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Vie matérielle et comportements biologiques, bulletin n° 12 : L'alimentation au XVIIe siècle : les marchés de pourvoierie

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Pierre Couperie*
Affiliation:
École Pratique des Hautes Études

Extract

La défiance éprouvée envers leurs serviteurs par les grands seigneurs du XVIe et du XVIIe siècles a suscité une série assez abondante de documents d'un grand intérêt pour l'histoire de la vie matérielle. Il s'agit des « Marchés de pourvoierie » passés devant notaire, par lesquels un « pourvoyeur », à la fois entrepreneur et officier domestique, s'engageait à fournir un approvisionnement régulier de certaines denrées à des prix convenus à l'avance. Ainsi étaient empêchées les escroqueries des domestiques majorant le prix de leurs achats.

Ce système connut une grande extension : pâtisserie, vin, pain et farine, avoine, chandelles, livrées, linge de table, etc., faisaient l'objet de tels marchés. Mais les plus intéressants sont les marchés de pourvoierie proprement dite, c'est-à-dire viande, rôtisserie et poisson : chacun d'eux donne une liste de plus de deux cents articles avec les prix correspondants.

Type
Enquêtes Ouvertes
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1964

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References

1. Pour le xvi e siècle, une série de marchés a été publiée, ou est répertoriée dans les fichiers du Minutier Central : 1538 G. Dartigue, « Traité passé par Henri d'Albret pour alimenter sa maison », (ARCH. Basses-PyrÉNÉES, B 2083), Annales du Midi 49, 1937, pp. 409-418. 1558 (15 janvier), Marché pour la maison du cardinal de Châtillon, AECH. NAT., Min. Centr., CXXII, 1285 (déclassé). 1558 (13 février), Marché pour la maison du comte de Maulervier, ARCH. NAT., Min. Centr., CXXII, 1285. 1561 (21 mars), Marché pour le cardinal de Guise, ARCH. NAT., Min. Centr., XIX, 296. 1564 V. Dubarat, « Traité de fournitures de vivres pour la maison de Jeanne d'Albret (3 février 1564) » (ARCH. Basses-PyrÉNÉES, E 1998, f. 11, r°), Revue du Béarn 1, 1904, pp. 300-311. 1567 (8 janvier), Marché pour le duc d'Anjou, ARCH. NAT., Min. Centr., XXXVI, 20. 1580 (18 janvier), Marché pour la Reine Mère, ARCH. NAT., Min. Centr., LIX, 95. 1580 (10 juin), Marché pour la Reine Mère, ARCH. NAT., Min. Centr., XIX, 319. 1582 (25 mai), Marché pour Louis de Lorraine, archevêque de Reims, ARCH. NAT., Min. Centr., VIII, 389. 1583-1584, A. de Lamothe, « Marché passé entre le prince de Condé, Henry de Bourbon et le sieur Dubye, fournisseur de sa table (1583-1584) », Revue des Sociétés Savantes des départements Sér. V, 7, 1874, 1 e r semestre, pp. 495-505. D'autres doivent exister, en particulier ceux d'Albert de Gondi, duc de Retz (Bulletin Soc. Hist. Paris 33,1906, p. 67 : compte-rendu de la séance du 10 avril 1906, communication de M. Caron). Pour le x v m e siècle, Grouchy, « Comptes de maison », a publié les prix relevés par lui dans un marché du 10 janvier 1747 pour la reine Marie Leczinska. Deiamare, (Traité de la Police 1722) mentionne plusieurs fois «les pourvoyeurs du Roi et des Grands ».

1. Deloche, M., La Maison du cardinal de Richelieu, Paris, 1912, p. 270 Google Scholar sqq.

1. Tous les marchés de pourvoierie ne suivent pas ce modèle. Certains consistent en un simple engagement à fournir tout ce qu'il faudra, de viande par exemple, pendant telle durée (Cf. ARCH. NAT., Min. Centr., XXX, 79, 23 avril 1675 : Marché pour fournir en viande le duc de la Feuillade pendant la prochaine campagne), sans précision de quantité ou de prix. D'autres sont en forme de menu-type (jours gras, jours maigres). Par exemple : ARCH. NAT., Min. Centr., XCVIII, 76, 23 août 1604 : marché-menu pour l'évêque d'Aix. Grouchy, Comptes 26 mai 1660 : marché-menu pour Mesdemoiselles d'Orléans. Parfois ces marchés-menus indiquent les quantités et les prix. C'est le cas du marché du 21 décembre 1650 pour le duc de Candalle (Grouchy, op. cit.) que nous

1. avons utilisé dans les tableaux ci-joints.

1. Voir ces tableaux en dépliants ci-après.

2. Ce sont : le plat de tripes de boeuf, le ventre et la taie de veau, la langue de mouton, le cervelas de Bologne ou de Milan, ainsi que le boudin blanc qui apparait dans le marché de 1705 pour le duc d'Orléans. De même n'ont pas été retenus les alouettes de mer, le garoussiau (carpe de moins d'un pied), les écrevisses de Péronne ou de Seine, le plat de palourdes, le coq de mer et la zaconne, poisson non identifié. Les marchés qui ont été publiés font état de certaines denrées que l'on ne retrouvera pas ici : le beurre de « Vannes », par exemple, mauvaise lecture de « Vanvre » (Vanves), ou « la livre de cresson », inadvertance de Grouchy (op. cit.) au sujet de la livre de « crestes » (de coq) ; encore moins le « hibou » et son étrange progéniture, le « hibouveau », que Champier et Sandoz, imaginant sans doute la voracité omnivore de peuplades faméliques, faisaient paraître sur la table du duc d'Orléans : « héron et héronneau »

1. en fait, avec un r semblable à un b à la mode du XVIIe siècle.

1. Delamake, op. cit. II 283.

2. Delamake, op. cit. III, p. 70 sqg. : avoir le poisson « frais et bon à manger, aux lieux éloignez de la mer d'une certaine distance, qui ne peut être que de 25 ou 30 lieues au plus, demande… une diligence extraordinaire ».

3. Comestibles Lacépède, selon, Histoire naturelle des poissons, Paris, 1789-1803Google Scholar

1. II, pp. 890-891.

1. Afin d'équilibrer les tableaux de prix, nous avons réuni tout le saumon dans celui des poissons d'eau douce, ce qui permet aussi la comparaison poisson frais poisson salé, le saumon salé étant classé, dans les marchés, avec la marée.

2. « L'on estime aussi beaucoup en France le beurre de Blois et celui de Vanvre, proche de Paris, pour leur délicatesse et leur bon goût, mais il ne s'en fait pas un fort grand commerce » (Delamare, op. cit. II. 800).

3. Delamare, op. cit. III. 65.

4. Delamare, op. cit. III. 50 : « Fort peu estimé et presque hors d'usage en France. »

1. « Ce poisson est inconnu à Paris. »

1. On peut espérer les combler peu à peu, par exhumation progressive des richesses du Minutier Central. Il devrait être possible d'aligner un marché par an : tous ceux de Louis XIII, de la comtesse de Soissons, du marquis d'Effiat, du duc de Chevreuse, etc., restent à découvrir. Sous Louis XIV, la Reine-Mère, la Reine, la Dauphine avaient

1. leurs pourvoyeurs. De tout cela il doit y avoir des restes qui reparaîtront peu à peu.

1. Un exemple récent de cette interprétation nous est donné par le volume de Corbino, E., L'Economia italiana dal 1860 al 1960, Bologne, 1962 Google Scholar, où est reprise l'analyse que ce même auteur avait déjà esquissée dans les cinq volumes des Annali delVeconomia italiana Città di Castello, 1933-1938