La géographie est pour les champions de la Croix-Rouge un auxiliaire qui a bien son prix, mais dont nous ne savons pas que, jusqu'à ces derniers temps, on ait tiré parti, du moins au point de vue auquel nous songeons en cet instant. Un globe terrestre indiquant tous les lieux où la guerre a sévi serait une preuve irréfragable de l'universalité de ce fléau, et ferait comprendre intuitivement combien est illusoire la sécurité des peuples qui pensent n'avoir pas à le redouter pour eux-mêmes. On en conclurait à bon droit que la Croix-Rouge, en tant qu'institution de prévoyance propre à atténuer les souffrances des blessés, n'est nulle part une superfluité, et que l'argument, si souvent invoqué, des dispositions pacifiques d'une nation, pour rester en dehors de ce mouvement humanitaire, est de peu de valeur. Au fond, tous les peuples le sentent bien, puisqu'aucun ne licencie son armée, et la froideur que rencontre encore çà et là la Croix-Rouge tient moins à un optimisme de raison qu'à une fâcheuse apathie. Pour vaincre cette résistance, il peut donc être bon de joindre aux chiffres de la statistique, qui, malgré leur éloquence, ne portent pas suffisamment à l'action, le stimulant plus impressif que nous venons d'indiquer et qui agirait, par la vue, sur les volontés endormies.