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Le Livre du désert: La vision du monde d’un lettré musulman de l’Ouest saharien au xixe siècle
Published online by Cambridge University Press: 13 August 2019
Résumés
Cet article propose une analyse du Livre du désert (Kitāb al-bādiya), un traité de droit composé par Muḥammad al-Māmī (m. 1282/1865), un lettré musulman originaire des déserts du Tiris dans l’actuelle Mauritanie. Dans son ouvrage, l’auteur réfléchit sur l’adaptation de la charia – la loi religieuse de l’islam – aux besoins des populations pastorales de l’Ouest saharien : comment s’approprier un système normatif a priori insensible aux contextes nomades, étant donné que celui-ci postule l’autorité d’un État dirigé par un souverain islamique (imām) comme garant de son implémentation et suppose la ville comme cadre de l’exercice de la justice ? L’article restitue les différents contextes dans lesquels s’inscrit le propos d’al-Māmī : celui d’un notable religieux à la fois engagé dans les luttes de pouvoir entre groupes nomades et fervent partisan des mouvements de djihad en Afrique de l’Ouest aux xviiie et xixe siècles, celui d’un jurisconsulte malikite qui pense sa société dans le cadre du droit musulman postclassique, celui d’un bédouin s’interrogeant sur les implications juridico-religieuses de la distance culturelle qui sépare son monde de celui des sédentaires. Tout l’enjeu est de remettre en question les notions de centre/périphérie et de « déclin » postclassique qui continuent à structurer le champ de l’histoire intellectuelle de l’islam.
Abstracts
This article provides an analysis of the Book of the Desert (Kitāb al-Bādiya), a nineteenth-century legal treatise written by Muḥammad al-Māmī (d. 1282/1865), a Muslim scholar from the Tiris desert in present-day Mauritania. In his book, the author reflects on the adaptation of sharia—the religious law of Islam—to the needs of pastoral populations in the western Sahara: how to embrace a normative system that at first glance seems incompatible with nomadic ways of life, given that it presupposes the existence of a state governed by an Islamic ruler (imām) and considers the city the natural environment for legal institutions? Challenging the narratives of center-periphery relationships and the so-called post-classical “decline” that continue to structure the field of Islamic intellectual history, this article seeks to explore the different contextual layers of al-Māmī’s reasoning as a scholar: that of a religious notable deeply involved in the struggle for power among nomadic groups and a fervent supporter of the jihad movements in West Africa over the eighteenth and nineteenth centuries; that of a Muslim jurist of the mālikī school who approached his society from the perspective of Islamic legal thought; that of a Bedouin preoccupied with the legal and religious implications of the cultural gap separating his world from that of urban dwellers.
- Type
- Écrire l’histoire de l’islam moderne et contemporain
- Information
- Copyright
- © Éditions de l'EHESS
Footnotes
Les matériaux exposés dans cet article ont été recueillis lors d’un séjour de recherche en Mauritanie en novembre 2016. Que Mohamedou Meyine, Ahmed Maouloud Eida El-Hilal, Abdel Wedoud dit Deddoud Ould Abdellahi, Mohammed el-Barnaoui et al-Tijani Ould Abdel Hamid trouvent ici le témoignage de ma gratitude pour leur aide et leur soutien. Je tiens également à remercier Camille Lefebvre et Augustin Jomier pour la richesse de leurs remarques sur une première version de cet article.
References
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2 Voir Gellner, Ernest, Muslim Society, Cambridge, Cambridge University Press, 1981Google Scholar, à qui nous devons sans doute la version la plus élaborée de cette théorie.
3 Le terme « charia » désigne la normativité juridico-religieuse contenue dans les sources de la révélation islamique, alors que la notion de fiqh réfère à la fois à la science s’attachant à expliciter cette normativité et au système de normes et de règles né de ces efforts d’explicitation et d’interprétation. Voir Johansen, Baber, Contingency in a Sacred Law: Legal and Ethical Norms in the Muslim Fiqh, Leyde, Brill, 1999Google Scholar ; Schacht, Joseph, Introduction au droit musulman, trad. par Kempf, P. et Turki, A. M., Paris, Maisonneuve et Larose, [1964] 1983Google Scholar ; Weiss, Bernard G., The Spirit of Islamic Law, Athens, University of Georgia Press, 2006Google Scholar.
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6 L’école malikite remonte à l’enseignement du juriste médinois Mālik b. Anas (m. 179/795). Elle s’est développée notamment dans l’Occident musulman et en Égypte.
7 Nous avons utilisé l’édition publiée par le Centre des études sahariennes à Rabat, qui reprend celle réalisée par l’association des descendants de Muḥammad al-Māmī en 2007 : al-Shaykh Muḥammad al-Māmī b. al-Bukhārī al-Bariki, Kitāb al-bādiya wa nuṣūṣ ukhrā, Rabat, Publications du Centre des études sahariennes, 2014 (ci-après Kitāb al-bādiya).
8 Il existe deux monographies en arabe consacrées à al-Māmī et à son œuvre : Muḥammad Wuld Aḥmad al-Barnawi, Al-khilāf wa’l-ikhtilāf wa’l-istikhlāf aw al-ʿurf wa’l-sharʿ wa’l-sulṭa al-siyāsiya fī’l-janūb al-gharbī lil’-gharb al-islāmī bidāyat al-qarn al-tāsiʿʿashara. Muḥāwala ḥafr ḥawla fikr al-shaykh Muḥammad al-Māmi [sic] (1865-1780), Nouakchott, Institut Sidi Abdalla Ould el Fadhel pour la recherche scientifique, 2010 ; Id., Al-shaykh Muḥammad al-Māmi [sic] b. al-Bukhārī : al-walī, al-ʿālim, al-mujaddid, Nouakchott, s. n., 2012. Nous tenons à remercier chaleureusement Mohamed Ould Barnaoui de nous avoir offert un exemplaire de chacun de ces livres.
9 Il a notamment transposé en dix mille vers le principal manuel du droit malikite de l’époque, le Mukhtaṣar, du juriste égyptien Khalīl b. Iṣḥāq al-Jundī (m. 767/1374). La pratique de la versification, très répandue dans tout l’espace sahélo-saharien, vise à faciliter la mémorisation (ḥifẓ) de ce type de texte, ce qui à la fois constitue l’idéal de l’éducation du temps et répond aux contraintes imposées par la rareté du papier dans la région. Sur le curriculum des lettrés sahélo-sahariens, voir Bruce S. Hall et Charles C. Stewart, « The Historic ‘Core Curriculum’ and the Book Market in Islamic West Africa », in G. Krätli et G. Lydon, The Trans-Saharan Book Trade…, op. cit., p. 109-174.
10 Abdel Wedoud Ould Cheikh, « Théologie du désordre. Islam, ordre et désordre au Sahara », L’année du Maghreb, 7, 2011, p. 61-77. L’anthropologue a mis en perspective l’inscription du texte et de son auteur dans le contexte sociopolitique de la première moitié du xixe siècle en étudiant la représentation de l’espace ouest-saharien chez al-Māmī comme une terre d’anarchie (bilād al-sāʾiba), déchirée par les rivalités entre les différents groupes nomades.
11 Abdel Wedoud Ould Cheikh, « De quoi le Sahara est-il le nom ? Images du Sahara et des Sahariens dans Kitāb al-bādiya d’al-Shaykh Muhammad al-Mâmi », colloque « Le Sahara, lieux d’histoire et espace d’échanges », Centre des études sahariennes, 2016, p. 9. Nous remercions l’auteur de nous avoir aimablement communiqué le manuscrit de sa communication.
12 Michel de Certeau, L’écriture de l’histoire, Paris, Gallimard, 1975, p. 27-31.
13 Rainer Osswald, Die Handelsstädte der Westsahara. Die Entwicklung der arabisch-maurischen Kultur von Šinqīṭ, Wādān, Tīšīt und Walāta, Berlin, D. Reimer, 1986 ; Abdel Wedoud Ould Cheikh, « Nomadisme, Islam et pouvoir dans la société maure précoloniale (xie siècle-xixe siècle). Essai sur quelques aspects du tribalisme », thèse de doctorat, Université Paris Descartes, 1985 ; Id., Éléments d’histoire de la Mauritanie, Nouakchott, Institut mauritanien de recherche scientifique, 1991.
14 Hall, Bruce S., A History of Race in Muslim West Africa, 1600-1960, Cambridge, Cambridge University Press, 2011CrossRefGoogle Scholar.
15 Il s’agit d’un espace s’étendant de l’Oued Noun au Maroc jusqu’à la vallée du Sénégal, du littoral atlantique jusqu’à l’Azaouad au nord de l’actuel Mali. Voir Khalīl al-Naḥwi, Bilād Shinqīṭ al-manāra wa’l-ribāṭ. ʿArḍ li’l-ḥayāt al-ʿilmiyya wa’l-ishāʿ al-thaqāfī wa’l-jihād al-dīnī min khilāl al-jāmiʿāt al-badawiya al-mutanaqila (al-maḥāḍir), Tunis, al-Munaẓẓama al-ʿarabiyya li-tarbiya wa’l-thaqāfa wa’l-ʿulūm, 1978, p. 24-56.
16 Voir notamment les travaux de Pierre Bonte, Timothy Cleaveland, Sophie Caratini, Abdel Wedoud Ould Cheikh, Bruce Hall, Rainer Osswald, Ulrich Rebstock, Ghislaine Lydon, Ann McDougall, Muhammad Ould Saad, Charles Stewart.
17 Nous avons décidé de ne pas recourir à la traduction conventionnelle du terme qabīla par « tribu » afin de mieux préserver les spécificités du discours lettré musulman, et lui avons préféré celui de « formation lignagère ».
18 Muhammed Al Muhtar W. As-sa’d, « Émirats et espace émiral maure. Le cas du Trārza aux xviiie-xixe siècles », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, 54, 1989, p. 53-82 ; Pierre Bonte, L’émirat de l’Adrar mauritanien. Harîm, compétition et protection dans une société tribale saharienne, Paris, Karthala, 2008 ; A. W. Ould Cheikh, Éléments d’histoire de la Mauritanie, op. cit. ; Raymond A. Taylor, « L’émirat pré-colonial et l’histoire contemporaine en Mauritanie », Annuaire de l’Afrique du Nord, 38, 1999, p. 53-69.
19 Il s’agit d’un phénomène qui n’est pas propre à l’Ouest saharien mais qui est répandu un peu partout dans l’Occident musulman, y compris dans le monde touareg, en milieu fulbé et chez les communautés ibadites. Voir Fanny Colonna, « Saints furieux et saints studieux ou, dans l’Aurès, comment la religion vient aux tribus », Annales HSS, 35-3/4, 1980, p. 642-662 ; Jocelyne Dakhlia, L’oubli de la cité. La mémoire collective à l’épreuve du lignage dans le Jérid tunisien, Paris, La Découverte, 1990 ; Augustin Jomier, « Un réformisme islamique dans l’Algérie coloniale. Oulémas ibadites et société du Mzab (c. 1880-c. 1979) », thèse de doctorat, Université du Maine, 2015 ; Harry Thirwall Norris, The Tuaregs: Their Islamic Legacy and Its Diffusion in the Sahel, Warminster, Aris and Phillips, 1975 ; I. Warscheid, Droit musulman et société au Sahara prémoderne…, op. cit., p. 28-54.
20 Acloque, Benjamin, « De la constitution d’un territoire à sa division. L’adaptation des Ahl Bârikalla aux évolutions sociopolitiques de l’Ouest saharien (xviie-xxie siècles) », Canadian Journal of African Studies/Revue canadienne des études africaines, 48-1, 2014, p. 119-143CrossRefGoogle Scholar. Le terme Gibla ou Guebla, qui fait référence à la direction de la prière vers la Mecque (qibla), désigne le Sud de l’actuelle Mauritanie, les régions du Trarza et du Brakna au nord du fleuve Sénégal.
21 Curtin, Philip D., « Jihad in West Africa: Early Phases and Interrelations in Mauritania and Senegal », The Journal of African History, 12-1, 1971, p. 11-24CrossRefGoogle Scholar ; A. W. Ould Cheikh, « Nomadisme, Islam et pouvoir… », op. cit. ; Robinson, David, « The Islamic Revolution of Futa Toro », The International Journal of African Historical Studies, 8-2, 1975, p. 185-221CrossRefGoogle Scholar.
22 Kitāb al-bādiya, p. 228.
23 A. W. Ould Cheikh, « De quoi le Sahara est-il le nom ?… », art. cit.
24 A. W. Ould Cheikh, « Théologie du désordre… », art. cit., p. 66.
25 Lovejoy, Paul E., Jihād in West Africa during the Age of Revolutions, Athens, Ohio University Press, 2016.Google Scholar
26 L’ouvrage de référence reste celui de Robinson, David, The Holy War of Umar Tal: The Western Sudan in the Mid-Nineteenth Century, Oxford, Clarendon Press, 1985Google Scholar.
27 Berque, Jacques, « Les hilaliens repentis ou l’Algérie rurale au xve siècle d’après un manuscrit jurisprudentiel », Annales ESC, 25-5, 1970, p. 1325-1353Google Scholar ; Binay, Sarah, Die Figur des Beduinen in der arabischen Literatur 9.-12. Jahrhundert, Wiesbaden, L. Reichert, 2006Google Scholar ; Leder, Stefan, « Nomadische Lebensformen und ihre Wahrnehmung im Spiegel der arabischen Terminologie », Die Welt des Orients, 34, 2004, p. 72-104Google Scholar ; Voguet, Élise, « Dissidence affirmée ou rejet codifié de la Umma. Badawî et ‘arab dans les Nawâzil Mâzuna », Alfa. Maghreb et sciences sociales, 2006, p. 147-157.Google Scholar
28 Kitāb al-bādiya, p. 175.
29 Bauer, Thomas A., Die Kultur der Ambiguität. Eine andere Geschichte des Islam, Francfort-sur-le-Main, Verlag der Weltreligionen, 2011, p. 20-24Google Scholar.
30 Jackson, Sherman A., Islamic Law and the State: The Constitutional Jurisprudence of Shihāb al-Dīn al-Qarāfī, Leyde, Brill, 1996Google Scholar.
31 Coulson, Noel James, A History of Islamic Law, Édimbourg, University Press, 1964Google Scholar ; Linant de Bellefonds, Yvon, Traité de droit musulman comparé, Paris, Mouton, 1965-1973, 3 vol.Google Scholar ; J. Schacht, Introduction au droit musulman, op. cit. ; B. Johansen, Contingency in a Sacred Law…, op. cit., p. 42-72 ; Messick, Brinkley, The Calligraphic State: Textual Domination and History in a Muslim Society, Berkeley, University of California Press, 1996, p. 54-72Google Scholar.
32 Kitāb al-bādiya, p. 131.
33 Schacht, Joseph, « Classicisme, traditionalisme et ankylose dans la loi religieuse de l’Islam », in Brunshvig, R. et Von Grunebaum, G. E. (dir.), Classicisme et déclin culturel dans l’histoire de l’Islam, Paris, Maisonneuve et Larose, 1977, p. 141-166, ici p. 141Google Scholar.
34 Il s’agit de la méthodologie développée par les juristes musulmans entre le viiie et le ixe siècle pour dériver des normes à partir de la révélation islamique. L’expression « fondement » (aṣl, pl. uṣūl) renvoie aux quatre sources de normativité sur lesquelles les juristes musulmans se sont accordés : le Coran, la tradition prophétique (sunna), le raisonnement analogique (qiyās) et le consensus (ijmāʿ). Le terme ijtihād désigne la maîtrise de cette méthodologie qui permet au mujtahid de dériver des normes de manière autonome, à la différence du muqallid qui doit se contenter d’appliquer les règles et les principes forgés par les mujtahid-s de son école. Au cours des siècles, les juristes musulmans ont forgé toute une hiérarchie distinguant plusieurs types d’ijtihād et de taqlīd. Voir Hallaq, Wael B., A History of Islamic Legal Theories: An Introduction to Sunnī Uṣūl al-Fiqh, Cambridge, Cambridge University Press, 1999Google Scholar. Sur les hiérarchies entre juristes musulmans : Calder, Norman, « Al-Nawawī’s Typology of Muftīs and Its Significance for a General Theory of Islamic Law », Islamic Law and Society, 3-2, 1996, p. 137-164CrossRefGoogle Scholar.
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37 Kitāb al-bādiya, p. 131.
38 S. A. Jackson, Islamic Law and the State…, op. cit. L’ouvrage constitue l’étude la plus approfondie de la notion du taqlīd à partir d’une lecture méticuleuse des écrits du juriste malikite égyptien Shihāb al-Dīn al-Qarāfi (m. 682/1283 ou 684/1285).
39 Kitāb al-bādiya, p. 131. Le terme « fatwa » désigne une consultation portant sur un point spécifique de la charia ou de son application. La fatwa relève d’une logique dialectique, c’est-à-dire qu’elle répond toujours à une demande explicite (istiftāʾ) formulée par un questionneur (mustaftī). L’identité de ce dernier est variable : bien que l’émission de fatwas vise avant tout, dès ses débuts au viie siècle, à encadrer l’action des juges musulmans, nombreux furent les souverains et les dignitaires politiques à s’adresser aux muftis pour légitimer leurs décisions d’un point de vue religieux. Voir Hallaq, Wael B., « From Fatwās to Furūʿ: Growth and Change in Islamic Substantive Law », Islamic Law and Society, 1-1, 1994, p. 29-65Google Scholar ; Masud, Muhammad Khalid, Messick, Brinkley et Powers, David S. (dir.), Islamic Legal Interpretation: Muftis and Their Fatwas, Cambridge, Harvard University Press, 1996Google Scholar.
40 Kitāb al-bādiya, p. 128.
41 Ibid., p. 218, par exemple. Pour comprendre l’expression, il faut savoir que le terme qawl (affirmation) désigne dans le jargon du fiqh une prise de position doctrinale.
42 Kitāb al-bādiya, p. 131.
43 Ibid., p. 132.
44 Ibid., p. 131. Al-Māmī fait référence à l’école ash‘arite qui, dans la théologie musulmane (kalām), a effectivement adopté une position médiane entre le rationalisme mu‘tazilite et les positions traditionalistes. Voir Thiele, Jan, « Between Cordoba and Nīsābūr: The Emergence and Consolidation of Ashaʿrism (Fourth-Fifth/Tenth-Eleventh Century) », in Schmidtke, S. (dir.), The Oxford Handbook of Islamic Theology, Oxford, Oxford University Press, 2016, p. 225-241Google Scholar.
45 Le terme takhrīj désigne la solution d’un cas d’espèce inédit selon la méthodologie casuistique transmise dans le cadre de l’école juridique, tandis que celui de tarjīḥ renvoie au choix entre différents avis juridiques contradictoires. Voir W. B. Hallaq, « Fatwās to Furūʿ… », art. cit., p. 51-52 ; Id., « Takhrīj and the Construction of Juristic Authority », in B. Weiss (dir.), Studies in Islamic Legal Theory, Leyde, Brill, 2002, p. 337-364 ; S. A. Jackson, Islamic Law and the State…, op. cit.
46 Kitāb al-bādiya, p. 175.
47 Sur le personnage, voir al-Tijānī Wuld ʿAbd al-Ḥamīd, Sīdī ʿAbd Allāh b. al-Ḥājj Ibrāhīm al-ʿAlawī bayna muqtaḍiyyāt al-aḥwāl fi’l-majāl wa dawāfiʿ al-raghba fī’l-tajdīd wa sadd al-firāgh, Nouakchott, Imprimerie nouvelle, 2010.
48 Sīdī ʿAbdallāh bin al-Ḥājj Ibrāhīm al-ʿAlawī al-Shinqiṭi, Ṭarad al-ḍawāl wa’l-humal ʿan al-kurūʿ fī ḥiyāḍ masāʾil al-ʿamal, Idleb, Najeebawaih Manuscripts Center, [s. d.]. Je tiens à remercier Wuld ʿAbd al-Ḥamīd de m’avoir gracieusement offert un exemplaire du livre.
49 Ibid., p. 39-44.
50 Kitāb al-bādiya, p. 99-123. Sur le genre de la ḥāshiya, voir El Shamsy, Ahmed, « The Ḥāshiya in Islamic Law: A Sketch of the Shāfiʿī Literature », Oriens: Journal of Philosophy, Theology and Science in Islamic Societies, 41-3/4, 2013, p. 289-315CrossRefGoogle Scholar.
51 Kitāb al-bādiya, p. 127.
52 Ibid., p. 147.
53 Wuld Saʿd, Muḥammad al-Mukhtār, Al-Fatāwā wa’l-tāʾrīkh. Dirāsa li-maẓāhir al-ḥayāt al-iqtiṣādiyya wa’l-ijtimaʿiyya fī Mawritāniyā min khilāl fiqh al-nawāzil, Beyrouth, Dār al-Gharb al-Islāmī, 2000Google Scholar.
54 L’auteur fait référence aux « villes-camps » (miṣr, pl. amṣār) fondées durant les grandes conquêtes des premiers siècles de l’islam, comme Bassorah, Koufa, Kairouan et Fustat, le futur Caire.
55 Kitāb al-bādiya, p. 147.
56 A. W. Ould Cheikh, « De quoi le Sahara est-il le nom ?… », art. cit., p. 8-9.
57 Kitāb al-bādiya, p. 175.
58 Ibid., p. 177.
59 Ibid., p. 176 et 205.
60 Touati, Houari, « Le prince et la bête. Enquête sur une métaphore pastorale », Studia Islamica, 83-1, 1996, p. 101-119CrossRefGoogle Scholar.
61 Kitāb al-bādiya, p. 177. Voir aussi A. W. Ould Cheikh, « Théologie du désordre… », art. cit., p. 65.
62 Boubrik, Rahal, « Les fuqahâ’ du prince et le prince des fuqahâ’. Discours politique des hommes de religion au pays maure (Mauritanie, xviie-xixe siècle) », Afrique et histoire, 7-1, 2009, p. 153-172Google Scholar ; A. W. Ould Cheikh, « Théologie du désordre… », art. cit., p. 67 ; I. Warscheid, Droit musulman et société au Sahara prémoderne…, op. cit., p. 158-163.
63 Opwis, Felicitas, Maṣlaḥa and the Purpose of the Law: Islamic Discourse on Legal Change from the 4th/10th to 8th/14th Century, Leyde, Brill, 2010CrossRefGoogle Scholar.
64 Kitāb al-bādiya, p. 212 : « zāwiya al-bayt lā budda lahā min suwwar ». Pour un aperçu de ce système de fiscalité, voir P. Bonte, L’émirat de l’Adrar mauritanien…, op. cit. ; M. M. W. As-sa’d, « Émirats et espace émiral maure… », art. cit.
65 Kitāb al-bādiya, p. 214.
66 Kitāb al-bādiya, p. 214, rapporte une fatwa d’Ibn al-Aʿmash au sujet de la répartition des charges parmi les habitants de l’oasis de Ouadane. La même pratique s’observe chez les juristes des oasis du Grand Touat dans le Sud algérien aux xviiie et xixe siècles. Voir I. Warscheid, Droit musulman et société au Sahara prémoderne…, op. cit., p. 102-105.
67 Kitāb al-bādiya, p. 214.
68 A. W. Ould Cheikh, « Théologie du désordre… », art. cit., p. 64 ; Abdel Wedoud Ould Cheikh et Bernard Saison, « Vie(s) et mort(s) de al-Imām al-Ḥaḍrāmī. Autour de la postérité saharienne du mouvement almoravide (11e-17e s.) », Arabica, 34-1, 1987, p. 48-79, ici p. 66-71.
69 Chaumont, Éric, « ‘God Has Ordained Excellence in All Things: When You Put to Death, Do So after a Decorous Manner’: The Implementation of Mandatory Penalties (al-ḥudūd) in Muslim Law », in Berthelot, K. et Morgenstern, M. (dir.), The Quest for a Common Humanity: Human Dignity and Otherness in the Religious Traditions of the Mediterranean, Leyde, Brill, 2011, p. 327-347CrossRefGoogle Scholar ; B. Johansen, Contingency in a Sacred Law…, op. cit., p. 349-420 et 421-433 ; Peters, Rudolph, Crime and Punishment in Islamic Law: Theory and Practice from the Sixteenth to the Twenty-First Century, Cambridge, Cambridge University Press, 2005Google Scholar.
70 Gleave, Robert, « Public Violence, State Legitimacy: The Iqamat al-hudud and the Sacred State », in Lange, C. et Fierro, M. (dir.), Public Violence in Islamic Societies: Power, Discipline, and the Construction of the Public Sphere, 7th-19th Centuries CE, Édimbourg, Edinburgh University Press, 2009, p. 256-275Google Scholar.
71 B. Johansen, Contingency in a Sacred Law…, op. cit., p. 189-218, présente une excellente analyse de cette différenciation à partir du cas de l’école hanéfite.
72 Eltantawi, Sarah, Shari’ah on Trial: Northern Nigeria’s Islamic Revolution, Oakland, University of California Press, 2017CrossRefGoogle Scholar.
73 Kitāb al-bādiya, p. 177. Nous n’avons malheureusement pas réussi à localiser Jawluma.
74 Ibid., p. 177.
75 Ibid., p. 218.
76 Ibid., p. 175.
77 Peirce, Leslie P., Morality Tales: Law and Gender in the Ottoman Court of Aintab, Berkeley, University of California Press, 2003, p. 208Google Scholar.
78 B. Johansen, Contingency in a Sacred Law…, op. cit., p. 172-188. Par exemple, la validité d’un contrat n’est pas affectée par les considérations concernant la moralité des parties s’il s’agit de personnes réputées « pieuses » (ṣāliḥ) ou, au contraire, « débauchées » (fāsiq). Seule compte la question de savoir si la transaction a été conforme aux normes de l’école juridique et si les parties étaient en pleine possession de leur capacité juridique. En revanche, certains actes comme le pillage ou l’abus de pouvoir peuvent entraîner à la fois une condamnation éthico-morale et la perte de la capacité juridique, un sujet jurisprudentiel très présent dans les recueils de fatwas ouest-sahariens, dans la mesure où les groupes guerriers ḥassān sont les premiers visés. Voir R. Osswald, Schichtengesellschaft und Islamisches Recht…, op. cit.
79 Kitāb al-bādiya, p. 175.
80 Ibid., p. 176. Voir Berque, Jacques, Al-Yousi. Problèmes de la culture marocaine au xviie siècle, Paris, Mouton, 1958Google Scholar.
81 Kitāb al-bādiya, p. 177.
82 Ibid., p. 223.
83 Éric Chaumont, « La notion de ‘awra selon Abû l-Ḥasan ‘Alî b. Muḥammad b. al-Qaṭṭān al-Fâsî (m. 628/1231) », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, 113/114, 2006, p. 109-123, ici p. 113 : « La ‘awra d’une personne désigne de manière générale les parties de son corps qu’elle ne peut dévoiler, qu’elle ne peut laisser apparaître et qu’autrui ne peut regarder. » Voir aussi Johansen, Baber, « The Valorization of the Human Body in Muslim Sunni Law », in Stewart, D. J., Johansen, B. et Singer, A. (dir.), Law and Society in Islam, Princeton, Markus Wiener, 1996, p. 71-112Google Scholar.
84 Kitāb al-bādiya, p. 219.
85 R. Osswald, Schichtengesellschaft und Islamisches Recht…, op. cit.
86 Kitāb al-bādiya, p. 219.
87 Ibid., p. 220. Sur l’institution du muḥtasib, voir Stilt, Kristen, Islamic Law in Action: Authority, Discretion, and Everyday Experiences in Mamluk Egypt, Oxford, Oxford University Press, 2011Google Scholar.
88 Kitāb al-bādiya, p. 220 : « al-amr bi’l-maʿrūf wa’l-nahī ʿan al-munkar ». Voir Cook, Michael, Commanding Right and Forbidding Wrong in Islamic Thought, Cambridge, Cambridge University Press, 2006Google Scholar.
89 Kitāb al-bādiya, p. 220.
90 Gustav E. Von Grunebaum, L’identité culturelle de l’Islam, trad. par R. Stuvéras, Paris, Gallimard, [1969] 1973, p. 53 : « Et en outre, le succès de la période ‘médiévale’ ne dura pas fort longtemps. Au xviiie siècle, la société musulmane, partout et en tout champ d’activité, connaissait une grave décadence. » Des propositions similaires se retrouvent dans des publications récentes : Diner, Dan, Lost in the Sacred: Why the Muslim World Stood Still, trad. par Rendall, S., Princeton, Princeton University Press, [2005] 2009Google Scholar ; Kuran, Timur, The Long Divergence: How Islamic Law Held Back the Middle East, Princeton, Princeton University Press, 2010Google Scholar.
91 Warscheid, Ismail, « The Persisting Spectre of Cultural Decline: Historiographical Approaches to Muslim Scholarship in the Early Modern Maghreb », Journal of the Economic and Social History of the Orient, 60-1/2, 2017, p. 142-173CrossRefGoogle Scholar.
92 Pour un regard critique sur cet arabocentrisme, voir Bashir, Shahzad, « On Islamic Time: Rethinking Chronology in the Historiography of Muslim Societies », History and Theory, 53-4, 2014, p. 519-544CrossRefGoogle Scholar.
93 Pour d’autres usages de la « République des Lettres » dans le champ des études arabo-islamiques, voir al-Musawi, Muhsin J., The Medieval Islamic Republic of Letters: Arabic Knowledge Construction, Notre Dame, University of Notre Dame Press, 2015CrossRefGoogle Scholar ; İlker Binbas, Evrim, Intellectual Networks in Timurid Iran: Saraf al-Dīn ‘Ali Yazdī and the Islamicate Republic of Letters, Cambridge, Cambridge University Press, 2016CrossRefGoogle Scholar. Sur les réseaux de lettrés saharo-maghrébins aux périodes modernes et contemporaines, voir Jomier, Augustin, « Les réseaux étendus d’un archipel saharien. Les circulations de lettrés ibadites (xviie-années 1950) », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 63-2, 2016, p. 14-39CrossRefGoogle Scholar ; Stefan Reichmuth, « Murtaḍā al-Zabīdī (1732-91) and the Africans: Islamic Discourse and Scholarly Networks in the Late Eighteenth Century », in S. S. Reese (dir.), The Transmission of Learning in Islamic Africa, op. cit., p. 121-153 ; Stewart, Charles C., « Southern Saharan Scholarship and the Bilād al-Sūdān », The Journal of African History, 15-1, 1976, p. 73-93CrossRefGoogle Scholar ; I. Warscheid, Droit musulman et société au Sahara prémoderne…, op. cit., p. 28-57.
94 Osswald, Rainer, Sklavenhandel und Sklavenleben zwischen Senegal und Atlas, Wurtzbourg, Ergon Verlag, 2016Google Scholar.
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