Un exercice sanitaire « en grand » et de nature à montrer la façon magistrale dont l'Allemagne s'efforce de préparer, pour les blessés d'une guerre éventuelle, les secours de gens éclairés, a été exécuté le 20 octobre dernier par les colonnes sanitaires hessoises, savoir celles de Mayence, Darmstadt, Worms, Offenbach et Bingen, auxquelles s'était jointe celle de Francfort; dans le voisinage de l'emplacement choisi, un train sanitaire muni de tous les perfectionnements modernes, et sur le Rhin, plusieurs bateaux étaient prêts à recevoir des blessés qu'il s'agissait d'évacuer. La supposition générale était, en effet, qu'une bataille avait eu lieu autour de Mayence, et que les blessés devaient être emmenés loin du sol réputé ennemi. Cet exercice, auquel participèrent des diaconesses de la Société Alice et d'autres infirmières, réussit à tous égards; après avoir reçu les premiers soins que nécessitait leur état supposé, les blessés furent évacués, les uns en wagon, les autres en bateau. Les autorités qui assistaient à ces manœuvres témoignèrent de leur parfaite satisfaction, en faisant ressortir que jamais encore, en Allemagne, un exercice pareil n'avait eu lieu dans d'aussi vastes proportions.

Le monde médical est unanime à reconnaître que le succès des pansements aseptiques et antiseptiques est absolument compromis par l'attouchement de mains malpropres, et déplore la difficulté qu'on éprouve en campagne à se préserver de ce danger. M. de Mooij, médecin principal en retraite des Pays-Bas, qui a déjà souvent donné des preuves de son esprit inventif, a cherché un moyen de l'écarter et semble y être parvenu dans une certaine mesure.

La Société francfortoise de secours aux militaires blessés a adopté, le 24 mars 1895, de nouveaux statuts qui out été approuvés par le Comité central prussien. Le nombre des membres du Comité est porté de 10 à 19, de manière à ce qu'il puisse faire face à toutes les affaires nouvelles qui viennent absorber son activité. La Société a en outre été autorisée à porter le nom de Société francfortoise de la Croix-Rouge; c'est un honneur dont elle est fière. Par la fusion de l'association de Bockenheim avec elle, la Société a gagné 42 membres et sa fortune s'est accrue de 7,962 marks.

Le président de la Société française de secours aux blessés militaires a fait, de l'expédition de Madagascar, l'objet principal de son rapport sur l'exercice de 1895. L'exposé du service sanitaire organisé à Madagascar forme la première partie de ce compte rendu.

Avec l'assentiment de l'Administration centrale de la Société russe, un nouveau comité de la « Croix-Rouge » s'est fondé à Saint Pétersbourg, par l'initiative de la princesse Lobanow Rostowsky. Il doit sous peu commencer son activité, qui tendra à porter secours et assistance à ceux qui ont rempli des charges militaires et sont actuellement invalides, en congé ou mis à la réserve, ainsi qu'a leur famille. Le Comité se propose en outre d'établir un asile renfermant un pavilion pour officiers et un atelier, et de construire une école pour les boiteux et les estropiés, d'après le modèle des asiles et écoles existant à Copenhague.

Deux nouvelles associations se sont fondées, l'une à Neumark, dans la Prusse occidentale et l'autre dans la Hesse, à Homberg. A la fin de l'exercice, la Société prussienne comptait 12 sociétés provinciales, 2 sociétés de district (Cologne et Dusseldorf) et 453 sections, soit trois de moins que l'année passée. Comme à l'ordinaire, le Comité est venu en aide par des subventions aux institutions qui vouent leurs soins à la formation d'infirmiers, qui pratiquent ainsi l'assistance volontaire et qui en cas de besoin mettraient leurs forces à la disposition de la Croix-Rouge. C'est également à des sociétés de ce genre que le Comité a fourni des baraques et des objets d'aménagement intérieur. La somme des dépenses ainsi occasionnées s'élève à Mk 58, 171 50. La société a reçu, en revanche, du Comité central allemand, une subvention de Mk 17,000.

Le rapport annuel sur l'activité de la Société hongroise a été présenté à l'assemblée générale des sociétaires le 27 mai 1895. Depuis seize ans qu'elle existe, la Société a pris une extension considérable, ce dont témoigne actuellement sa fortune, qui dépasse deux millions de florins. Cependant il y a encore des régions où rien n'a été fait, dans le domaine des préparatifs en vue d'une guerre éventuelle. Le nombre des établissements et hôpitaux est resté à peu près le même dans le cours du dernier exercice. La Société est en état de recueillir et de faire soigner, en cas de guerre, 450 officiers et 37,654 soldats, soit en tout 38,101 militaires.

Le 24 avril dernier, M. Furley a donné à Londres une conférence sur la Convention de Genève et les secours aux malades et aux blessés militaires. Il a fait remarquer l'importance progressivement prise par cet acte international: la Convention, signée en 1864 par 8 Etats, l'est maintenant par 36, et 32 Sociétés de la Croix-Rouge fonctionnent actuellement avec un seul et même but: le soulagement des misères de la guerre. L'Angleterre, bien qu'à l'abri des guerres qui se déchaînent sur le continent, n'en reste pas moins solidaire des grands chocs qui peuvent se produire entre nations, et l'humanité comme la civilisation lui interdisent de se désintéresser du sort des blessés. Un jour d'ailleurs peut venir ou l'Angleterre aura à prendre soin de ses propres citoyens blessés. Le peuple anglais ne sait pas envisager la perspective d'une guerre d'une façon aussi compréhensive que les nations du continent; lesautorités militaires, sur lesquelles il se repose avec confiance, sont plus préoccupées d'assurer la victoire que d'aménager des hôpitaux pour les blessés, et c'est ainsi que l'Angleterre reste en arrière des autres Etats quant à l'assistance volontaire. La Convention de Genève est un des faits les plus remarquables des temps modernes, et il serait plus utile, dans les écoles et les collèges, d'apprendre aux jeunes gens à la connaître, que de leur enseigner beaucoup d'autres choses.

On lit dans la livraison de la Revue scientifique publiée à Paris le 4 juillet 1896:

«Un médecin allemand, M. Hœnig, de Berlin, a imaginé une voiture-ambulance d'un genre nouveau. C'est un véhicule à cinq roues, sur les essieux duquel repose un cadre mobile, avec toit léger en toile. Deux selles à l'avant et à l'arrière servent à recevoir deux cyclistes, qui transportent leur voiture et son fardeau, et font office de chevaux et de cochers à la fois. Le tout est très léger, et le transport du malade ou de la victime d'un accident, sur le cadre recouvert de la bâche, se fait très aisément, à condition que les routes soient en bon état. A l'arrivée à l'hôpital, on peut détacher le cadre et monter le malade dans les salles, sans le changer de position.»

Le Comité directeur de la Société saxonne débute, dans son rapport bisannuel, présenté le 7 décembre 1895 à l'assemblée générale, par un mot de regret profond adressé à la mémoire de M. de Criegern-Thumitz, premier président, l'un des fondateurs de la Société. Depuis longtemps atteint d'une maladie incurable, il a été enlevé le 10 avril 1895 à une activité intelligente et dévouée, que ses souffrances avaient été impuissantes à arrêter. Le comte Vitzthum von Eckstädt a été appelé à le remplacer.

Dans le rapport présenté par le ministère des affaires étrangères au parlement italien sur l'administration de l'Erythrée pendant l'année 1894–1895, un paragraphe est consacré à l'intervention de la Croix-Rouge dans cette colonie, et il n'est pas sans intérêt d'y relever les appréciations gouvernementales à son sujet.

Il résulte du compte rendu présenté par le Comité central grec de la Croix-Rouge à l'assemblée générale des fondateurs et des membres de la Société, que son activité, pour l'année 1895, se résume dans les faits suivants.

Le Messager de la Société russe de la Croix-Rouge n'est pas un recueil spécial, consacré exclusivement à représenter l'activité de cette association. Il s'occupe aussi de politique, et publie des faits divers qui n'ont aucun rapport avec la Croix-Rouge. D'un autre còté, les renseignements qu'il donne sur l'activité de cette institution sont loin d'être complets, et l'on peut rencontrer dans les grands journaux quotidiens russes, tels que le Nouveau Temps, le Journal de Saint-Pétersbourg, etc., des faits intéressants qui ne sont pas mentionnés dans l'organe dont nous disposons. Il nous est assez difficile, dans des conditions pareilles, de faire une relation exacte de l'activité de la Croix-Rouge en Russie.

La Croix-Rouge serbe porte en ce moment le deuil de son président, le général Lechïanine, qu'elle a perdu le 27 février dernier, et nous ne voulons pas laisser ignorer ce douloureux événement à nos lecteurs.

Le général Lechïanine avait été mis à la tête de la Croix-Rouge en 1888, en remplacement de M. Simitch. C'était un officier de valeur. Après des études faites à Berlin et à Paris, il avait été directeur de l'Académie militaire de Belgrade, chef d'état-major de l'armée serbe, et deux fois ministre de la guerre, en 1873 et en 1880. Il avait joué un rôle important pendant la guerre contre la Turquie, en 1876. Aussi le roi a-t-il exprimé personnellement ses sentiments de sympathie à la famille du défunt, qui s'est éteint à l'âge de 63 ans.

L'abus incessant qui est fait de l'emblème de la Croix-Rouge, par des sociétés étrangères à cette œuvre, a engagé le Comité central italien à tenter une nouvelle démarche auprès du Ministre de l'intérieur, aux fi is de réprimer cette contravention. Accueillant favorablement sa requête, le Ministre a adressé à tous les préfets du royaume la circulaire suivante:

« Rome, 15 novembre 1895.

« Par circulaire en date du 11 novembre 1890, le Ministre avait déjà attiré l'attention de MM. les préfets sur l'emploi abusif de l'emblème qui caractérise la Société de la Croix-Rouge italienne, de la part de sociétés et de comités d'assistance publique étrangers à la dite Association, de même que de la part des particuliers.

Nous annoncions, dans notre dernier Bulletin, la mort du comte della Somaglia, président de la Croix-Rouge italienne. Son successeur a été nommé, par décret royal du 5 avril, en la personne du comte Rinaldo Taverna, sénateur du royaume. Uń journal de Rome ayant, à cette occasion, publié quelques notes biographiques sur le nouvel élu, nous prenons la liberté de lui emprunter les indications suivantes:

« Le comte Taverna est le chef d'une des plus anciennes et des plus grandes familles milanaises, la famille des Taverna del Canciellere, ainsi nommée parce qu'elle descend du comte François Taverna, grand chancelier de Charles-Quint au XVIme siècle.

Les dons en faveur des blessés et des malades en Erythrée ont continué à parvenir au Comité central italien. Les journaux quotidiens en publient presque chaque jour de nouvelles listes. Il faut signaler entre autres la magnifique somme de fr. 51,386 14 recueillie en Amérique par les soins du Comité de Buenos-Aires, à l'instigation du ministre italien comte Antonelli. Elle sera affectée à l'assistance des familles des soldats tués ou blessés pendant la guerre.

Le Comité central de la Croix-Rouge italienne a porté à la connaissance des sous-comités italiens, par une circulaire datée de Rome le 20 septembre 1895, les nouvelles mesures qu'il vient de prendre en vue de secourir les familles indigentes de ceux qui seront enrôlés, en cas de mobilisation, dans le personnel sanitaire de la Société. Ces mesures ont principalement pour but de faciliter le recrutement, toujours difficile, du personnel nécessaire aux hôpitaux de la Société. En effet, le nombre des surveillants, infirmiers et gardes qui se présentent pour le service des hôpitaux est toujours insuffisant, d'autant plus qu'il faudrait être prêt à combler les vides qui pourraient se produire peu après la mobilisation. En outre, disposant d'un plus grand choix, le Comité pourrait ne s'adresser qu'à la meilleure partie de son personnel.

Le 26 janvier (7 février) 1896, le Comité central de la Société serbe de la Croix-Rouge a célébré, dans une séance solennelle, le 20me anniversaire de sa fondation. Les hauts protecteurs de la Société, S. M. le roi Alexandre et S. M. la reine Nathalie étaient présents, ainsi que l'ancien président du Comité, S. Em. l'archevêque Mgr Michel, le ministre de la guerre M. Franassovitch, le président de la Chambre, beaucoup de députés, de dignitaires civils et mililaires, de membres de la Croix-Rouge et de la Société des Dames. La réunion était présidée par le général Léchïanine, aujourd'hui décédé.

Article premier. — Le but de la Société est le suivant:

a) En temps de guerre exécuter les prescriptions de la Convention de Genève, et établir des hôpitaux et ambulances, d'accord avec les chefs du gouvernement.

b) En temps de paix, se préparer aux exigences de la guerre, secourir les victimes de malheurs publics, tels que tremblements de terre, inondations, etc., et établir des ambulances pour le transport des blessés en cas d'accidents, dans les rues, chemins de fer, ports, etc.