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Vers une histoire psychanalytique. II

Published online by Cambridge University Press:  11 October 2017

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Rapprocher l'histoire de la psychanalyse, c'est aussi rapprocher celle-ci de son centre, du foyer même de son savoir. Car, bien au delà de l'expérience intellectuelle, ce que sait le psychanalyste provient de ses réactions inconscientes à la personne de l'analysé et au discours qu'elle tient en situation analytique. Le contre-transfert est l'ensemble des distorsions dans la perception et la réaction du psychanalyste à son patient qui lui fait réagir à ce patient comme s'il était une imago archaïque, et agir dans la situation analytique conformément à ses propres besoins, désirs, fantasmes inconscients, le plus souvent infantiles.

Type
Frontières Nouvelles
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1969

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References

page 1011 note 1. Cette définition, due à G. Devereux, comprend le transfert sous le seul angle épistémologique. Le prédicat « contre » désigne une différence de position, non de nature. On peut aussi bien parler d'une réaction « contre-Laïus » ou « contre-Jocaste » de l'enfant que de la réaction contreoedipienne de ses parents.

page 1011 note 2. Ce qui a pour corollaire l'obligation faite au psychanalyste de se soumettre à une psychanalyse personnelle.

page 1012 note 1. Devereux, G., From Anxiety to Method in the Behavioral Sciences, La Haye, Paris, 1967.CrossRefGoogle Scholar On trouvera à la fin du livre la bibliographie complémentaire et un aperçu de l'oeuvre immense de George Devereux.

page 1012 note 2. L'engagement émotionnel est d'ordinaire plus grand dans les sciences du comportement que dans les sciences naturelles, et les effets transférentiels sont plus graves. Ce qui distingue les sciences du comportement n'est pas leur sujet (le comportement humain peut faire l'objet d'une investigation de type physique), mais leur méthode : « This simply means that physics is to be explained physicalistally and behavior behaviorally » (p. 14)

page 1014 note 1. Une femme dit à son mari : « Si l'un de nous deux meurt, j'irai m'établir sur la Côte d'Azur ». Le mari se met en colère. Cette colère l'avertit et l'instruit de la teneur agressive du lapsus de son épouse.

page 1015 note 1. Sous le même angle j'interpréterais volontiers la revendication présentée de manière si pressante au mois de mai 1968 du « travail d'équipe ». Non que le travail d'équipe soit par lui-même stérile, mais on voit bien la distanciation qu'il peut procurer par rapport au sujet d'études et les facilités qu'il offre à répercuter sur autrui l'obligation angoissante du face à face. Quand une méthode se présente comme impérative, voire obligatoire, c'est qu'elle est entrée dans le champ de l'idéologisation.

page 1015 note 2. Kantorowicz, E. H., The King's Two Bodies, A Study in Mediaeval [Political Theology, Princeton, New Jersey, 1957.Google Scholar

page 1016 note 1. P. 501.

page 1016 note 2. Cette interprétation se fortifie par deux associations qui se sont formées dans mon esprit mais qui rejoignent peut-être des connotations implicites ou demeurées inconscientes dans l'esprit de Kantorowicz : 1° Alexandre, pour repousser les accusations de complicité, laissa s'accréditer la légende selon laquelle il n'était pas le fils de Philippe, mais de Zeus, du chef des Olympiens, soit du double divin que Philippe promenait dans le théâtre ; 2° Un mauvais jeu de mots, comme en use couramment le « processus primaire » : entre l'Olympe, à laquelle s'adjoint Philippe, et Olympias, sa femme, mère d'Alexandre, qui fomenta le meurtre. Point n'est besoin de souligner que ce fantasme n'épuise pas le livre et n'a que peu de rapport avec son contenu objectif. Il n'a de sens que par rapport à l'historien, à sa capacité, influencée par ses motivations inconscientes, à repérer l'ensemble intelligible que constitue la théorie des deux corps du roi.

page 1016 note 3. A la fin du Tableau de la France. Histoire de France, Paris, s.d., t. II, p. 193.

page 1017 note 1. Définition reprise du Vocabulaire de la Psychanalyse, op. cit.

page 1017 note 2. Histoire de France, op. cit., t. XII, pp. 56-57.

page 1018 note 1. Freud, Inhibition, Symptôme et Angoisse, op. cit., pp. 81, 82.

page 1018 note 2. A ce niveau ou à un autre : tel fantasme, comme celui du « pénis inversé », étudié par G. Devereux, apparaît dans une culture sous forme de mythe, dans une autre sous forme de maladie, dans un individu comme symptôme psychotique. A un autre niveau encore il apparaît dans la psyché du psychanalyste qui l'identifie. Autre exemple : le fantasme dit du « Vagin denté », doué de la même ubiquité. Cf. la remarquable étude de Gessain, R., « Vagina dentata dans la clinique et la mythologie », in La Psychanalyse, Paris, 1957 Google Scholar, n° 3.

page 1019 note 1. Le Tsarévitch immolé, Paris, 1968.

page 1021 note 1. Cet exemple m'a déjà deux fois servi ; ce n'est pas sans remords que je l'utilise encore une fois. Au moins j'en ai éprouvé la solidité et la portée. Tant pis pour l'élégance et qu'on me pardonne…

page 1023 note 1. Goubert, P. Louis XIV et vingt millions de Français, Paris, 1966, p, 143.Google Scholar

page 1025 note 1. Bloch, M., Apologie pour l'histoire, ou Métier d'historien, Paris, 1959, p. 101.Google Scholar

page 1025 note 2. Le principe est énoncé dans la préface d'Électricité et Optique. Cf. G. Devereux, « Psychanalyse et Histoire », Annales, E.S.C., 1965, n° 1.

page 1026 note 1. Ferenczi, S., First Contributions to Psycho-analysis, Londres, 1952, pp. 278279.Google Scholar

page 1026 note 2. Sur ce bref exemple pourrait s'ouvrir une discussion. Trois points, au moins, ne sont pas clairs : 1° La réduction. Derrière la richesse du singulier concret, déceler les quelques situations symboliques d'essence non historique, qui reviennent obstinément en arrière-fond, ne nous apprend rien, en principe, sur le singulier. Mais le fait est que chez Michelet, pour la première fois, un sym- archi-usé est associé à l'ensemble historique du Moyen Age, en fait, par opposition aux Temps modernes, qui culminent avec la Révolution. Seule cette association est porteuse de sens. Le découvrir, c'est à quoi se mesurera la sagacité de l'historien psychanalyste. Nulle clé, nul passe-partout, ne lui ouvrira la porte. Le voilà livré à ses seules ressources, à sa pénétration, à sa culture, à sa solitude : comme tout historien. Cela dit, gardons-nous d'un contresens. Le couplage d'une unité historique (la Révolution) avec une unité psychologique transhistorique (le complexe d'OEdipe) n'est pas l'établissement d'un rapport causal. La révolution n'est pas causée par l'OEdipe ; elle possède une dimension oedipienne. Celle-ci reconnue, on apercevra une logique oedipienne à l'oeuvre dans la Révolution. Comment opère-t-elle ? A l'historien de le montrer. La révolution eût-elle tourné autrement, cette logique n'eût pas été prise en défaut, puisque l'OEdipe est une combinatoire susceptible de plusieurs arrangements. 2° La preuve. Qui nous garantit de l'arbitraire dans l'interprétation ? L'histoire admet plusieurs types de preuves, depuis la preuve matérielle, analogue à la preuve judiciaire, jusqu'à la conviction irrésistiblement entraînée par la logique cohérente du récit — ce qui n'est plus une preuve mais une théorie. Tout livre d'histoire use de plusieurs types de preuves, le premier étant réservé aux unités les plus restreintes (les « faits, ») le second aux développements plus généraux et au livre entier. L'histoire psychanalytique, de même. Sur les faits isolés elle porte des jugements en toute sécurité (à moins qu'on dénie toute validité à l'expérience psychanalytique) et son interprétation générale appartient indubitablement au second type. C'est une persuasion, une suasoria, au sens de Cicéron et de Quintilien. Le psychanalyste est habitué à ce qu'on lui refuse tout crédit et que ses évidences les plus patentes soient traitées d'hypothèses aventureuses. Il admet que ne comprend que celui qui est préparé à comprendre par une expérience intérieure, laquelle n'est pas forcément psychanalytique (fort heureusement). Il admet plus ouvertement que l'historien positiviste la part d'incertitude et d'arbitraire, puisqu'il l'attribue à la fois à l'imperfection de sa documentation et à celle de son instrument d'investigation, c'est-à-dire à la sienne propre. 3° Je n'ai pas marqué nettement la différence entre l'épistémologie historique (penser, connaître l'histoire) et la logique de l'histoire (son déroulement objectif). Cela tient à ce que je m'interroge sur la méthode psychanalytique en histoire et non pas sur la théorie psychanalytique de l'histoire. Je ne suis pas sûr que celle-ci existe et, dans l'abstrait, elle ne m'intéresse guère. Je suis convaincu, en revanche, que la méthode est praticable. C'est la pratique seulement qui permettra de préciser la logique psychanalytique de l'histoire. Sur la pratique, il ne convient pas d'anticiper.

page 1927 note 1. Starobinski, J., Montesquieu par lui-même, Paris, 1967, pp. 99108.Google Scholar

page 1928 note 1. M. C. et Ortigues, E., œdipe africain, Paris, 1966.Google Scholar

page 1928 note 2. Gorer, G., The People of Great Russia, N. Y., 1962.Google Scholar

page 1928 note 3. Voir les belles analyses de G. Mendel, op. cit.,

page 1029 note 1. Roheim, G., Psychanalyse et anthropologie, Paris, 1967, p. 494 Google Scholar et suiv. Voir aussi Jones, E., « The Theory of Symbolism », in Papers on Psychoanalysis, Boston, 1961.Google ScholarPubMed Roheim est le premier à avoir levé l'hypothèque de la trace mnésique en proposant une théorie de la culture — et de l'OEdipe — fondée sur « l'inachèvement » de l'homme (Bolk, etc.).

page 1029 note 2. Abraham, K., « l'Araignée, symbole onirique », in œuvres complètes, Paris, 1966, t. II, p. 141.Google Scholar

page 1030 note 1. Éliade, M., Le Mythe de l'Éternel Retour, Paris, 1949.Google Scholar

page 1030 note 2. Sans exclure les autres, bien entendu. Mais celles-ci me paraissent immédiatement et facilement exploitables.

page 1031 note 1. Novaos, , Henri d'Ofterdingen, trad. Rovini, Paris, 1967, p. 141.Google Scholar

page 1032 note 1. Ch. Du Bos, (cit. par Maurois), Approximations, Paris, 1965, p. 18.

page 1032 note 2. On touche là un danger très grave qui tient à la puissance même de la lecture psychanalytique. Ce qu'on trouve dans un seul texte est d'une telle abondance qu'on se croit facilement dispensé du reste, qui est, faute d'un meilleur terme, la culture générale du sujet. On risque ainsi de glisser vers l'explication unilatérale, pesamment systématique. Le tact, la liberté indispensable à l'égard du « système » sont le fruit de la culture. Or la psychanalyse n'est pas une culture, si même elle peut y introduire.

page 1033 note 1. D. Anzieu, « Étude psychanalytique des groupes réels », les Temps modernes, juillet 1966, n° 242. Une expérience de groupe peut sensibiliser, non seulement à soi-même, mais à ce qu'est le groupe, dont Anzieu nous dit qu'il fonctionne comme un rêve, associant un désir et une défense, comme l'histoire, par conséquent.