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La thèse des descriptions multiples: lieu commun ou paradoxe de la philosophie de l'action?

Published online by Cambridge University Press:  13 April 2010

Marc Neuberg
Affiliation:
Université catholique de Louvain

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Nous appelons «thèse des descriptions multiples» l'opinion qui veut qu'une seule et même action peut etre decrite de plusieurs façons différentes selon que Ton prend en considération ou non les différentes conséquences, plus ou moins lointaines, de cette action. Cette thèse joue chez certains penseurs un rôle essentiel dans la solution du problème de l'individuation des actions. Chez D. Davidson notamment, elle intervient de façon décisive dans la démonstration de sa fameuse thèse que toute action se réduit à des mouvements corporels. Nous entendons montrer, premièrement, que la thèse des descriptions multiples, à supposer même qu'elle soit vraie, ne saurait remplir le rôle que lui assigne Davidson dans le contexte de l'individuation des actions; deuxièmement, que cette thèse est fondée en fait sur l'ignorance de certaines distinctions importantes concernant l'action et le langage de l'action.

Type
Articles
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Copyright © Canadian Philosophical Association 1985

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References

1 La notion de « mouvement corporel » doit être comprise de façon assez «généreuse » pour pouvoir s'appliquer également à des « actes mentaux »; cf. D. Davidson. «Agency », 49. Les travaux de Davidson que nous citons le sont d'après leur réimpression dans Davidson, Donald. Essays on Actions and Events (Oxford: Clarendon Press. 1980)Google Scholar.

2 Austin, John L., How to Do Things with Words (2d ed.: Cambridge, MA: Harvard University Press, 1975), 107108CrossRefGoogle Scholar.

3 Le passage cité d'Austin est à cet egard on ne peut plus clair. Tel n'est pas le cas, comme l'a noté Davidson («Agency», 57), d'un passage de «A Plea for Excuses» (Austin, John L., Philosophical Papers [2d ed.; Oxford: Oxford University Press. 1971], 201).Google Scholar La formulation d'Austin a cet endroit peut faire croire que les conséquences sont «importees» dans l'action et pas seulement dans sa description. Or, c'est sur ce dernier passage que J. Feinberg s'est appuyé pour formuler sa conception de «l'effet accordeon»: «... an act, like the folding musical instrument, can be squeezed down to a minimum or else stretched out» (Feinberg, J., «Action and Responsibility». cite d'aprés White, A. R., ed.. The Philosophy of Action [Oxford: Oxford University Press. 1968], 106).Google Scholar Formulé de cette facon, «l'effet accordeon» dit exactement le contraire de la these des descriptions multiples qui veut justement exclure que les conséquences d'une action soient «importées» dans Faction elle-méme.

4 Anscombe, G. E. M.. Intention (Oxford: Basil Blackwell. 1957), §26Google Scholar.

5 Davidson. «Actions, Reasons and Causes», 4Google Scholar.

6 Searle, John R.. «The Intentionality of Intention and Action». Inquiry 22 (1979). 272273CrossRefGoogle Scholar.

7 Ces régies sont a la fois plus precises et d'application plus limitée que les régies auxquelles obèissent les actions que G. H. von Wright, empruntant le terme a J. Habermas, appelle «actions communicatrices»: executer un ordre, rèpondre à une question, etc. (Wright, G. H. von, «The Determinants of Action». dans Kohlenberger, Helmut, ed., Reason, Action and Experience, Essays in Honour of R. Khhunski [Hamburg: Felix Meiner Verlag, 1979], 109111)Google Scholar.

8 Feinberg prècise: «... in respect of causally connected sequences of acts and conse- quences, our language provides us with numerous alternative ways of talking» («Action and Responsibility», 106).

9 Thalberg, I., Perception, Emotion and Action (Oxford: Basil Blackwell. 1977). 8992 et 9497Google Scholar.

10 C'est ce que nous comprenons d'apres l'exemple donne par Thalberg.

11 Et non pas: tourner l'interrupteur, comme il est èvident d'aprés I'analyse de Davidso dans «Agency», 50–52 et 53.

12 Davidson, «Agency», 51.

13 Toulmin, S. E. et Baier, K., «On Describing». dans Caton, C. E.. ed., Philosophy and Ordinary Language, (Urbana: University of Illinois Press. 1963), 210Google Scholar.

14 Davidson, «Agency». 61.

15 De même qu'Anscombe confond explication et description de l'action, Searle, dans son exemple cité ci-dessus, confond décrire une action et donner In signification d'une action. En effet, l'énoncé «II a vengé la Servie» n'est pas une «description» de l'acte de Princip, mais il indique la signification qu'a eue, pour Princip et pour une partie du peuple serbe, une certaine action, à savoir l'assassinat de l'héritier présomptif de cet empire autrichien perçu comme oppresseur du peuple serbe. Un patriote autrichien. par contre, n'aurait pas prononce cette phrase, et cela non pas parce qu'il n'aurait pas remarqué cette soi-disante «consequence» de l'attentat, mais parce que pourlui l'acte de Princip ne possede pas cette signification.

16 Aristote dit à ce propos: «Tout mouvement s'étale dans le temps et tend à une fin—ainsi la construction d'une maison—et il n'est acheve et fini que lorsque est fait ce vers quoi il tend, en d'autres termes par consequent lorsqu'on le prend dans la totalite de ce temps qui est necessaire pour que soit fait ce vers quoi il tend» (Ethiqtie a Nicomaqite, 1174a19ff.). Aristote, Ethique à Nicomuque, traduction Gauthieret, R. A.Jolif, J. Y. (Louvain et Paris: Publications Universitaires de Louvain/Béatrice-Nauwelaerts, 1970)Google Scholar.

17 Lorsque nous disons qu'il s'agit d'actions différentes, nous n'entendons pas par la qu'elles sont totalement différentes, comme le sont, par exemple, jouer du violon et enfoncer un clou dans le mur. II y a une partie qui leur est commune. Mais cela n'empeche pas qu'elles sont differentes dans le meme sens que sont différents un noyau de cerise et la cerise entiére.

18 Davis, L. H., «Individuation of Actions», Journal of Philosophy 67 (1970), 520530;CrossRefGoogle ScholarThomson, J. J., «The Time of a Killing», Journal of Philosophy 68 (1971), 115132:CrossRefGoogle ScholarGoldman, A. I., A Theory of Human Action (New York: Prentice Hall, 1970)Google Scholar; Goldman, A. I., «The Individuation of Action», Journal of Philosophy 68 (1971), 761774CrossRefGoogle Scholar.

19 Thalberg, I., «Singling Out Actions, their Properties and Components», Journal of Philosophy 68 (1971), 783CrossRefGoogle Scholar.

20 Pour la conception de l'évenement chez Davidson, voir: Davidson, «The Individuation of Events», 163–180.

21 Goldman, «The Individuation of Action», 774Google Scholar.

22 Pour une discussion plus detaillée de la polémique entre Goldman et Davidson, voir; Kaufmann, J. N., «Philosophie analytique de Taction et fondement normatif des sciences de I'homme», Dialogue 23 (1984), 1114CrossRefGoogle Scholar.

23 Nous empruntons ces deux termes à Kaufmann, ibid.

24 Pbur l'ensemble de ce développement, voir: Thalberg, Perception, 105–112.

25 Ibid. 109.

26 Wright, G. H. von, «On the Logic of Norms and Actions», dans Hilpinen, R. ed., New Studies in Deontic Logic (Dordrecht: D. Reidel, 1981), 335CrossRefGoogle Scholar.

27 Ibid., 17; nous pouvons negliger ici la distinction que fait von Wright entre «actions individuelles» et «actions génériques».

28 Ibid., 16.

29 Ibid.

30 Ibid., 18.