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Structures du peuplement, fonctions urbaines et formation du capital dans la Flandre médiévale

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

David Nicholas*
Affiliation:
Université du Nebraska

Extract

L'hypothèse de l'origine marchande des villes médiévales a été rendue célèbre par Henri Pirenne et ses disciples. Elle s'appuyait sur l'exemple de la Flandre et particulièrement de Gand, sa plus grande ville. Pirenne voyait les villes se développer, après les invasions Scandinaves, en tant qu'agglomérations marchandes, centrées sur un ouvrage fortifié et appuyant leur essor sur le commerce européen de textiles de laine, d'une qualité remarquable. La prospérité des villes déterminait, selon lui, un développement précoce de l'agriculture flamande en offrant un débouché aux paysans, à des prix inflationnistes qui leur permettaient de s'affranchir de leurs obligations serviles. La prospérité des Flandres aux XIe et XIIe siècles fut encore favorisée par une succession de comtes avisés, hommes d'État assez perspicaces qui fondèrent, sur leurs domaines, des « villes neuves » ou des bourgades d'agriculteurs et s'entendirent avec d'autres seigneurs qui agissaient de même. Une de ces fondations, Ypres, devait devenir la troisième grande cité industrielle flamande.

Summary

Summary

A study of primitive settlement patterns and the means of capital formation suggests that Henri Pirenne and his followers have greatly exaggerated the importance of industry and long distance trade in the functional origin of the cities of medieval Flanders. The cities developed initially as centers for the reconsignment of agricultural products. Capital thus formed was invested in industrial production, which meant considerable profits through export. But greater per capita profit could be made in provisioning the urban masses with necessary wool and grain than in textile manufacturing. The fundamental division of all urban populations into basic and non-basic factors of production thus explains in large measure the rise of the Flemish cities, together with the continued prosperity of the wealthiest families after Flemish urban textiles has lost some of their export market. The locally bound nature of the cities caused them to develop in Flanders, as elsewhere, in a rough rank-size pattern, while the enormous size which foreign capital made possible for Ghent, Bruges, and Ypres enabled the great cities to exercise disproportionate political power, even as they transcended Flanders proper as an economic region.

Type
Histoire Urbaine
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1978

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References

Notes

1. Discussion fondée sur ma compilation du travail de Gysseling, M., Toponymisch Woordenboek van België, Nederland, Luxemburg, Noord-Frankrijk en West Duitsland (voor 1226), Bruxelles, 1960 Google Scholar. Les données sur la superficie territoriale des communes proviennent d'Eugène de Seyn, Geschied- en Aardrijkskundig Woordenboek der Belgische Gemeenten, 2 vol., 2e édition, Turnhout, s.d. ; du fait que le profil de la côte a constamment changé, j'ai reporté sur une carte contemporaine les étapes chronologiques du peuplement.

2. Calculs effectués d'après Gysseling, M. et Koch, A. C. F., Diplomata belgica ante millesimum centisimum scripta, 1, 60-61, Bruxelles, 1950 Google Scholar, qui se basent sur une superficie du bunuarium d'environ 1,25 h. Le suffixe -inge ou -inga suggère un site de peuplement germanique avant l'extension de la colonisation par Saint-Bertin.

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5. Tout comme Gand, Termonde était située sur le plus petit des deux cours d'eau qui la desservaient, la Dendre en l'occurrence. Son expansion, comme celle de Gand, se faisait en direction de la source de ses approvisionnements. L'Escaut ne touchait à la ville qu'à sa limite nord.

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7. On trouvera dans de Smet, J., «Le dénombrement des foyers en 1469 », Bulletin de la Commission royale d'histoire, XCIX (1935), pp. 105150 CrossRefGoogle Scholar, les totaux des foyers par paroisses, mais non la publication des documents proprement dits.

8. Voir le livre-terrier de l'abbaye Saint-Bavon de Gand, Archives de l'État à Gand, R. 43. fol. 18-19 r°, 20 v°-25 r°, 16 r°-175. En un siècle, le déclin démographique aurait atteint 68 % au village de Kluizen, R. 43, fol. 72 v°-74 r°.

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12. Discussion fondée sur Verhulst, A., «Die Fruhgeschichte der Stadt Gent», dans Die Stadt in der europaïschen Geschichte. Festschrift Edith Ennen, Bonn, 1972, pp. 108137 Google Scholar, travail qui supplante les publications antérieures.

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15. Pour la période la plus ancienne, les pourcentages sont ceux de l'année fiscale 1325-1326, mais ils présentent peu de variations jusqu'à la fin de la levée de l'impôt, en 1333-1334. Sources utilisées pour ce tableau : Espinas, G. et Pirenne, H. (éditeurs), Recueil de documents relatifs à l'histoire de l'industrie drapière en Flandre, 4 vol., Bruxelles, 1906-1924, t. II, pp. 436453, 504-510Google Scholar; Vuylsteke, J. (édit.), Gentche Stads- en Baljuwsrekeningen, 1280-1336, Gand, 1900, pp. 407408 Google Scholar. Les calculs sont les miens.

16. van Werveke, A. (édit.), Gentse Stads- en Baljuwsrekeningen (1351-1364), Bruxelles, 1970, pp. 290291 Google Scholar. J'ai réparti les ateliers par paroisses et fait les calculs appropriés.

17. Source utilisée pour ce tableau : de Potter, F. (édit.), Petit cartulaire de Gand, Gand. 1885, pp. 321323.Google Scholar

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40. de Pauw et Vuylsteke, Ibid., t. I, pp. 275-276.

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42. de Pauw et Vuylsteke, Rekeningen, cité par Espinas et Pirenne, Recueil, t. II, p. 624.

43. van Werveke, Lakenproduktie, p. 12.

44. En 1362-1363, l'accise de la tourbe rapporta 2 880 livres à la ville, alors que l'ensemble des taxes sur les textiles, essentiellement ceux vendus sur place, ne valut qu'un peu moins de 3 880 livres. van Werveke, Rekeningen, pp. 546-548.

45. Les rentes perçues sur des parcelles urbaines autour du Hudevettershoek, occupées principalement par de petits logements (Gariten), s'élevaient en moyenne, en 1330, à 11 sols 6 deniers parisis, soit à peine 1 sol gros tournois. Des chiffres plus représentatifs, probablement, proviennent du quartier entourant le Schaapbrug, dans la paroisse St-Jacques, où les foulons étaient nombreux : les rentes y atteignaient un niveau moyen de 1 livre 1 sol 8 deniers par., soit 2 sols 1 denier gr. t. Ce n'était là de toute façon qu'une petite partie du revenu annuel d'un maître-artisan occupé à plein temps, comme on l'a vu. Chiffres tirés de Vuylsteke, Rekeningen, pp. 740-745.

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47. Le problème des investissements fonciers à la campagne par les bourgeois flamands est étudié en détail dans Nicholas, D., Town and Countryside : Social, Economie and Political Tensions in Fourteenth-Century Flanders, Bruges, 1971, pp. 267329.Google Scholar

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49. Cette formule s'exprime par où r désigne le rang d'imporr tance d'une ville dans sa région en fonction de sa dimension ; nr la population d'une ville atteignant un rang r dans sa région, et C la dimension de la plus grande ville de la région. C'est l'occasion de considérer les théories du professeur Russell, dont le travail suscite de ma part respect et admiration, même lorsque je suis forcé d'en débattre certains points. Il me semble qu'il a tendance à jongler avec les populations des villes d'une région économique en vue d'appliquer sa formule rang-dimension, et que, lorsqu'il ne trouve pas le nombre requis de villes d'un rang convenable à l'intérieur d'une région, il agrandit simplement cette dernière. Ainsi, dans Médiéval Régions, pp. 112-121, il étudie une région économique dont Gand est la métropole pilote. Cette région englobe selon lui la Picardie et l'Artois, ce qui se justifie pour la fin du Moyen Age (mais non pour la période antérieure au XIIe siècle), mais aussi un territoire qui s'étend vers le sud jusqu'à Reims, vers l'est jusqu'à Cologne et Aix-la-Chapelle, et vers le nord jusqu'en Hollande. Il est certain que les villes flamandes commerçaient avec ces régions, mais également avec l'Italie et la Castille. D'autre part, pour échelonner les villes suivant le chiffre de leur population, à l'intérieur d'une région donnée, il utilise des statistiques de 1356 pour Gand, de 1340 pour Bruges, mais de 1412 pour Ypres, date à laquelle cette dernière ville avait connu le déclin depuis plus d'un siècle. Or, aucun correctif n'est envisagé. Le professeur Russell estime également la population de ces régions à un total de 1,5 million, ce qui à mon avis est beaucoup trop peu.