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L’échographie équivaut-elle à la tomodensitométrie dans la prise en charge des patients avec suspicion d’urolithiase se présentant à l’urgence?

Published online by Cambridge University Press:  09 February 2016

Aubert Lachance-Fortin
Affiliation:
Programme de formation complémentaire en médecine d’urgence (CCMF-MU), Université Laval, Québec City, Québec
Xavier Leblanc
Affiliation:
Programme de formation complémentaire en médecine d’urgence (CCMF-MU), Université Laval, Québec City, Québec
Samuel Racine
Affiliation:
Programme de spécialité en médecine d’urgence, Université Laval, Québec City, Canada
Audrey Dupuis
Affiliation:
Département d’information et de communication, Université Laval, Québec City, Canada Centre intégré de santé et services sociaux de Chaudière-Appalaches, Secteur Alphonse-Desjardins (CHAU de Lévis), Lévis, Québec City, Canada
Patrick Archambault*
Affiliation:
Département de médecine familiale et médecine d’urgenceet Division de soins intensifs, Université Laval, Québec City, Canada Centre intégré de santé et services sociaux de Chaudière-Appalaches, Secteur Alphonse-Desjardins (CHAU de Lévis), Lévis, Québec City, Canada.
*
Correspondance to: Patrick M. Archambault, 143 rue Wolfe, Lévis, Québec, Canada G6V 3Z1; Email: [email protected]

Abstract

Article Chosen: Smith-Bindman R, Aubin C, Bailitz J., et al. Ultrasonography versus Computed Tomography for Suspected Nephrolithiasis. New Engl J Med 2014;371;1100-10.

Type
Knowledge to Practice
Copyright
Copyright © Canadian Association of Emergency Physicians 2016 

ARRIÈRE-PLAN

Près de 1 Canadien sur 10 présentera au moins un épisode de colique néphrétique dans sa vie 1 et ces patients mobilisent plusieurs ressources dans les urgences au CanadaReference Papa, Stiell and Wells 2 comme ailleurs.Reference Hyams, Matlaga and Korley 3 De plus, l’utilisation de la tomodensitométrie (TDM) comme première modalité diagnostique en cas de suspicion d’urolithiase a beaucoup augmenté au cours des dernières années.Reference Kocher, Meurer and Fazel 4 Malgré une sensibilité supérieure à celle de l’échographie, son utilisation accrue ne semble pas avoir amené d’amélioration significative de la prise en charge des patients.Reference Westphalen, Hsia and Maselli 5 En contrepartie, la TDM présente certains effets indésirables comme: l’irradiation, 6 - Reference Mathews, Forsythe and Brady 8 un nombre élevé de découvertes fortuitesReference Lumbreras, Donat and Hernández-Aguado 9 , Reference Thompson, Wojcik and Grant 10 et des coûts importants.Reference Pearle, Calhoun and Curhan 11 Ainsi, l’échographie réalisée au département d’urgence (EDU) et l’échographie effectuée par un radiologiste deviennent des modalités diagnostiques intéressantes à étudier. Le but de cette étude était donc d’évaluer l’efficacité comparative de ces trois modalités d’investigation sur le devenir des patients consultants à l’urgence avec une colique néphrétique.

POPULATION À L’ÉTUDE

Les patients, âgés entre 18 et 76 ans, devaient avoir consultés à l’urgence pour une douleur à l’abdomen ou au flanc, pour laquelle le médecin a demandé une imagerie afin de confirmer l’hypothèse diagnostique primaire d’urolithiase.

DEVIS EXPÉRIMENTAL

Il s’agit d’un essai clinique randomisé pragmatique réalisé dans 15 urgences américaines universitaires. Les patients ont été assignés aléatoirement avec un ratio de 1:1:1 à l’une des trois modalités d’imagerie suivante: l’EDU, l’échographie par un radiologiste et la TDM. Après assignation à l’investigation initiale, la prise en charge des patients était laissée à la discrétion du médecin d’urgence, notamment en ce qui a trait aux investigations supplémentaires. Une analyse de la précision diagnostique des trois modalités a aussi été réalisée en utilisant comme étalon-or la confirmation visuelle du passage de la lithiase par le patient ou par un urologue.

CRITÈRES DE JUGEMENT ÉVALUÉS

Les critères de jugement primaires évalués dans cette étude étaient: (1) l’incidence cumulative à 30 jours de diagnostics significatifs manqués ou retardés comme une rupture d’anévrysme de l’aorte abdominale, une appendicite rupturée, une pneumonie avec sepsis, une diverticulite avec abcès ou sepsis, une ischémie ou perforation intestinale, un infarctus rénal, une néphrolithiase avec abcès, une pyélonéphrite avec urosepsis ou bactériémie, une torsion ovarienne avec nécrose, ou bien une dissection aortique avec ischémie; (2) la dose cumulative d’irradiation à 6 mois; et (3) les coûts totaux (non reportés dans la présente étude). Les critères de jugement secondaires étaient la survenue d’évènements graves, les deuxièmes visites à l’urgence, les hospitalisations subséquentes, la douleur ainsi que la précision diagnostique des trois modalités d’imagerie.

RÉSULTATS

Parmi 3100 patients éligibles, 2759 ont été randomisés. Au total, 113 patients ont été perdus au suivi. Trente jours après la randomisation, 6 (0,7%) patients dans le groupe EDU, 3 (0,3%) patients dans le groupe échographie par le radiologiste et 2 (0,3%) patients dans le groupe TDM ont eu un diagnostic de pathologie significative (p=0.3). En ce qui concerne la dose cumulative d’irradiation à 6 mois, celle-ci était plus faible pour le groupe EDU (10.1 millisiverts (mSv)) et pour les échographies en radiologie (9.3 mSv) par rapport au groupe TDM (17.2 mSv) (p<0.001).

Parmi les critères de jugement secondaires, la survenue d’évènements graves était comparable dans les trois groupes (113 (EDU) vs. 96 (échographie par le radiologiste) vs. 107 (TDM); p=0.5). Les auteurs n’ont pas noté de différence dans la sévérité de douleur rapportée. La précision diagnostique des trois modalités était aussi comparable (la sensibilité de l’EDU, de l’échographie par le radiologiste et la TDM étaient respectivement 85%, 84% et 86% pour détecter les urolithiases; la spécificité était 50%, 53% et 53% respectivement).

ANALYSE CRITIQUE

Cette analyse a été réalisée avec l’aide des critères proposés par le User’s Guides to the Medical LiteratureReference Guyatt, Meade, Drummond and Cook 12 et la liste de vérification CONSORT. 13 Bien qu’un des critères de jugement soit l’évaluation de la précision diagnostique des modalités d’investigation, nous avons surtout centré notre critique sur l’étude comparative de l’efficacité des stratégies diagnostiques sur le devenir des patients. Cette étude démontre que le devenir des patients, mesuré par l’incidence cumulative de diagnostics significatifs manqués ou retardés, est similaire peu importe laquelle des modalités d’imagerie est utilisée initialement. Elle démontre aussi que la dose d’irradiation cumulative a été moindre dans les deux groupes d’échographie (p<0,001).

Les résultats de l’étude sont-ils valides?

Malgré que cette étude soit randomisée, multicentrique et offre un suivi adéquat des patients, certains aspects de la méthodologie restreignent la validité interne et externe des résultats. Le manque d’aveuglement des cliniciens par rapport à la modalité diagnostique a possiblement influencé la performance des cliniciens interprétant les modalités diagnostiques et la décision d’utiliser des tests supplémentaires. De plus, les raisons pour demander une imagerie supplémentaire ne sont pas mentionnées et les critères pour considérer une modalité d’imagerie positive n’étaient pas définis. Pourtant, 40,7% des patients ayant reçu une EDU et 27% des patients ayant reçu une échographie en radiologie ont eu une imagerie supplémentaire. Il aurait également été intéressant de connaître si les groupes différaient en termes de médication prise, en particulier ceux ayant un impact sur la fonction rénale. D’autres éléments limitent la validité externe des résultats. Premièrement, la sélection des patients a été réalisée uniquement lorsque les trois modalités étaient disponibles (essentiellement le jour). De plus, les critères d’exclusion sont subjectifs puisqu’ils reposent sur le jugement des cliniciens pour exclure les patients potentiellement à haut risque de diagnostic alternatif grave. Aussi, le suivi des patients dans cette étude (à 3, 7, 30, 90 et 180 jours) a été très serré. L’incidence de complications manquées pourrait être plus élevée dans le contexte réel de la pratique d’urgence où le suivi risque de ne pas être aussi exemplaire. Finalement, en choisissant la confirmation visuelle du passage de la lithiase par le patient ou le chirurgien comme étalon-or a pu sous-estimer la mesure de la sensibilité des différentes modalités diagnostiques.

Les résultats sont-ils utiles?

Cette étude démontre qu’il est possiblement sécuritaire d’utiliser l’échographie (EDU ou échographie en radiologie) comme première investigation pour un patient de 18 à 76 ans qui se présente à l’urgence le jour avec une suspicion élevée de colique néphrétique. Ces deux modalités entrainent moins d’irradiation que la TDM, mais il faut faire un suivi serré après le congé de l’urgence pour éviter des diagnostics manqués ou retardés. Dans le contexte canadien actuel où l’on tente de diminuer le surdiagnostic et de mieux cibler nos investigations avec l’initiative Choisir avec soin (Choosing wisely Canada MD ), 14 ces résultats pourraient être utiles.

Est-ce que les résultats changeront ma pratique?

Compte tenu des limitations décrites, les résultats de cette étude ne doivent pas changer la pratique, mais ils semblent offrir une avenue de réflexion intéressante pour réduire l’exposition à l’irradiation et le surdiagnostic. Il reste aussi à évaluer et à connaître le coût comparatif de ces différentes stratégies diagnostiques. De plus, tel que suggéré par l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé, 15 il sera souhaitable d’obtenir d’autres études prospectives démontrant l’avantage potentiel des modalités échographiques en terme de sécurité et de coût dans le contexte canadien. Finalement, il sera aussi important de vérifier l’applicabilité de ces résultats dans les milieux ruraux où les ressources échographiques sont moins grandes.Reference Fleet, Poitras, Maltais-Giguère, Villa and Archambault 16

Intérêts opposés: Rien à déclarer.

Supplementary Material

To view supplementary material for this article, please visit http://dx.doi.org/10.1017/cem.2016.10

References

Références

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10. Thompson, RJ, Wojcik, SM, Grant, WD., et al. Incidental findings on CT scans in the emergency department. Emerg Med Int 2011;2011:624847.CrossRefGoogle Scholar
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16. Fleet, R, Poitras, J, Maltais-Giguère, J, Villa, J, Archambault, P. A descriptive study of access to services in a random sample of Canadian rural emergency departments. BMJ Open 2013;3:e003876.CrossRefGoogle Scholar
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