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Un procès hors du commun ?

Le procès de la Fraction Armée Rougeà Stuttgart-Stammheim (1975-1977)

Published online by Cambridge University Press:  04 May 2017

Frédéric Audren
Affiliation:
CNRS-CURAPP/Université de Picardie Jules Vernes
Dominique Linhardt
Affiliation:
Centre Sociologie de l’Innovation, École des Mines de Paris

Résumé

L’article propose une analyse du procès pénal qui s’est tenu entre 1975 et 1977 à Stuttgart-Stammheim en vue de juger les membres du noyau central de la première génération de la Rote Armee Fraktion (RAF). Événement judiciaire marquant pour la jeune République fédérale, le procès de Stammheim a fait l’objet d’un investissement massif de la part des accusés et de leurs avocats. Discernant dans le procès une occurrence de « justice politique », l’enjeu est de démontrer l’incapacité de l’État à se soumettre à ses propres exigences, et par-là même de dévoiler la nature « fasciste » d’un État dont le caractère démocratique serait de pure apparence. Cet objectif, ils entendent le réaliser en faisant un usage stratégique du droit. Et cet usage du droit contre le droit constitue, pour les représentants de l’État, un problème de taille : la volonté des accusés de les forcer à sortir du droit ne laisse d’autre choix que d’en rajouter dans l’usage du droit et de chercher à réduire la procédure judiciaire à une succession d’actes techniques, sans admettre aucune forme d’extériorité. Une telle configuration offre un remarquable point de vue sur les contraintes qui pèsent sur le travail juridique et le passage du droit et, plus généralement, sur l’État de droit saisi à travers les épreuves qu’il affronte et qui le forgent.

Abstract

Abstract

The article analyses the trial which brought the core members of the first generation of the Rote Armee Fraktion (RAF) to a criminal court in Stuttgart-Stammheim between 1975 and 1977. The Stammheim trial was a judiciary landmark for the young Federal Republic, and the accused, together with their lawyers, took an active part in it. They aimed to prove that the trial was a case of ‘political justice’ and to demonstrate the inability of the State to abide by its own principles, thereby unveiling its ‘fascist nature’ and the fact that its democratic discourse was merely a sham. In order to prove this, they turned the law into a strategic tool, and used it as a weapon. This was a major problem for the representatives of the State: as the accused tried to force them out of the political arena, they were left with no choice but to rely even more heavily on the legal system and to try and reduce the judiciary procedure to a succession of technical acts. This trial then offers a remarkable vista on the constraints weighing on judicial work, and more generally on a legally constituted State, perceived through the difficulties it has to face, and which in turn shape it.

Type
Justice politique
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 2008

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References

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3 - Pour la traduction des termes techniques, nous adoptons la terminologie proposéepar le service européen Inter Active terminology for Europe : http://iate.europa.eu/.

4 - Les accusés étaient initialement au nombre de cinq : Andreas Baader, GudrunEnsslin, Ulrike Meinhof, Jan-Carl Raspe et Holger Meins. Ce dernier est mort dessuites d’une grève de la faim en 1974, au cours de la procédure d’instruction. Seuls lesquatre premiers sont donc présents à l’ouverture du procès.

5 - Si la RAF est l’organisation la plus connue, elle n’est pas la seule qui, dans l’Allemagnedu début des années 1970, se revendique d’un modèle d’insurrection calqué surl’exemple des Tupamaros uruguayens.

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7 - Comme le notent A. Baader et U. Meinhof, « le processus politique dont est issue laguérilla urbaine en République fédérale a commencé à Berlin – [en] 66, 67, 68 » (« a./u.:linie zum prozess gegen das kommando holger meins »), in Texte: der RAF, Lund, VerlagBo Cavefors, 1977, p. 32.

8 - Rethmann, Petra, «On militancy, sort of », Cultural Critique, 62, 2006, p. 6791.CrossRefGoogle Scholar

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10 - Attentat à la bombe contre les bâtiments hébergeant le 5e corps de l’armée améri-caine à Heidelberg le 5 mai 1972 ; attentat contre des commissariats de police à Augs-bourg le 19 mai, ainsi que, le lendemain, à Munich ; attentat contre le quartier généraldes forces américaines en Europe à Francfort le 24 mai. Les années 1970 et 1971 avaientété essentiellement consacrées à des tâches logistiques (se procurer des appartements, des voitures, des armes, des papiers et de l’argent), ainsi qu’à un entraînement effectuéau Moyen-Orient. Au cours de cette période, les seules actions ouvertes du groupe ontété des hold-up.

11 - L’année 1972 marque ainsi la fin de la « première génération de la RAF ». Le terro-risme n’en a pas pour autant été éliminé, le projet de la RAF ayant été repris par une« seconde génération » dont la socialisation politique était moins étroitement liée aumouvement social de la fin des années 1960. Voir Wunschik, Tobias, Baader-MeinhofsKinder: die zweite Generation der RAF, Opladen, Westdeutscher Verlag, 1997.CrossRefGoogle Scholar

12 - Selon l’expression d’un journaliste de la Süddeutsche Zeitung du 21 mai 1975.

13 - Diewald-Kerkmann, Gisela, « ‘Im Vordergrund steht immer die Tat...’: Gerichts-verfahren gegenMitglieder der RAF», Rechtsgeschichte, 7, 2005, p. 138152, ici p. 146-150.CrossRefGoogle Scholar

14 - Les rapports entre justice et politique font aujourd’hui en France l’objet d’un regaind’intérêt. Voir notamment, Commaille, Jacques et Kaluszinsky, Martine (dir.), La fonction politique de la justice, Paris, La Découverte, 2007;Google Scholar Israël, Liora, Robes noires, années sombres. Avocats et magistrats en résistance pendant la Seconde Guerre mondiale, Paris, Fayard, 2005;Google Scholar Roussel, Violaine, Affaires de juges. Les magistrats dans les scandales politiques enFrance, Paris, La Découverte, 2002;Google Scholar Vauchez, Antoine, L’institution judiciaire remotivée.Le processus d’institutionnalisation d’une « nouvelle justice » en Italie, 1960-2000, Paris, LGDJ, 2004.Google Scholar Voir également le panorama historiographique de Farcy, Jean-Claude, L’histoirede la justice française de la Révolution à nos jours : trois décennies de recherches, Paris, PUF, 2001.Google Scholar Dans le cas du procès de Stammheim, la dimension politique du procès est siprégnante qu’elle risque de faire écran à la compréhension du travail proprement juri-dique du tribunal.

15 - Les exemples d’analyses de ce type sont nombreux. Le plus spectaculaire est sansdoute l’étude au demeurant bien informée de Pieter Schut, H. Bakker, Politische Vertei-digung in Strafsachen: eine Fallstudie des von 1972-1977 in der Bundesrepublik Deutschlandgeführten Strafverfahrens gegen Andreas Baader, Gudrun Ensslin, Ulrike Meinhof, Holger Meins, Jan Carl Raspe, Kiel, Neuer Malik Verlag, 1986.Google Scholar Plus récemment, on retrouve uneperspective similaire dans une série de trois ouvrages publiés en 1991 sous le titregénéral de «Terroristen und Richter » : Góssner, Rolf, Das Anti-Terror-System: politischeJustiz im präventiven Sicherheitsstaat, Hambourg, VSA-Verlag, 1991;Google Scholar Hannover, Heinrich, Terroristenprozesse: Erfahrungen und Erkenntnisse eines Strafverteidigers, Hambourg, VSA-Verlag, 1991;Google Scholar Overath, Margot, Drachenzähne: Gespräche, Dokumente und Recherchen ausder Wirklichkeit der Hochsicherheitsjustiz, Hambourg, VSA-Verlag, 1991.Google Scholar

16 - Aust, Stefan, Der Baader-Meinhof-Komplex, Munich, Goldmann, [1985] 1998, p. 271.Google Scholar

17 - Prendre cette épreuve au sérieux nécessite de suspendre analytiquement le préa-lable de l’évidence de l’État de droit et de le considérer sous le rapport de sa « fragilité »et de sa « transformabilité ». Eisenstadt, Samuel N., «The paradox of democraticregimes: Fragility and transformability », Sociological Theory, 163, 1998, p. 211238.CrossRefGoogle Scholar

18 - Sur le droit comme travail de production, Moor, Pierre, Pour une théorie micropolitiquedu droit, Paris, PUF, 2005.Google Scholar

19 - ThÉvenot, Laurent, L’action au pluriel. Sociologie des régimes d’engagement, Paris, LaDécouverte, 2006, p. 157181.Google Scholar

20 - Sur le passage du droit, Latour, Bruno, La fabrique du droit. Une ethnographie duConseil d’État, Paris, La Découverte, 2002.Google Scholar La tradition américaine accorde une grandeimportance à cette notion de passage du droit. Par exemple, Holmes, Oliver W. dansle classique The path of the law, Bedford, Applewood Books, [1894] 1996 Google Scholar (égalementtéléchargeable à l’adresse http://www.constitution.org/lrev/owh/path_law.htm).

21 - «DasKonzept Stadtguerilla » (avril 1971), inM. HOFFMANN (dir.), Rote Armee Fraktion:Texte und Materialien zur Geschichte der RAF, Berlin, ID-Verlag, 1997, p. 27-48, ici p. 47.

22 - Voir les analyses de Sturm, Michael, «Tupamaros München: ‘Bewaffneter Kampf’, Subkultur und Polizei, 1969-1971 », in Weinhauer, K., Requate, J. et Haupt, H.-G. (dir.), Terrorismus in der Bundesrepublik: Medien, Staat und Subkulturen in den 1970 er Jahren, Francfort, Campus Verlag, 2006, p. 99133.Google Scholar

23 - Sur la critique du fascisme du régime de Bonn dans les années 1960, voir Kohser-Spohn, Christiane, Mouvement étudiant et critique du fascisme en Allemagne dans les annéessoixante, Paris, L’Harmattan, 1999.Google Scholar

24 - HIS/BRD, RA 03/001, 004. Lettre d’un accusé, novembre 1975 (annotation manuellede la date) (usage systématique des minuscules dans l’original). L’importance que lesmembres de la guérilla urbaine confèrent au procès de Stammheim apparaît plus claire-ment encore dans une autre lettre, rédigée quelques jours plus tard : « ainsi se clôt, àstammheim, une phase, la phase de la destruction discrète. une évolution s’y esquissevers un fascisme ouvert, et l’on assiste à un conditionnement de l’appareil judiciairepour la stratégie de destruction du procureur général – comme politique de gouverne-ment – et comme l’expression et la pointe avancée d’une évolution qui affecte toute lasociété. rendre visible l’évolution et la structure de la répression étatique, voilà le sensde notre politique dans le procès » (HIS/BRD, RA 03/001, 004. Lettre d’un accusé à sonavocat, décembre 1975, usage systématique des minuscules dans l’original).

25 - U. Meinhof a été retrouvée pendue dans sa cellule au matin du 9 mai 1976.

26 - Preuss, Ulrich, «Die Aufrüstung der Normalität », Kursbuch, 56, 1979, p. 1537, icip. 17.Google Scholar

27 - Par exemple, Brünneck, Alexander Von, Politische Justiz gegen Kommunisten in derBundesrepublik Deutschland: 1949-1968, Francfort, Suhrkamp, 1978, p. 224231.Google Scholar

28 - Robert Lehr, ministre de l’Intérieur, lors d’un débat parlementaire, cité par P. H. BAKKER SCHUT, Politische Verteidigung..., op. cit., p. 40.

29 - Au sens d’ Kirchheimer, Otto, Political justice: The use of legal procedure for politicalends, Princeton, Princeton University Press, 1961.Google Scholar L’ouvrage dont la traduction alle-mande a été publiée en 1965 a connu un grand succès dans les milieux militants. Pourles activistes de la RAF, il fournit une sorte de sens commun et une grille d’analyse àl’aune de laquelle ils réfléchissaient leurs propres expériences.

30 - HIS/BRD, RA 02/001, 008. Citation extraite de la correspondance entre les accusés etleurs avocats, papier portant le titre « 2. Antrag », s. d.

31 - La conception de l’objectif que les accusés s’assignent dans le procès, et des moyensqu’ils mettent en œuvre pour l’atteindre, ne peut être dissociée de la façon dont, plusgénéralement, les groupes armés se représentent l’efficacité de leur action et, notamment, de l’importance qu’ils accordent à la provocation. Puisant directement son inspiration dansle situationnisme, faisant l’objet d’une élaboration théorique dans les mouvements sociauxde la fin des années 1960, la conception provocatrice de l’action militante est reprise etradicalisée par les fondateurs des groupes de guérilla urbaine et les pousse à réfléchir àleurs actions en fonction de deux dimensions. La première est celle du coup, qui désignel’efficacité immédiate d’une action et vise à ce titre directement l’adversaire (par exempleun juge) en obligeant ce dernier à riposter. S’y ajoute cependant une seconde, celle dugeste, qui ne s’adresse pas tant à l’adversaire qu’à un tiers spectateur, à un « public ».C’est bien la conjonction entre ces deux dimensions indissociables qu’exprime cetteformulation de la RAF : «Les bombes contre l’appareil de répression, nous les lançonsaussi dans la conscience des masses. » (« Über den bewaffneten Kampf in Westeuropa »(mai 1971), in M. HOFFMANN (dir.), Rote Armee Fraktion..., op. cit., p. 49-111, ici p. 100).Il s’agit de démontrer à autrui (aux «masses »), à travers les réactions induites par l’actionde la guérilla urbaine, la « vérité » de l’état d’oppression dans lequel on les tient.L’agir de la guérilla urbaine convoque donc à sa façon le public ; il installe un conflitpublic qui impose aux protagonistes directs de rendre leur combat descriptible commeapproprié, valeureux, honorable, ce qui fut particulièrement le cas dans le contexte duprocès de Stammheim, devenu un événement public et médiatique.

32 - Voir les débats animés que l’interview du juge a suscités dans le cours même duprocès, Protokoll Stammheimer Verfahren, f. 1659-1698 (le compte rendu sténographiquedu procès est numéroté en continu, nous citerons désormais : StV, suivi du numéro dufeuillet).

33 - Fürst, Martin, Grundlagen und Grenzen der §§ 129, 129a StGB: zu Umfang und Notwen-digkeit der Vorverlagerung des Strafrechtsschutzes bei der Bekämpfung krimineller und terroris-tischer Vereinigungen, Francfort, Peter Lang, 1989.Google Scholar L’article 129 ne doit pas être confonduavec l’article 129a qui n’a cessé de provoquer des critiques et des protestations. L’ar-ticle 129a, définissant le délit de « formation d’associations terroristes », s’inscrit bienentendu dans la continuité de l’article 129, mais n’a été introduit dans le droit pénalqu’après le procès de Stammheim (en partie sur la base des limites de l’article 129 quis’y étaient révélées).

34 - StV, f. 11733. Décision du tribunal régional de Kaiserslautern du 12 décembre 1974(1 AK 34/74).

35 - P. H. BAKKER SCHUT, Politische Verteidigung..., op. cit., p. 49.

36 - Wagner, Joachim, «Terrorismus, Hochverrat und Abhörgesetz », Neue juristischeWochenzeitschrift, 33, 1980, p. 913920, ici p. 914.Google Scholar

37 - Generalbundesanwalt beim Bundesgerichtshof, Anklageschrift (1 StE 1/74), Karls-ruhe, 26 septembre 1974, p. 15.

38 - Les services du procureur ont perçu le risque en introduisant une distinction entredes objectifs initiaux d’ordre politique et l’évolution ultérieure au cours de laquelle laRAF serait devenue « une bande purement criminelle » (ibid.).

39 - HIS/BRD, RA 03/001, 004. Lettre d’un accusé, septembre 1975 (usage systématiquedes minuscules dans l’original, souligné par nous). Comme on peut le lire dans la lettre, « la RAF n’est pas un parti. on ne peut pas lui donner sa voix ou non. elle n’est paséligible. elle est illégale. elle est un rapport et une pratique, le rapport d’un groupe decombattants anti-impérialistes à l’état, qui trouve son expression, c’est-à-dire sa réalitédans sa lutte contre l’état. sa réalité est sa politique, c’est-à-dire sa pratique et elle est lenoyau stratégique de la politique prolétarienne dans la métropole de la républiquefédérale. »

40 - HIS/BRD, RA 03/001, 004. Lettre d’un accusé à son avocat, décembre 1975.

41 - Absente du protocole du procès, on peut prendre connaissance de larges extraitsde la déclaration sur le fond dans M. HOFFMANN (dir.), Rote Armee Fraktion..., op. cit., p. 198-265.

42 - StV, f. 5673-5699.

43 - StV, f. 5782.

44 - Sur cette figure, Hans Enzensberger, Magnus (dir.), Freisprüche: Revolutionäre vorGericht, Francfort, Suhrkamp, 1970.Google Scholar

45 - Il s’agit de paroles qu’A. Baader aurait prononcé lors du deuxième jour de l’au-dience. Elles sont reproduites dans le recueil de textes : Texte: der RAF, op. cit., p. 142, mais ne se trouvent pas dans la retranscription officielle.

46 - HIS/BRD, RA 03/001, 004. Lettre d’un accusé, novembre 1975 (annotation manuellede la date).

47 - A. Baader in Texte: der RAF, op. cit., p. 142 (même remarque que note 45).

48 - Ibid., p. 142-143 (même remarque que note 45).

49 - HIS/BRD, RA 03/001, 004. Lettre d’un accusé à son avocat, décembre 1975 (usagesystématique des minuscules et soulignement dans l’original).

50 - Sur cette question, voir Brunn, Hellmut et Kirn, Thomas, Rechtsanwälte – Linksan-wälte: 1971 bis 1981 – das Rote Jahrzehnt vor Gericht, Francfort, Eichborn, 2004;Google Scholar Stefan Reinicke, «Die linken Anwälte. Eine Typologie », inW. Kraushaar (dir.), Die RAF..., op. cit., vol. 2, p. 948-956 ; Jórg Requate, «Terroristenanwälte und Rechtsstaat. ZurAuseinandersetzung um die Rolle der Verteidiger in den Terroristenverfahren der1970er Jahre », in K. Weinhauer, J. Requate et H.-G. Haupt (dir.), Terrorismus..., op. cit., p. 271-299.

51 - HIS/BRD, RA 03/001, 004. Lettre d’un accusé à son avocat, décembre 1975 (usagesystématique des minuscules et soulignement dans l’original).

52 - Le député Willfried Penner, débat au Bundestag du 11 octobre 1974, in Vinke, Hermann et Witt, Gabriele (dir.), Die Anti-Terror-Debatten im Parlament: Protokolle 1974-1978, Reinbek bei Hamburg, Rowohlt, 1978, p. 31.Google Scholar

53 - Ibid., p. 29. Le député Fritz Wittmann note ainsi que « [l]es juges aussi sont deshommes qui, lorsqu’ils sont attaqués, peuvent avoir la tentation, non pas pleinementconsciente, mais inconsciente, de prendre le chemin de la moindre résistance ».

54 - Le député F. Wittmann, débat au Bundestag du 11 octobre 1974, ibid., p. 30.

55 - Le député Fritz-Joachim Gnädinger, débat au Bundestag du 18 décembre 1974, ibid., p. 62.

56 - Voir les propos du ministre de la Justice, Vogel, Hans-Jochen, « Strafverfahrensrechtund Terrorismus – eine Bilanz », Neue juristische Wochenzeitschrift, 31, 1978, p. 12171228.Google Scholar

57 - Le député F. Wittmann, débat au Bundestag du 11 octobre 1974, in H. Vinke et G. Witt (dir.), Die Anti-Terror-Debatten im Parlament..., op. cit., p. 27.

58 - Hamburger Abendblatt, 3 et 4 juin 1975.

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60 - Dürig, Günter (commentaire de l’article 18 de la Loi fondamentale), in Maunz, T. et al. (dir.), Grundgesetz: Kommentar, Munich, Beck, [1958] 1978,Google Scholar § 5, cité par Cobler, Sebastian, «Grundrechtsterror », Kursbuch, 56, 1979, p. 3849, ici p. 38.Google Scholar

61 - Ibid.

62 - Ibid.

63 - G. Dürig, «Grundrecht sverwirklichung auf Kosten von Grundrechten », art. cit., p. 87.

64 - Jaschke, Hans-Gerd, Streitbare Demokratie und innere Sicherheit: Grundlagen, Praxisund Kritik, Opladen, Westdeutscher Verlag, 1991.CrossRefGoogle Scholar La notion de « streitbare Demokratie »que l’on traduit généralement par « démocratie militante » vise à rendre compte del’idée que, dans la mesure où l’Allemagne fédérale est un « ordre politique lié par desvaleurs (wertgebundene Ordnung) », elle doit pouvoir se défendre contre ceux qui veulentrenverser cet ordre et les valeurs qui lui sont attachées. Dans la mesure où il s’agit d’unordre démocratique et libéral, ceux qui abuseraient des idéaux de liberté et de démocra-tie prennent le risque de voir les droits subjectifs correspondants périmés (verwirkt). LaCour constitutionnelle, dans sa décision d’interdiction du parti communiste allemand, a conféré une validité juridique à cette conception. (Les décisions de la Cour fédéraleconstitutionnelle sont publiées par l’éditeur Mohr Siebeck dans la collection Entschei-dungen des Bundesverfassungsgerichts ; nous adopterons pour citer ces décisions les conven-tions allemandes : BverfGE (pour Bundesverfassungsgericht), suivi du numéro du volumedes Entscheidungen, suivi du numéro de page ; ainsi, dans le cas présent, la décision estréférencée sous la forme «BverfGE, 5, 85 ».)

65 - Le député F. Wittmann, débat au Bundestag du 11 octobre 1974, reproduit dansH. Vinke et G. Witt (dir.), Die Anti-Terror-Debatten im Parlament..., op. cit., p. 27.

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68 - Ibid., p. 970.

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71 - Le député Alfred Dregger, débat au Bundestag du 28 octobre 1977, in H. Vinke et G. Witt (dir.), Die Anti-Terror-Debatten im Parlament..., op. cit., p. 332.

72 - Ce serait là l’un des traits qui distinguent le Rechtsstaat allemand de la Rule oflaw anglo-saxonne. Voir Heuschling, Luc, État de droit, Rechtsstaat, Rule of law, Paris, Dalloz, 2002.Google Scholar

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74 - BverfGE, 3, 225.

75 - Ibid.

76 - BverfGE, 7, 89.

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82 - Le député F.-J. Gnädinger, débat au Bundestag du 18 décembre 1974, in H. VINKEet G. WITT (dir.), Die Anti-Terror-Debatten im Parlament..., op. cit., p. 62.

83 - Le député Detlef Kleinert, ibid., p. 35.

84 - H.-J. Vogel, ibid., p. 27.

85 - Ibid.

86 - H. Schmidt, débat au Bundestag du 13 mars 1975, ibid., p. 89.

87 - P. H. BAKKER SCHUT, Politische Verteidigung..., op. cit., p. 80-84.

88 - Cette stratégie donne lieu à la mise en place d’un dispositif d’information et dediscussion complexe appelé « das info ». Les avocats jouent le rôle crucial de centresde tri et de distribution, puisque l’accès de chacun à chacun de ses mandants étaitgaranti. Notons que le dispositif de communication et les défensesmultiples qui l’autori-saient dépassaient le noyau des accusés de Stammheim. Lors de la mise en place, ilconcernait une soixantaine de prisonniers et plus de cinquante cabinets d’avocats.

89 - Décision de la Cour fédérale de justice du 17 juin 1972, reproduite dans Vorbereitungder RAF-Prozesse durch Presse, Polizei und Justiz: Dokumentation, Berlin, Rote Hilfe, 1972, p. 6-7. Lors de son arrestation intervenue le 15 juin, U. Meinhof était en possessiond’une note écrite de la main de G. Ensslin alors que cette dernière était déjà en déten-tion. Or, O. Schily avait été la seule personne à avoir eu un contact personnel avec elle :l’avocat était donc nécessairement le messager.

90 - 1 BJs 6/71. Décision de la Cour fédérale de justice du 25 août 1972, reproduite dans Neue juristische Wochenzeitschrift, 25, 1972, p. 2140-2143, ici p. 2140.

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93 - Cité par Rómer, Wilhelm, « Pflichtverteidiger neben Wahlverteidiger? », Zeitschriftfür Rechtspolitik, 11, 1977, p. 92101, ici p. 92.Google Scholar

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95 - Décision de la Cour fédérale de justice du 22 octobre 1975, cité par P. H. BAKKERSCHUT, Politische Verteidigung..., op. cit., p. 247-255.

96 - BverfGE, 41, 246.

97 - Sur cette question, Rouyer, Muriel, «La politique par le droit », Raisons politiques, 9, 2003, p. 6580,CrossRefGoogle Scholar qui montre comment, dans la tradition constitutionnaliste libérale, ledroit apparaît comme une force, sans pour autant constituer une violence.

98 - Il est intéressant d’observer ici la manière dont la critique, dans le contexte duprocès de Stammheim, à la fois récupère et inverse l’analyse de la « légitimation parla procédure » élaborée par Luhmann, Niklas, Legitimation durch Verfahren, Francfort, Suhrkamp, [1969] 1983.Google Scholar Voir par exemple les passages qu’y consacre P. H. BAKKERSCHUT, Politische Verteidigung..., op. cit., p. 74-79.

99 - Michel Foucault avait noté ce trait caractéristique de la théorie de l’État de droitqui ne se résume pas à postuler que les actes de la puissance publique doivent nécessai-rement être « encadrés dans des lois », mais qui, de plus, constitue la figure d’un État« dans lequel il y a pour chaque citoyen des possibilités concrètes, institutionnaliséeset efficaces de recours contre la puissance publique » : Foucault, Michel, Naissance dela biopolitique. Cours au collège de France (1978-1979), éd. par M. Sennellart, sous la dir.de F. Ewald et A. Fontana, Paris, Gallimard/Le Seuil, 2004, p. 174175,Google Scholar souligné parnous. Les développements que M. Foucault consacre dans cette même série de coursà l’État de droit allemand sonnent à bien des égards comme une mise en garde adresséeaux gauchistes de part et d’autre du Rhin. Habités par une « phobie d’État » (ibid., p. 77-78 et p. 193-194) qu’il conviendrait non pas d’endosser, mais de soumettre à l’analyse, ces derniers appliqueraient aux développements actuels de l’État le postulat d’« unesorte de continuité génétique, [d’]une implication évolutive entre les différentes formesd’État, l’État administratif, l’État-providence, l’État bureaucratique, l’État fasciste, l’État totalitaire » (ibid., p. 193), qui conduit à « renvoyer » une « analyse, par exemple, de la sécurité sociale et l’appareil administratif sur lequel elle repose, à partir de quelquesglissements et grâce à quelques mots sur lesquels on joue, à l’analyse des camps deconcentration » (ibid.). À cette forme d’« inflation critique » (ibid.), M. Foucault entendopposer une «moralité critique » (ibid., p. 192) qui, sur le plan analytique, se traduit parle refus de « l’interchangeabilité des analyses et [de] la perte de leur spécificité » (ibid., p. 193) et l’exigence de payer « le prix du réel et de l’actuel » (ibid., p. 194). Ainsi, « lemodèle allemand […] n’est pas le modèle si souvent disqualifié, banni, honni, vomi del’État bismarckien devenant hitlérien. Le modèle allemand qui se diffuse, le modèleallemand qui est en question, le modèle allemand qui fait partie de notre actualité, quila structure et qui la profile sous sa découpe réelle, ce modèle allemand, c’est la possibilité d’une gouvernementalité libérale » (ibid., p. 197-198) qui implique une forme particulière de l’État de droit (ibid., p. 175-184). En somme, il s’agit de ne pas confondrel’analyse de l’État de droit allemand actuel avec « le grand fantasme de l’État para-noïaque et dévorateur » (ibid., p. 194). Cette démarche ne conduit naturellement pas àune posture acritique ; bien au contraire, elle établit la critique sur le sol solide des faitset lui donne par conséquent sa force. Elle explique ainsi pourquoi M. Foucault a pus’engager en faveur de l’ancien avocat de la RAF, Klaus Croissant, lorsque celui-ci a faitl’objet d’une décision d’extradition, tout en condamnant toute forme de terrorismesubversif qui se légitimerait par la seule lutte antifasciste. Sur cette question, voir«Michel Foucault : la sécurité et l’État » (entretien avec R. Lefort), Tribune socialiste, 24-30 novembre 1977, p. 3-4, in Foucault, M., Dits et écrits, 1954-1988, t. III : 1976-1979, éd. établie sous la dir. de D. Defert et F. Ewald, Paris, Gallimard, 1994, p. 383388;Google Scholar voir également Sennellart, Michel, « Situation des cours », in Foucault, M., Sécurité, territoire, population. Cours au collège de France (1977-1978), éd. par M. Sennellart, sous la dir. de F. Ewald et A. Fontana, Paris, Gallimard/Le Seuil, 2004, p. 379411, icip. 385-387.Google Scholar

100 - Klaus ESCHEN, «Das Sozialistische Anwaltskollektiv », inW. KRAUSHAAR, Die RAF..., vol. 2, op. cit., p. 957-972, ici p. 963.

101 - Lettre reproduite dans Ulf G. STUBERGER (dir.), « In der Strafsache gegen AndreasBaader, Ulrike Meinhof, Jan-Carl Raspe, Gudrun Ensslin wegen Mordes u.a. » : Dokumenteaus d. Prozeß, Francfort, Syndikat, 1977, p. 206-207.

102 - StV, f. 13156-13157. Par ce courrier, le juge Mayer a en effet enfreint l’article 39 dela loi régissant la fonction de juge (Richtergesetz), ainsi que l’article 353d-3 du Code pénal.

103 - StV, f. 13171-13176.

104 - StV, f. 13223.

105 - Ainsi qu’il le dira par la suite dans une interview dans la presse : « ‘Akten zu, Fallaus’. SPIEGEL-Interview mit Stammheim-Verteidiger Manfred Künzel », Der Spiegel, 25 avril 1977.

106 - Le document est reproduit inU. G. STUBERGER (dir.), « In der Strafsache... », op. cit., p. 224-225.

107 - StV, f. 13221-13222.

108 - Frankfurter Rundschau, 21 février 1977.

109 - Ibid., 22 février 1977.

110 - Ibid.

111 - Pierre LASCOUMES et Jean-Pierre LE BOURHIS, «Des ‘passe-droits’ aux passes dudroit. La mise en œuvre socio-juridique de l’action publique », Droit et société, 32, 1996, p. 51-73.

112 - Frankfurter Rundschau du 29 avril 1977.

113 - Garapon, Antoine, Le gardien des promesses. Le juge et la démocratie, Paris, O. Jacob, 1996.Google Scholar

114 - Extraits d’un entretien avec le juge Prinzing dans Der Tagesspiegel du 10 octobre2007.

115 - Pour une analyse du droit en contexte et en action, Dupret, Baudouin, Le jugementen action. Ethnométhodologie du droit, de la morale et de la justice en Égypte, Genève/Le Caire, Droz/CEDEJ, 2006.Google Scholar

116 - Sur l’attente et l’anticipation de droit, P. Moor, Pour une théorie micropolitique..., op. cit., p. 195.

117 - «Les faits traités par le droit et portés à la connaissance des juges n’ont, remarqueY. Thomas, aucune consistance propre, s’ils n’ont d’abord reçu leur signification d’uneloi. En droit, la question de fait est toujours posée après la question de droit » : Thomas, Yan, «La Vérité, le temps, le juge et l’historien », Le Débat, 102, 1998, p. 1736, ici p. 22.CrossRefGoogle Scholar

118 - Witz, Claude, Le droit allemand, Paris, Dalloz, 2001, p. 4959.Google Scholar

119 - «Wir wollen eine offene Diskussion unter allen, die hier um Veränderung kämp-fen » (1992), in M. Hoffmann (dir.), Rote Armee Fraktion..., op. cit., p. 420-454.

120 - RAF, Texte sans titre [déclaration de dissolution], Radikal, 155, 1998, p. 94-99.