Paris, Le Livre de Poche, 1997, p. 153171Google Scholar; et Cours d'esthétique I, trad. Lefebvre, J.-P. et von Schenk, V., Paris, Aubier, 1995, p. 127145Google Scholar. Desormais j'utiliserai la désignation VÄ(I,II,III) pour les tomes de l'édition allemande et indiquerai la pagination correspondante dans les traductions françaises en employant le sigle Es(I,II) pour celle de C. Bernard et le sigle CE(I,II,III) pour celle de J.-P. Lefebvre et V. von Schenk.

5 Cf. à ce sujet les développements de Hegel sur «das Prinzip der inneren Subjektivität» et ce qui s'ensuit pour le destin de l'art moderne; VÄ(II), p. 128–150; Es(1), p. 630–659; et CE(II), p. 121–140.

6 «En effet, Dieu est représenté dans le christianisme dans sa vérité, done comme étant en soi complétement concret, comme une personne, un sujet et, défini plus précisément, commeesprit» VÄ(I), p. 101; Es(I), p. 130; et CE(I), p. 99.

7 «Nous pouvons caractériser ce passage de l'art a la religion en disant que, du point de vue de la conscience religieuse, l'art ne constitue qu'un aspect» VÄ(I), p. 143; E(I), p. 169; et CE(I), p. 143. Est sous-entendu dans ce passage que cette conscience religieuse est celle qui s'affirme dans la religion chrétienne, laquelle, comme nous l'avons vu plus haut, voit dans l'intériorité le lieu de la manifestation de l'esprit et la rencontre de l'homme avec l'absolu.

8 VÄ(I), p. 24; Es(I), p. 60; et CE(I), p. 17.

9 Cf. Gadamer, H.-G., Vérité et méthode. Les grandes lignes d'uneherméneutique philosophique, édition intégrate revue et complétée par P. Fruchon, J. Grondin et G. Merlio, Paris, Éditions du Seuil, 1996, p. 59Google Scholar. Gadamer parle de «la subjectivation de l'esthétique à travers Kant» et il vise par là «die radikale Subjektivierung» introduite par Kant dans l'esthétique moderne. En ce sens, cette subjectivation radicale débute, selon Gadamer, par l'œuvre de Kant.

10 Dans l'ordre de sa présentation, Hegel traite successivement; 1) «la philosophie kantienne»: VÄ(I), p. 83–89; Es(I), p. 114–119; CE(I), p. 80–85; 2)«Schiller, Winckelmann, Schelling» : VÄ(I), p. 89–93; Es(I), p. 119–122; CE(I), p. 85–90; et 3) sous le titre «L'ironie» il aborde les frères Schlegel, Solger et Tieck :VÄ(I), p. 93–99; Es(I), p. 122–129; CE(I), p. 90–97.

11 Cf. VÄ(II), p. 110–112; Es(I), p. 630–632; et CE(II), p. 102–104.

12 Cf.VÄ(I), p. 142, cf. aussi p. 24; ES(I), p. 169 et 60; et CE(I), p. 143 et 17.

13 Par exemple, celle de la belle âme et celle de l'ironie. Cf. supra, p. 765.

14 Cf. VÄ(II), p. 231–242; Es(I), p. 738–748; et CE(II), p. 219–229.

15 Cf. VÄ(I) p. 237–238; Es(I), p. 744; et CE(II), p. 224.

16 Cf.VÄ(I), p. 113; Es(I), p. 141–142; et CE(I), p. 112.

17 Cf. VÄ(I), p. 81; Es(I), p. 112;et CE(I), p. 76. Cf. aussi VÄ(II), p. 140; Es(I), p. 656; et CE(II), p. 131.

18 Je pense surtout aux développements que Hegel consacre au concept d'expérience dans sa célèbre introduction, lorsqu'il souligne le caractère d'autoévaluation de la conscience vis-à-vis son monde et elle-même. Dans ce contexte, Hegel parle de «Mqβstab der Wahrheit» (critère de vérité) et de «Prüfung (d'examen) de la conscience pour souligner l'irréductibilité des rapports de médiation que la conscience doit entreprendre à l'égard de ses expériences. Dans le contexte de la réflexion esthétique, cette caractéristique s'incarne, comme je tente de le souligner dans ce qui suit, par l'importance que Hegel accorde à considerer la dimension de l'expérience esthétique à partir de la problématique des idéaux de la subjectivité, ceux qu'elle porte en elle-même comme l'intimité de ses plus hauts sentiments; mais la réalisation de ceux-ci implique ipso facto pour la subjectivite l'épreuve de la réalite existante. Cf. Phänoménologie des Geistes (Werke 3), Francfort, Suhrkamp, 1984, p. 7778Google Scholar et Phénoménologie de l'esprit, trad. Lefebvre, Jean-Pierre, Paris, Aubier, 1991, p. 8788.Google Scholar

19 Cette application m'apparait d'autant plus plausible lorsque l'on prend en considération les endroits où Hegel laisse entendre que la reconstruction philosophique de l'histoire de l'esthétique prend la forme articulée de ce que l'on pourrait nommer proprement une phénoménologie des formes de l'art, laquelle s'inspire largement du principe de reconstruction dialectique que l'on retrouve à la base de la Phénoménologie de l'esprit, à savoir la progression historique des formes que la conscience prend d'elle-même et de son monde par l'intermédiaire d'un «developpement de figures de l'art» (Verlauf von Gestaltungen der Kunst) conçu comme «des étapes à franchir» (Verlauf von Stufen durchzugehen). Cf. VÄ(I), p. 103; Es(I), p. 132; et CE(I), p. 101–102.

20 Hegel détermine la poésie lyrique comme «das Sichaussprechen des Subjekts» (l'expression de soi du sujet) en tant que celle-ci est l'expression de l'intériorité comme «monde interieur» (innere Welt) de la subjectivité. Cf. VÄ(III), p. 322; Es(II), p. 486; et CE(III), p. 301.

21 Dans le cas de la poésie épique et celui de la poésie dramatique, Hegel propose une réflexion sur l'interaction de l'homme à son monde consiérée à travers 1) l'action comme expression de «pouvoirs spirituels» (geistige Mächte) s'exprimant objectivement par la voix et les gestes des héros épiques et 2) l'action comme expression consciente de l'lntériorité subjective se sachant distincte du monde objectif. Cf. VÄ(III), p. 321, 323–324; Es(II), p. 486–488; et CE(III), p. 300–303.

22 Cf. supra, p. 755.

23 Cf. aussi p. 764–765.

24 Cf. Taminiaux, J., «Entre l'attitude esthétique et la mort de l'art», dans Recoupements, Bruxelles, Ousia, 1982, p. 150174Google Scholar; Ferry, L., Homo œstheticus. L'invention du goût à l'âge démocratique, Paris, Grasset, 1990, p. 172179Google Scholar; Sherringham, M., Introduction à la philosophie esthétique, Paris, Payot, 1992, p. 225Google Scholar; Schaeffer, J.-M., L'art de l'âge moderne. L'esthétique et la philosophie de l'art du xvIIIe siècle à nos jours, Paris, Gallimard, 1992, p. 78, 178Google Scholar; et Jimenez, M., Qu'est-ce que l'esthétique?, Paris, Gallimard, 1997, p. 158170.Google Scholar

25 Cf. Bubner, R., Ästhetische Erfahrung, Francfort, Suhrkamp, 1989, p. 951.Google Scholar

26 Pour une discussion critique de ces deux types d'esthétique, je renvoie au travail de Seel, Martin, Die Kunst der Entzweiung. Zum Begriff der ästhetischen Rationalität, Francfort, Suhrkamp, 1985, p. 4172Google Scholar; L'art de diviser. Le concept de rationalité esthétique, trad. Hary-Schaeffer, C., Paris, Armand Colin, 1993, p. 4155.Google Scholar

27 Cf. Bubner, R., Ästhetische Erfahrung, Francfort, Suhrkamp, 1989, p. 151.Google Scholar

28 Il est bien connu que les deux introductions de la Critique de la faculté dejuger abordent cette problématique explicitement. C'est cette probleématique qui fait aussi d'un point de vue systématique que la troisième Critique, mis à part son contenu thématique propre, représente par rapport aux deux Critiques précédentes une métacritique de la philosophie critique. Si Kant arrive à cette réflexion après avoir considéré la raison théorique et la raison pratique, il est bien connu aussi que l'idéalisme allemand, quant à lui, prend son envoi en partant d'emblée de la problématique de l'unité de la raison elle-même. Cf. Kant, E., Œuvres philosophiques II, Paris, Gallimard, La Pléiade, 1985, Première introduction, p. 845912, Deuxième introduction, p. 923–955.Google Scholar

29 Que le lecteur veuille bien relire à ce propos les cinq premiers paragraphes de la Critique de la faculté de juger.

30 À propos de la médiation de Schiller entre l'esthétique kantienne et celle de Hegel, je renvoie aux quelques titres suivants : Taminiaux, J., La nostalgie de la Grèce à l'aube de l'idéalisme allemand. Kant et les Grecs dans l'itinéraire de Schiller, de Hölderlin et de Hegel, La Haye, M. Nijhoff, 1967Google Scholar; Rohrmoser, G., «Zum Problem der ästhetischen Versohnung. Schiller und Hegel», dans Schillers Briefe iiber die asthetische Erziehung, éd. Bolten, de J., Francfort, Suhrkamp, 1984, p. 314333Google Scholar; Gethmann-Siefert, Annemarie, «Idylle und Utopie. Zur gesellschaftskritischen Funktion der Kunst in Schillers Ästhetik», dans Jahrbuch der deutschen SchillerGesellschaft, vol. 24 (1980), p. 3267Google Scholar; et Gethmann-Siefert, Annemarie, «Vergessene Dimensionen des Utopiebegriffs. Der «Klassizismus» der idealistischen Ästhetik und die gesellschaftskritische Funktion des “schönen Scheins”», dans Hegel-Studien, vol. 17 (1982), p. 119167.Google Scholar

31 Cf. ici le §42 intitulé «De l'intérêt intellectuel concernant le beau» de la Critique de la faculté de juger.

32 Cf. mon article, «De la beauté comme symbole de la paix perpétuelle», dans Dialogue, vol. 36, no4 (1997), p. 753770.CrossRefGoogle Scholar

33 Cf.VÄ(I), p. 313–314; Es(I), p. 327–328; et CE(I), p. 321–322.

34 Cf.VÄ(I), p. 95–96, 382; Es(I), p. 125–126, 392; et CE(I), p. 93–94, 393–394.

35 Cf. supra, note 3.