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Published online by Cambridge University Press: 26 July 2017
Nous avons tenté, dans cette étude, d'esquisser l'évolution de la sensibilité religieuse à Rouen à partir des clauses testamentaires. Il est inutile de rappeler l'intérêt de cette source pour l'étude de la sensibilité religieuse à l'époque moderne. Mais nous avons voulu savoir si elle était valable en tous lieux, et particulièrement en Normandie où la coutume ne laissait de liberté au testateur que dans la dévolution d'une partie de ses biens meubles. Dans ces conditions, le Normand pouvait se dispenser de passer testament.
This article is concerned with the evolution of religious clauses in wills written in Rouen in the 18th century. Unlike Marseille and Paris, there were relatively few wills in Rouen. But the sample is compatible with the social composition of the city, and more so than elsewhere, it furnishes us with insight into attitudes among the lower orders. The temperament of the people of Rouen is original in that, right from the beginning of the century, it eschewed ostentatious burials. The evolution of religious clauses, on the other hand, is less unusual. In Rouen, as elsewhere, it was in this century that the demand for masses to be sung after a death dwindled. The end of the period sees the emergence, as in Paris, of a pious minority (women and men), whose social contours are loosely defined : it contains representatives of all categories of society even if, by and large, the traditionalist behaviour of the nobility and the rentier bourgeoisie stands in opposition to the rejection of the world of commerce, crafts and wage-labour.
1 Vovelle, M., Piété baroque et déchristianisation, Paris. 1973, 697 p.Google Scholar et Chaunu, P., La mort à Paris, 1978. 543 p.Google Scholar Toutes les références faites par la suite aux situations marseillaise et provençale ou parisienne renvoient à ces deux ouvrages.
2 Nous avons procédé à un sondage échelonné de 10 ans en 10 ans dans les minutiers des douze notaires de Rouen, en cherchant toujours à obtenir 80 à 100 testaments par coupe sauf pour la première. Années retenues : 1689-1690, 1701-1704, 1711-1714, 1721-1724, 1731-1734, 1741-1743, 1751-1753, 1761-1762, 1771-1772, 1782-1783. Les sondages 1761-1762 et 1771-1772 et une partie du sondage 1782-1783 ont été faits par Mlles Aube et Pillet, étudiantes à Rouen, que nous remercions.
3 Renseignements aimablement communiqués par J.-P. Bardet.
4 J.-P. Bardet. Histoire de Rouen(collectif sous la direction de M. Mollat), Toulouse, 1979, p. 250 ss. Sauf indication contraire, les références à d'autres éléments de la situation rouennaise renvoient à ce travail.
5 Part des testaments féminins dans chaque coupe : 60 %, 44 %, 50 %, 60 %, 55 %, 55 %, 52 %, 68 %, 58 %, 56 %.
6 Étude faite dans le cadre d'une thèse d'État en cours sur les mentalités religieuses en Haute- Normandie à l'époque moderne.
7 Répartition pour quelques catégories sociales dans chacune des coupes : marchands : 30 %, 20 %, 21 %, 8 %, 20 %, 21 %, 15 %, 30 %, 23 %, 20 %, 17 % ; bourgeois et officiers : 18 %, 25 %,9%.8 %,7%,8%,6%,4%,1 %; filles majeures rentières : 33 %, 16 %, 39 %, 32 %, 11 %, 11 %, 4 %, 9 %, 10 %, 5 %, 5 %.
8 On ne peut citer ici que quelques exemples. Les testaments de femmes de marchands représentent 41 % des testaments de la catégorie en 1730 et 51 % en 1781. Ceux des femmes de compagnons et domestiques représentent 53 % des testaments de la catégorie en 1701-1704,60 % en 1730 et 66 % en 1782-1783.
9 Exemples de nombre moyen de messes (pour les hommes) : 100 en 1750, 50 en 1760, 75 en 1770 et 126 en 1780.
10 Somme moyenne d'après les indications des testaments et le dépouillement des revenus de certaines fabriques de Rouen.
11 Quelques taux pour les hommes: 62 en 1700, 14 en 1710, 26 en 1729, 16 en 1760, 20 en 1780. Pour les femmes (mêmes dates de sondage) : 40, 16, 32, 12, 12.
12 Comme l'indique le testament de Catherine Derouche, fille majeure, en juin 1712 (Étude Ernult).
13 Mode de la demande de 100 à 500 1. : 71 % en 1730, 76 % en 1740, 70 %en 1780.
14 Un exemple, le testament de M.-A. Lammier, veuve de compagnon, qui demande la grosse sonnerie, 33 messes et 4 douzaines de cierges d'une demi-livre chacun et un cierge de corps d'une livre (Étude Boutrolle, 18 février 1772).
15 Quelques taux de demandes de messes : 42 %en 1700, 16 % en 1720, 20 % en 1740, 13 % en 1760, 4 % en 1770, 3 % en 1781.
16 Taux à partir de 1700: 20 %, 30 %, 18 %, 8 %, 10 %, 25 %, 10 %, 26 %, 7 ,6 %.
17 Un exemple intéressant, même s'il précède la période de développement de cette attitude, celui de Louis Godefroy, écuyer seigneur de Mirville qui ne veut « aucune pompe ny dépense qui marque le faux homme du monde » (Étude Mabriez, 16 mars 1703).
18 Quelquestauxpourlesnobles:33 96 en 1710, 30 %en 1730,28 96 en 1750,25 96 en 1770. Marchands : 21 % en 1710, 11 96 en 1730, 21 96 en 1740, 3 96 en 1750. La clause disparaît ensuite. Bourgeois: 16 96 en 1710, 12 96 en 1720, 15 96 en 1730.
19 Dans le monde populaire, la clause n'est jamais présente dans plus de 10 96 des testaments.
20 L'église choisie est toujours celle de la paroisse. A la différence du Marseillais, le Rouennais souhaite très rarement la sépulture dans un couvent.
21 A titre d'exemple, taux de fréquence pour deux catégories à partir de 1720 : marchands (hommes) :61 %,30 %,9%,0%,0%,6%,0%; femmes :11 %,21 %, 12%, 28 %,0%, 27 %, 7 % ; compagnons (hommes) : 33 %. 36 %,14%, 33 %,15%,3%,0%; femmes : 36 %, 25 %, 4 %, 10 %, 20 %, 5 %, 25 %.
22 Somme moyenne donnée par rapport aux testaments qui indiquent pour les nobles : 1 000 1. en 1700,700 1. en 1750, 500 1. en 1780. Pour les marchands : 150 1. en 1 700, 130 1. en 1750 et 55 1. en 1780.
23 M. Vovelle, op. cit., p. 261.
24 Le produit des quêtes a été étudié de 1690 à 1790 (Saint-Godard : A.D.S.-M., G 6623 à 6634 ; Saint-Vivien : G 7795 à 7814 ; Saint-Patrice : G 7486-7487).
25 La moyenne décennale des quêtes de Saint-Patrice, après être passée de 180 1. de 1701 -1710, tombe à 24 1. en 1741 -1750. Elle remonte quelque peu à la fin de l'Ancien Régime : 55 1. et 69 I. en 1781-1789. La moyenne décennale des quêtes de Saint-Godard passe de 109 1. en 1691 -1700 à 180 1. pour tomber à 46 1. en 1771 -1780.
26 Ont été étudiées les confréries de Notre-Dame de la Pitié de la paroisse Saint-Vivien (A.D.S.-M., G 7781 ). du Saint-Sacrement de la paroisse de Saint-Maclou (G 7082 à 7084) et du Saint- Sacrement de la paroisse de Saint-Vincent (G 7728).
27 Dans la première moitié du xviiie siècle, la moyenne décennale du produit des quêtes de la confrérie du Saint-Sacrement de la paroisse Saint-Maclou passe de 67 1. en 1701-1709 à 201 1. en 1741 -1750 ; elle tombe à 126 1. en 1761 -1770 puis connaît une certaine récupération à la fin du siècle. Le produit décennal moyen des quêtes à la confrérie du Saint-Sacrement de la paroisse Saint-Vincent est de 82 1. en 1731-1740, de 39 1. en 1771-1780 et de 50 1. en 1781-1789.
28 A.D.S.-M., G 9877, Délibérations.
29 M. Join- Lambert, « La pratique religieuse dans le diocèse de Rouen, 1707-1789 », Annales de Normandie, janvier 1955.
30 Bardet, et Gouesse, , « Le calendrier des mariages à Rouen. Rupture et résurgence d'une pratique », Voies nouvelles pour l'histoire de la Révolution française(Colloque Mathiez-Lefèbvre), Paris, 1978, pp. 63–78.Google Scholar
31 Le rôle des prélats est peu décisif. Les indices montrent que l'évolution se déroule indépendamment des règnes archi-épiscopaux.
32 Qué Niart, J., Culture et sociétés urbaines dans la France de l'ouest au XVIIIe siècle, Paris, 1978, fig. 4.Google Scholar
33 Le taux d'analphabétisme des artisans (hommes et femmes) testateurs est stable à 25-30 %avec une chute à moins de 10 % à la fin du siècle (1771 et 1781).
34 Le taux d'analphabétisme des femmes de cette catégorie peut atteindre (d'après les testaments) 25 % en 1741.
35 J. Qué Niart, ibid., pp. 225-307, passim.
36 J.-P. Bardet, Histoire de Rouen, op. cit., p. 264.