Qu'est-ce que la « police » dans le socialisme d'État ? Elle n'est pas réductible à l'activité de la police secrète, quoique les dimensions et compétences énormes de cette dernière aient été une caractéristique structurante des dictatures de type soviétique. Quant à sa consoeur, la police publique, elle ne peut pourtant pas être tout bonnement rapprochée des appareils d'État chargés de maintenir la sécurité et l'ordre dans les démocraties occidentales classiques. Sans doute partage-t-elle avec ceux-ci des domaines de compétence qui sont typiques des États industrialisés modernes : police routière, police municipale, police judiciaire. Cependant la police normale de la RDA était en outre directement impliquée dans des processus de bouleversement social, imposés par la dictature du Parti Socialiste Unifié d'Allemagne (Sozialistische Einheitspartei Deutschlands, désormais SED), ce qui n'a jamais été le cas des appareils policiers dans les sociétés démocratiques de type occidental. Dans quelle proportion l'était-elle comparativement à d'autres appareils (comme le Parti lui-même, le ministère de la Sûreté intérieure de l'État, les différents ministères spécialisés, les organes administratifs locaux et les organisations de masse), la question doit pour l'instant rester ouverte — à moins qu'on n'assimile a priorila revendication de domination sociale exprimée par le SED avec la réalité historique, ce qui rendrait superflue la question de l'importance relative des diverses instances qui lui étaient subordonnées. Pour dresser un bilan de la coopération des différents éléments du système de domination socialiste dans le processus historique, en revanche, l'état actuel de la recherche est encore loin d'être suffisamment avancé, car les sources internes nécessaires à une analyse qui dépasserait la programmatique officielle du Parti ne sont accessibles que depuis très peu de temps.