Published online by Cambridge University Press: 26 July 2017
Fruit des relations fécondes nouées depuis quelques années par l'histoire et l'anthropologie, l'étude des rituels monarchiques s'est considérablement développée. Un intérêt renouvelé a été porté aux recherches classiques d'E. Kantorowicz et de Marc Bloch et, sous l'influence des enquêtes de Clifford Geertz en particulier, divers travaux novateurs ont été engagés sur les aspects rituels des symboliques du pouvoir. Dans de courtes observations au sujet du charisme royal, Geertz a comparé les apparitions publiques des souverains dans l'Angleterre élisabéthaine, à Java au 14e siècle et au Maroc au 19e siècle ; il a attiré l'attention sur quelques modèles de « formes symboliques structurées » par lesquelles les élites dirigeantes « expriment le fait qu'elles sont bien les dirigeants authentiques ». D'après lui, dans toutes les sociétés à organisation complexe, de telles formes symboliques —un ensemble de récits par exemple, de cérémonies, de médailles ou autres accessoires— caractérisent le centre comme centre, légitiment l'existence des dominants et ordonnent leur comportement. Cela ne concerne pas seulement les sociétés traditionnelles prémodernes, mais également l'ensemble des Etats-nations modernes et contemporains.
From the beginning of the Meiji dynasty, Japanese leaders set up new monarchic rituals designed to create a new bond between the emperor and his people. Little by little, the emperor is exposed to the public eye before a people in turn indifferent, festive, fervent or interested, while the local authorities offer up the image of a people in the process of becoming “civilized”. Through such official rituals, it is the very process of the creation of a State and of a modem nation which is being staged in which the role of the emperor is “invented” in its new function—he represents the legitimation of modernity.
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