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Conscience des déficits dans le cadre de la maladie d’Alzheimer : représentations et vécu des professionnels soignants

Published online by Cambridge University Press:  07 March 2024

Julie Vignolo*
Affiliation:
Master 2 en Psychologie Clinique et Gérontologie. LCPI : Laboratoire Cliniques Psychopathologique et Interculturelle EA4591, Université Toulouse 2 Jean-Jaurès, 5 Allée Antonio Machado, 31058, Toulouse, France
Jean-Pierre Jacus
Affiliation:
Doctorat. LCPI : Laboratoire Cliniques Psychopathologique et Interculturelle EA4591, Université Toulouse 2 Jean-Jaurès, 5 Allée Antonio Machado, 31058, Toulouse, France
Thierry Darnaud
Affiliation:
HDR. LCPI : Laboratoire Cliniques Psychopathologique et Interculturelle EA4591, Université Toulouse 2 Jean-Jaurès, 5 Allée Antonio Machado, 31058, Toulouse, France
Christine Vanessa Cuervo-Lombard
Affiliation:
HDR. CERPPS : Centre d’Études et de Recherche en Psychopathologie et Psychologie de la Santé EA7411, Université Toulouse 2 Jean-Jaurès, Allée Antonio Machado, 31058, Toulouse, France
*
Auteur de correspondance: Julie Vignolo; Email: [email protected]
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Résumé

La qualité des soins apportés aux personnes vivant avec la maladie d’Alzheimer (MA) dépend en partie de la capacité des professionnels à déterminer le degré de conscience de la maladie chez les patients. La présente recherche s’est intéressée aux représentations des soignants concernant la conscience des troubles chez les résidents d’établissements de soins de longue durée présentant un diagnostic de MA. Le pouvoir prédicteur de l’anosognosie sur le fardeau soignant a également été examiné. L’anosognosie des troubles de la construction (r = 0,40, p = 0,0164) et de l’initiation (r = 0,32, p = 0,052) était corrélée au fardeau soignant. Les professionnels se représentaient les résidents comme ayant une conscience altérée de leurs capacités, même en l’absence d’anosognosie. Les scores réels d’anosognosie ne prédisaient pas les estimations soignantes, hormis le score global sous forme de tendance (χ2 = 3,38, p = 0,066). Les soignants surestimaient pourtant les performances cognitives des résidents, telles que mesurées au moyen du protocole Misawareness (prédictions aidants/performances réelles : DC = 12,32, p < 0,0001).

Abstract

Abstract

The quality of care provided to people living with Alzheimer’s Disease (AD) depends, in part, on the ability of professionals to identify the extent of awareness in patients. The present research focused on professional caregivers’ representations concerning patients’ awareness of disorders in residents of long-term care institutions diagnosed with AD. The predictive power of anosognosia on healthcare professionals’ burden was also investigated. Anosognosia for construction and initiation impairments (r= 0.40, p = 0.0164; r = 0.32, p = 0.052) was correlated with caregivers’ burden. Professionals tended to form representations of patients as being unaware of their condition, including in the absence of anosognosia. Indeed, anosognosia scores did not predict professionals’ estimates, except for the overall anosognosia score (χ2 = 3.38, p = 0.066). However, caregivers overestimated patients’ cognitive performances, as measured via the Misawareness protocol (caregiver predictions/actual performances: DC = 12.32, p <0.0001).

Type
Article
Copyright
© Canadian Association on Gerontology 2024

Introduction

En France, plus d’un tiers des personnes accueillies en Établissements d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EHPAD) présentent une Maladie d’Alzheimer (MA) ou une maladie apparentée (Balavoine, Reference Balavoine2022). Rice et collaborateurs (Reference Rice, Howard and Huntley2019), à l’instar de l’équipe de Quinn, Clare, Jelley, Bruce, et Woods (Reference Quinn, Clare, Jelley, Bruce and Woods2014), soulignent la nécessité, notamment pour les aidants professionnels, de comprendre l’expérience subjective des personnes présentant un diagnostic de maladie neuro-évolutive afin de développer des accompagnements adaptés à leurs besoins. Pour ces mêmes auteurs, cette appréhension de l’expérience vécue par les personnes passe nécessairement par une compréhension de la nature et de l’étendue de la prise de conscience dans la maladie. Dans ces deux articles (Quinn et al., Reference Quinn, Clare, Jelley, Bruce and Woods2014; Rice, Howard, et Huntley, Reference Rice, Howard and Huntley2019), les auteurs désignent la conscience par le terme « awareness », faisant référence à une appréciation raisonnable ou réaliste d’un aspect donné de sa propre situation, de son fonctionnement ou de sa performance, qui peut s’exprimer explicitement à travers ce qui est dit ou implicitement à travers un comportement (Nelis et al., Reference Nelis, Clare, Martyr, Markova, Roth and Woods2011). Cette conscience est donc relative à différents objets que représentent notamment les divers domaines (ou dimensions) impactés par la maladie (cognitif, thymique, comportemental). L’objet de conscience le plus fréquemment étudié dans la MA est l’objet « cognition » (Agnew et Morris, Reference Agnew and Morris1999; Antoine, Billiet, et Nandrino, Reference Antoine, Billiet and Nandrino2008; Avondino et Antoine, Reference Avondino and Antoine2016; Berlingeri et al., Reference Berlingeri, Ravasio, Cranna, Basilico, Sberna and Bottini2015; Hannesdottir et Morris, Reference Hannesdottir and Morris2007). Cependant, d’autres objets ont été étudiés à l’instar du fonctionnement social et émotionnel (Nelis et al., Reference Nelis, Clare, Martyr, Markova, Roth and Woods2011; Seltzer, Vasterling, Yoder, et Thompson, Reference Seltzer, Vasterling, Yoder and Thompson1997; Verhülsdonk, Quack, Höft, Lange-Asschenfeldt, et Supprian, Reference Verhülsdonk, Quack, Höft, Lange-Asschenfeldt and Supprian2013), de l’indépendance fonctionnelle (DeBettignies, Mahurin, et Pirozzolo, Reference DeBettignies, Mahurin and Pirozzolo1990), de la sphère comportementale (Starkstein, Sabe, Chemerinski, Jason, et Leiguarda, Reference Starkstein, Sabe, Chemerinski, Jason and Leiguarda1996) ou encore de la personnalité (Rankin, Baldwin, Pace-Savitsky, Kramer, et Miller, Reference Rankin, Baldwin, Pace-Savitsky, Kramer and Miller2005). Le versant négatif de la conscience des troubles, nommé anosognosie ou « unawareness », peut être défini comme « une altération de la capacité à reconnaître la présence ou la sévérité des déficits dans le fonctionnement sensoriel, perceptif, moteur, affectif ou cognitif » (Kotler-Cope et Camp, Reference Kotler-Cope and Camp1995). Cette dernière définition souligne l’hétérogénéité de l’anosognosie, pouvant concerner plusieurs objets de conscience simultanément et inégalement (Avondino et Antoine, Reference Avondino and Antoine2016). L’anosognosie est fréquente dans la MA mais sa prévalence diffère en fonction des études : de 23 à 75% selon Antoine, Antoine, Guermonprez, et Frigard (Reference Antoine, Antoine, Guermonprez and Frigard2004) et de 20 à 80% selon Starkstein (Reference Starkstein2014). Nous parlerons ici de conscience des troubles ou de son corolaire l’anosognosie.

L’hétérogénéité de l’anosognosie ainsi que son caractère fluctuant compliquent significativement l’appréhension du niveau de conscience des personnes par leurs aidants (Rozotte, Reference Rozotte2001). Pourtant, selon Rice et collaborateurs (Reference Rice, Howard and Huntley2019), une appréciation précise du niveau de conscience des déficits des patients par ces derniers permet, sans aucun doute, d’initier des accompagnements non conflictuels en orientant les discours et attitudes en fonction des domaines où la conscience est préservée. Pour ces mêmes auteurs, la qualité des accompagnements dépend en grande partie de la capacité des professionnels à appréhender la conscience de soi et des troubles chez les bénéficiaires de l’aide. Ceci est d’ailleurs étayé par Cotrell (Reference Cotrell1997) soulignant la nécessité, pour les aidants, d’être accompagnés en vue d’identifier les différents domaines de conscience préservés et altérés afin de développer une compréhension objective du comportement de la personne aidée ainsi que des réponses efficaces. L’auteur mentionne également que des perceptions erronées, de la part des aidants, concernant les habiletés et la conscience des patients sont susceptibles d’avoir un effet négatif sur la capacité de ces derniers à évaluer avec précision leurs déficits, créant en retour une détresse pour l’entourage et des difficultés dans la relation d’aide. Plusieurs auteurs soulignent de surcroit que l’efficacité des interventions thérapeutiques est en partie modulée par le niveau de conscience des troubles des personnes (Aalten, van Valen, Clare, Kenny, et Verhey, Reference Aalten, van Valen, Clare, Kenny and Verhey2005; Fernández-Calvo et al., Reference Fernández-Calvo, Contador, Ramos, Olazarán, Mograbi and Morris2015). Ceci renforce la nécessité, pour les soignants, d’être attentifs à la conscience des personnes qu’ils accompagnent.

Certaines recherches démontrent que les soignants ne percevant peu ou pas de signes de conscience chez les personnes aidées tendent à considérer le soin comme une expérience négative et à diminuer leurs interactions (Ekman, Norberg, Viitanen, et Winblad, Reference Ekman, Norberg, Viitanen and Winblad1991). Cette dernière affirmation est également étayée par Rozotte (Reference Rozotte2001) qui souligne que c’est la manière dont cette conscience est appréhendée « en termes d’absence ou de préservation, qui, au regard des autres, indique implicitement la pérennité ou la disparition de l’état d’humanité du patient ». L’auteur mentionne que la fluctuation de la conscience (des troubles et de soi) engendre une vision des patients comme ayant « une conscience sporadique » qui ne manque pas de susciter des difficultés dans la relation d’aide (Vignolo, Darnaud, et Cuervo-Lombard, Reference Vignolo, Darnaud and Cuervo-Lombard2021). Quinn et collègues (Reference Quinn, Clare, Jelley, Bruce and Woods2014) indiquent quant à eux que la recherche, par les soignants, des signes de conscience chez les personnes peut représenter une expérience bénéfique dans la mesure où ces signes sont associés à une relation soignant-soigné plus qualitative. Finalement, Rice et collègues (Reference Rice, Howard and Huntley2019) soulignent que plus les soignants sont capables de reconnaître et d’anticiper la conscience de soi, du fonctionnement et de la performance d’une personne présentant des troubles neurocognitifs majeurs, plus ils seront en mesure de fournir des soins de qualité et un soutien approprié. Pourtant, peu d’études se sont intéressées à la manière dont la conscience des troubles des personnes aidées est appréhendée et conceptualisée par les aidants professionnels ou familiaux. Une grande majorité d’études, synthétisées dans la méta-analyse de Rice et collaborateurs (Reference Rice, Howard and Huntley2019), se concentre sur la conscience de soi dans une acception plus générale. L’objectif principal de cette étude est donc d’étudier les représentations des soignants concernant les capacités et la conscience des déficits des personnes qu’ils accompagnent. Plus précisément, nous souhaitons comparer les prédictions des soignants, en termes de capacités cognitives et de conscience des troubles, à des performances objectives. Nous nous attendons à ce que les estimations soignantes soient plus précises lorsqu’il s’agit des performances cognitives des résidents que lorsqu’il s’agit de la conscience de plusieurs domaines de fonctionnement (activités de la vie quotidienne, humeur, relations interpersonnelles, cognition). En effet les performances nous paraissent représenter des éléments plus tangibles que la conscience qui leur est associée, plus difficile à appréhender selon plusieurs auteurs (McCusker et Loy, Reference McCusker and Loy2014; Rozotte, Reference Rozotte2001). Nous nous attendons également à ce que les professionnels parviennent à réaliser des estimations plus adéquates de la conscience globale des sujets que de celle relative à des objets spécifiques. En effet, Quinn et collaborateurs (Reference Quinn, Clare, Jelley, Bruce and Woods2014) avaient déjà mis en évidence une propension, chez les professionnels soignants, à caractériser la conscience (dans une acception plus générale) des personnes ayant reçu un diagnostic de MA, de manière dichotomique, cette dernière leur apparaissant soit préservée soit totalement altérée.

Notre objectif secondaire est de déterminer si l’anosognosie et ses différentes dimensions sont associées à la majoration de la charge des aidants professionnels. L’anosognosie est en effet associée à de nombreuses difficultés tant pour les personnes aidées que pour leur entourage familial. Pour les patients, l’anosognosie favorise les retards diagnostiques, une moindre adhésion aux aides proposées, leur implication dans des activités inadaptées ainsi qu’un amoindrissement des bénéfices thérapeutiques. Ces conséquences se répercutent également sur les aidants et c’est dans cette optique que de nombreuses études ont identifié l’anosognosie comme un prédicteur de la majoration du fardeau perçu par les aidants familiaux (DeBettignies et al., Reference DeBettignies, Mahurin and Pirozzolo1990; Kelleher, Tolea, et Galvin, Reference Kelleher, Tolea and Galvin2016; Nelis et al., Reference Nelis, Clare, Martyr, Markova, Roth and Woods2011; Turró-Garriga et al., Reference Turró-Garriga, Garre-Olmo, Vilalta-Franch, Conde-Sala, de Gracia Blanco and López-Pousa2013). Ces travaux mettent notamment en évidence que les différentes dimensions de l’anosognosie n’affecteraient pas nécessairement les aidants de manière équivalente. Si la littérature est abondante concernant le vécu des aidants familiaux vis-à-vis de l’anosognosie (Vignolo et al., Reference Vignolo, Darnaud and Cuervo-Lombard2021), peu de recherches, à notre connaissance, se sont intéressées à l’expérience subjective des professionnels soignants concernant cette symptomatologie (Vignolo, Darnaud, et Cuervo-Lombard, Reference Vignolo, Darnaud and Cuervo-Lombard2023). Nous avons identifié une seule étude, réalisée par Al-Aloucy et collaborateurs (Reference Al-Aloucy, Cotteret, Thomas, Volteau, Benmaou and Dalla Barba2011), mettant en exergue un effet de l’anosognosie cognitive sur la charge ressentie par les professionnels du soin. Le lien entre fardeau et anosognosie relative aux symptômes comportementaux n’est cependant pas retrouvé dans cette étude. Par la présente recherche, nous souhaitons donc également investiguer l’influence particulière des différentes dimensions de l’anosognosie sur le ressenti du fardeau des soignants. Nous émettons l’hypothèse que les différentes dimensions de l’anosognosie ne seront pas associées de la même manière au fardeau soignant. Sur la base des résultats obtenus par Al-Aloucy et collègues (Reference Al-Aloucy, Cotteret, Thomas, Volteau, Benmaou and Dalla Barba2011), nous nous attendons à observer un effet plus important de l’anosognosie cognitive par rapport aux autres dimensions de cette symptomatologie (relations interpersonnelles, autonomie, humeur). Nous nous attendons également à observer des variations des scores de fardeau suivant les sous-dimensions de l’anosognosie cognitive. En effet, selon de récents travaux (Avondino, Huvent-Grelle, Roche, Puisieux, et Antoine, Reference Avondino, Huvent-Grelle, Roche, Puisieux and Antoine2018), ces sous-dimensions sont associées à des corrélats cliniques et cognitifs différents, ceci suggérant qu’elles puissent différemment impacter la charge ressentie par les soignants. Par ailleurs, Seltzer et collègues (Reference Seltzer, Vasterling, Yoder and Thompson1997) avaient déjà mis en évidence que les diverses dimensions de l’anosognosie (cognitive / comportementale) n’impactaient pas de la même manière le fardeau ressenti par les aidants familiaux. Ceci suggère donc que les différentes dimensions de l’anosognosie n’influencent pas le fardeau des aidants de manière équivalente.

Matériel et méthode

Population

Quant à la population, 28 dyades résidents-soignants référents ont été rencontrées au sein d’EHPADs situés dans la région Toulousaine. Le groupe des résidents était composé de 28 personnes, ayant reçu un diagnostic de maladie d’Alzheimer probable dont 22 femmes et 6 hommes, ayant un âge moyen de 84,6 ans (ET=8,42, min=65, max=97) et un niveau socioculturel moyen de 4 (ET= 1,6, min=3, max=7), correspondant à un niveau d’études entre la troisième et la première du cycle d’enseignement secondaire (Barbizet et Duizabo, Reference Barbizet and Duizabo1977). Le score moyen au Mini Mental State Evaluation (MMSE; Folstein, Folstein, et McHugh, Reference Folstein, Folstein and McHugh1975) était équivalent à 19,25 (ET=2,18, min=15, max=25). Les critères d’inclusion pour les résidents étaient les suivants : (1) présenter un diagnostic de MA probable (2), avoir un score au MMSE situé entre 15 et 25, (3) savoir lire et comprendre la langue française, (4) résider dans un EHPAD et (5) avoir signé le formulaire de consentement libre et éclairé.

Le groupe des aidants professionnels était constitué de 28 soignants référents dont 22 femmes et 6 hommes ayant un âge moyen de 38 ans (ET=10,74, min=21, max=60) et un niveau socioculturel moyen égal à 5 (ET=1,03, min=2, max=7), représentant un niveau d’études équivalent au baccalauréat. Parmi les soignants, 22 exerçaient en tant qu’aides-soignants et 6 en tant qu’infirmiers. Les données socio-démographiques complémentaires des soignants sont synthétisées dans le tableau 1. Les soignants inclus dans l’étude répondaient aux critères d’inclusion suivants : (1) être majeur, (2) comprendre et parler couramment le français, (3) être le soignant référent et (4) avoir signé un formulaire de consentement libre et éclairé.

Tableau 1. Données socio-démographiques complémentaires des soignants

Matériel

Évaluation neurocognitive

L’évaluation de la cognition a été réalisée via deux outils : le MMSE (Folstein et al., Reference Folstein, Folstein and McHugh1975) ainsi que la Dementia Rating Scale (DRS; Mattis, Reference Mattis, Bellak and Karasu1976). La DRS comporte 37 items répartis en 5 sous-échelles : attention; initiation; construction; conceptualisation; mémoire. Le score maximal est de 144, les scores plus élévés reflétant une meilleure cognition.

Évaluation du fardeau des soignants

La charge des aidants dans le cadre de la MA est traditionnellement mesurée via l’Inventaire du fardeau de Zarit (Zarit, Reever, et Bach-Peterson, Reference Zarit, Reever and Bach-Peterson1980). Cette échelle comprend 21 items mesurant divers aspects du fardeau des aidants familiaux. Les options de réponses sont présentées sur une échelle de Likert en 5 points allant de 0 « jamais » à 4 « presque toujours ». Les scores les plus élevés indiquent une plus grande détresse chez l’aidant. Cet outil étant destiné aux aidants familiaux, nous avons utilisé une version révisée de l’inventaire du fardeau proposée par Miyamoto, Tachimori, et Ito (Reference Miyamoto, Tachimori and Ito2010). Le questionnaire révisé comprend 12 items de la version d’origine, adaptés à la population soignante. Le score peut varier de 0 à 48. La cohérence interne telle que mesurée via le coefficient de Cronbach est satisfaisante à 0,74, dans la présente étude.

Évaluation de la conscience des troubles

L’anosognosie a été mesurée à l’aide de deux outils distincts : la Patient Competency Rating Scale (PCRS; Prigatano, Altman, et O’Brien, Reference Prigatano, Altman and O’Brien1990) et la Multidimensional Isomorphic Simple Awareness Assessment (MISAware; Antoine, Nandrino, et Billiet, Reference Antoine, Nandrino and Billiet2013). La PCRS est un questionnaire de 30 items conçu pour évaluer 4 objets de conscience : la cognition, les relations interpersonnelles, les activités de la vie quotidienne (ADL) et les émotions. Elle est basée sur la méthode des écarts patient-proche qui compare la cotation du participant à celle d’un proche ou soignant. Les scores d’anosognosie (score total et aux 4 dimensions) sont calculés en soustrayant le score de l’aidant (ici, le soignant référent) de celui du participant (patient – aidant). Plus le différentiel soignant-patient est élevé, plus l’anosognosie est importante.

L’échelle MISAware (Antoine et al., Reference Antoine, Nandrino and Billiet2013) est basée sur le paradigme prédiction-performance. Les participants sont invités à prédire leurs performances à l’échelle DRS de manière dichotomique (« je pense réussir plutôt bien / plutôt mal ») après avoir entendu les différentes consignes. Les sous-échelles de la DRS renvoient aux dimensions de la MISA. Une fois la DRS complétée, un score d’anosognosie est calculé en soustrayant le score prédit du score réel, pour l’anosognosie totale et chacune de ses dimensions. Plus le score est élevé, plus grande est l’anosognosie à l’échelle globale comme aux sous-échelles.

Évaluation de la représentation de la conscience des troubles des résidents par les soignants

Le questionnaire de représentation de la conscience des troubles, créé pour cette étude, est une hétéro évaluation en 5 items. Ce questionnaire est basé sur les 4 dimensions mesurées par la PCRS (cognition, relations interpersonnelles, ADL et émotions). Pour chaque dimension, le soignant référent devait évaluer, selon sa perception, le niveau de conscience du résident en répondant à la question suivante : « Selon vous, Mr/Mme… a-t-il/elle conscience de ses difficultés dans le domaine cognitif / comportemental / des émotionsr / des relations interpersonnelles ? ». Trois modalités de réponses étaient proposées pour chaque dimension considérée : « Oui : conscience préservée », « Partiellement : conscience partiellement altérée », « Non : conscience totalement altérée »). Si le résident ne présentait pas de difficultés pour le domaine en question, les soignants pouvaient répondre « non applicable ». Une dernière question proposait aux soignants d’évaluer la conscience des troubles globale des résidents : « Selon vous, Mr/ Mme… est-t-il/elle anosognosique ? ». Les modalités de réponses proposées étaient les mêmes que celles précédemment mentionnées (oui / partiellement / non).

Design des scores

Afin de comparer les prédictions des soignants avec le niveau de conscience des troubles des personnes, évalué à l’aide de la PCRS, les résidents ont été répartis en 3 catégories. Les scores des sous-dimensions de la PCRS pouvant varier de 0 à 5, nous avons établi 3 intervalles de même longueur afin de répartir les participants (<1,65 : absence d’anosognosie; 1,66 à 3,96 : anosognosie légère; >3,97 anosognosie avérée). De même pour le score total d’anosognosie (PCRS<40 : anosognosie absente; PCRS de 41 à 80 : anosognosie légère, PCRS>80 : avérée). Les prédictions des soignants ont ensuite été classées en 2 catégories, « bonnes » et « mauvaises prédictions », en comparaison avec les scores d’anosognosie obtenus à l’échelle PCRS.

De même, en lien avec la MISA, les soignants ont également été invités à prédire les performances des résidents à la DRS dans les mêmes conditions que pour les résidents.

Analyses statistiques

Toutes les analyses ont été réalisées à l’aide du logiciel Jamovi (jamovi project, 2022. Version 2.3). Les conditions de validité le permettant, des corrélations de Pearson ainsi que des régressions linéaires ont été réalisées afin de déterminer les associations entre anosognosie et fardeau soignant. Néanmoins, étant donné la taille de l’échantillon, des analyses de puissance (1-β) ont été réalisées avec le logiciel G*Power.

Afin de comparer les performances réelles aux prédictions de réussite des résidents et des soignants (concernant la DRS), le test des rangs de Friedman a été utilisé. Les comparaisons entre les scores réels d’anosognosie (PCRS) et les estimations des soignants vis-à-vis de la conscience des troubles des résidents ont été effectuées via des régression logistiques ordinales et par une analyse du pourcentage de bonnes et mauvaises prédictions.

Procédure

Résidents et soignants ont été rencontrés séparément le même jour. Les passations débutaient par la présentation des objectifs de l’étude et le recueil des consentements libres et éclairés. La durée des entretiens était comprise entre une et deux heures; les participants étaient informés qu’ils pouvaient réaliser la passation en deux temps ou disposer de pauses dès que nécessaire.

La présente étude a obtenu un avis favorable du Comité d’éthique local (CER N° 2022-557).

Résultats

Anosognosie et fardeau soignant

Des corrélations de Pearson ont été réalisées afin de caractériser les relations existantes entre l’anosognosie et le fardeau perçu par les soignants. Nous avons utilisé les scores globaux et les scores aux sous-dimensions des échelles MISAware et PCRS.

Nous observions une corrélation positive significative entre l’anosognosie pour la dimension « construction » de la MISAware et les scores des soignants à l’inventaire du fardeau de Zarit (r = 0,40, p = 0,016, 1-β = 0,71). Nous observions également une tendance à la significativité pour la corrélation entre l’anosognosie de la dimension « initiation » et le score de fardeau (r = 0,32, p = 0,050, 1-β = 0,51), avec une puissance statistique relativement faible.

Une régression linéaire a été réalisée afin de déterminer la valeur prédictive de la sous-dimension « construction » sur le fardeau des soignants. Le lien semblait confirmé suite à l’inclusion des variables de contrôle suivantes : score au MMSE, score à la DRS, présence de formation chez les soignants au sujet de l’anosognosie et de la maladie d’Alzheimer et le fait d’avoir côtoyé, pour les soignants, une personne anosognosique dans leur entourage proche (B = 1,83; t(21) = 2,39; p = 0,026, 1-β = 0,70). L’anosognosie de la construction expliquait 16% de la variance des scores du fardeau (Tableau 2).

Tableau 2. Modèle de régression

Aucune corrélation n’a pu être observée entre les scores des soignants à l’échelle de Zarit et les scores d’anosognosie obtenus à la PCRS.

Analyses des prédictions : comparaisons des prédictions des résidents et soignants à la performance réelle à la DRS

Le test des rangs de Friedman, réalisé sur 3 variables (performances réelles des résidents à la DRS, prédictions de réussite des aidants et des patients), révélait une différence significative pour le score total à la DRS et ses 5 sous-échelles (Tableau 3). Résidents et soignants surestimaient significativement les performances de ces premiers comparativement aux performances réelles obtenues à la DRS (Tableau 3). De plus, nous observions une différence significative entre les prédictions des résidents et celles des soignants pour les dimensions « attention » (DC=2,20, p = 0,032), « initiation » (DC = 4,02, p = 0,0002), « mémoire » (DC = 8,74, p < 0,0001) ainsi que pour le score total (DC = 10,37, p < 0,0001). Nous n’observions pas de différence significative entre ces prédictions pour les dimensions « construction » et « conceptualisation » (p > 0,05).

Tableau 3. Comparaisons des prédictions des résidents et soignants à la performance réelle à la DRS

* Patient ≠ Aidants ≠ Score DRS

** (Patients = Aidants) ≠ Scores DRS

Analyses des représentations de la conscience des troubles des résidents par leurs soignants référents

Des régressions logistiques ordinales ont été utilisées afin de déterminer si les scores obtenus à la PCRS totale et ses sous-dimensions étaient prédicteurs des estimations des soignants vis-à-vis du niveau de conscience des résidents (Tableau 4). Ces régressions montraient que seul le score total de la PCRS tendait à prédire les estimations des soignants (χ2 (1)=3,38, p = 0,066). Pour les sous-dimensions de l’échelle, les prédictions n’étaient pas déterminées par les scores réels d’anosognosie (ps > 0,05).

Tableau 4. Régressions logistiques ordinales du score d’anosognosie des patients sur les représentations de la conscience des troubles perçues par les soignants

* Cs : Conscience

L’analyse en pourcentage révélait de mauvaises prédictions liées aux représentations de la conscience des troubles des résidents par les soignants (Tableau 5). En référence aux matrices de confusions utilisées pour les régressions logistiques, le seuil d’acceptabilité d’une prédiction a été estimé à 50% de bonnes prédictions. Pour la dimension « cognition », les résultats montraient 79% de mauvaises prédictions. Nous observions un pourcentage d’erreurs plus important dans la condition où les soignants percevaient les résidents comme ayant une conscience entièrement altérée vis-à-vis de leurs difficultés cognitives. Pour la dimension « ADL », les prédictions des soignants se rapprochaient davantage des scores réels d’anosognosie en dépit d’un pourcentage d’erreur de 52%. Les erreurs étaient également concentrées dans la condition « conscience altérée ». Pour les dimensions « émotions » et « relations interpersonnelles », les pourcentages de mauvaises prédictions atteignaient respectivement 88% et 90%. Pour ces dimensions, la condition où les résidents étaient perçus comme ayant une conscience du trouble préservée n’était que rarement sélectionnée (max 4%). Les soignants percevaient davantage les résidents comme étant non-conscients de leurs difficultés dans ces domaines, y compris lorsque les scores réels d’anosognosie étaient faibles. Finalement, pour le score global de la PCRS, le pourcentage d’erreur était de 68% avec des mauvaises prédictions plus fréquentes dans la condition « conscience partiellement altérée ».

Tableau 5. Répartition des prédictions des soignants

Nous avons recherché les variables prédictives des estimations des soignants via une régression logistique binomiale. Parmi les variables sélectionnées (formation sur l’anosognosie et la maladie d’Alzheimer, score au MMSE), seul le score au MMSE pouvait prédire ces dernières. En effet, les probabilités d’estimations correctes étaient plus élevées lorsque le score au MMSE était faible (B = -0,38; Z = -2; p = 0,046).

Discussion

La présente étude possédait deux objectifs : (1) déterminer quelles dimensions de l’anosognosie étaient préférentiellement associées au fardeau soignant et (2) étudier les représentations de la conscience des troubles des personnes présentant une MA par les professionnels exerçant en gériatrie.

Nos résultats soulignent une influence de l’anosognosie cognitive sur le ressenti de fardeau des soignants. Deux dimensions de l’anosognosie cognitive majoraient la charge perçue par les professionnels : l’anosognosie des troubles de la construction et de l’initiation, mesurée par la MISA. Ces résultats sont en accord avec les conclusions d’Al Aloucy et collaborateurs (2011) mentionnant un effet de l’anosognosie cognitive sur le fardeau soignant, sans toutefois distinguer les différentes sous-dimensions de l’anosognosie cognitive. Les auteurs supposaient un lien entre l’anosognosie cognitive et la présence de troubles psycho-comportementaux chez les sujets, majorant de fait la charge soignante. Nous envisageons que la relation anosognosie cognitive / fardeau pourrait également être expliquée par l’influence des corrélats de l’anosognosie cognitive sur ce ressenti. Ceci est étayé par une récente étude réalisée par Avondino et collaborateurs (2018), portant sur les corrélats cliniques des différentes sous-dimensions de l’anosognosie cognitive, telle que déterminée par l’échelle MISA (Antoine et al., Reference Antoine, Nandrino and Billiet2013). Les résultats montraient que l’anosognosie de l’initiation était négativement corrélée avec les performances en mémoire épisodique ainsi qu’avec l’autonomie fonctionnelle. Il serait intéressant de préciser les items des échelles d’autonomie nécessitant le plus d’attention de la part des soignants lorsque les résidents présentent une anosognosie de l’initiation. L’étude de Avondino et collaborateurs (2018) n’avait cependant pas permis la recherche des corrélats de l’anosognosie pour la dimension construction du fait du faible nombre d’items présents dans la DRS pour la caractériser. Néanmoins, au regard de la simplicité de cette sous-échelle, un score faible suggère un déficit cognitif plus important, soulignant éventuellement une anosognosie cognitive plus marquée dans ce contexte et son impact sur le fardeau des soignants.

Concernant les représentations de la conscience des résidents par les soignants, nous avons observé de nombreuses erreurs d’estimation. Les professionnels interrogés se représentaient les résidents comme non-conscients de leurs difficultés et ce, pour chacun des objets de conscience considérés, hormis pour l’objet « ADL ». Celui-ci représente certainement un domaine de conscience plus aisé à appréhender pour les soignants, intervenant auprès des résidents pour ces mêmes activités. Les soignants parvenaient à produire des estimations plus proches de la réalité concernant la conscience globale des troubles des résidents, les erreurs étant davantage condensées sur les diverses dimensions de la PCRS. Concernant la dimension cognitive, les erreurs de prédictions, sur-représentées en condition « conscience entièrement altérée », suggéraient que les résidents étaient perçus comme anosognosiques, y compris lorsque la conscience des troubles semblait préservée. De même, l’importance des fausses prédictions pour les dimensions « émotions » et « relations interpersonnelles » (88 et 90%) suggéraient que ces domaines de conscience étaient les plus difficiles à appréhender pour les soignants. Ceci donne à penser que la recherche des domaines où la conscience est préservée, élément favorisant la qualité relationnelle (Rice et al., Reference Rice, Howard and Huntley2019), pourrait être soutenue par la mise en place de dispositifs de formation. Bastin et Salmon (Reference Bastin and Salmon2020, 13) précisent qu’il est nécessaire de comprendre « les activités que le patient réussi habituellement et ses réactions face à l’échec afin d’ajuster les choix lors de la prise en charge de manière à surmonter la résistante du patient et à l’aider à redécouvrir plus volontiers ses forces et ses faiblesses ». L’établissement d’une relation d’aide qualitative dans le cadre de la MA ne peut faire fi de la recherche de la conscience associée aux difficultés et aux implications de ces dernières dans la vie quotidienne.

La cognition globale semblait influencer les représentations soignantes, la probabilité pour qu’elles soient correctes étant plus élevée lorsque le MMSE était faible. Il n’a toutefois pas été possible de déterminer si de faibles scores au MMSE étaient associés à la présence ou l’absence d’anosognosie dans les prédictions soignantes. Il semble intéressant, dans de futurs travaux, de déterminer finement les variables susceptibles de générer des erreurs de représentations.

Pour autant, les soignants surestimaient les performances cognitives des résidents quelle que soit la dimension de la DRS considérée. Ceci peut s’expliquer par le fait que l’outil MISAware ne concerne que les capacités cognitives en situation non-écologique. Les professionnels ont ainsi probablement plus de difficultés à évaluer les performances des résidents vis-à-vis d’activités non-réalisées dans la vie quotidienne, d’autant qu’ils ont, avec les résidents, une proximité quotidienne. Cependant, les prédictions soignantes situaient les résidents en dessous du seuil pathologique de la DRS, conformément aux résultats obtenus par Antoine et collègues (2008). Ceci suggère que les soignants parvenaient à repérer une altération pathologique du fonctionnement cognitif.

Il semble également exister une contradiction dans les représentations des soignants dans la mesure où les performances cognitives des résidents étaient surestimées, contrairement à leur niveau de conscience des troubles, quant à lui, sous-estimé. Cette contradiction nous donne à penser que lorsqu’un diagnostic de MA est établi, les soignants tendent à inférer des troubles de la conscience aux résidents. Au regard de ces résultats, il convient d’envisager des formations, à destination des aidants formels, dans l’optique de les aider à éviter des biais de représentations, délétères dans la prise en soin des patients. En effet, l’association automatique entre troubles cognitivo-comportementaux et altération de la conscience pose de nombreuses questions relevant de l’éthique et de la qualité des prestations de soin. La catégorisation des patients comme étant inéluctablement « anosognosiques » peut conduire à une forme de réductionnisme de l’expérience subjective de ces derniers (Kushtanina, Balard, Caradec, et Chamahian, Reference Kushtanina, Balard, Caradec and Chamahian2019). Elle peut également mener à une exclusion des résidents des activités collectives ainsi qu’à une plus faible motivation, chez les aidants, à développer l’aspect relationnel du soin (Ekman et al., Reference Ekman, Norberg, Viitanen and Winblad1991; Quinn et al., Reference Quinn, Clare, Jelley, Bruce and Woods2014). Ces résultats soulignent l’intérêt de formations à destination des professionnels relatives à l’identification des objets de conscience préservés et altérés. Ces formations pourraient également porter sur les corrélats des différents types d’anosognosie afin de permettre aux soignants d’améliorer l’aspect relationnel du soin, réduisant ainsi le potentiel sentiment de fardeau associé à l’anosognosie.

Limites

Notre étude n’est pas sans biais. Tout d’abord, il serait intéressant de reproduire le protocole sur une population plus importante et non limitée aux EHPAD. En effet, le manque de significativité de certaines relations tient peut-être au petit nombre de participants. Il conviendrait aussi d’envisager un outil de mesure plus adapté et validé pour la caractérisation du fardeau soignant. La version révisée de l’Inventaire de Zarit nous semble peu précise et décontextualisée pour la population des aidants professionnels. Il semble également légitime de s’intéresser à une population présentant des scores d’anosognosie plus élevés afin de déterminer si les prédictions des soignants sont plus précises lorsque l’anosognosie est plus importante pour les dimensions. Enfin, l’absence de cut-off pour l’échelle PCRS doit également être soulignée. La méthode utilisée pour déterminer le niveau de conscience des troubles des participants n’a fait l’objet d’aucune validation et a pu biaiser les résultats obtenus concernant les représentations des soignants. La méthode des centiles aurait également pu être utilisée, mais la faible hétérogénéité de notre échantillon n’aurait pu permettre de représenter toutes les catégories de conscience (scores d’anosognosie élevée peu fréquents), ce qui aurait alors faussé les classes.

Conclusion

Au regard de nos résultats, nous pensons qu’une évaluation de l’anosognosie, généralisée dans les différentes structures gériatriques, pourrait être pertinente. En effet, Stirati-Buron, Koskas, et Drunat (Reference Stirati-Buron, Koskas and Drunat2008, 33) soulignent la nécessité d’évaluer la conscience des troubles des personnes dès leur admission en hôpital de jour via « une équipe pluridisciplinaire et complémentaire ». Selon ces mêmes auteurs, cette évaluation « conditionne une partie des objectifs cognitifs et sociaux » qui guideront le parcours des patients. Une appréhension concise de la conscience des résidents en EHPAD nous semble légitime afin d’initier des accompagnements adaptés et de limiter les biais de représentations liées notamment à une pathologie. Cette notion « d’évaluation pluridisciplinaire » nous semble primordiale et devoir être étendue aux acteurs de première ligne que sont les infirmiers et les aides-soignants. Des outils adaptés à la pratique de terrain permettraient aux soignants de réaliser une évaluation objective de la conscience des personnes qu’ils accompagnent. L’utilisation de ces outils devra être accompagnée de formations théoriques centrées sur l’identification des diverses dimensions de l’anosognosie, de leurs corrélats cliniques associés et conséquences sur la vie quotidienne. Ces formations pourront également aborder les interventions centrées sur la conscience des troubles afin de minorer le fardeau associé.

Footnotes

Remerciements

Nous tenons à remercier Mme Coraline Lethimonnier pour son aide durant l’analyse statistique.

References

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Tableau 1. Données socio-démographiques complémentaires des soignants

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Tableau 2. Modèle de régression

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Tableau 3. Comparaisons des prédictions des résidents et soignants à la performance réelle à la DRS

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Tableau 4. Régressions logistiques ordinales du score d’anosognosie des patients sur les représentations de la conscience des troubles perçues par les soignants

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Tableau 5. Répartition des prédictions des soignants