La question du paquet individuel de pansement revenant de plus en plus à l'ordre du jour, malgré les critiques qui lui ont été adressées par quelques chirurgiens d'armée, trop peu opportunistes peut-être ou trop cliniciens, ils ne sera pas sans intérêt pour les lecteurs du Bulletin, de connaître différents de ces pansements qui semblent répondre aux exigences des guerres modernes.

Le 14 mars dernier est décédé à Berlin le médecin général Dr Otto Lieber, secrétaire général des Associations allemandes de ia Croix-Rouge. Né le 11 mai 1839 à Züllichau, il prit part, peu après la terminaison de ses études, comme médecin assistant à l'expédition contre le Danemark en 1864, et en 1866 à la guerre avec l'Autriche. Il fit la campagne de 1870–71 en qualité de médecin d'état-major du 6me corps. Etabli ensuite à Strassbourg, il y fut successivement médecin en chef d'état-major, médecin de la garnison du fort, médecin de division et enfin médecin en chef du lazaret de la garnison de Strasbourg, un des plus grands de l'Allemagne.

Les dernières guerres ont mis en lumière les avantages que présentent les vaisseaux-hôpitaux. L'assistance volontaire en Allemagne s'est dès lors occupée de l'aménagement de bateaux de ce genre. La Société hambourgeoise des infirmiers volontaires a entrepris sur le remorqueur Hansa, transformé en bateau-hôpital, des exercices répétés qui ont rencontré l'approbation unanime des personnes compétentes en matière militaire et d'assistance volontaire. Les dernières manœuvres de la marine allemande dans la mer du Nord lui ont fourni l'occasion de fonctionner et de révéler son utilité directe.

La Convention signée à La Haye le 29 juillet 1899 « pour l'adaptation à la guerre maritime des principes de la Convention de Genève du 22 août 1864 » n'a pas eu seulement pour effet, comme son titre l'indique, de rendre les principes de cette dernière applicables aux guerres navales, car, sur un point du moins, elle a dépassé ce but en proclamant un principe que la conférence de 1864 avait repoussé. L'assemblée revisionniste de 1903 devra donc pourvoir, semble-t-il, au rétablissement de l'harmonie, qui n'aurait pas dû être troublée, entre la règle adoptée en 1864 et celle de 1899 à laquelle nous venons de faire allusion.

Les associations de la Croix-Rouge, ainsi que l'activité de cessociétés, se sont considérablement développées dans les vingt-cinq dernières années. Les chefs de ces associations ont senti le besoin de se réunir, non seulement pour se faire mutuellement part de leurs expériences, mais aussi pour consolider les principes de l'organisation générale de la Croix-Rouge en Allemagne et, d'après les leçons de l'expérience, poser une base large et plus certaine pour l'activité future.

Depuis que le Comité international de la Croix-Rouge existe, c'est-à-dire depuis quarante ans, son personnel a subi, par suite de démissions et de décès, de nombreux changements, tant et si bien qu'à l'heure actuelle, un seul de ses membres, son président, n'a jamais quitté son poste depuis l'origine, et seul d'entre eux, par conséquent, peut témoigner de visu de ce qui s'est passé au cours de ce qu'on pourrait nommer assez justement la période héroïque de ce Comité. Nous entendons par là celle où le succès de sa tentative était encore problématique, et où il devait déployer plus de perspicacité, de tact et de savoir-faire que jamais, pour mener à chef le projet qu'il s'était proposé de réaliser. Les hommes appelés plus ou moins tardivement à participer à son administration auraient bien voulu savoir comment les choses s'étaient passées avant eux, mais ils n'avaient, pour se renseigner à ce sujet, que des récits incomplets, qui ne leur suffisaient pas, et leur collègue, ouvrier de la première heure, était souvent appelé à les renseigner verbalement sur les tâtonnements de leurs devanciers, jusqu'à ce qu'enfin il fut mis par eux en demeure de consigner par écrit ses souvenirs, afin de leur laisser un témoignage durable de temps anciens dont il leur importait de connaître toutes les particularités.

L'association allemande pour les chiens sanitaires, dont nous avons à plus d'une reprise entretenu nos lecteurs, va entrer dans une nouvelle phase de son existence par l'érection d'un établissement de dressage et de formation, et par un aménagement nouveau de la station. De plus en plus cette institution conquiert sa place et son droit à l'intérêt général par les services qu'elle rend; elle a déjà des imitateurs à l'étranger. Dans le dernier exercice le nombre de ses membres s'est accru de 142, dont 16 associations patriotiques de dames et 52 sociétés de la Croix-Rouge, ce qui prouve à quel point ces dernières ont reconnu pour leur œuvre l'utilité de cette institution. Beaucoup de colonnes sanitaires ont adopté des chiens dressés pour les recherches des blessés. Son président est toujours le peintre animalier Bungartz et son protecteur le grand duc de Bade.

Nous avons signalé plusieurs fois l'ingéniosité avec laquelle la Croix-Rouge allemande cherche à utiliser sa puissance et ses ressources par la création d'institutions sociales et humanitaires au premier chef. C'est plus spécialement la Société patriotique des dames de Charlottenburg qui vient de lui ouvrir un nouveau champ d'action en instituant des jardins d'ouvriers, où ceux-ci, pendant la belle saison, peuvent se livrer à la culture et s'adonner à une occupation non seulement saine par elle-même, mais qui les retient encore loin des plaisirs malsains de la grande ville.

M. le Dr Cramer, médecin d'état-major, précédemment à Wittenberge et actuellement à Rostock, vient de publier en brochures le résumé de deux conférences qu'il a faites à des assemblées de colonnes sanitaires à Brunschwig et à Grünfeld, l'une sur ce que le membre d'une coloñne sanitaire doit savoir en molière de pansement, et l'autre sur ce qu'il est le plus important de connaître dans le domaine de l'improvisation des moyens de secours.

La Société autrichienne de la Croix-Rouge nous a fait part de la perte qu'elle a dernièrement éprouvée par la mort, survenue le 24 août 1903, de son second vice-président, S. E. le comte Hoyos-Sprinzenstein, qui était conseiller intime et chancelier de l'empereur. Sur notre demande, le Comité de Vienne a bien voulu nousdonner sur le défunt les détails biographiques suivants:

«Après avoir inauguré, pour ainsi dire, l'activité pratique de la Société patriotique de secours aux malades et blessés à la guerre, le comte Hoyos quitta Vienne immédiatement; en 1859, accompagné de médecins, de garde-malades, et muni de provisions, de médicaments, d'objets de pansement, etc., afin de porter des secours sur le champ de bataille en Italie.

La loi sutrichienne, dont nous mentionnions l'élaboration dans notre dernier numéro, a été votée par les Chambres et a reçu la sanction impériale. Nous en donnons le texte ci-dessous.

M. le député G. Roszkowski a présenté à la Chambre des Députés un rapport sur la décision de la Chambre des Seigneurs relative à cet objet. Ce rapport, qui révèle là plume d'un homme parfaitement au courant des questions concernant la Croix-Rouge et la Convention de Genève, est un résumé historique complet des origines de l'une et de l'autre, de l'institution privée qui prit naissance en octobre 1863, aussi bien que du pacte diplomatique international qui fut signé le 22 août 1864.

Après 1853, en Europe et en Amérique, trois guerres cruelles se succédèrent à peu d'intervalle l'une de l'autre; leurs traces sanglantes ont attiré l'attention des contemporains.

La guerre d'Orient (1853–1856) entraîna dans la tombe 784,991 hommes: 53,007 furent tués, les 731,984 autres succombèrent à leurs blessures et aux maladies. Dans les hôpitaux anglais moururent 1847 blessés, tandis que les maladies en emportèrent 17,580. Sur 85,375 Français décédés, il n'y en eut que 10.475 qui périrent des suites de leurs blessures; l'armée sarde perdit 16 hommes par armes à feu et 2,166 par maladies. Autant qu'il est permis d'en juger d'après l'expérience de la seconde moitié de la campagne, un grand nombre des victimes auraient pu être sauvées s'il avait élé mieux tenu compte des besoins de l'assistance médicale.

M. le Dr Port connaît aussi bien les lacunes des services officiels que celles des services officieux. Sa longue pratique de la vie militaire et du service des ambulances ainsi que son intérêt pour la cause des malades et des blessés, l'ont initié, presque dans leurs moindres détails, aux besoins de l'organisation sanitaire des armées, aussi est-ce toujours avec profit qu'on entend les observations et les enseignements de ce vétéran de l'assistance sanitaire. Voici une nouvelle publication de l'éminent praticien, dont les ambulanciers ne pourront que faire leur profit, elle traite de l'enseignement pratique des colonnes sanitaires volontaires.

Le Comité directeur de l'Association congolaise et africaine de la Croix-Rouge a entendu, dans sa séance du 29 juin 1903, présidée par M. Alfred Simonis, président, la lecture du rapport annuel présenté par M. le baron Ruffin, secrétaire général.

Les établissements hospitaliers allemands de la Croix-Rouge, qui, comme on sait, sont constitués en association, se sont réunis en assemblèe générale, dans les premiers jours de novembre 1902, à Elberfeld. Le Dr Osius, de Cassel, qui a dû démissionner de ses fonctions de président, pour motif de santé, a été remplacé par M. Chuchul. L'Association compte 25 etablissements ou sociétés, lesquels accusent un total de plus de 1600 infirmières, tant sœurs de la Croix-Rouge qu'élèves ou volontaires.

La Société autrichienne, qui a célébré en 1902 le soixantième anniversaire de son protecteur princier, l'archiduc Louis-Victor, a continué à jouir de la faveur du gouvernement.

Elle se compose d'une direction centrale à Vienne, de 22 sociétés régionales, soit mixtes, soit composées exclusivement d'hommes ou de dames, se subdivisant en 431 sections, sans compter les 79 bureaux de districts de la Galicie et les 100 sections de la Société auxiliaire de dames pour la Bohème.

Nous avons déjà fait allusion à l'espérance que nourrissait la Société autrichienne de voir bientôt légalement protégé en Autriche l'emblème de la Croix-Rouge.

Un projet de loi a été effectivement présenté aux Chambres autrichiennes; le rapport de la Commission nommée a été imprimé déjà en juin 1902, et un rapport spécial émanant du comité politicosocial et dû à la plume de M. G. Roskowski, — lequel, comme on sait, s'est toujours beaucoup occupé de la Croix-Rouge, — vient de paraître pour recommander aux Chambres son adoption. Ce rapport contient, comme annexe, les dispositions légales qui, dans beaucoup de pays déjà (Italie, Belgique. Danemark, Roumanie, Portugal, Serbie, Etats-Unis, Allemagne), protègent efficacement cet emblème.

Nous reproduisons ci-dessous le rapport de l'économe général, M. le Dr Robinet, présenté à l'assemblée générale du 29 mars 1903:

« Ainsi que le constate l'inventaire que j'ai l'honneur de vous soumettre, le gros matériel de notre Association (brancards, tentes, voitures, etc.) est resté stationnaire pendant l'année qui vient de finir.

« Certes, le Comité directeur avait décidé, dès 1902, d'affecter une somme de 15,000 francs à son augmentation. Mais soucieux des devoirs qui lui incombent et de la bonne administration des deniers confiés à sa garde, il a tenu auparavant à s'entourer des renseignements les plus complets, afin de doter la Croix-Rouge de Belgique d'un matériel répondant aux derniers perfectionnements.

La discussion qui a eu lieu sur le sujet du premier pansement au XXXIme congrès de la Société des chirurgiens allemands, à Berlin, au mois d'avril de cette année, nous paraît résumer les expériences faites par la chirurgie militaire, quant aux plaies modernes pendant les dernières guerres. Nous en donnons un court aperçu d'après un article de M. Fischer dans les Archives de médecine et de pharmacie militaires.

Si nos arrière-neveux songent à écrire une histoire de la Croix-Rouge, après que cette institution aura pris tout le développement vers lequel elle s'achemine, ils auront probablement d'intéressantes choses à dire de l'accueil que lui auront fait les diverses races humaines, très inégalement espacées aujourd'hui sur l'échelle de la civilisation, mais sur laquelle il faut espérer qu'elles s'élèveront toutes plus ou moins rapidement. Imaginée par des blancs, la Croix-Rouge n'a encore fait que deux incursions en dehors de l'habitat de ses premiers adeptes, et cela dans des milieux trop dissemblables pour qu'il soit permis de déduire de ces rares expériences quelque loi générale sur sa facilité d'acclimatation ailleurs.