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Le crédit à la consommation des classes populaires à la Belle Époque: Invention, innovation ou reconfiguration ?
Published online by Cambridge University Press: 20 January 2017
Résumé
Durant la Belle Époque se construit en France une économie de la consommation de masse qui passe par l’accès massif au crédit des classes populaires. Ce phénomène ne peut pourtant se comprendre comme un simple changement d’échelle, car il s’agit d’un véritable réagencement de l’ordre social du crédit, de l’identification économique aux processus de sanction. Ces différentes facettes de la relation de crédit sont abordées successivement à travers deux dossiers documentaires : l’organisation du crédit à destination des classes populaires mise en place par les Grands Magasins parisiens Dufayel et les réformes introduites par la loi du 12 janvier 1895 sur la saisie-arrêt des salaires des ouvriers. La réorganisa- tion du système de crédit se traduit par l’apparition conjointe de nouvelles médiations et de nouvelles mises à distance, ainsi que par la multiplication des scènes sur lesquelles se joue la dette – entre espace commercial, tribunal et monde du travail.
Abstract
During the “Belle Époque” period a mass consumption economy was built in France through a widespread access to credit for the working classes. Nevertheless, this phenomenon can't be simply understood as a change of scale, for it is a truly new layout of the credit's social order, from economic identification to sanction's process. These different phases of the credit relationship are successively approached through two documented cases: first, the credit organisation formed by the Parisian department store Dufayel for the working classes and second, reforms introduced by the law of the 12th January 1895 about workers’ garnishment. The shake-up of the credit system results in the joint emergence of new mediations and new distancing, along with the increasing number of stages where the debt is played –between commercial world, court and working places.
- Type
- Histoire du crédit (XVIIIe-XXe siècle)
- Information
- Copyright
- Copyright © Les Éditions de l’EHESS 2012
Footnotes
Je remercie Christophe Charle, Anne-Marie Sohn, Claire Zalc, Claire Lemercier et Mathilde Rossigneux-Méheust pour leurs relectures attentives et pour leurs conseils.
References
1- Ce livret de crédit m’a été montré par Pascal Ferlicot, un collectionneur de vieux papiers sur l’histoire du quartier de la Goutte d’Or où se situaient les établissements Dufayel. La conservation des archives privées des classes populaires étant particulièrement rare et aléatoire, ce livret de crédit est une pièce unique et sa représentativité est donc impossible à évaluer. Il permet, par contre, de mesurer des écarts entre le discours des grands magasins et la pratique d’une relation débiteur/créditeur. Pour un exemple d’un carnet de crédit Dufayel vierge, consulter le site internet de P. Ferlicot : http://www.lagouttedor.net.
2- Caron, François, Les deux révolutions industrielles du XXe siècle, Paris, Albin Michel, [1995] 1997 Google Scholar ; Verley, Patrick, Nouvelle histoire économique de la France contemporaine, vol. 2, L’industrialisation, 1830-1914, Paris, Éd. La Découverte, [1989] 2003.Google Scholar
3- Tiersten, Lisa, Marianne in the Market: Envisioning Consumer Society in Fin-de-Siècle France, Berkeley, University of California Press, 2001 Google Scholar ; Auslander, Leora, Taste and Power: Furnishing Modern France, Berkeley, University of California Press, 1996 Google Scholar ; Chessel, Marie-Emmanuelle, Histoire de la consommation, Paris, & Eacute;d. La Découverte, 2012.Google Scholar
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5- Coffin, Judith G., « Credit, Consumption, and Images of Women's Desires: Selling the Sewing Machine in Nineteenth Century France », French Historical Studies, 18-3, 1994, p. 749–783 CrossRefGoogle Scholar, et le chapitre 3 de son ouvrage The Politics of Women's Work: The Paris Garment Trades, 1750-1915, Princeton, Princeton University Press, 1996, intitulé « Selling the Sewing Machine: Credit, Advertising, and Republican Modernity, 1870- 1900 ». Pour une synthèse en français de ces deux textes, voir Id., « Naissance d’une consommation de masse en France, 1880-1914 », in Bourgeron, L. (dir.), La révolution des aiguilles. Habiller les Français et les Américains, 19e-20e siècles, Paris, Éd. de l’EHESS, 1996, p. 115–150.Google Scholar
6- Quelques exemples pertinents pour notre étude, parmi la très nombreuse littérature anglaise et américaine sur le sujet : Olney, Martha L., Buy Now, Pay Later: Advertising, Credit, and Consumer Durables in the 1920s, Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 1991 Google Scholar ; Calder, Lendol Glen, Financing the American Dream: A Cultural History of Consumer Credit, Princeton, Princeton University Press, 1999 Google Scholar ; Olegario, Rowena, A Culture of Credit: Embedding Trust and Transparency in American Business, Cambridge, Harvard University Press, 2006 CrossRefGoogle Scholar ; O’Connell, Sean, Credit and Community: Working-Class Debt in the UK since 1880, Oxford, Oxford University Press, 2009 CrossRefGoogle Scholar ; Lauer, Josh, « The Good Consumer: Credit Reporting and the Invention of Financial Identity in the United States, 1840-1940 », Enterprise & Society, 11-4, 2010, p. 686–694.Google Scholar
7- En histoire, voir notamment Laferté, Gilles et al., « Le crédit direct des commerçants aux consommateurs. Persistance et dépassement dans le textile à Lens (1920-1970) », Genèses, 79-2, 2010, p. 26–47 CrossRefGoogle Scholar ; Chatriot, Alain, « Protéger le consommateur contre luimême. La régulation du crédit à la consommation », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 91, 2006, p. 95–119 CrossRefGoogle Scholar ; Effosse, Sabine (dir.), no spécial « Consommer à crédit en Europe au XXe siècle », Entreprises et histoire, 59-2, 2010 Google Scholar. En sociologie, on peut signaler, notamment, l’article de Cusin, François, «Du Mont-de-Piété à la carte de crédit. Évolution du crédit à la consommation », Informations sociales, 64, 1997, p. 40–53 Google Scholar ; Salomon, Danièle, « La transformation du système bancaire français. L’exemple du segment du crédit à la consommation », thèse de doctorat, IEP de Paris/FNSP, 1995 Google Scholar ; dans une perspective plus large, Lazarus, Jeanne, L’épreuve de l’argent. Banques, banquiers, clients, Paris, Calmann-Lévy, 2012 Google Scholar. En économie, les recherches sur la construction sociale de la confiance sont un point de départ important, notamment l’article de Guinnane, Timothy W., « Les économistes, le crédit et la confiance », Genèses, 79-2, 2010, p. 6–25 CrossRefGoogle Scholar. On peut enfin signaler une synthèse publiée par des acteurs du crédit à la consommation, cadres chez Cetelem : Gelpi, Rosa-Maria et Julien-Labruyer, François, Histoire du crédit à la consommation. Doctrines et pratiques, Paris, Éd. La Découverte, 1994.Google Scholar
8- Caron, François, « L’embellie parisienne à la Belle Époque. L’invention d’un modèle de consommation », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 47, 1995, p. 42–57.CrossRefGoogle Scholar
9- Rougerie, Jacques, « Remarques sur l’histoire des salaires à Paris au XIXe siècle », Le Mouvement social, 63, 1968, p. 71–108.CrossRefGoogle Scholar
10- J. G. Coffin, « Naissance d’une consommation de masse en France, 1880-1914 », art. cit., p. 123.
11- Cet arrondissement a été choisi pour deux raisons. D’une part, il s’agit d’un arrondissement populaire, la majeure partie de sa population étant composée d’ouvriers. Cela s’explique par la présence d’industries anciennes (avec, par exemple, l’usine de construction métallique Cail) et par l’installation, à la Belle Époque, d’industries de pointe (mécanique avec les établissements Decauville, ou encore électricité avec les usines Mors). D’autre part, les archives de la saisie-arrêt ont été particulièrement bien conservées dans cette justice de paix, ce qui n’est pas le cas de beaucoup d’autres arrondisse- ments parisiens. Cette étude s’appuie sur les citations à comparaître, les minutes des jugements, les pièces de procédures et quelques dossiers de débiteurs constitués lors des procédures de saisie-arrêt. En raison de leur caractère massif, les minutes des jugements et les citations ont fait l’objet de sondages tous les 10 ans (1893, 1903 et 1913).
12- Saint-Martin, André, Les grands magasins, Paris, A. Rousseau, 1900, p. 92–93.Google Scholar
13- Laferté, Gilles, « De l’interconnaissance sociale à l’identification économique. Vers une histoire et une sociologie comparées de la transaction à crédit », Genèses, 79-2, 2010, p. 135–149 CrossRefGoogle Scholar ; Hautcoeur, Pierre-Cyrille, « Les transformations du crédit en France au XIXe siècle », Romantisme, 151-1, 2011, p. 23–38 CrossRefGoogle Scholar. Pour les mentions de Dufayel, voir J. G. Coffin, « Credit, Consumption, and Images of Women's Desires… », art. cit. ; Williams, Rosalind H., Dream Worlds: Mass Consumption in Late Nineteenth-Century France, Berkeley, University of California Press, 1982 Google Scholar ; Berlanstein, Lenard R., The Working People of Paris (1871-1914), Baltimore, John Hopkins University Press, 1984.Google Scholar
14- Comme Aristide Boucicaut, né dans l’Orne et ancien vendeur, fondateur du Bon Marché en 1852, ou Jules Jaluzot qui crée le Printemps en 1865.
15- d’Avenel, Georges, « Le mécanisme de la vie moderne. Le prêt populaire, Montsde- Piété, Bons Crespins, Crédit Mutuel », Revue des Deux Mondes, LXXIe année, 5e période, t. 1, 1901, p. 167–196, citation p. 181Google Scholar. Cette affirmation s’avère exacte selon l’acte de naissance de Jacques Crespin : Archives départementales de la Manche, 5 MI 1593.
16- Archives départementales de la Seine, V3E/M242, acte de mariage.
17- G. d’Avenel, « Le mécanisme de la vie moderne… », art. cit., p. 182.
18- AD Seine, DQ 7 11109/11280/12201/12482/12724, déclarations de succession.
19- Voir le dossier de la Légion d’honneur, Archives nationales LH/831/24.
20- « Un mécène », Cri de Paris, 24 sept. 1905.
21- Artaud, A., « Les employés et les grèves », Revue populaire d’économie sociale, 1, 5e année, 1906, p. 3–12.Google Scholar
22- Collection Ferlicot, livret de crédit Dufayel.
23- En 1911, 0, 1% de Français et 1, 1% de Parisiens possèdent une fortune supérieure à un million de francs, selon les déclarations de succession. Voir Daumard, Adeline (dir.), Les fortunes françaises au XIXe siècle. Enquête sur la répartition et la composition des capitaux privés à Paris, Lyon, Lille, Bordeaux et Toulouse d’après l’enregistrement des déclarations de succession, Paris/La Haye, Mouton, 1973.Google Scholar
24- AD Seine, D31U3/1607, statuts de la société anonyme fondée en 1917.
25- Annuaire Desfossés, 1913.
26- G. d’Avenel, « Le mécanisme de la vie moderne… », art. cit., p. 181.
27- « Je suis un homme dans le genre de Dieu, disait un jour M. Dufayel à feu Crespin, son associé, j’adore créer, créer des mondes, des mondes immenses. […] Quel défi amusant à relever : acheter un grand terrain vague, et, en quelques mois, y installer tout ce qui constitue la vie moderne : un Casino, dix mastroquets, trois pharmacies, un montde- piété, quatorze hôtels et un dentiste, sans compter un cent de maison », article signé du pseudonyme Bing, dans la revue humoristique Fantasio, collection Ferlicot, s. d. Sur le Nice-Havrais, voir l’album de photographies réalisé entre 1906 et 1913 par L. Poulain, numérisé par la Bibliothèque nationale de France, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84363565.
28- Saint-Martin, A., Les grands magasins, op. cit., p. 37 Google Scholar, et G. d’Avenel, « Le mécanisme de la vie moderne… », art. cit., p. 181.
29- Voir, notamment, Miller, Michael B., Au Bon Marché, 1869-1920. Le consommateur apprivoisé, Paris, Armand Colin, 1987 Google Scholar ; Williams, R.H., Dream Worlds…, op. cit. Google Scholar ; Crossick, Geoffrey et Jaumain, Serge (dir.), Cathedrals of Consumption: The European Department Store, 1850-1939, Aldershot/Brookfield, Ashgate, 1999.Google Scholar
30- Sur l’utilisation des Grands Magasins Dufayel comme salle de spectacle, voir Meusy, Jean-Jacques, Paris-Palaces ou le temps des cinémas, 1894-1918, Paris, CNRS Éditions, 1995 Google Scholar. C’est dans cette salle de cinéma que Jean Renoir, amené par sa gouvernante, a vu ses premiers films.
31- La Nature, no 1184, 8 févr. 1896.
32- Sur les innovations commerciales et architecturales des grands magasins, non spécifiques à Dufayel, voir Benson, Susan Porter, « Palace of Consumption and Machine for Selling: The American Department Store, 1880-1940 », Radical History Review, 21, 1979, p. 199–221 CrossRefGoogle Scholar ; Crossick, G. et Jaumain, S. (dir.), Cathedrals of Consumption…, op. cit. ; de Andia, Béatrice et Francois, Caroline (dir.), Les cathédrales du commerce parisien, grands magasins et enseignes, Paris, Action artistique de la Ville de Paris, 2006.Google Scholar
33- G. d’Avenel, « Le mécanisme de la vie moderne… », art. cit., p. 182.
34- Collection Ferlicot, livret de crédit Dufayel.
35- J. G. Coffin, « Credit, Consumption, and Images of Women's Desires… », art. cit., p. 754.
36- Couture, Charles, Des différentes combinaisons de ventes à crédit dans leurs rapports avec la petite épargne, Paris, L. Larose, 1904, p. 10.Google Scholar
37- Laurent, Eloi, « Peut-on se fier à la confiance ? », Revue de l’OFCE, 108-1, 2009, p. 5–30 Google Scholar ; T. W. Guinnane, « Les économistes, le crédit et la confiance », art. cit.
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41- L’étude de cas d’Hélène Lemesle fournit de nombreux exemples précis des multiples rôles joués par le concierge au sein d’un immeuble, notamment pour la perception des loyers et la tenue des livres de compte. Voir Lemesle, Hélène, Vautours, singes et cloportes. Ledru-Rollin, ses locataires et ses concierges au XIXe siècle, Paris, Association pour le développement de l’histoire économique, 2003.Google Scholar
42- AD Seine, D15U1/179.
43- Simonin, A., Confessions d’un enfant de La Chapelle, op. cit, p. 28.Google Scholar
44- Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 72.Google Scholar
45- G. d’Avenel, « Le mécanisme de la vie moderne… », art. cit., p. 184.
46- Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 7 Google Scholar ; sur le colportage et son rôle dans les sociétés modernes, voir Fontaine, Laurence, Histoire du colportage en Europe (XVe-XIXe siècle), Paris, Albin Michel, 1993.Google Scholar
47- Perrot, Michelle, Les ouvriers en grève. France, 1871-1890, Paris/La Haye, Mouton, 1973, p. 211 Google Scholar ; sur la petite bourgeoisie et son processus de distinction d’avec les classes populaires, voir Crossick, Geoffrey et Haupt, Heinz-Gerhard, The Petite Bourgeoisie in Europe, 1780-1914: Enterprise, Family, and Independence, Londres/New York, Routledge, 1995.Google Scholar
48- Collection Ferlicot, livret de crédit d’Émile Martin.
49- Pierre GIRIEUD, Souvenirs d’un vieux peintre, s. d., http://www.edartiguelongue.freesurf.fr/souvenir/girieud.php.
50- Même s’ils sont l’entreprise la plus importante, les Grands Magasins Dufayel ne sont en effet pas les seuls à faire crédit aux classes populaires et de nombreuses maisons leur font concurrence : Aux Classes Laborieuses, Aux Enfants de La Chapelle, les magasins du Louvre, le Petit Saint Thomas, Au pèlerin Saint-Jean, par exemple. Ainsi Louis Auger, employé de la mairie du VIIe arrondissement, est endetté, entre 1894 et 1914, auprès d’au moins vingt-deux maisons de nouveautés, dont deux engagements chez Dufayel en 1897 et 1906 : AD Seine, D15U1/467.
51- Geertz, Clifford, Peddlers and Princes: Social Change and Economic Modernization in Two Indonesian Towns, Chicago, University of Chicago Press, 1963.Google Scholar
52- Collection Ferlicot, livret de crédit d’Émile Martin.
53- Simonin, A., Confessions d’un enfant de La Chapelle, op. cit., p. 116.Google Scholar
54- Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 76 Google Scholar.
55- G. Laferté et al., « Le crédit direct des commerçants aux consommateurs… », art. cit.
56- A. Artaud, « Les employés et les grèves », art. cit., p. 9.
57- Sparks, Edith, « Terms of Endearment: Informal Borrowing Networks among Northern California Businesswomen, 1870-1920 », Business and Economic History On-Line, 2, 2004 Google Scholar, http://www.thebhc.org/publications/BEHonline/2004/Sparks.pdf ; Fontaine, Laurence et Weber, Florence (dir.), Les paradoxes de l’économie informelle. À qui profitent les règles ?, Paris, Karthala, 2010.Google Scholar
58- Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 20.Google Scholar
59- AD Seine, D15U1/16/179, conciliations pour dettes de la justice de paix du XVe arrondissement de Paris, 1893.
60- Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 26–27.Google Scholar
61- Ces pièces de procédures ont été conservées de manière aléatoire et incomplète. Les mois de janvier, février et mars 1913 ont été choisis en fonction de ces contraintes : AD Seine, D15U1/215.
62- Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 72–73 Google Scholar ; Saintmartin, A., Les grands magasins, op. cit., p. 90 Google Scholar ; Maroussem, Pierre Du, La question ouvrière, vol. 2, Ébénistes du Faubourg Saint-Antoine, Paris, A. Rousseau, 1892, p. 149.Google Scholar
63- Collection Ferlicot, livret de crédit d’Émile Martin.
64- G. Laferté, « Théoriser le crédit de face-à-face… », art. cit., p. 58.
65- Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 74.Google Scholar
66- Ibid.
67- L’enquête menée dans les archives d’un petit commerce à Lens a toutefois montré l’adoption d’une mise en fiche partielle des clients : dans les années 1960, la commerçante note dans un cahier l’état de la relation par la mention écrite des lettres de rappel envoyées aux mauvais payeurs. En l’absence d’archives de ce type pour la Belle Époque, il est très difficile de comparer. Voir Avanza, Martina, Laferté, Gilles et Penissat, Étienne, «O crédito entre as classes populares francesas: o exemplo de uma loja em Lens », Mana. Estudo de Antropologia Social, 12-1, 2006, p. 7–38 Google Scholar (texte disponible en français, «Le crédit des classes populaires en France de la Libération aux années 70. Le face-à-face au commerçant, l’exemple d’une boutique à Lens », http://www2.dijon.inra.fr/esr/pagesperso/laferte/textemana4.pdf).
68- G. d’Avenel, « Le mécanisme de la vie moderne… », art. cit., p. 185.
69- On retrouve le même contrôle de l’interaction entre les employés attribuant le crédit et les débiteurs dans la banque contemporaine, contrôle amplifié par le passage à l’informatique qui rigidifie les critères pour accorder un crédit. Voir Lazarus, Jeanne, « L’épreuve du crédit », Sociétés contemporaines, 76-4, 2009, p. 17–39.CrossRefGoogle Scholar
70- G. d’Avenel, « Le mécanisme de la vie moderne… », art. cit., p. 185 ; Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 74.Google Scholar
71- Caron, François, Les voies de l’innovation. Les leçons de l’histoire, Paris, Éd. Manucius, 2011.Google Scholar
72- Pohier, Jacques, De la saisie-arrêt et de la loi du 12 janvier 1895 sur la saisie-arrêt des salaires et petits traitements, Paris, A. Rousseau, 1902, p. 1.Google Scholar
73- Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 45.Google Scholar
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77- Il s’agit d’une des thèses de R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale…, op. cit.
78- Pohier, J., De la saisie-arrêt et de la loi du 12 janvier 1895…, op. cit., p. 6.Google Scholar
79- Pour une présentation détaillée du processus législatif et des différentes propositions de réformes, voir Delassault, Paul-Louis, La réforme de la loi du 12 janvier 1895 sur la saisie-arrêt des salaires et petits traitements, Paris, L. Tenin, 1914.Google Scholar
80- Le vote est cependant moins problématique que pour la loi sur les accidents du travail (dix-huit ans écoulés entre le premier projet et l’adoption en 1898) ou celle concernant les retraites ouvrières et paysannes, sur le métier depuis vingt ans lorsqu’elle aboutit en 1910.
81- Proposition de loi sur la saisie-arrêt de Thellier de Poncheville, 5 déc. 1889, parue au Journal officiel, 5 mars 1890, documents parlementaires, no 143.
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85- Couture, C., Des différentes combinaisons de ventes à crédit…, op. cit., p. 46–47.Google Scholar
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87- Saisie-arrêt des salaires et petits traitements. Loi du 12 janvier 1895. Critique. Projet de réforme, Rouen, Léon Gy, 1906, p. 3. Il faut toutefois tenir compte des formalités administratives requises pour la consultation, qui rendent la procédure assez longue.
88- J. Lauer, «The Good Consumer… », art. cit.
89- Ministère du Commerce, de l’Industrie, des Postes et des Télégraphes, Office du travail, Saisie-arrêt sur les salaires, op. cit., p. 19.
90- Voir A. Chatriot, « Protéger le consommateur contre lui-même… », art. cit. ; Effosse, Sabine, « Pour ou contre le crédit à la consommation ? Développement et réglementation du crédit à la consommation en France dans les années 1950 et 1960 », Entreprises et histoire, 59-2, 2010, p. 68–79.CrossRefGoogle Scholar
91- Voir l’ouvrage de référence de Topalov, Christian (dir.), Laboratoires du nouveau siècle. La nébuleuse réformatrice et ses réseaux en France, 1880-1914, Paris, Éd. de l’EHESS, 1999 Google Scholar. Sur les conceptions développées en matière de consommation par ce réseau, Chessel, Marie-Emmanuelle, Consommateurs engagés à la Belle Époque. La Ligue sociale d’acheteurs, Paris, Les Presses de Science Po, 2012 Google Scholar, et Anne LHUISSIER, Alimentation populaire et réforme sociale. Les consommations ouvrières dans le second XIXe siècle, Paris/ Versailles, Éd. de la MSH/Éd. Quæ, 2007.
92- Entre 1895 et 1914, au moins vingt-neuf thèses de droit consacrées exclusivement à cette loi sont soutenues, corpus qui permet de faire une histoire précise des différentes tentatives de réformes.
93- Ministère du Commerce, de l’Industrie, des Postes et des Télégraphes, Office du travail, Saisie-arrêt sur les salaires, op. cit., p. 128.
94- Ibid.
95- Cette proposition de loi est à nouveau soumise par Laurent Bonnevay à la Chambre en 1910 sous la forme d’un amendement.
96- A. Chatriot, « Protéger le consommateur contre lui-même… », art. cit.
97- Chambre syndicale de la vente à crédit, Rapport relatif au projet de loi tendant à l’insaisissabilité des salaires, Paris, A. Baudu, 1906, p. 4 et 17.
98- « Un mécène », Cri de Paris, 24 sept. 1905. La revue Fantasio se moque d’ailleurs de ces prétentions sociales en raillant «M. Dufayel, socialiste admirable, [qui] a mis la dette à portée de toutes les bourses », Fantasio, collection Ferlicot, s. d.
99- Ministère du Commerce, de l’Industrie, des Postes et des Télégraphes, Conseil supérieur du travail, neuvième session (juin 1900), op. cit., p. 443-445.
100- Guernier, Charles, La saisie-arrêt des salaires et traitements. Compte rendu des discussions, Paris, Félix Alcan, 1913, p. 46 Google Scholar, publié avec le concours de l’Association nationale française pour la protection légale des travailleurs. Sur cette association et son rôle au sein de la nébuleuse réformatrice, voir Gregarek, Rainer, « Une législation protectrice. Les Congrès des assurances sociales, l’Association pour la protection légale des travailleurs et l’Association pour la lutte contre le chômage, 1889-1914 », in Topalov, C. (dir.), Laboratoires du nouveau siècle…, op. cit., p. 317–333.Google Scholar
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102- Sur 817 questionnaires recueillis, 681 émanent d’industriels, quarante de commerçants, vingt et un de professions non dénommées, neuf des chambres de commerces et consultatives des arts et manufactures, vingt des chambres syndicales patronales, trente-cinq d’organisations ouvrières et onze d’organisations diverses, d’après le ministère du Commerce, de l’Industrie, des Postes et des Télégraphes, Office du travail, Saisie-arrêt sur les salaires, op. cit., p. XV.
103- Pohier, J., De la saisie-arrêt et de la loi du 12 janvier 1895…, op. cit., p. 32.Google Scholar
104- Le livret ouvrier, instauré en 1803 et supprimé en 1890, a pu servir à noter les dettes des ouvriers envers les patrons, mais il s’agissait d’avance sur salaire, c’est-à-dire de dettes contractées dans la relation de travail. En outre, cette pratique est très contestée et les annotations sont interdites en 1854. Voir Crom, Jean-Pierre Le, « Le livret ouvrier au XIXe siècle, entre assujettissement et reconnaissance de soi », in Gaurier, D., Legal, P.-Y. et Le Gall, Y. (dir.), Du droit du travail aux droits de l’humanité. Études offertes à Philippe-Jean Hesse, Rennes, PUR, 2003, p. 91–100 Google Scholar ; Cottereau, Alain, « Sens du juste et usages du droit du travail. Une évolution contrastée entre la France et la Grande-Bretagne au XIXe siècle », Revue d’histoire du XIXe siècle, 33, 2006, p. 101–120.CrossRefGoogle Scholar
105- Ministère du Commerce, de l’Industrie, des Postes et des Télégraphes, Office du travail, Saisie-arrêt sur les salaires, op. cit., p. 26-27.
106- Ibid., p. 38.
107- Ibid., p. 25.
108- Ibid., p. 27.
109- Ministère du Commerce, de l’Industrie, des Postes et des Télégraphes, Conseil supérieur du travail, neuvième session (juin 1900), op. cit., p. 430-431.
110- Cette pratique ne semble pas marginale, puisque l’enquête de 1899 regroupe cinquante-trois établissements qui déclarent renvoyer systématiquement les ouvriers saisis.
111- Ministère du Commerce, de l’Industrie, des Postes et des Télégraphes, Conseil supérieur du travail, neuvième session (juin 1900), op. cit., p. 45.
112- Ibid., p. 48.
113- Ibid., p. 21.
114- C’est le sociologue Hoggart, Richard qui a, le premier, mis en évidence cette clôture de l’univers populaire dans son ouvrage pionnier La culture du pauvre. Étude sur le style de vie des classes populaires en Angleterre, Paris, Éd. de Minuit, [1957] 1970.Google Scholar
115- AD Seine, D15U1/16 et D15U1/179.
116- Guernier, C., La saisie-arrêt des salaires et traitements…, op. cit., p. 39–40.Google Scholar
117- Ministère du Commerce, de l’Industrie, des Postes et des Télégraphes, Office du travail, Saisie-arrêt sur les salaires, op. cit., p. 125.
118- La communauté des huissiers de l’arrondissement de Rouen, se sentant menacée par la proposition de loi de Laurent Bonnevay, publie un texte défensif qui expose bien son rôle dans le processus judiciaire, Saisie-arrêt des salaires et petits traitements. Loi du 12 janvier 1895. Critique…, op. cit.
119- Boireau, Abel, Saisie-arrêt et cession des petits salaires (loi du 27 juillet 1921), Bordeaux, D. Gomez et Cie, 1923, p. 14.Google Scholar
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124- AD Seine, D15U1/215.
125- Ibid. L’orthographe d’origine est respectée.
126- Ce procédé fait écho aux appels à l’autorité de l’époque moderne, étudiés notamment par Edward P. Thompson ou Simona Cerutti. Cependant, ces historiens examinent des actions collectives. Après la Révolution française et l’instauration d’une justice locale, c’est au contraire une demande individuelle, directe, entre la débitrice et le juge qui s’exprime. Voir Thompson, Edward P., « The Moral Economy of the English Crowd in the Eighteenth Century », Past and Present, 50-1, 1971, p. 76–136 CrossRefGoogle Scholar ; Cerutti, Simona, « Travail, mobilité et légitimité. Suppliques au roi dans une société d’Ancien Régime (Turin, XVIIIe siècle) », Annales HSS, 65-3, 2010, p. 571–611.Google Scholar
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Translation available: Working-Class Consumer Credit During the Belle Époque: Invention, Innovation, or Reconfiguration?*