M. F. Le Lionnais a créé une active Association des Écrivains scientifiques, qu'il dirige avec compétence. Ce groupement a tenu l'an dernier au Palais de la Découverte une discussion sur ce thème : Qui doit vulgariser la Science?

Le sujet est d'actualité, spécialement pour nos sciences pré- et protohistoriques non encore intégrées — ou peu s'en faut — dans l'Enseignement. Il s'ensuit que les livres de bonne qualité scientifique se vendent peu, et que les grands éditeurs s'adressent à des spécialistes de la vulgarisation romancée. Ces derniers font sans doute de leur mieux : ils lisent, en quelques trimestres, quelques manuels et beaucoup de vulgarisations, y glanent une foison de termes spéciaux, de dates, qu'ils comprennent souvent mal, et recherchent avant tout, en bons journalistes, le paradoxe, l'antithèse, l'anecdote à effet. C'est la course au sensationnel, où l'imagination se taille la part du lion.

Nous ne disposions jusqu'à présent, sur le plus complexe et le plus vaste mouvement de la droite française au xxe siècle, que de deux types de travaux, très différents par leurs ambitions et la nature de leur information. Au premier type appartiennent tous les écrits issus directement de membres de l'Action française, ou indirectement d'écrivains de la mouvance de Maurras — Production pléthorique mais toujours suspecte, quels que soient le détachement rétrospectif des auteurs et la qualité de leur documentation ; elle risque en effet d'entretenir une légende autour de l'Action française, d'accentuer le caractère littéraire d'un mouvement dont la place qu'il occupe dans le monde culturel paraît déjà supérieure à son importance effective, sur le plan social et politique.

Grâce au professeur W. H. Chaloner, de l'Université de Manchester, et à M. Alvaro Castillo, spécialiste de l'histoire financière espagnole, il nous est déjà possible d'apporter quelques compléments à des notes trop brèves sur la taille et les tailles.

En Angleterre. Privilégiés par sept siècles d'emploi officiel de la tailleobjet, les historiens anglais pourraient avoir tendance à n'étudier que cet aspect des choses, et à croire à une diffusion par le haut. Ce faisant, ils ne méconnaissent pas le point essentiel : dès le règne de Henri II Plantagenet, chaque shériflf de comté, collecteur d'impôts et de rentes, devait avoir son propre bureau de comptabilité et d'émission de tailles.

Un Livre dont on attendait la publication avec une légitime impatience. Aujourd'hui une œurve belle achevée. Il faut savoir gré à Jean Meuvret et à sa collaboratrice diligente Mme Micheline Baulant d'avoir mené ce travail à son terme, vite et bien. Ce tome II couvre la meilleure partie du XVIIe siécle, de 1621 à 1698. Il est la suite du tome I, publié voici moins de deux ans. Un bref avertissement (p. 1) renvoie à l'introduction commune aux deux livres (t. I, pp. 1-26). Même ordonnance, même méthode, même précision, ajoutons même qualité, partant égal succès. Une œurve, qui, par delà la VIe section de l'École Pratique des Hautes-Études, le mot n'est pas excessif, honore l'ensemble de l'École historique française.

Les historiens s'accordent sur le fait que l'économie de l'Europe au nord des Alpes a traversé une phase dépressive de longue durée pendant les XIVe et XVe siècles (arrêt de l'essor démographique, contraction de la production agricole, stagnation des prix des céréales, etc.) et que le problème qui se pose maintenant est celui des causes et des modalités de cette tendance à la stagnation. Mais en ce qui concerne la péninsule italienne, la question n'est pas encore résolue.

En 1949, M. Cipolla avait déjà mis l'accent sur la stagnation de l'économie italienne au XIVe siècle, et avait analysé le caractère « rural » de la reprise du XVe siècle.

Plaignons l'historien qui se voue ou se vouera à redire notre époque et son monde : le xxe siècle reste un sphinx redoutable, parce que prolixe.

Presse écrite, parlée ou filmée, enquêtes, statistiques : un demi-siècle de vie successive, de plans, de guerres, d'entreprises, tout cela s'ouvre à qui veut s'y livrer. On plonge, on se ravit ; mais comment ressortir ?

Pour l'historien, voici donc le temps de l'abondance. C'est dire : celui de la facilité ; alors que ce devrait être celui d'une rigueur supplémentaire. Le présent est à nous, l'histoire de notre temps règne aux devantures des libraires.

Confronter dans un même ouvrage l'Inde et le Japon d'aujourd'hui peut paraître à première vue une entreprise mal justifiée. Comment appliquer les mêmes critères d'estimation à deux nations différentes jusqu'à la contradiction ? D'un côté, une société industrielle parmi les plus puissantes du monde, totalement alphabétisée, très fortement urbanisée, ramassée sur quelques îles étroites, espérant tout du commerce et de la mécanisation, et tirant une bonne part de sa fierté nationale de sa traditionnelle indépendance.

Les sources de l'histoire de l'Afrique noire, semblent pour une bonne part des sources orales. Mais s'agit-il bien de sources ?

Chez les africanistes le contraste est net entre l'utilisation empirique fréquente qui a été faite de la tradition et certains jugements sévères, ou plus ou moins fondés, portés par ceux qui l'appréciaient sur un plan général, entre l'importance qu'elle risque d'avoir pour l'histoire et l'absence d'une étude d'ensemble sur son utilisation critique. Un chercheur belge vient d'effacer cette inconséquence et cette lacune et son œurve serait-elle médiocre — ce qui n'est pas — que la tentative seule suffirait à faire date dans l'historiographie.

Jean Delumeau a rendu à l'histoire économique, et par delà à toute l'histoire et aux sciences de l'homme, un service qui compte. L'Alun de Rome est un modèle, un modèle à imiter, dans un avenir plus ou moins lointain, et à incorporer, dès maintenant à notre connaissance du monde moderne. Pour situer cet « indice d'activité », on cherche des exemples, et l'on pense, tout naturellement, aux importations d'or et d'argent d'Amérique calculées, on sait comment, voici trente ans déjà, par Earl J. Hamilton ! On n'a pas achevé encore d'en épuiser le contenu. L'Alun de Rome toutes choses étant égales, c'est, pour l'histoire économique, un événement, à bien peu de choses près, comparable aux trésors d'Hamilton. C'est dire assez qu'on n'en épuisera pas, d'un coup, le contenu.

Organisé par M. Besterman, directeur de l’ « Institut et Musée Voltaire » de Genève, le « premier congrès international sur le siècle des lumières » a tenu ses assises à Genève et au château de Coppet en juillet 1963. Dès l'automne, les communications faites à ce congrès ont été éditées, à quelques rares exceptions près, dans les volumes XXIV à XXVII des « Studies on Voltaire and the eighteenth century » : en tout, quatre-vingt-huit communications, près de deux mille pages.

LE premier tome de l'étude que M. CACHO VIU consacre à L'Institution libre d'Enseignement nous conduit jusqu'en 1881, c'est-à-dire cinq ans après sa fondation, à peine davantage depuis que les événements de la Restauration espagnole ont évincé de l'Université centrale de Madrid les derniers maîtres du krausisme. Le rationalisme théiste de Krause, découvert par Sanz del Rio dès 1845 et choisi par lui comme l'instrument d'une rénovation philosophique et civique de l'Espagne, avait rencontré un succès rapide — qu'il ne connut jamais en Allemagne — bien avant que ne paraisse L'Idéal de l'Humanité oeuvre essentielle de Krause, traduite et adaptée en 1860 par Sanz del Río.

La grosse thèse de M. J. Roger est plus et moins qu'une histoire de la recherche biologique aux XVIIe et XVIIIe siècles. Si elle précise, discute et complète sur plus d'un point l'ouvrage classique d'E. Guyénot, elle demeure, pour l'essentiel, une histoire des découvertes et des doctrines. On y trouvera peu d'éléments à verser au dossier de cette « archéologie » de la perception scientifique que tente par exemple, pour les dernières années du XVIIIe siècle, un livre récent de Michel Foucault . Fidèle aux méthodes éprouvées de l'histoire des idées, l'auteur a su toutefois leur faire donner tout ce qu'elles pouvaient produire.

Deux thèses de géographie humaine méditerranéenne ont été soutenues récemment, presque en même temps, celle de Renée Rochefort sur la Sicile, celle de Roger Livet sur la Basse-Provence. Milieux humains, à vrai dire fort différents, mais cadres naturels qui présentent bien des points communs, et types d'économie agricole, ancienne et moderne, qui s'apparentent. Or peu d'ouvrages sont aussi dissemblables dans leur conception, leur problématique, leurs méthodes. Leur confrontation semble illustrer un tournant dans l'histoire de la géographie.

« Il ne s'agit pas pour nous économistes, quand nous étudions des questions d'histoire économique, de refaire l'histoire, car nous n'avons pas les qualifications ni l'expérience qu'ont en ce domaine les historiens, mais d'utiliser le travail de ceux-ci à des fins qui nous sont propres. » Reprenant à son compte cette phrase du Professeur J. Lhomme, M. Bairoch, dans son livre Révolution Industrielle et Sous-Développement, n'en a pas moins fait œ d'historien autant que d'économiste, même s'il ne l'a pas cherché. Son propos, « la fin qui lui est propre », est de trouver pourquoi le démarrage des pays sous-développés qui ne s'est pas fait au XIXe siècle est encore si difficile au xxe.