Parmi les heureuses conséquences qu'ont produites indirectement les résolutions de la Conférence de Genève de 1863, l'une des plus imporlantes est, sans contredit, l'émulation éveillée chez d'anciens ordres de chevalerie, sortis depuis peu d'une torpeur plusieurs fois séculaire et dont les attributions avaient la plus grande analogie avec celles des Sociétés de la Croix rouge nouyellement créées. On sait, par exemple, le rôle utile qu'ont joué, dans l'armée allemande, pendant ses dernières campagnes, les Ordres de Saint-Jean de Jérusalem et de Malte.

Dans notre précédent Bulletin, nous n'avons pu que signaler laconiquement la perte que venait de faire la Société française en la personne de son présídent; mais nous annoncions l'intention de revenir sur la carriére de cet homme éminent. Aujourd'hui nous sommes heureux de pouvoir réaliser ce désir, grâce à l'obligeance de notre correspondant de Paris, qui a bien voulu nous communiquer l'éloge de M. le comte de Flavigny, lu par M. le comte de Beaufort a l'assemblée générate de la Société françhise, le 27 décembre dernier. Ce document devant ètre publié en France, nous n'en reproduirons ici que la dernière partie, qui retrace la carrière de M. de Flavigny.

L'activité de la Société de secours est actuellement très-limitée. A côté des difficultés générales qui surgissent partout en temps de paix, il y a deux raisons particulières qui s'opposent à un progrès décidé.

On se souvient que, dans-notre précédente livraison, nous avons inséré (p. 66), touchant l'abus du brassard international, une note qui nous avait été adressée par l'un de nos honorables correspondants de La Haye. Cette communication a fourni à M. le major Burgess l'occasion de nous remettre en meémoire les opinions émises sur le même sujet, à la suite de la guerre de 1810–71, par les membres et agents de la Société anglaise de la Croix rouge, opinions qui ont eété publiées par cette société comme réponses aux questions 5 et 6 de son consciencieux questionnaire. II nous a paru qu'en raison de l'extrême importance de leur objet, la traduction d'un certain nombre de fragments empruntés à l'ouvrage dont nous parlons ne serait pas déplacée dans ce Bulletin, et pourrait aider à la solution d'un des problèmes qui préoccupent le plus, et è juste titre, les amis de notre œuvre.

Notre ami et ancien collègue de la Conférence de 1863, M. le docteur Nicasio Landa, de Pampelune, nous a envoyé un spécimen d'une petite trousse de pansement qu'il a imaginée, et que chaque soldat en campagne devrait porter sur lui.

Elle a été trouvée si utile qu'on n'a pas hésité à la répandre par milliers dans l'armée républicaine actuellement en campagne.

Le docteur de Mooij, médecin de première classe dans l'armée néerlandaise, est parvenu, après de persévérantes recherches et des expériences répétées, à construire un brancard à roues qu'il appelle Léchophore, et qui paraît destiné à rendre de réels services. Jusqu'à présent on s'était heurté, dans la construction des brancards à roues, à l'impossibilité de maintenir ces appareils en équilibre, soit pendant qu'on y déposait le blessé sans le secours de plusieurs hommes, soit pendant le transport, ce qui nécessitait, de la part du brancardier, une dépense de force qui l'épuisait rapidement. Le Dr de Mooij a cherché à résoudre ce problème et paraît y être parvenu, en plaçant le centre de gravité au-dessous de l'essieu qui relie les deux roues du brancard, au lieu de le placer au-dessus, ainsi que cela s'était toujours fait.

M. le Dr Wittelshöfer, président de l'Exposition du service de santé militaire, et MM. les professeurs Drs Mundy et Billroth, prévoyant avec regret que le matériel réuni à Vienne allait se disperser sans qu'on l'eut examiné au point de vue des services qu'il est appelé à rendre et sans avoir été expérimenté, ont pris l'initiative d'une conférence d'un caractère purement privé, à laquelle ils ont convoqué un certain nombre de personnes compétentes. Voici la circulaire par laquelle ces Messieurs ont annoncé et convoqué cette réunion

Le rapport de la Société badoise de secours nous apprend qu'en suite d'un accord conclu, le 18 novembre 1871, entre la Société badoise de secours (hommes) et la Société des dames badoises, ces deux sociétés ont adopté une administration commune. La direction supérieure, pour les affaires qui touchent aux deux associations, a été confiée à un comité composé de trois délégués par société, et appelé le Comité général de la Société badoise de secours. Le nombre des membres de ce comité, fixé primitivement à 6, a été augmenté et porté à 12. Cet arrangement est la conséquence de l'action combinée des deux sociétés pendant la guerre. Le nouveau comité fonctionne depuis le mois de janvier de l'année 1872. L'administration de la fortune acquise par les deux sociétés appartient au Comité général, et les sociétés unies portent le nom collectif de Société badoise de secours (Badischer Landes-Hilfs-Verein).

Une tentative intéressante et éminemment louable a été faite par le lieutenant général J. van Swieten, commandant en chef de l'expédition hollandaise contre Atchin. En se mettant en campagne, il a écrit au sultan, son ennemi, une lettre destinée à lui exposer les principes d'humanité admis par les peuples civilisés pour la conduite de la guerre et à lui en proposer l'adoption, déclarant que, quant à lui, sa ferme intention était de s'y conformer. Il va de soi que les règles inscrites dans la Convention de Genève sont du nombre de celles que l'honorable général préconisait, et ce serait assurément un beau triomphe s'il avait réussi à les faire mettre en pratique par une nation aussi arriérée dans les voies de la civilisation que le sont les Atchinois. C'est là une question de fait que nous chercherons à éclaircir; mais, en attendant des renseignements positifs sur ce qui s'est passé, nous mettrons sous les yeux de nos lecteurs la lettre du général van Swieten, dont nous empruntons le texte à la Revue de droit international et de législation comparée, qui se publie à Gand.

Au mois d'avril dernier, le Conseil de la Société française a réuni au siége du Comité central, à Paris, les représentants des comités départementaux.

Nous avons si rarement l'occasion de parler de l'Italie et de l'œuvre de la Croix rouge dans ce pays, qu'on serait tenté de croire qu'elle y est ou complétement ignorée, ou du moins assez négligée. On se tromperait cependant si on le supposait, et les rapports annuels du Comité central de Milan montrent bien que, si la Société italienne de secours fait peu de bruit, elle n'en travaille pas moins.

Le dernier rapport du Comité central néerlandais nous apporte le compte rendu de la séance de la Croix rouge, tenue le 15 septembre 1873 à La Haye. Ce compte rendu renferme: 10 le rapport du secrétaire du Comité central, M. le Dr Werwey, sur les années 1871 et 1872; — 20 la décision du Comité central relativement à la proposition touchant le mode de nomination des membres du Comité, soumise à la ratification du roi; — 30 la discussion et la décision prise sur l'emploi du matériel de toute espèce réuni par la Croix rouge pendant la dernière guerre; après une longue discussion, il fut décidé de s'en remettre à la Commission des modèles pour qu'elle fît un choix de ce qu'il fallait garder et une répartition judicieuse du reste aux sous-comités qui lui en feraient la demande; — 40 la discussion sur un projet général de règlement pour les Comités de la Croix rouge, proposé par le Comité d'Utrecht; la décision a été ajournée; — 50 enfin des détails sur les faits et gestes de la Société pendant la guerre de Sumatra, concernant plus spécialement Java.

« Les Sociétés de la Croix rouge qui dépendent du Comité soussigné, viennent d'éprouver une perte douloureuse par la mort de M. le professeur Dr Löffler, médecin général, sous-directeur de l'Institut médico-chirurgical Frédéric-Guillaume, mort le 22 de ce mois, après une courte maladie, dans sa 59e année. Ce que le défunt a été pour l'État et pour l'armée, ce qu'il a été appelé à faire par ses éminentes capacités pendant ses trente-sept années de service et dans quatre campagnes, comme médecin militaire distingué, écrivain, directeur et professeur des établissements de médecine militaire, les efforts, enfin, qu'il a tentés avec le zèle le plus persévérant pour la réforme du service de santé militaire prussien, efforts qu'il a poursuivis avec une rare énergie et qui ont été couronnés de succès, — le recommandent à notre estime, et le souvenir en demeurera éternellement dans les annales de la médecine militaire allemande.

Dans une brochure intitulée : Du champ de bataille à la place de pansement (Vom Gefechts- zum Verband Platze), le Dr Antoine Vogl, médecin d'état-major dans l'armée bavaroise, a consigné le résultat des observations qu'il a recueillies pendant la dernière guerre. Sans entrer dans des détails techniques de médecine et de chirurgie, nous pourrons néanmoins recueillir dans ce travail des idées et des renseignements qui ne manquent point d'intérêl.

Le gouvernement néerlandais déploie, tant en Europe qu'aux Indes orientales, une grande activité en vue de la seconde expédition contre les Atschinois. En attendant la reprise des hostilités, une forte escadre continue à bloquer les côtes situées à l'extrémité septentrionale de l'île de Sumatra.

Le Comité central de la Croix rouge des Indes néerlandaises a droit à la gratitude du corps expéditionnaire combattant dans les eaux et sur le territoire de l'empire d'Atchin.

Permettez-moi d'être auprès de vous l'interprête de la reconnaissance des officiers et des soldats qui ont été témoins de l'action bienfaisante de la Croix rouge ou qui en ont éprouvé les effets salutaires.

Par lettre du 1–13 mars 1874, nous avons été informés officiellement de l'élection du lieutenant généal A. Baumgarten comme président, et des lieutenants généraux Guédéonoff et baron Delvig comme vice-présidents du Comité central russe de secours aux militaires blessés et malades.

La littérature de la Croix rouge s'enrichit chaque jour, et chaque jour de nouveaux points de vue, des idées nouvelles surgissent; mais le champ est vaste, et longtemps encore les amis de l'humanité y trouveront à utiliser leurs nobles facultés. A peu d'exceptions près, cependant, les auteurs qui ont écrit sur ce sujet se sont préoccupés de la situation présente de l'œuvre ou des exigences nouvelles que l'avenir pourrait lui imposer. Bien peu ont songé à remonter le cours des âges, pour rechercher si l'idée genéreuse qui a produit la Convention de Genève n'avait pas des antécédents dans l'histoire.

Par lettre du 21 mai 1873, le Comité central beige nous a informés qu'il songe à profiler de la période de paix actuelle « pour se reconstituer et s'établir sur des bases plus larges et avec des formes plus complètes. » II n'a cependant point encore pris de résolutions à ce sujet, et s'est borné à confier provisoirement les fonctiotfs de secrétaire à M. Henri Manceaux, éditeur à Bruxelles, en remplacement de M. le Dr van Holsbeek, démissionnaire.