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Pour une analyse politique du patronage*

Published online by Cambridge University Press:  10 November 2009

Raymond Hudon
Affiliation:
Université Laval

Abstract

Towards a political analysis of patronage

Political patronage is a phenomenon which has already been analysed and evaluated from many angles. An analytical model inspired by cybernetics is proposed here as a framework for the interpretation of the phenomenon. Such a model leads one to observe interactions between the different actors of a given society in terms of power relations. Using the ideas suggested by the model, the author describes patronage as a complex process in which a client relationship is established between patron and client, following which the former tries to alter his relationship with his opponents in political competition. Through the establishment of a client relationship, the patron helps to pull the client out from a certain state of weakness so as to obtain the means which the client wants for himself. Consequently, thanks to the means obtained by the client, which help him augment his power, the patron tries once more to alter his relations with his rivals in the political competition. In this sense, patronage permits a double transformation.

On an empirical level two questions are posed. Can one trace an evolutionary pattern in the practice of patronage by political parties in Quebec between 1944 and 1972, and in what sense can patronage be defined? Does patronage have different characteristics depending on whether it is practised by the Liberal party or the Union nationale in the period under review?

Type
Articles
Copyright
Copyright © Canadian Political Science Association (l'Association canadienne de science politique) and/et la Société québécoise de science politique 1974

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References

1 La recherche à laquelle il est fait référence fut réalisée durant l'été 1971 et depuis juin 1972 jusqu'à l'automne 1973. Subventionnée par le Conseil des Arts du Canada, la recherche fut principalement menée par deux assistants de recherche, Nicole Aubé qui s'est surtout attachée à analyser les représentations que divers agents ont du patronage, et l'auteur du présent texte. La teneur du présent texte représente done le fruit d'un travail d'équipe et le mérite ne doit pas en revenir au seul auteur qui assume la responsabilité de son contenu.

2 Ont ainsi été recensés une série de près de trois mille cas de patronage qui constituent le premier univers de référence pour l'analyse du phénomène. Ces nombreux cas ont pu être rassemblés par suite d'un lecture attentive tout d'abord de journaux quotidiens, Le Canada de juin 1944 jusqu'à la fin de sa publication en 1954 et Le Devoir depuis ce moment jusqu'en 1972; ensuite de journaux proprement partisans, Le Temps de l'Union nationale et La Réforme du Parti libéral, pour les principaux; enfin de journaux hebdomadaires d'opposition, Vrai publié par Jacques Hébert dans la deuxième moitié des années cinquante, et Québec-Presse. A travers ces différentes sources, ont été retenus tous les événements rapportés comme illustrant la pratique du patronage au Québec et les événements décrits de telle sorte qu'ils apparaissaient avoir tous les caractères d'un cas de patronage.

3 Les termes ici utilisés pour désigner ces phases sont inspirées du modèle élaboré par Lucien Mehl, dans son texte « Pour une théorie cybernétique de l'action administrative », in Aubry, J.M. et al., Traité de science administrative (Paris, 1966), 781833.Google Scholar Le schéma présenté plus loin est inspiré de Lemieux, Vincent, « Politique et administration selon M.G. Smith », in La Revue Canadienne des Etudes Africaines, VI. no. 1, (1972), 5772.CrossRefGoogle Scholar

4 Cette phase de connexion n'est pas opérée par les seuls organisateurs; elle peut, par exemple, encore être opérée à travers des processus de consultation. Nous ne référons pas ici à ces processus de consultation, car ces types de relations ne s'avèrent pas directement pertinents à notre objet d'analyse.

5 Bertrand de Jouvenel dit qu'il y a instigation quand a demande à b d'accomplir l'action H. De la politique pure, coll. « Liberté de l'esprit » (Paris, 1963), 29.

6 Ces notions de maîtrise et de contrôle sont définies par Lemieux, Vincent, dans son article « Le jeu de la communication politique », publié dans la Revue canadienne de science politique, III. no. 3 (1970), 359–75.CrossRefGoogle Scholar

7 Ce caractère disjonctif de l'opération de patronage permet de la distinguer plus facilement de l'opération d'une relation de caractère bureaucratique.

8 Dans la série de cas recensés pour saisir et illustrer le phénomène, nous n'avons pas toujours pu déceler clairement l'opération de la deuxième transformation. Cette lacune est principalement due à la nature des sources utilisées. Nous avons retenu les cas où il y avait au moins présomption de la première transformation et du caractère disjonctif de cette transformation, et pour lesquels on laissait soupçonner, le plus souvent de façon non explicite, la réalisation de la deuxième transformation. Pour parler de patronage politique, la deuxième transformation demeure essentielle.

9 Le client peut être un gouvernant, un fonctionnaire, un organisateur ou un gouverné; le patron, lui, peut être un gouvernant, un fonctionnaire ou un organisateur. Dans une étude du patronage des partis politiques, il peut à prime abord sembler surprenant que des fonctionnaires puissent agir comme patrons. Il est cependant arrivé, parmi les cas observés, que le fonctionnaire soit à ce point identifié comme partisan qu'il nous a fallu retenir ces cas. Si nous n'avons pas de cas où le patron est un gouverné, cela tient en partie au fait suivant : quant un électeur était identifié dans un rôle de patron par rapport à un autre électeur, il était assimilé par nous au groupe des organisateurs.

10 Il est par là possible de constater que le patron a tendance à distribuer des moyens à des clients qui sont de même allégeance que lui. Cette règle, cependant, est loin de comporter un caractère absolu.

11 L'identification d'un tel rôle permettrait de distinguer dans le patronage des partis un patronage « gouvernemental » et un patronage « de parti », c'est-à-dire un patronage par lequel on transmet des moyens « normalement » attribués par les gouvernants ou les fonctionnaires et un patronage par lequel on distribue des moyens dont le parti est la source. Nous avons vite pris conscience que nos informateurs s'attachaient d'abord à « dénoncer » le patronage par lequel sont remis au client des moyens « normalement » contrôlés par le gouvernement et les organisations qui s'y rattachent.

12 Ces rôles ne sont peut-être pas évalués très justement à travers l'ensemble de cas recensés pour amorcer l'analyse du phénomène au Québec. Cette lacune tiendrait principalement à ce que l'informateur qui dénonce un cas de patronage le fait avec l'intention de causer préjudice au patron identifié dans ce cas tout en jugeant que le tort causé sera proportionnel à l'impression d'abus dans la forme ou d'excès dans la répétition ou l'ampleur qu'une telle dénonciation pourra créer. Il devient ainsi plausible que l'informateur cherche à grossir le rôle du patron et soit porté à faire abstraction des autres acteurs qui auraient pu être reliés au processus de la relation de clientèle rapportée.

13 Le rôle d'entremetteur, incarné la plupart du temps par des acteurs partisans, est généralement joué suite à une demande du client. Il importe de bien saisir la perception qu'a le client du statut des acteurs avec lesquels il est en contact. Si par exemple le client percoit l'acteur qui joue le rôle d'entremetteur comme son patron, cet acteur devra être identifié comme l'opérateur de la relation de clientèle. Les autres acteurs seront alors replacés dans des rôles qui conviennent à leur activité dans la réalisation de cette relation. Le même danger d'ambiguïté peut s'appliquer à l'acteur qui jouera le rôle d'émetteur quand ce rôle ne sera pas joué par le patron lui-même. C'est pourquoi nous adoptons le point de vue du client pour situer les acteurs dans leurs rôles respectifs.

14 Si le patron est perçu comme l'opérateur du patronage, il n'est pas nécessairement celui qui prend l'initiative du processus d'instigation que constitue une relation de clientèle.

15 On saisit que seul le patron pourrait contribuer à déterminer de façon aussi absolue ces conditions.

16 Cette proportion pourrait être encore plus élevée. Nous avons en effet assumé que si un informateur rapportait, par exemple, en termes généraux 20 cas de congédiement dans un ministère à la suite d'un changement de gouvernement, il s'agissait là d'un seul cas de patronage et non pas de 20. Quant à la distinction proposée entre les termes « job », position et situation, elle s'inspire d'un texte de Gilles Vignault et elle ne peut être qu'approximative. Ainsi, le terme « job » correspondrait à un emploi de moindre importance, souvent non permanent, alors que le terme position référerait à un emploi permanent, souvent assez rémunérateur. Le terme situation se rapporterait de son côté à un emploi qui, en plus d'être assez rémunérateur, comporte un prestige certain tout en n'étant pas nécessairement permanent.

17 Il est intéressant de remarquer que ces moyens remis au client n'occupent pas le même ordre d'importance selon que le patron est un gouvernant ou un organisateur. Ainsi, un patrongouvernant attribue d'abord à un client les moyens suivants : des subventions (13 pour cent); des contrats (10.2 pour cent); des positions (9.5 pour cent); des situations (6.9 pour cent); des achats pour des besoins collectifs (6.0 pour cent); des inaugurations (5.9 pour cent); des commissions (5.5 pour cent); des travaux de voirie (5.2 pour cent); etc. De son côté, le patron-organisateur remet plus souvent les moyens suivants : des « jobs » (14.3 pour cent); de l'argent (11.9 pour cent); des subventions (10.0 pour cent); des positions (8.4 pour cent); des contrats (6.9 pour cent); des biens de consommation (6.0 pour cent); etc.

18 Dans bon nombre de cas, ces services partisans renvoient au fait qu'un individu ait occupé, au nom du parti, des postes comme ceux de ministre, conseiller législatif, député, ou encore qu'il ait simplement été candidat au nom de ce parti, même si ce n'est qu'à une « convention ».

19 C'est justement parce que le client a peut-être contribué à affaiblir la position du patron au niveau de ces relations que ce patron en arrive à « punir » le client.

20 Deux autres modèles d'échange méritent d'être sommairement décrits même s'ils se rencontrent plus rarement. Pour l'un, le patron attribue un moyen positif et potentiel à un client qui lui transmet, ou lui a déjà transmis un moyen positif et acquis : la relation de clientèle ne pourra être achevée « selon les règles » que si le patron respecte sa « promesse », mais celuici peut déjà opérer la deuxième transformation à son profit au niveau des relations de rivalité. Pour l'autre, le patron attribue un moyen négatif et potentiel à un client qui lui attribue, lui aussi, un moyen négatif et potentiel : les deux acteurs se « menacent » en somme d'achever une relation de clientèle qui aura des effets négatifs pour l'autre partie.

21 Un examen systématique de ces conditions obligerait aussi à tenir compte des conditions culturelles, morales et économiques et à tenter de déceler les influences qu'elles peuvent avoir sur l'évolution des conditions politiques et administratives.

22 Il y a une erreur souvent répétée qui amène à percevoir le patronage comme dérogeant toujours aux règles officielles. L'opération de patronage n'est pas nécessairement une activité « illégale » ou « para-légale » : il peut arriver qu'elle soit réalisée dans les limites de certains mécanismes prévus par la loi.

23 Pratiquement, la csc ne faisait souvent qu'entériner la décision du patron.

24 A la fin des années cinquante, le patronage politique avait pu devenir un enjeu politique. L'existence et le travail de la Commission d'enquête Salvas, les dénonciations répétées des libéraux qui pouvaient compter avec une attitude de réceptivité du public, les enquêtes nombreuses et détaillées de Pierre Laporte alors journaliste au Devoir, etc., tout cela a pu contribuer à amplifier le nombre de cas recensés pour la seconde moitié des années cinquante, nous empêchant ainsi de tirer des conclusions sûres quant à l'ampleur de la pratique du patronage. Il apparaît aussi, qu'au début des années soixante, l'Union nationale s'est employée à dénoncer systématiquement le patronage opéré par les libéraux pour démontrer que les « purs d'hier » n'étaient peut-être pas aussi purs qu'ils avaient réussi à le faire croire. Il ne faut pas encore négliger le fait que les libéraux sortaient d'un « long carême » qui avait duré seize ans; ce qui expliquerait l'ampleur des appétits de plusieurs d'entre eux.

25 Un député actuel allait jusqu'à dire : « Tu sais, les déclarations à l'Assemblée nationale, e'est pour le jeu ! Dans le privé, les députés parlent entre eux du patronage, mais e'est souvent sur le ton de la plaisanterie ». On peut ajouter qu'il y aurait peut-être moins de « dénonciations » principalement parce que le patronage serait opéré de façon plus cachée et plus clandestine de telle sorte qu'il s'avérerait plus difficile de prouver ses accusations. Les deux opérations décrites sommairement plus haut servent encore à illustrer cette dernière proposition. La première opération décrite représente un cas assez facile à prouver par le fait que le caractère disjonctif de l'attribution est plus apparent que dans la deuxième opération où celui qui se voit attribuer l'emploi a répondu aux exigences stipulées dans la loi.

26 Une telle évolution doit être située dans le contexte suivant. Peu à peu, les électeurs en étaient venus à considérer comme « normal » d'obtenir des moyens du gouvernement par voie de patronage; ce que suggère jusqu'à un certain point l'expression de « patronage érigé en système ». Mais, à la fin des années cinquante, ils ont possiblement développé une certaine « gêne » à quémander des moyens de cette manière, compte tenu des dénonciations fracassantes de cette pratique. Mais les règles bureaucratiques régissant de plus en plus largement les rapports entre le gouvernement et la communauté, une partie des électeurs seraient de plus en plus tentés de personnaliser leurs rapports avec l'appareil d'Etat par le biais de relations de clientèle.

27 Les organisateurs interviewés manifestent justement des sentiments qui trahissent leur perte de « pouvoirs » et de prestige. Bien plus, les députés actuels que nous avons rencontrés sont à peu près unanimes à dire que les électeurs vont de plus en plus directement à eux, sans « passer par » l'organisateur.

28 De telles tendances peuvent en grande partie s'expliquer par suite de l'adoption, depuis 1960, de nombreuses lois dans le domaine social, dans le domaine de l'éducation, etc. En ce qui touche les emplois, il faut encore tenir compte de l'événement que constitue la syndicalisation des fonctionnaires au début des années soixante.

29 Voir note 18, ci-haut.

30 Un informateur, non-unioniste, suggérait l'expression de « patronage démocratique ».

31 Le terme collectivité réfère ici à des appareils comme les municipalités, les commissions scolaires, etc., et aux ensembles de populations que ces appareils recouvrent. Cette particularité du patronage unioniste a déjà été décrite éloquemment par Quinn, Herbert F., dans The Union Nationale : A Study in Quebec Nationalism (Toronto, 1963).Google Scholar

32 Ce qui vient d'être dit s'applique bien aux cas de patronage positif. Mais lorsque l'on examine la portion de « réalité » à laquelle renvoie le patronage négatif, certaines corrections doivent être apportées. Quand il s'agit d'attribuer des moyens négatifs et acquis à des clients d'un autre parti, les patrons libéraux opèrent relativement plus de relations de clientèle que ne le font les patrons unionistes. Cette différence avait tendance à s'accentuer, l'Union nationale ayant de moins en moins tendance à opérer ce patronage « punitif » face à des clients non-unionistes alors qu'une telle tendance ne peut être perçue, dans le temps, pour les cas où le patron est libéral.

33 Un informateur suggérait que cette différence tenait à un « esprit de parti » plus poussé chez les unionistes. Les unionistes seraient d'une certaine manière prêts à « se sacrifier pour le bien du parti » en ce sens qu'ils accepteraient plus facilement que les libéraux de ne pas se réserver des moyens attribués par voie de patronage pour les remettre à d'autres, même des non-unionistes, si cela peut être bénéfique pour le parti.

34 Une telle préoccupation revenait presque en leitmotiv dans la bouche de nos informateurs unionistes au cours des entrevues menées auprès d'eux. Vincent Lemieux formalise justement ces préoccupations de l'Union nationale en la comparant, sur ce point, aux autres partis politiques québécois : « La gauche : rétrospective et prospective », in Le quotient politique vrai (Québec, 1973), 57–66.

35 Ces indices expliquent, du moins en partie, que le client-gouverné se sente relativement plus à l'aise face à un patron unioniste. Le contact serait plus facile, et cela se traduirait dans le fait que le client-gouverné prend plus souvent l'initiative de l'opération de patronage face à un patron unioniste. Le client-organisateur, mieux choyé chez les libéraux, aurait un peu le même réflexe à l'intérieur de ce parti.

36 Voir note 31, ci-haut.

37 L'allégeance réfère à l'appartenance à un parti sans qu'il y ait eu nécessairement travail d'élection ou d'organisation pour ce parti, mais cette appartenance correspond à plus qu'un simple vote ou qu'une simple identification symbolique au parti. On pourrait parler de l'acteur porteur de cette qualité comme d'un partisan, constituant un moyen terme entre le militant et l'électeur.

38 Nous pouvons ici préciser notre jugement sur le comportement plus « électoraliste » de l'Union nationale à travers les opérations de patronage. Les unionistes cherchent d'abord à se voir attribuer par le client dans la relation de clientèle des votes qui permettront la réalisation, à leur profit, de la deuxième transformation. Les libéraux, comparativement aux unionistes, travaillent plutôt à obtenir du client dans la relation de clientèle des moyens qui profiteront à leur organisation pour ainsi leur permettre de réaliser à leur avantage la deuxième transformation. Somme toute, les deux partis ont une visée « électoraliste » dans l'opération de leur patronage. L'Union nationale y va cependant plus directement.

39 Ce qui pourrait expliquer que plusieurs personnes parlent de « gros » et de « petit » patronage pour caractériser, dans l'ordre, le patronage de chacun des deux partis.

40 Voir note 31, ci-haut.

41 Une telle distinction peut surprendre, car on sait bien que les libéraux distribuent eux aussi des subventions à des collectivités et que leurs représentants président eux aussi à des inaugurations diverses. La différence tient principalement à la façon dont l'Union nationale attribue ces moyens : souvent, on confère un caractère plus prononcé de disjonctivité à cette attribution tout en la situant presque formellement dans le cadre d'une première transformation opérée par un patron qui appellerait la remise de moyens à un patron dans le but de réaliser la deuxième transformation.

42 L'image de « grosse entreprise » suggérée par un informateur pour dépeindre le Parti libéral se rattache assez bien à de telles constatations; chez les libéraux, on a peut-être tendance ` faire le patronage comme on fait des affaires. En opposition à cette façon de faire, les patrons unionistes semblent plutôt s'adonner à des « opérations-charme » auprès de leurs clients. Si on se reporte à une constatation déjà faite, à savoir que les unionistes établissent relativement plus souvent des liens de clientèle avec des non-unionistes, une telle remarque prend du poids.

43 En référent encore une fois au contenu des entrevues auprès des organisateurs, on perçoit chez les unionistes une volonté plus grande d'amener les fonctionnaires à « collaborer ». Cette « collaboration » se concrétise dans des rôles de relayeurs. En ce qui touche les acteurs privés, non partisans, qui jouent des rôles de relayeurs ou d'émetteurs, quelques-uns des informateurs ont justement raconté de quelle manière ils obtenaient la « collaboration » des entreprises privées. Les informateurs unionistes semblaient en parler plus en connaissance de cause que les informateurs libéraux, mais une telle évaluation ne peut être que limitée.

44 On saisit bien que si un moyen attribué à un client par un patron dans le cadre de la première transformation opérée dans une relation de clientèle est remis au client par un acteur public, non partisan, jouant le rôle d'émetteur, il s'avèrera plus difficile de présenter cette attribution comme reliée à un cas de patronage.

45 Une étude de Vincent Lemieux, menée à l'lle d'Orléans, démontre justement que l'Union nationale retirait ses appuis d'abord à des endroits où la compétition politique est moins accentuée : Parenté et politique : L'organisation sociale dans l'lle d'Orléans (Québec, 1971).

46 C'est ainsi que quelques informateurs unionistes disaient qu'il y avait de piètres législateurs qui étaient les meilleurs députés. L'étude de Lemieux, Vincent, « Le législateur et le médiateur : analyse d'un campagne électorale », in Recherches sociographiques, 3 (1962), 331–45CrossRefGoogle Scholar, montre comment, durant la campagne électorale de 1956 dans le comté de Lévis, les candidats avaient tendance, particulièrement celui de l'Union nationale, à se présenter comme médiateurs.