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Moulin mystique. A propos d'un chapiteau de Vézelay : figures allégoriques dans la prédication et dans l'iconographie romanes

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

Michel Zink*
Affiliation:
Université de Paris IV

Extract

Moïse, vêtu d'une tunique courte et les pieds chaussés comme un esclave, se penche sur l'entonnoir d'un moulin, où il déverse le contenu du sac de grain qu'il porte sur son épaule. Saint Paul, pieds nus et en toge de citoyen, tend un autre sac sous la meule pour recueillir la farine. La roue du moulin figure une croix inscrite dans un cercle.

La croix est au centre du chapiteau, dont toutes les lignes suivent la courbe de la roue : le corps des deux personnages, les plis de leurs vêtements, tourbillonnant aux hanches sous le vent de l'Esprit, le sac à demi vide sur l'épaule de Moïse, la barbe de saint Paul, le geste de son bras entraîné par le mouvement de la roue et corrigeant la courbe inverse du visage familier, au front et au menton fuyants, au nez busqué, aux grands yeux à fleur de tête.

Summmary

Summmary

Each of the allegorical elements which goes into the composition of the ambitious capitol of the moulin mystique at Vézelay, can be found in sermons addressed in the vulgar language to the general public. But in this latter context, the meaning, although not exactly different, has undergone a reorientation ; it is no longer directed towards theological speculation, but rather towards edification. The capitol thus gains a new meaning which is a moral sense. Seen in this light, it can be interpreted either allegorically or tropologically.

Type
Mythes et religions
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1976

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References

Notes

1. Le thème du moulin mystique est assez rare dans l'iconographie de cette époque. Tel qu'il est traité à vézelay, il n'a guère d'équivalent que sur un vitrail de saint-denis à peu près contemporain (vers 1140) : on y voit des prophètes apporter des sacs de blé au moulin dont saint paul tourne la roue (cf. Grodecki, L., « Les vitraux allégoriques de saint-denis », Art de france, 1961, I, 22/24Google Scholar). Voir Lindet, L., « Représentations allégoriques du moulin et du pressoir dans l'art chrétien », Rev. Arch. 36, 1900, Pp. 403413 et l'article «Mystische mùhle » du Lexikon der christlichen Ikonographie, t. pii, pp. 297-299, Rome, Herder, 1971, qui cite des sources patristiques.Google Scholar

2. Bernard, Saint, Sermones Per Annum, Deuxième sermon pour l'epiphanie. Texte original latin: éd.Google Scholar Leclercq, D. J., Sancti Bernardi Opéra, T. Iv, p. 301, 1. 7-9, Rome, éditions Cisterciennes, 1966.Google Scholar Traduction En Langue d'oïl : Ms. Bn. Fr. 24768 P 80 V°, éd. Fôrster, W., « Altfranzôsische Uebersetzung Des xiii. Jahrhunderts Der Predigten Bernhards Von Clairvaux », dans Romanische Forschungen, Ii, 1885, p. 96, 1. 36 à p. 97, 1. 1.Google Scholar « Mais Vous (Les Rois Mages), Vous Le Voyez Vraiment (Le Roi) Sous Le Diadème Dont Sa Mère l'a Couronné, Sous Le Sac de la Condition Mortelle, Dont Il Dit En Ressuscitant: ‘tu As Déchiré Mon Sac et Tu M'as Couvert de Joie'.»

3. Bernard, Saint, Sermones Per Annum, Premier Sermon Pour l'epiphanie, éd. Leclercq, D. J., T. Iv, p. 292, 1. 22 à p. 293, 1.1.Google Scholar Traduction Bn. Fr. 24768 F° 75 R°, éd. W. Fôrster, p. 91, 1. 3-6. « Voici que Dieu Le Père a Envoyé sur la Terre Comme Un Sac Rempli de Sa Miséricorde : Un Sac, Dis-Je, Déchiré dans la Passion Pour que se Répande Ce Qui Est Caché En Lui, Notre Rançon ; Un Sac En Vérité, Petit Peut-être, Mais Plein. »

4. Saint Bernard, , Sermones Per Annum, Premier Sermon de Noël, éd. Leclercq, D. J., T. Iv, p. 251, 1. 1-4.Google Scholar Traduction Bn. Fr. 24768 F° 51 R°, éd. W. Fôrster, p. 62, 1. 34-37. « Il N'est Pas étonnant Cependant que Nous Cherchions dans la Passion Ce que Le Christ a Apporté dans Sa Nativité : C'est Alors En Effet, Quand Le Sac Fut Déchiré, Qu'il Répandit l'argent Qui y était Caché Comme Prix de Notre Rachat. »

5. Voir D. J. Leclercq, T. Iv, p. 251, Note 4.

6. Commentaire du Psaume 29, Bn. Fr. 13316 F° 23 V° ; et Ms. Durham a ii 11 F°81 R2. « Mais quand le sac est déchiré, alors on voit ce qu'il y a à l'intérieur. De même l'humanité de jésus n.s. Avait recouvert la divinité, si bien que celle-ci n'apparaissait pas. Mais quand le sac, c'est-à-dire la chair, fut déchiré par la mort de la croix, quand les nobles trous y furent faits au côté, aux pieds, aux mains, alors apparut le froment de la divinité dont nos âmes sont repues et engraissées ». Dans le même ms. Bn. Fr. 13316, Le sermon [s]piritus domini replevit (f° 26 r°- 27 v°) contient une image analogue, à ceci près que le sac de blé est remplacé par une boîte d'onguent : à l'origine, dit ce texte, la foi en dieu était enfermée dans jérusalem comme un onguent dans une boîte. Quand les juifs percèrent le corps du christ, la bonne odeur se répandit par les trous des mains, des pieds et du côté et couvrit toute la terre (f° 26 r°).

7. Dedisti Clipeum Salutis Tue (…). Ces Paroles Sunt Escrites El Livre Des Rois, Ms. Mazarine 788, F°72r1.

8. Bernard, Saint, Sermones In Cantica Ix, Leclercq, D. J., T. 1, p. 47, 1. 26.Google Scholar Traduction En Langue d'où : Ms. Nantes Dobrée 5, F° 26 R°.

9. Sermon Ascendant In Palman et Appréhendant fructus ejus et cetera. Salemons Dist Ceste Parole, Ms. Arsenal 2058 F° 67 V L . « Ils Ne Seront Pas Moulus Si Gros Qu'ils Le Sont Maintenant, Mais Ils Seront Très Subtils. » Ce Sermon Est Contenu, à Notre Connaissance, dans Treize Manuscrits. la Version Qui se Lit dans Le Ms. Berlin Nationalbibl. Lat. 264 In-8”, F° 82 V°-127 V° a été éditée Par Christ, K. dans Mittelalterliche Hundschrifte. Festgabe H. Degering, Leipzig, 1926, Pp. 5881.Google Scholar

10. Ms. Mazarine 788 F 25 R 1-2. « et Il y a Une Purification du Grain Qui Est Faite Par Le Fléau. et Il y a Une Purification de la Vendange Qui Est Faite Par Le Pressoir. a l'image de Toutes Ces Sortes de Purification, Les Tribulations Servent à Purifier Le Coeur Des élus de Notre Seigneur. »

11. Sermon Uns Rois Nobles, Ms. Mazarine 788 F° 174 V2. « … et il jeta le malheureux fils du roi dans la prison de désespoir, dans laquelle le diable vient le trouver ; et il lui fait moudre son blé à la meule de l'absence de piété dans l'entourage, au moulin de mauvaise conscience. Quelle douleur ! » Ce sermon est une traduction très amplifiée de deux paraboles de saint bernard mises bout à bout. Voici le passage correspondant à celui qui vient d'être cité dans le texte original de saint bernard : « Vinctusque in desperationis carcere, ubi in circuitu impii ambulant, in mola illa impiae circuitionis cogitur molere emolumento malae conscientiae. Proh dolor ! » (J. Leclercq, T. Vi, 2, p. 262). on note que l'adaptation française développe la métaphore de façon plus concrète que le texte original, où il n'est pas question de blé et où le diable n'est pas nommé.

12. « Nunc vero tribus malignissimis et validissimis ventis expositi sumus, carni, diabolo et mundo, qui conscientiam illuminatam moliuntur exstinguere, insufflantes in corda nostra desideria mala, motus illicitos et ita te repente turbantes, ut vix praenoscere valeas unde venias aut quo vadas. » (J.|Leclercq, T. Iv, p. 215, 1. 17-21). « Mais or sommes nos entre trois venz ki sunt très maligne et très fort, c'est la char, lo diaule et lo munde, ki se poinent d'estignre la consci[en]ce ki est enlumineie per les malvaiz desiers et les mais enmovemenz k'il sofflent en noz cuers : ensi qu'il subitement nos torbent si fièrement ke nos ne poiens conostre dont nos vigniens ne quel part nos ailliens. » (Bn. Fr. 24768 F°. 28 V°-29 R°, éd. W. Fôrster, p. 36, 1. 5-10). « Mais à présent nous sommes exposés à trois vents très mauvais et très violents, la chair, le diable et le monde, qui s'efforcent d'éteindre la lumière de la conscience, soufflant dans notre coeur les désirs mauvais, les mouvements interdits, et nous troublant si soudain que nous avons du mal à connaître d'où nous venons et où nous allons. »

13. Sermon Ascendam In Pulmum, cf. Note 9. Voir Sulpice Sévère, Vie de Suint Martin, Chap. X, Dont Le Récit Est Repris Par Jacques de Voragine dans la Légende Dorée.

14. Egressu Est Bestia de Babilonia Habens Capita. Vil, Super Quum Sedet Dominu Habens Fialim (Sic) Auream In Munis (Sic) Suu (Sic) Plénum Mortifero Veneno. Seignors, Oiez que Nos Reconte Un Glorios Damoiseaus…, Poitiers, Bibl. mun. 97, F° 43 V°-45 V° (Voir Boucherie, A., Le Dialecte Poitevin au xiiie siècle, Paris, 1873 Google Scholar) ; Bn. Fr. 24838, F° 93 V°-100 R°. « Une Bête à Sept Têtes Est Sortie de Babylone, sur Laquelle Est Assise Une Femme Tenant dans Ses Mains Une Coupe d'or Remplie d'un Poison Mortel. »

15. Ms. Arsenal 2058, F* 17 R I . « Par Cette Naissance, Cet Enfant S'est Livré Pour Nourrir Notre Coeur, Enveloppé de Pauvres Langes En Forme de Pain. »

16. Commentaire Inédit de Pierre Le Mangeur sur l'évangile de Saint Matthieu, Paris Bn. Lat. 15269, F” 106 V°, Cité Par Landgraf, A., Dogmengeschichte, Ii, 1, p. 254, n°91Google Scholar, Et Repris Par Chàtillon, J., Achard de Suint-Victor. Sermons Inédits, Paris, Vrin, 1970, p. 122.Google Scholar «c'est Pourquoi [Les Tenants de Cette Opinion] Rapportent que Cet éclat N'était Pas dans Le Corps du Seigneur Mais dans l'air Autour de Lui… a Cette Opinion S'accordent Les Peintures sur Les Murs Des églises, Où la Transfiguration Est Représentée. d'habitude Des Rayons de Lumière éclatante Sont Peints Autour du Corps du Seigneur, Mais En Sont Séparés. »