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Introduction : La culture dans le domaine du droit

Published online by Cambridge University Press:  18 July 2014

David Howes
Affiliation:
Department of Sociology and Anthropology, Concordia University, Montreal (Quebec) Canada H3G 1M8, [email protected]

Extract

Dans leur introduction au livre Law in the Domains of Culture, Austin Sarat et Thomas Kearns écrivent : «Law and legal studies are relative latecomers to cultural studies. To examine [law in the domains of culture] has been, until recently, a kind of scholarly transgression». L'inverse est vrai aussi : les cultural studies (incluant l'anthropologie) sont arrivées tardivement au droit et aux réflexions sur le droit, alors qu'on assistait, ces dernières décennies, à une irruption remarquable de discours culturels dans le domaine du droit.

Il semble bien que l'acquisition d'une certaine «compétence culturelle» soit devenue obligatoire dans les cercles juridiques. Il n'y a pas que la floraison de séminaires et cours sur la «sensibilité culturelle» pour juges, avocats et policiers, mais le «concept de culture» traverse maintenant bien des décisions judiciaires en matière de droits autochtones, et la «défense culturelle» (bien que fortement contestée par certains et toujours sans approbation officielle) est désormais une dimension de nombreux procès criminels impliquant des immigrants. Aussi, la Charte canadienne des droits et libertés réfère à «l'héritage multicultural des Canadiens» (art. 27) dont la préservation et la promotion est une condition de sa propre interprétation.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Canadian Law and Society Association 2005

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References

1 Sarat, AustinKearns, Thomas R., eds., «The Cultural Lives of Law» dans Law in the the Domains of Culture, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1998, 5.Google Scholar Les auteurs poursuivent: «In the last fifteen years, […] first with the development of critical legal studies, and then with the growth of the law and literature movement, and finally with the growing attention to legal consciousness and legal ideology in sociolegal studies, legal scholars have come regularly to attend to the cultural lives of law and the ways law lives in the domains of culture». On pourrait dire que ce développement a culminé dans le livre de Sherwin, Richard, When Law Goes Pop: The Vanishing Line between Law and Popular Culture, Chicago, University of Chicago Press, 2000.Google Scholar

2 Voir Niezen, Ronald, «Culture and the Judiciary: The Meaning of the Culture Concept as a Source of Aboriginal Rights in Canada» (2003) 18:2R.C.D.S. 1Google Scholar; Asch, Michael, «The Judicial Conceptualization of Culture after Delgamuukw and Van der Peet» (2000) 5:2Rev. Const. Stud. 119.Google Scholar

3 Voir Wong, Charmaine M., «Good Intentions, Troublesome Applications: The Cultural Defence and Other Uses of Cultural Evidence in Canada» (1999) 42 Crim. L.Q. 367Google Scholar; Renteln, Alison Dundes, The Cultural Defense, New York, Oxford University Press, 2004.Google Scholar

4 Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11.

5 E.B. Tylor, le premier professeur d'anthropologie à l'Université Oxford, définit la culture comme «[…] that complex whole which includes knowledge, belief, art, morals, law, custom, and any other capabilities and habits aquired by man as a member of society». Tylor, E.B., Primitive Culture, New York, Harper Torch Books, 1958, 1.Google Scholar Selon une définition plus contemporaine «social facts [traditions, practices, etc.] represent selections from larger sets of possibilities of which societies keep symbolic track, whether consciously or unconsciously, explicitly or covertly. Societies conceptualize themselves as select (in both senses) arrangements, valued against contrary arrangements that are in some way ‘objectified’», James A. Boon, Other Tribes, Other Scribes, Cambridge, Cambridge University Press, 1982, 52. Le concept de culture ne possède plus l'unité qui le caractérisait auparavant. Les cultures sont maintenant considérées partielles plutôt qu'entières, conjoncturelles plutôt qu'essentielles.

6 La jurisprudence transculturelle implique de voir (et d'entendre) le droit de toute juridiction des deux côtés, de l'intérieur et de l'extérieur, du point de vue de la majorité et de celui de la minorité, et de chercher des solutions qui résonnent à travers la faille. Pour reprendre les termes de Nicholas Kasirer, il faut donc faire le pas de sortir de «l'Empire du droit» (même si ce n'est que temporairement) et tenter de prendre pied dans le «cosmos du droit». Voir Kasirer, Nicholas, «Bijuralism in Law's Empire and in Law's Cosmos» (2002) 52 J. Legal Educ. 29.Google Scholar

7 Geertz, Clifford, «The Uses of Diversity» dans Available Light, Princeton, Princeton University Press, 2000, 68 aux pp. 79, 86.Google Scholar Voir aussi Comaroff, John et Comaroff, Jean, «Policing Culture, Cultural Policing: Law and Social Order in Postcolonial South Africa» (2004) 29 Law & Soc. Inquiry 513 at 545.CrossRefGoogle Scholar

8 Sur les politiques de l'identité, voir Taylor, Charles, «The Politics of Recognition» in Multiculturalism and ‘The Politics of Recognition’, Princeton, Princeton University Press, 1992, 25.Google Scholar

9 Renteln, Alison Dundes, The Cultural Defense, New York, Oxford, 2004 [Renteln].Google Scholar

10 Tout aussi problématique, selon Renteln, est l'acceptation furtive de la preuve culturelle, qui est alors tantôt confirmée et tantôt rejetée (en tant que «abus de discrétion») en appel. «There is no uniformity in the way culture is handled by the courts, and this variation leads to dissimilar outcomes, sometimes for similar offenses». Ibid. à la p. 185. D'où le besoin pour «[…] statutory authorization of the admissibility of cultural evidence in the courtroom». Ibid., à la p. 206.

11 Renteln réfère à l'article 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 19 décembre 1966, 999 R.T.N.U. 171, art. 9–14, R.T. Can. 1976 n° 47, comme l'une des sources du «droit à la culture», mais dénonce son utilisation relativement restreinte. Ibid. à la p. 213.

12 En droit pénal, par exemple, de nombreuses défenses - incluant l'auto-défense, la provocation, l'erreur sur les faits - exigent que l'accusé démontre avoir agi de la manière qu'une personne raisonnable l'aurait objectivement fait dans les circonstances. Or, la culture modifie la perception des circonstances, avec le résultat que des personnes d'autres cultures paraissent avoir agi de manière non raisonnable, alors que leur comportement était dans les faits conforme à la norme objective de leur propre culture. Cet écart doit faire partie de la recherche judiciaire des faits pertinents selon Renteln.

13 Ibid. aux pp. 217, 203.

14 Ibid. à la p. 217. Je pense que la conception qu'a Renteln du préjudice devrait être dédoublée, tenant compte de la contribution de Heather Douglas dans ce numéro, qui parle des niveaux culturels et sous-culturels. Voir Hoople, Terry, «Conflicting Visions: SM, Feminism, and the Law. A Problem of Representation» (1996) 11:1R.C.D.S. 177.Google Scholar

15 R. c. Lucien “1998], A.Q. n° 8 (C.Q.) aux para. 6–7.

16 «The Haitian Embassy in Ottawa called the judgment ‘a grave insult to the Haitian people’ and insisted on the fact that rape is severely punished in Haiti». Fournier, Pascale, «The Ghettoisation of Difference in Canada: ‘Rape by Culture’ and the Danger of a ‘Cultural Defence’ in Criminal Law Trials» (2002) 29 Man. L.J. 81, n. 78.Google Scholar

17 R. c. Lucien [2000], R.J.Q. n° 2 (CA.). Voir la présentation de cette décision dans Fournier, ibid.

18 Concernant l'image d'hommes noirs, Fournier cite Fanon: «One is no longer aware of the Negro, but only of a penis: the Negro is eclipsed [… ] He is the penis». Ibid. aux pp. 93–94. Quant aux femmes de couleur, Fournier réfère à Razack: «Racialised women […] are considered inherently less innocent and worthy than white women, and the classic rape in legal discourse is the rape of a white woman». Ibid. aux pp. 108–09.

19 Ibid. p. 84.

20 Cité dans R. c. Ammar Nouasria, [1994] A.Q. n° 522 at para. 19.

21 Fournier, supra note 16 à la p. 107.

22 Ibid. à la p. 112

23 Dans Campbell, le juge Moir commente le rapport de l'anthropologue Frances Henry comme suit: «the report, taken as a whole, suggests for the jurors to reason as Dr. Henry has done; that is, to allow generalizations about police and generalizations about members of the Black community to determine specific issues of fact». (Voir l'article de Robert Currie dans ce numéro). On pourrait y opposer qu'il n'y a pas d'autre façon légitime de raisonner sur la ‘race’ que celle de Dr Henry, puisque tout autre manière traiterait la ‘race’ comme une catégorie objective plutôt que le construit social qu'elle est. Voir Berreman, Gerald, «Race, Caste and Other Invidious Distinctions in Social Stratification» (1972) 13 Race 500–31.CrossRefGoogle Scholar

24 (2002), 209 N.S.R. (2d) 81 (N.S.C.S.).

25 Il est intéressant de lire comment, selon Renteln, la culture ‘influence’ le comportement individuel (à la fois dans le texte dans ce numéro et dans The Cultural Defense, supra note 9, c. 2) à la lumière de l'analyse de Currie sur la manière dont les cours construisent la «motivation individuelle». La perspective anthropologique large de Renteln est visiblement à couteaux tirés avec celle des cours. Ce qui mène à une bataille entre anthropologues et juges sur la discipline qui commettrait la plus grossière «généralisation» dans l'interprétation du comportement humain (une question qui trame les contributions de Renteln et de Currie). Le besoin d'un dialogue (plutôt que de guerres de clocher) est évident.

26 Cet extrait de l'arrêt Campbell est cité dans Currie, ce numéro.

27 Citation de l'article de Mohr, ce numéro. D'autres articles qui se penchent sur cette question de manière exemplaire sont Webber, Jeremy, «Multiculturalism and the Limits to Toleration» dans Lapierre, Smart et Savard, , eds., Language, Culture and Values in Canada at the Dawn of the 21st Century, Ottawa, International Council for Canadian Studies and Carleton University Press, 1996Google Scholar; Santos, Bonaventura De Sousa, «Vers une conception multiculturelle des droits de l'homme» (1997) 35 Dr. Soc. 7996.Google Scholar

28 L'analyse de Roy approfondie les déterminants historiques et socio-juridiques de la situation de Mme G. – tout ce que les cours n'ont que survolé. En le faisant, Roy illustre bien l'argument de Mohr, dans ce numéro, selon lequel «The act of interpretation is not a simple mechanistic application of the law to objective facts: the facts [and, I would add, the laws] themselves must be interpreted within a legal and social context. The judge is a participant in – and indeed a part of – that context.»

29 Nous connaissons le résultat que les cours canadiennes ont réservé à la demande Gitska-Witsuwit'en, voir Delgamuukw v. British Columbia, (1991) 79 D.L.R. (4th) 185, [1991] 3 W.W.R. 97. Si la situation avait été renversés et le procès avait eu lieu dans un hall de fête, le résultat aurait-il été différent? Voir Mills, Antonia, Eagle Down is Our Law: Wtsuwit'en Law, Feasts and Land Claims, Vancouver, University of British Columbia Press, 1994.Google Scholar

30 Ce champ de l'esthétique a néanmoins été traité ailleurs. Sur l'iconographie et l'architecture du droit, voir par exemple, Jay, Martin, «Must Justice Be Blind? The Challenge of Images to Law» dans Douzinas, C. et Nead, L., eds., Law and the Image: The Authority of Art and the Aesthetics of Law, Chicago, University of Chicago Press, 1999Google Scholar; Mohr, Richard, «Enduring Signs and Obscure Meanings: Contested Coats of Arms in Australian Jurisdictions» dans Wagner, A., Summerfield, T. et Benavides, F.S., eds., Contemporary Issues of the Semiotics of Law, Oxford, Hart, 2005Google Scholar; Jacob, Robert, «The Historical Development of Courthouse Architecture/La formazione storica dell'architettura giudiziaria» (19951996) 14:30Zodiac 43Google Scholar; voir aussi Manderson, Desmond, Songs Without Music: Aesthetic Dimensions of Law and Justice, Berkeley, University of California Press, 2000.Google Scholar

31 Le troisième artiste présenté dans l'exposition Double jeu était Richard Purdy de Trois-Rivières, Québec, qui met en scène ce qui se présente comme installations archéologiques authentiques d'une civilisation indonésienne fantastique. Nous n'avons pas inclus son travail fascinant en termes d'effets de vérité puisque le lien avec le thème de ce numéro spécial est moins évident que dans les œuvres de Cole et de Noganosh.