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Faillis en Anjou au XVIIIe siècle. Contribution à l'histoire économique d'une province

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

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De l'activité économique de l'Anjou, peu connue, mal connue — parce que les sources en sont rares et disparates, parce que probablement aussi elle n'a pas fourni une ample matière à enquêtes et rapports de la bureaucratie monar-chique — les archives de la juridiction consulaire d'Angers permettent de reconstituer un secteur : celui du commerce, vu à travers les bilans de faillites déposés au greffe. Moins visible, moins tangible que la production (artisanale et cooporative, ou manufacturière et industrielle), le commerce mérite notre attention. Comment s'opérait la distribution ? par quels intermédiaires et de quelle importance ? combien de gens vivaient du commerce ? et quelle place revenait à ce secteur dans la vie économique de l'Anjou ? Autant de questions qu'on aimerait poser aux bilans de faillites. Mais, comme l'écrivait H. Hauser, « les affaires se laissent beaucoup mieux saisir à l'état de crise que dans leur vie normale » : ce que nous saisissons ici, c'est l'anormal. Peut-on considérer comme norme ce qui reste au vrai anomalie ?

Type
Les Domaines de L'Histoire (Comptes rendus)
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1970

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References

1. Il suffit de rappeler l'absence d'étude sur le textile choletais. En dehors d'un court article de V. Dauphin, « Le textile dans les Mauges avant 1789 », Mém. Soc. Se. Lettres Cholet, 1954, pp. 23-42, F. Dornic a tiré d'un document de 1751 (A.N. F 12, 553) une carte des métiers battants de la manufacture de Cholet, Histoire de l'Anjou, P.U.F., 1961, p. 82. Sur la date approximative de la création de la manufacture de Cholet, cf. la mise au point de R. FAVREAU, « Mémoires sur le commerce en Anjou, 1692 », Mém. Acad. Angers, 1966, p. 75.

2. Cf. F. Lebrun : « Les grandes enquêtes statistiques des XVIIe et XVIIIe siècles sur la généralité de Tours », Ann. Bretagne, 1965.

3. A.D.M. et L., VI B. Sur cette juridiction consulaire, fondée en mars 1564, cf. A. Villiers, « Notes sur la J.C. en Anjou 1566-1884 », Rev. Anjou, 1884, pp. 121-151. Importante bibliographie, toujours valable, sur les consulats dans la thèse de droit de Logie, P., Les institutions de commerce à Amiens au XVIIIe siècle, Amiens, 1951, 159 p.Google Scholar

4. H. Hauser, « Une source de l'histoire du commerce et des banques : le fond des faillites », A.H.E.S., 1931, pp. 542 sq.

page 478 note 1. A.D. M. et L. VI B 216 à 259. Selon le Manuel historique, géographique et politique des négociants, ou Encyclopédie portative de la théorie et de la pratique du Commerce, Lyon, chez J. M. Bruyset, 1762, in-12, t. Il, p. 5, « l'une des circonstances qui caractérisent la faillite… est lorsque le débiteur a mis son bilan au greffe ». La définition que le Manuel donne de la faillite, p. 4, reprend, en l'étoffant celle du Dictionnaire Universel de Commerce de Savary deS Bruslons, nouv. éd., 1741, t. Il, coll. 852.

page 478 note 2. P. Dardel, « Crises et faillites à Rouen et dans la haute Normandie de 1740 à l'an V », R.H.E.S., pp. 53-71 ; mais il ne précise pas le nombre total des bilans déposés. P. de Saintjacob ; « Histoire économique et sociale dans les archives de la juridiction consulaire de Dijon, 1715-1789 », Bull. Soc. Hist. Mod., 1957, 12e sér., n° 4, pp. 2-10 : 360 bilans. De toute façon ces deux consulats viennent pour le nombre de faillites enregistrées, loin derrière celui de Paris (6 000 bilans d'après P. de Saint-Jacob, 8 000 d'après P. Dupieux, « Les attributions de la J. C. de Paris, 1563-1792… », Bibl. de l'École des Chartes, t. XCV, 1934, pp. 116-148).

page 478 note 3. A. Villiers, art. cit., p. 126.

page 478 note 4. Le Dictionnaire ou le Manuel (cf. ci-dessus, note 1 ) précisent bien que « par la déclaration du 13 juin 1716 tous les marchands, négociants… qui ont fait faillite sont tenus de déposer un état détaillé et certifié véritable de tous leurs effets, meubles et immeubles et de leurs dettes, comme aussi de leurs livres et registres au greffe de la J.C. du lieu, ou de la plus prochaine; faute de quoi ils ne pourront être reçus à passer avec leurs créanciers aucun contrat d'atermoyement, concordat, transaction ou autres actes »… Notre propre recherche sur les toiles imprimées à Angers au XVIIIe siècle, nous a amené à découvrir dans les minutes notariales plus d'une dizaine de bilans importants suivis d'atermoiements sans qu'aucune trace en appert dans les papiers de la J.C. Détail piquant : l'un de ces faillis qui violent les dispositions légales est le consul en exercice de l'année, fils d'ancien jugeconsul et lui-même à son second mandat consulaire (Louis Sartre, A.D. M. et L., 5 E 6 2, 1771). En 1776, dans un mémoire au garde des sceaux, les juges-consuls d'Angers protestaient contre « les notaires qui reçoivent le bilan des faillis sans que ces derniers déposent ni un état certifié de leur situation, ni les livres de leur régie » (VI B 17). Rappelons qu'un marchand failli était déchu de ses fonctions marchandes (garde-juré, consul, juge) s'il en exerçait et ne pouvait plus y prétendre (Ordonnance du Commerce, 1673, titre XI), à moins d'obtenir de la chancellerie des lettres de réhabilitation, ce qui n'arriva qu'une fois à Angers au XVIIIe siècle.

page 481 note 1. Art. cit., p. 125 (et répété par V. Dauphin, « Les J.C. d'Angers et de Saumur, 1563- 1791 », Mém. Soc. Agr. Se. Arts Angers. 1929, pp. 158-167). Vérifié par les faits, cela ne semble pas aussi clair en droit car Villiers reprend les arguments des consuls dans leurs conflits avec les juges ordinaires, notamment ceux de la sénéchaussée de Saumur (VI B 34). La jurisprudence des arrêts du Parlement de Paris rendus contre les J.C. tend à une interprétation bailliagère de leurs ressorts. Quoi qu'il en soit, à la suite de plaintes réitérées des juges ordinaires contre l'extension de la juridiction des consulats—qui souvent jugeaient «de proche en proche» et ainsi agrandissaient leur ressort — la déclaration royale du 7 avril 1759 (cf. Isambert, t. XXII, p. 283) renouvela l'article 240 de l'ordonnance de Blois «renvoyant devant les juges ordinaires les affaires de marchand à marchand des villes inférieures » et précise bien que « suivant le droit commun de notre royaume, les J.C… ne doivent avoir d'autre étendue que celle du siège royal des villes où elles sont établies ». Frappant surtout l'extension de la J.C. de Paris et rendue contre l'avis des députés du commerce, cette déclaration semble n'avoir rien changé en Anjou, car, après 1759, des faillis de Château-Gontier (en 1775-1785), de Sablé (1780) ou de Châtillon en Poitou (1778) déposent leurs bilans au greffe du consulat d'Angers. Elle entraîna des protestations vives de la plupart des consulats : des exemplaires imprimés des « représentations au roi » de vingt-huit consulats sont conservés dans les papiers de la juridiction d'Angers (VI B 13-14).

page 481 note 2. Ces autres consulats étaient ceux de Nantes (créé en 1564), de Tours (1565), de Poitiers (1566), du Mans et de Rennes (1710). En mars 1710 la monarchie avait créé vingt nouveaux consulats autant pour tenir compte du développement des causes marchandes, et donc du commerce, que pour créer de nouvelles recettes, car l'édit supprimait tous les anciens greffes des J.C. et en établissait de nouveaux, moyennant 50 000 1.1.

page 482 note 1. Selon V. Dauphin, art. cit., pp. 165-167, jusqu'en 1759, les Saumurois n'auront de cesse d'obtenir le rétablissement de la J.C. (A.N. F12 72, fol. 386; 77, fol. 137; 94, fol. 513).

En 1730, ils furent très près de réussir, comme le montrent les nombreuses démarches effectuées par la Compagnie consulaire au début de l'année 1730 : intervention près de leurs collègues de Tours, placet « au Roi et à Nos Seigneurs du Conseil », dont le texte fut distribué à tous les Conseillers d'État, texte extrêmement dur, voire méprisant à l'égard de Saumur « ville inférieure de la province d'Anjou » et de ses marchands « qui y sont en très petit nombre, la plupart simples commissionnaires et courtiers, exclus d'entrer dans les charges du Consulat », et jouant au chantage financier vis-à-vis de la Monarchie : si un consulat était établi à Saumur, les ressources financières de celui d'Angers seraient réduites, et il devrait alors demander le remboursement de « plusieurs rentes considérables créées pour fournir des finances dans les coffres de votre Majesté ». Le syndic de la Compagnie députée Paris en 1731 réussit à écarter définitivement tout danger sérieux d'un établissement concurrent à Saumur.

page 482 note 2. Le nombre de notaires à Angers baisse régulièrement au cours du XVIIIe s. (Source : Almanach d'Anjou) : Notaires apostoliques

page 482 note 3. Cf. notre article sur le recrutement consulaire : « Comment pouvait-on être juge-consul, à Angers au XVIII’ siècle ? », Ann. Bretagne. 1969.

page 482 note 4. Parmi les cent faillis d'Angers, neuf étaient membres de la compagnie consulaire.

page 483 note 1. Bibl. municipale Angers ms. 1164 : Mercuriale d'Angers. Chiffres et courbe aimablement communiqués par François Lebrun. Cf. Dauphin, V., Recherches pour servir à l'histoire des prix des céréales et du vin en Anjou sous l'Ancien Régime, Xl°-1789, Paris, 1934, in-12, 58 p.Google Scholar V. Dauphin, p. 52, donne année par année les prix « officiels » du froment et du vin, calculés d'après les registres de l'Hôtel-Dieu d'Angers, mais en francs ! et sans indiquer l'unité de mesure. Autant dire que son travail est difficilement utilisable…

page 483 note 2. Nous sommes conscients des critiques qu'on pourra faire à ce tableau. Donner la moyennearithmétique des passif et actif n'offre pour nous qu'une valeur indicative. C'est pourquoi nous y avons adjoint les maximum et minimum respectifs de passif et d'actif pour une même période. Le découpage des années semblera aussi arbitraire; nous avons pourtant cherché à respecter le rythme même du mouvement des faillites, tel que l'exprime le graphique, irrégulier dans son amplitude et dans sa durée.

page 484 note 1. Un exemple, inédit, parmi tant d'autres possibles : les lettres de Lallart, correspondant nantais des manufacturiers angevins Danton-Moreau, conservées pour la seule année 1759 (A.D. M.L., E. 2198). Ainsi celle du 4 décembre 1759, peu après la déroute de la flotte de Conflans au large de Belle-Ile : « Les misères se multiplient plus de crédit nulle facilité pour aucune négociation, on prévoit si la paix ne survient pas, les billets de crédit pour le mois de janvier; je vous conseille en ami de prendre vos arrangements en conséquence et de faire rentrer vos créances même en perdant quelques bagatelles d'escompte… »; ou celles écrites par le frère du précédent correspondant marseillais des fabricants de toiles imprimées; 26 mars 1759 « …rien n'est plus vrai que le crédit est des plus resserré, à peine ose-t-on se confier à ses meilleurs amis. Vous avez ci-joint la liste de ceux qui ont failli depuis un mois ». (Il cite 8 faillis et le montant de leurs passifs respectifs.) «…Beaucoup d'autres qui ont accommodé et plusieurs petites faillites, dont on ne parle pas. Nous sommes encore menacés des plus grandes. Dieu nous en préserve. Des fabricants de savon ont refusé de vendre à usance à bien des maisons solides. Le papier sur Paris qui abonde, perd aujourd'hui 3/4, même 1 % à court jours. La désolation règne sur la place… ».

page 485 note 1. Ni à Dijon, ni à Rouen, mais nous manquons d'autres points de comparaison, ces années 1763-1766 ne sont des années de crise. La crise se situe ou avant ou après (1760, 1768).

page 485 note 2. Cf. Labrousse, E., Esquisse du mouvement des prix et des revenus au XViil’ siècle, Paris, 1933, p. 154,Google Scholar entre 1768 et 1771, 11 généralités sur 32 sont touchées par le mouvement cyclique.

page 485 note 3. D'après V. Dauphin, Recherches… (op. cit.), p. 26; froid rigoureux en 1765, en 1767, pluies continuelles en 1768, mauvais temps en 1769. Cf. PORT, C., Questions angevines, Angers, 1884, 287 p.Google Scholar, « Les phénomènes physiques », pp. 155-216.

page 485 note 4. Dans la généralité de Tours, l'indice du prix du froment 100 en 1764, année moyenne, passe à 231 en 1769, et dans l'échelle des hausses, la généralité de Tours vient au 8e rang, sur les 11 généralités touchées, d'après E. Benattar, La crise de 1770, enquête sur les généralités de Caen, Champagne, Picardie, Montauban. D.E.S., Paris, 1963, p. 58.

page 485 note 5. V. Dauphin, Recherches… (op. cit.), p. 52.

page 485 note 6. Cf. E. Benattar, D.E.S. cité, p. 87 dans la généralité d'Amiens. Froment : 1763 = 100, Production textile : 1763 = 100, 1770 = 215,8. 1771 = 52,6.

page 485 note 7. Labrousse, Esquisse…, p. 538.

page 485 note 8. Les entrepreneurs de la manufacture de toiles imprimées de Tournemine à Angers lancent dès 1766 un appel à Trudaine pour obtenir de lui des lettres de surséance qui les mettraient à l'abri d'un dépôt de bilan, c'est-à-dire d'une faillite ouverte (A.N.F1* 572, f° 392). Accordé, ce répit eût pu amener l'entreprise à passer sans encombres le cap difficile des années 1770.

page 486 note 1. Étude en cours actuellement.

page 486 note 2. Déjà dans YEsquisse, p. 531, E. Labrousse affirmait le caractère européen de la crise de 1769-1771 — et Luthy, H., La banque protestante en France, 1961, t. Il, le redit p. 109 Google Scholar — cf. deux lettres formelles à ce sujet l'une de l'Inspecteur général des Manufactures de Rennes (A.D. l.-et-V. C 1549) citée par Labrousse ﹛op. cit., p. 541), l'autre de Trudaine à l'Inspecteur de Rouen (A.N. F12 560) citée par Benattar, p. 91.

page 486 note 3. A preuve, le bilan d'un négociant en toiles de Cholet, Jacques Braud, rédigé à Saragosse, où « les règlements royaux l'ont empêché de vendre des mouchoirs imprimés », et déposé le 12 juin 1768.

page 486 note 4. VI B. 240.

Autre originalité de ce grand négociant : son entière dépendance du crédit accordé par ses fournisseurs; toutes ses dettes commerciales sont payées par des lettres de change, ou soldées par comptes courants. Il ne manie pas d'espèces, et ne déclare rien en caisse dans son bilan. Il tient seulement une comptabilité rigoureuse des échéances, ce qui en fait à coup sûr, l'un des rares émules angevins du « parfait négociant ».

Ainsi en novembre 1769, il doit 577 000 1.1. en 128 billets échus non payés ou non entièrement acquittés, ainsi ventilés pour les mois suivants :

page 487 note 1. Les spécialistes de la distribution appellent commerce « anormal » tout ce qui n'est pas d'achat quotidien (équipement biens culturels, mobilier, etc.), par opposition au commerce « banal ».

page 488 note 1. Sur les « métiers de l'alimentation », voir du point de vue institutionnel l'article de V. Dauphin, in la Province d'Anjou, 1930 et 1932. Et l'article de C. PORT sur « Les boulangers d'Angers », Revue de l'Anjou, 1868, p. 462.

page 488 note 2. Nous aurions pu aussi bien prendre les bouchers, relativement nombreux : 16 sur 205, c'est-à-dire autant que les voituriers par eau.

page 488 note 3. Cf. du point de vue institutionnel, V. Dauphin, « Une ancienne corporation d'Angers : les fabricants de bas au métier », in R.H.E.S., 1932.

page 488 note 4. Pour comprendre l'importance des transports fluviaux en Anjou, il suffit de regarder une carte. La situation remarquable d'Angers, au centre d'un magnifique réseau hydrographique atoujours attiré l'attention des Angevins, cf. R. Favreau, art. cit., pp. 65-66. Cf. aussi le « Discours sur le Commerce d'Angers » par Viger, primé par l'Académie d'Angers en 1787, Angers, 1787, p. 6. B.M. Angers, ms. 986, Se. A. Sur les voituriers par eau, cf. F. Billacois, « La batellerie de la Loire au XVII” siècle », R.H.M.C, juillet-septembre 1964, pp. 163-190, les ouvrages plus anciens de P. Mantellier (La communauté des Marchands fréquentant…, Orléans, 1864) et D. DION, Le Val-de-Loire, Tours, 1933.

page 490 note 1. Cf. art. cité plus haut p. 482, note 3.

page 490 note 2. L'arrêt du conseil du 20 février 1752 qui casse les élections au consulat « truquées » du 7 janvier précédent mentionne dans ses attendus : « …que cette manoeuvre ayant pour objet de la part des scrutateurs d'exclure les nouveaux sujets, ce qui est contraire à l'avantage du commerce dans lequel l'espérance du consulat entretient une heureuse émulation… », VI B 23, f° 204 v°.

page 490 note 3. Cf. Manuel (op. cit.), vol. Il, p. 486 : « Négociant : différent du marchand; ce dernier se borne ordinairement à un détail mercantile, et sa science ne consiste guère qu'à savoir acheter à propos une balle de marchandises et à la revendre ensuite au détail. Le premier au contraire porte ses vues plus au loin… »

page 490 note 4. Tous les documents connus le confirment : de l'enquête de Charles de Colbert en 1664 (reproduit in Marchegay Les Archives de l'Anjou, Angers, 1843, pp. 121 -181 ) à celle de l'intendant Miromesnil en 1699 (ibid., pp. 3-97) — sur ces enquêtes, cf. art. cit. de F. Lebrun, Ann. Bretagne, 1965 — au journal de Toisonnier (B.M. Angers, ms. 1008) et aux Recherches historiques sur l'Anjou de J. Bodin (Saumur, 1832, t. Il, pp. 478-480) : « Dès qu'un marchand ou un artisan avait amassé la plus mince fortune, il abandonnait son état pour vivre de la considération alors attachée à l'état de bourgeois. » Ajoutons ce témoignage anonyme d'un vieil Angevin qui en 1831 livrait au « Journal de Maine-et-Loire » ses souvenirs sur la société angevine avant 1789 : « On comptait peu de marchands qui ne fissent le menu détail, et ils quittaient la boutique dès qu'ils avaient 1 000 écus de rente. C'était passé en maxime. » ﹛Journal de M. et L, 5 décembre 1831.) Le plus bel exemple d'ascension sociale à Angers dans la seconde moitié du XVIIIe siècle est peut-être Charles Félix Claveau, membre de la Communauté des Marchands, élu Consul en 1756, garde de la Communauté en 1760, nommé échevin en 1763, élu juge en 1773 et la même année nommé Conseiller perpétuel à l'Hôtel de Ville, proposé au mairat dès 1775 et nommé dans cette fonction par Monsieur en 1785. Le jour de son installation à l'Hôtel de Ville, il déclara « vouloir vivre noblement et faire profession des armes » (d'après Blordier-Langlois, Angers sous le régime municipal, Angers, 1843, p. 329). Le mairat d'Angers conférait en effet la noblesse, et Viger dans son Discours en 1787 critiquait vivement cette institution, responsable grandement selon lui de la « fuite » de la condition marchande vers les honneurs.

page 492 note 1. Nous suivons nos marchands qui rangeaient les contrats de constitution dans les « biens fonds ». Même si ces sommes allaient à des marchands et servaient à des opérations commerciales; pour le prêteur il s'agissait d'un placement d'un prélèvement sur le capital-marchand pour aboutir à une rente.

page 493 note 1. La banque au XVIIIe comme le dit H. Luthy est « essentiellement commerciale » et donc incapable d'assurer des ressources régulières aux entreprises, a fortori à celles qui sont de la taille du négose de nos marchands (La banque protestante en France, Sevpen, 1961, II, 343). Le Manuel (I, 316) définit ainsi la banque : « commerce d'argent qu'on fait de place en place par le moyen de lettres de change ».

page 493 note 2. VI B 259 et 5 E379.

page 494 note 1. Des six meuniers, trois habitent les Ponts-de-Cé, un Saint-Melaine-sur-Aubance, un Cheffes et un le faubourg Saint-Lazare-lès-Angers.

page 494 note 2. Le nombre de fabricants de bas au métier passe de 0 (1715) à 108 (1788) d'après l'étude des structures socio-professionnelles de la population d'Angers, menée à partir des rôles de capitation de ces deux années, par Mlle Chabasseur (D.E.S. Paris, 1963,127 p. plus tableaux).

La liste des marchands et artisans qui entendent exercer un métier, dressée en 1777, recense 117 fabricants de bas (HH 24).

page 495 note 1. Associé à Louis Gillet, en 1763, il fonde une entreprise de toiles peintes rivale de celle de Tournemine, que nous étudions actuellement.

page 495 note 2. L'étude de Mlle Chabasseur (citée supra…) montre en 1715 une « hiérarchie contrastée » des boulangers (p. 109) : 36 % paient une capitation de 2 à 5 1.1., 44 % de 6 à 20 1.1. et cette deuxième catégorie tendrait à « s'intégrer à la petite bourgeoisie d'Angers ». Même structure pour les meuniers dont 48 % acquittent une cote supérieure à 6 1.1.

page 495 note 3. Telle voiturière rapporte des indiennes de Nantes en 1756, soit avant la levée de la prohibition, saisies par le bureau de traite d'Ingrandes. (5 E6 2), Gaillard, messager de Pouancé à Angers, commerce aussi à Pouancé de cotonnades et d'épicerie, de draps et d'arquebuses, de linons et d'acier (VI B 241).

page 496 note 1. Même si une partie importante des faillis sont domiciliés hors d'Angers, leur commerce reste fondamentalement dominé par le « marché urbain » : qu'il s'agisse de la demande de la ville en produits de table ou en tissus; de la mode vestimentaire imposée par la ville, ou du drainage par les propriétaires urbains du revenu des campagnes.

page 496 note 2. E. Glasson, « Les juges et consuls des marchands », Rev. Hist. Droit français et étranger, 1897, pp. 5-38, donne les chiffres suivants : 41 consulats au début du siècle, 61 en 1710, et 77 vers 1789.

page 496 note 3. Cf. un modèle d'étude « sectorielle » menée presque exclusivement à partir d'archives notariales : J. Mariniere, « Marchands d'étoffes de Toulouse à la fin du XVIIIe siècle », Ann. Midi. 1958.

page 496 note 4. En dehors de séries, rares, d'inventaires après décès telles que celles d'Amiens utilisées par Goubert, P., « Types de marchands amiénois au début du XVIIe siècle, dans XV/I” siècle, n°33. 1956, pp. 648670.Google Scholar

page 497 note 1. Dictionnaire… de Savary, Almanach des marchands…. Manuel des négociants…. Dictionnaire universel… de Peuchet.

page 497 note 2. Cf. John McManners: French ecc/esiastical society under the Ancien Régime : a study of Angers in the eighteenth century, Manchester U.P., 1960, 416 p. et son compte rendu par F. Lebrun, Rev. Bas Poitou. 1963, mars-avril, pp. 116-125. Le Dictionnaire d'Expilly (1762) recense : 24 chapitres; 20 abbayes et 74 couvents « de l'un et l'autre sexe ».

page 497 note 3. Quel était le rayonnement français du commerce angevin ? Seul le dépouillement analytique du chapitre des débiteurs dans les bilans en donnerait une appréciation exacte. Sauf exceptions, dont Bédane, ce rayonnement ne devait guère dépasser le cadre de la généralité de Tours (Anjou, Touraine, Maine).