Le dernier ouvrage de Dominique Iogna-Prat, Cité de Dieu, cité des hommes. L’Église et l'architecture de la société, 1200-1500, qui s'inscrit dans la postérité intellectuelle et chronologique de La maison Dieu. Une histoire monumentale de l’Église au Moyen Âge (v. 800-v. 1200), se présente comme un essai sur l’émergence de la ville en tant que figure symbolique et politique de la cité des hommes entre 1200 et 1700, et sur les effets de cette émergence sur l’Église, qui avait assumé cette fonction avant 1200. Il nourrit une réflexion ambitieuse sur les origines de la modernité, qui vise à dépasser les impasses de la philosophie politique, prompte à ignorer les siècles médiévaux et le moment scolastique, et à relativiser l'effacement de l'institution ecclésiale à partir de la Renaissance. Il rejette l'opposition binaire entre l’Église et l’État, propose une nouvelle périodisation de l’«entrée en modernité» et souligne l'importance des enjeux spatiaux (ici principalement en termes de représentation), s'inscrivant ainsi dans un courant de l'historiographie française attaché depuis plus d'une décennie à réintroduire la question de l'espace au cœur de l'histoire sociale et politique. La démonstration, stimulante, suscite cependant quelques interrogations. Celles-ci portent sur les effets de la Réforme protestante, la puissance croissante des États et le processus de «sécularisation» ou, plus encore, sur l'articulation entre une logique de polarisation de l'espace et une logique de territorialisation dans les pratiques de gouvernement et l'encadrement de la société, toutes deux promues par l'institution ecclésiale, avant les États eux-mêmes.